III. LES DÉPENSES D'INVESTISSEMENT SACRIFIÉES

A. LES MOUVEMENTS DE CRÉDITS INTERVENUS AU COURS DE L'ANNÉE 2001

Dans le courant de l'année 2001, deux décrets d'avance ont été publiés, celui du 21 mai et celui du 8 octobre 2001, auxquels un arrêté d'annulation était associé.

1. Le décret d'avance du 21 mai 2001 : financer la lutte contre l'ESB

Le décret d'avance n° 2001-433 du 21 mai 2001 a procédé à l'ouverture de crédits d'un montant de 3,12 milliards de francs , répartis en :

- 3,055 milliards de francs au titre des dépenses ordinaires ;

- 65 millions de francs en crédits de paiement.

Par ailleurs, il ouvrait également 320 millions de francs en autorisations de programme.

Dans l'exposé des motifs du présent projet de loi de finances rectificative, le gouvernement indique que ce décret d'avance « avait pour principal objet de couvrir les besoins liés au développement de la crise de l'encéphalopathie spongiforme bovine » (ESB), dite « maladie de la vache folle ».

Trois budgets étaient concernés par les ouvertures de crédits en dépenses ordinaires :

- l'agriculture et la pêche : logiquement, compte tenu de l'objet du décret d'avance du 21 mai, ce ministère connaît l'ouverture de crédits la plus importante, portant sur un montant de 2,205 milliards de francs ;

Les ouvertures de crédits intervenues sur le budget de l'agriculture et de la pêche

Le décret d'avance porte ouverture d'un total de 2,205 milliards de francs de crédits supplémentaires.

Les chapitres concernés sont les suivants :

- le chapitre 31-96 « Autres rémunérations principales et vacations » : une ouverture de 65 millions de francs de crédits concernant principalement les rémunérations des personnels des services déconcentrés ;

- le chapitre 44-53 « Interventions en faveur de l'orientation et de la valorisation de la production agricole » : l'ouverture de 2,04 milliards de francs est destinée à l'Office national interprofessionnel des viandes, de l'élevage et de l'aviculture (OFIVAL) dans l'objectif de financer des mesures à caractère économique, à savoir notamment la mise en oeuvre du programme de retrait/destruction ainsi que les tests de dépistage systématiques et obligatoires des animaux avant l'abattage, dans le cadre des mesures décidées par le ministère de l'agriculture pour faire face à l'ESB.

La loi de finances pour 2001 prévoyait une dotation de 3,64 milliards de francs pour le chapitre 44-53. Cette ouverture de crédits de plus de 2 milliards de francs représente donc une augmentation de plus de 56 % par rapport à la dotation initiale en loi de finances ;

- le chapitre 44-55 « Primes au maintien du troupeau de vaches allaitantes » : une ouverture de 100 millions de francs de crédits. Dans le cadre du deuxième train de mesures décidées par le ministère de l'agriculture en faveur des éleveurs, il s'agit d'une disposition à caractère économique qui constitue une aide directe aux éleveurs.

La loi de finances pour 2001 prévoyait une dotation de 903 millions de francs à ce titre. Cette ouverture de crédits de 100 millions de francs, qui correspond au montant des mesures nouvelles pour 2001 (+ 113 millions de francs) pour ce même chapitre, représente une hausse de 11 % par rapport à la dotation initiale en loi de finances.

- les charges communes : 600 millions de francs ont été ouverts sur ce budget, dont 450 millions de francs au titre des dépenses accidentelles, et 150 millions de francs pour indemniser les préjudices subis dans le secteur du tourisme suite au naufrage de l'Erika ;

- la santé et la solidarité : l' ouverture de 250 millions de francs vise à faire face aux besoins urgents et croissants en matière d'accueil des réfugiés et des personnes sinistrées.

Les dépenses en capital ouvertes concernent essentiellement le budget de l'enseignement supérieur, soit 240 millions de francs en autorisations de programme et 60 millions de francs en crédits de paiement. Il s'agit en fait de transferts résultant du fait que l'Etat a assuré plus souvent que prévu la maîtrise d'ouvrage d'investissements réalisés dans le cadre des contrats de plan Etat-régions.

Les ouvertures de crédits opérées par le décret d'avance du 21 mai 2001 ont été totalement gagées par l'arrêté d'annulation qui a annulé des crédits d'un même montant , sauf en ce qui concerne les autorisations de programme, les annulations sur ces dernières portant sur 1,35 milliard de francs, alors que 320 millions de francs avaient été ouverts.

De très nombreux chapitres sont concernés par ces annulations de crédits, généralement d'un faible montant.

Nombre de ces annulations de crédits sont présentées comme étant le résultat de la mise en oeuvre des contrats de gestion , nouvelle dénomination « politiquement correcte » que le gouvernement a donnée au traditionnel gel des crédits.

Or, il apparaît que ces contrats n'ont précisément de contractuel que le nom, sans compter que leur fondement légal est pour le moins « limite », comme le note la Cour des comptes.

Le jugement critique porté par la Cour des comptes sur les contrats de gestion

Dans son rapport relatif à l'exécution des lois de finances pour 2000, la Cour des comptes présente son analyse des contrats de gestion.

Elle rappelle d'abord qu'il s'agit, selon le gouvernement, d'une « nouvelle forme de régulation budgétaire inaugurée en 1999 », poursuivant « l'objectif annoncé de s'assurer d'une stricte maîtrise des dépenses publiques ».

Elle précise ensuite les « trois volets distincts complémentaires » de ce dispositif :

- les dépenses nouvelles apparues en cours d'année devront être compensées par une moindre exécution au sein de la même section ;

- la stabilisation des reports, section budgétaire par section budgétaire, au niveau des crédits reportables en début d'exercice ;

- la mise en réserve de crédits, au-delà du montant des reports convenus, en vue de doter la section budgétaire concernée d'une « marge de sécurité », les crédits mis en réserve pouvant être, soit débloqués en cours d'année, en fonction de l'évolution de l'exécution budgétaire ou en fin d'exercice, soit annulés, en totalité ou en partie.

Or, la Cour des comptes se montre relativement critique sur le procédé que constituent les contrats de gestion : « le recours systématique à la mise en réserve de crédits, suivie d'annulations et, plus encore, la stabilisation des reports à l'exercice suivant au niveau des reports de l'exercice précédent faussent singulièrement la portée de l'autorisation parlementaire budgétaire délivrée dans le cadre de la loi de finances initiale ».

Les principales annulations portent :

- pour 490 millions de francs , sur les crédits inscrits au budget de l'emploi , et alloués aux emplois-jeunes, ce qui confirme l'analyse de votre commission, selon laquelle ce chapitre fait l'objet d'une surdotation délibérée en loi de finances initiale afin de pouvoir plus facilement afficher la réalisation d' « économies » ultérieures ;

- pour 450 millions de francs , sur le budget de l'agriculture et de la pêche ;

- pour 305 millions de francs , sur les crédits du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie ;

- pour 300 millions de francs , sur les dotations de la défense .

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