TITRE IV
DE LA PARTICIPATION DU PUBLIC
A L'ÉLABORATION DES GRANDS
PROJETS
CHAPITRE PREMIER
CONCERTATION AVEC LE PUBLIC
Article 48
(art. L. 110-1 du code de l'environnement)
Elargissement de
la définition du principe de
participation
Cet
article modifie l'alinéa 4° du paragraphe II de l'article L. 110-1
du code de l'environnement, qui définit un certain nombre de principes
généraux en exergue du code, tels que le principe de
précaution et le principe du pollueur-payeur.
Actuellement, le principe de participation est compris comme un simple
accès aux informations
relatives à l'environnement, y compris
celles relatives aux substances et activités dangereuses.
Le texte proposé
pour l'article L. 110-1 du code de
l'environnement enrichit considérablement ce principe, en
prévoyant, d'une part, que chacun a accès (et non plus
« doit avoir accès » à ces
informations), et d'autre part, que
le public doit être associé
à l'élaboration des décisions
.
Néanmoins, le champ d'application de cette disposition reste circonscrit
aux décisions ayant une incidence importante sur l'environnement ou
l'aménagement du territoire.
Il s'agit de
mettre en conformité avec les dispositions
internationales et communautaires le droit français
.
En effet, la
Déclaration de Rio
sur l'environnement et le
développement, adoptée le 13 juin 1992, définissait
déjà le principe de participation dans son article 10 comme le
fait d'avoir «
accès aux informations relatives aux
substances dangereuses dans leurs collectivités, et avoir la
possibilité de participer aux processus de prise de
décision
».
Quoique dépourvue de valeur contraignante, la déclaration a connu
une première prise en compte par l'article 42 de la loi n° 96-1236
du 3 décembre 1996 sur l'air et l'utilisation rationnelle de
l'énergie, qui définit le principe de participation comme celui
«
selon lequel chacun doit avoir accès aux informations
relatives à l'environnement, y compris celles relatives aux substances
et activités dangereuses
». Cette définition
était cependant très en retrait par rapport à la
Déclaration de Rio, puisque seul l'aspect droit d'accès aux
informations relatives à l'environnement était retenu. Or il peut
s'avérer difficile de contrôler cette
« transparence ».
Par ailleurs, lors de la quatrième Conférence
ministérielle « un environnement pour l'Europe »,
tenue au Danemark en juin 1998, a été signée par 39 Etats
et la Communauté européenne la
Convention d'Aarhus sur
l'accès à l'information, la participation du public au processus
décisionnel et l'accès à la justice du 25 juin 1998
.
Son article premier prévoit que «
chaque Partie garantit
les droits d'accès à l'information sur l'environnement, de
participation du public au processus décisionnel
(...) ».
L'article 6 alinéa 4 prévoit en particulier que
«
chaque Partie prend des dispositions pour
que la
participation du public commence au début de la procédure, c'est
à dire lorsque toutes les options et solutions sont encore possibles
et que le public peut exercer une réelle influence
».
Pour la première fois, un instrument de droit international ayant valeur
normative définit donc le principe de participation.
Cependant, il faut noter que cette convention n'a pas encore ratifiée
par la France. Un projet de loi de ratification a cependant été
déposé le 23 août 2001 au Bureau de l'Assemblée
nationale.
Seuls l'Italie et le Danemark ont déjà ratifié la
convention dans l'Union européenne. La
convention est entrée
en vigueur le 30 octobre 2001
avec le dépôt du seizième
instrument de ratification.
Le présent article en tire cependant déjà les
conséquences, en élargissant la définition actuelle du
principe de participation
.
Cette nouvelle rédaction doit permettre de satisfaire les attentes
exprimées par le public.
Le terme de « public » peut susciter des
interrogations. En effet, il est difficile de définir les
populations
concernées
. Dans le cadre de l'enquête publique, il s'agit des
habitants des communes dans lesquelles la publicité des documents est
organisée. En outre, l'usager est celui pour lequel le projet est
potentiellement utile, tandis que le riverain se définit par rapport
à sa proximité de la zone d'emprise de tel projet. En pratique,
le projet lui-même joue un rôle structurant pour définir la
population susceptible de manifester un intérêt. L'intention de
circonscrire débat ou enquête à une certaine
catégorie est constamment mise en échec.
Le point 4 de l'article 2 de la convention d'Aarhus prévoit que
«
le terme « public » désigne une ou
plusieurs personnes physiques ou morales et, conformément à la
législation ou à la coutume du pays, les associations,
organisations ou groupes constitués par ces personnes
»,
ce qui constitue une définition extrêmement étendue.
Existe alors le risque, en entretenant le flou sur cette notion, de vider en
pratique le dispositif de sa substance, en raison des difficultés
à l'appliquer, ou à l'inverse de multiplier de manière
excessive les recours contentieux.
Par ailleurs, s'agissant du champ de la participation, l'article 48 du projet
de loi prévoit qu'elle concerne «
l'élaboration de
décisions ayant une incidence importante sur l'environnement ou
l'aménagement du territoire
». Se pose donc la question de
savoir si le terme « décisions » vise les
seules décisions administratives ou si, au contraire, il inclut
également les décisions prises par des personnes privées.
En outre, le critère d'une incidence « importante »
est particulièrement vague, et peut en conséquence donner lieu
à des appréciations très divergentes, d'où un
risque de contentieux accru. Ainsi, lors de la discussion du projet de loi en
première lecture à l'Assemblée nationale, ont
été systématiquement présentés (et
rejetés) des amendements présentés par M. Philippe
Marchand, du groupe radical, citoyen et vert , tendant à supprimer le
terme « importante ». Le rapporteur pour avis de la
commission de la Production et des échanges, M. Pierre Cohen, a
cependant indiqué que la convention d'Aarhus faisait
référence à la notion d' «
effet
important sur l'environnement
».
En définitive, ces multiples interrogations devraient pouvoir être
recadrées, l'article L. 110-1 du code de l'environnement
prévoyant
in fine
que l'inspiration de principes tels que celui
de participation se fait «
dans le cadre des lois qui en
définissent la portée
».
L'application du principe de participation est donc restreinte aux cas
prévus par la loi, c'est à dire pour l'essentiel :
- aux procédures prévues par le titre II du livre Ier du
code de l'environnement (concernant le débat public, les enquêtes
publiques dans le cadre de projets ayant un impact sur l'environnement et le
suivi des travaux prévus par le présent projet de loi) ;
- aux procédures prévues par le code de l'expropriation pour
cause d'utilité publique (enquête préalable à une
déclaration d'utilité publique) ;
- aux procédures prévues par l'article L. 300-2 du code de
l'urbanisme (concertation en cas de modification ou révision d'un plan
local d'urbanisme, en cas de création d'une zone d'aménagement
concerté ou d'une opération d'aménagement
réalisée par la commune).
Votre commission vous propose d'
adopter un amendement précisant que
le public est associé au processus d'élaboration des projets, et
non à l'élaboration des décisions, afin de bien marquer la
différence entre le temps de la concertation et le temps de la
décision
.
Votre commission des Lois vous propose d'
adopter l'article 48 ainsi
modifié.
Article 49
(art. L. 121-1 à L. 121-14 du code de
l'environnement)
Débat
public
Cet
article réécrit entièrement le chapitre Ier du titre II du
livre Ier du code de l'environnement concernant le « débat
public relatif aux opérations d'aménagement », qui
comprend les articles L.121-1 à L. 121-5. Lui est donc substitué
un chapitre intitulé « Participation du public à
l'élaboration des projets d'aménagement ou d'équipement
ayant une incidence importante sur l'environnement ou l'aménagement du
territoire », composé de trois sections, et comprenant les
articles L. 121-1 à L. 121-14.
Le rapport du Conseil d' Etat
soulignait que l'intervention de
l'Etat à plusieurs étapes de la procédure, en tant que
maître d'ouvrage, mais aussi en tant que personne habilitée
à décider de l'utilité publique d'un projet, par le biais
de son représentant dans le département, apparaissait
désormais choquante, en raison de l'évolution des attitudes des
citoyens.
Il avait ainsi préconisé de
mettre fin
à ce qui
était considéré, à tort ou à raison, comme
un
mélange des genres préjudiciable à la
crédibilité de l'Etat et de ses projets
, et de
remédier à la suspicion en faisant en sorte que les
procédures des débats, consultation et enquêtes, se
déroulent sous l'égide d'une instance consultative impartiale que
nul ne pourrait regarder comme ayant intérêt à la
réalisation du projet comme à son abandon. Le groupe
d'étude soulignait que ceci permettrait aux autorités de l'Etat
de mieux exercer leurs compétences en acquérant un surcroît
d'autorité et de crédibilité.
Le groupe d'étude, jugeant très prometteuses les premières
expériences de la Commission nationale du débat public,
préconisait qu'elle se voie doter de compétences étendues.
Elle veillerait à l'organisation des consultations, au moins pour les
projets les plus importants. Elle disposerait d'un pouvoir d'avis ou de
recommandation à l'usage des diverses parties prenantes à
l'élaboration des projets. Elle pourrait en outre être
associée à l'activité normative s'exerçant dans sa
sphère de compétence, et prendrait une part active au
développement d'une véritable culture du débat public.
Actuellement, les dispositions du code de l'environnement relatives au
débat public résultent de la loi n° 95-101 du 2
février 1995 relative au renforcement de la protection de
l'environnement, dite « loi Barnier »
.
Elles prévoient la possibilité (article L. 121-1) d'organiser un
débat public « pour les grandes opérations publiques
d'aménagement d'intérêt national (...) présentant un
fort enjeu socio-économique ou ayant un impact significatif sur
l'environnement », et précisent les modalités de
saisine, de composition, ainsi que la mission de la Commission nationale du
débat public (articles L. 121-1 à L. 121-5).
La Commission nationale du débat public a été
instituée par l'article 2 de la loi « dite
Barnier », afin de répondre à la forte demande sociale
d'information et de participation en amont de la réalisation des grands
projets d'aménagement et d'équipement. Elle n'est cependant
installée que depuis le 4 septembre 1997.
Elle a connu un
bilan
modeste, puisque sur la vingtaine de saisines dont
elle a fait l'objet, seules
quatre ont donné lieu à
l'organisation d'un débat public
. Il s'agit du projet
« Port 2000 » (visant à réaliser un port en
eau profonde au Havre), de celui d'une ligne à très haute tension
entre Boutre et Carros, de celui de l'autoroute A32 devant relier Metz et
Nancy, et enfin du projet de branche sud du TGV Rhin-Rhône.
Par ailleurs, le Premier ministre a demandé au président de la
Commission nationale du débat public d'éclairer le choix du
Gouvernement sur la nature de la nouvelle plate-forme aéroportuaire
susceptible de répondre aux besoins de déplacements
générés dans la région Ile de France et dans les
régions voisines, pour en retenir la localisation dans une gamme de
sites présentés au cours du débat public.
Cette
démarche d'utilité concertée pour un site
aéroportuaire international
(DUCSAI) s'est déroulée de
la mi-avril à la mi-octobre 2001. Une commission DUCSAI chargée
de veiller à la qualité du débat, présidée
par M. Bernard Poignant, député européen, a
été installée le 19 avril, tandis que le débat
était mené par le président de la Commission nationale du
débat public, M. Pierre Zémor.
Actuellement sont en cours des débats publics concernant :
l'extension du port de Nice (ouverture le 15 octobre 2001, fin prévue
à la mi-janvier 2002) et les contournements autoroutier et ferroviaire
de l'agglomération lyonnaise (ouverture également le
15 octobre, fin prévue fin janvier 2002).
Par ailleurs, la Commission nationale du débat public a poursuivi
l'instruction de trois débats publics dont le principe a
été retenu, et qui vont faire l'objet de mise en place de
commissions particulières : le barrage de Charlas en Haute-Garonne,
l'aéroport de Nantes - Notre-Dame-des-Landes en Loire-Atlantique et la
ligne électrique à très haute tension Lyon-Chambéry.
De plus, la Commission nationale du débat public a recommandé par
anticipation du présent projet de loi l'organisation de débats
locaux sous la responsabilité du maître d'ouvrage
concernant : le conditionnement, l'entreposage de déchets
radioactifs au centre de Cadarache (Bouches-du-Rhône) du Commissariat
à l'Energie atomique et la ligne à Très haute tension
Quercy blanc (Lot et Lot-et-Garonne).
Parallèlement, la Commission nationale du débat public instruit
plusieurs nouvelles saisines : la modernisation de l'aéroport
d'Orly, le « CDG Express », un projet de liaison
ferroviaire rapide « dédiée » entre la gare
de l'Est et l'aéroport Charles de Gaulle et la problématique des
traversées routières et ferroviaires des Alpes en y incluant la
réouverture du tunnel du mont-Blanc et la ligne à grande vitesse
Lyon-Turin (l'auteur de la saisine étant France Nature Environnement,
les avis du ministre de l'Equipement, du Transport et du Logement et du
ministre de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement ont
été demandés).
Le nombre de saisines n'ayant donné lieu à aucun débat
public a été critiqué, même si la Commission
nationale du débat public assure que le classement des dossiers a
été motivé par la tardiveté des saisines.
Après des débuts hésitants (quatre débats publics
en quatre ans), la Commission nationale du débat public semble enfin
entamer une montée en puissance. Le Gouvernement souhaite permettre un
recours plus fréquent à la procédure de débat
public, afin de discuter de l'opportunité de projets très en
amont de leur réalisation. L'objectif est de passer d'une moyenne d'un
débat public par an à une vingtaine de débats publics sur
la même période, ce qui suppose une réforme du dispositif
actuel.
Le présent article tend donc à élargir le champ du
débat public, à assouplir les modalités de saisine de la
Commission nationale du débat public et à renforcer ses
moyens
.
CHAPITRE PREMIER
Participation du public
à
l'élaboration des projets d'aménagement
ou
d'équipement ayant une incidence importante
sur l'environnement ou
l'aménagement du territoire
Section I
Missions de la Commission nationale du débat
public
Champ d'application et objet du débat public
L'intitulé de cette section a été complété en première lecture à l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur pour avis de la Commission de la Production de l'Assemblée nationale, M. Pierre Cohen, afin de préciser que cette section traite également des missions de la Commission nationale du débat public.
Article L. 121-1 du code de l'environnement
Nature et missions de la
Commission nationale du débat
public
L'actuel article L. 121-1
du code de l'environnement
prévoit qu'un débat public
peut
être organisé
pour les grandes opérations publiques d'aménagement
d'intérêt national
de l'Etat, des collectivités
territoriales, des établissements publics et des sociétés
d'économie mixte présentant un fort enjeu socio-économique
ou ayant un impact significatif sur l'environnement. Un débat public
peut alors être organisé sur les objectifs et les
caractéristiques principales des projets, pendant la phase de leur
élaboration.
L'article 49 du projet de loi réécrit totalement cet
article
.
1. Un champ d'application du débat public élargi
Le
premier alinéa du texte prévu pour l'article L. 121-1 du
code de l'environnement prévoit que la Commission nationale du
débat public est une autorité administrative
indépendante
.
Est donc suivie la recommandation du rapport du Conseil d'Etat de 1999. Il
s'agit donc de lui donner une autorité morale qui la rende
crédible et fasse taire les soupçons entachant les débats
publics.
Cet alinéa précise également la
mission de la
Commission nationale du débat public, qui est de veiller au respect de
la participation du public au processus d'élaboration de certains
projets
, qu'il définit.
Il définit ensuite le
champ des projets pour lesquels la Commission
nationale du débat public doit veiller au respect de la participation du
public.
Actuellement
,
le champ du débat public
(qui constitue la
seule modalité prévue) est délimité en fonction de
deux critères :
- la nature du projet en cause :
. « une
grande opération d'intérêt
national
», ce qui constitue une terminologie assez vague, en
l'absence de mention de seuils, mais permet d'exclure les projets des
collectivités locales n'ayant qu'un impact purement local ;
.
d'aménagement (ce qui exclut les installations liées
à la défense nationale) ;
. une opération publique
, puisque sont exclues du champ du
débat public les installations classées au titre de la protection
de l'environnement dont le maître d'ouvrage serait une personne
privée.
- les conséquences du projet :
. un « fort enjeu socio-économique » ;
. ou « un impact significatif sur l'environnement ».
C'est à la Commission nationale du débat public qu'il revient
d'apprécier si ces critères sont satisfaits.
Le projet de loi procède à une extension
, à
plusieurs titres.
Tout d'abord, il est question de participation du public et non plus seulement
d'organisation du débat public, qui n'est plus qu'une modalité de
la participation.
Par ailleurs, le champ des projets visés est étendu aux projets
remplissant de manière cumulative les conditions suivantes :
- avoir le caractère de projets d'aménagement ou
d'équipement (à la suite d'un amendement rédactionnel du
rapporteur pour avis M. Pierre Cohen adopté par l'Assemblée
nationale, avec avis favorable du Gouvernement substituant
« ou » à « et ») ;
- la nécessité de l'intérêt national du projet
est supprimée. Cette suppression emporte des conséquences
très importantes.
- les projets dont le maître d'ouvrage est une personne
privée sont également concernés, ce qui représente
une extension considérable du champ du débat public. S'agissant
des usines privées, il s'agit d'une extension délicate. Il
apparaît plus pertinent qu'une telle concertation intervienne au moment
de la fixation des plans locaux d'urbanisme et des schémas de
cohérence territoriale.
- de plus, sont concernés également les projets, qui, outre
présenter de forts enjeux socio-économiques ou avoir des impacts
significatifs sur l'environnement, ont des impacts significatifs sur
l'aménagement du territoire.
En effet, ce n'est pas l'ensemble du système actuel d'information et de
consultation du public qui est défaillant. Plusieurs milliers
d'enquêtes sont réalisées en France chaque année.
L'insatisfaction, voire
la frustration du public se focalisent sur les
projets de grande ampleur
(pas plus d'une dizaine par an), pour lesquels
les modes d'information et de consultation du public paraissent archaïques.
Néanmoins, une
précision importante
est introduite,
puisque ces projets doivent
désormais relever de catégories
d'opérations dont la liste est fixée par décret en Conseil
d'Etat
. Selon les informations fournies à votre rapporteur, le
décret en Conseil d'Etat devrait reprendre la liste des
opérations pouvant être soumises à débat public, qui
figure actuellement en annexe du décret n° 96-388 du 10 mai 1996
relatif à la consultation du public et des associations en amont des
décisions d'aménagement pris en application de la loi dite
Barnier.
Les seuils financiers ou techniques déclenchant une saisine de la
Commission seraient cependant revus à la baisse.
Si les grands projets de l'Etat seraient ainsi principalement visés,
certains grands projets des collectivités locales
pourraient
être également concernés, comme par exemple la
réalisation d'un tramway en site propre. Or, il n'apparaît pas
souhaitable qu'un débat purement local relève d'une instance
nationale.
Il convient donc de
revoir la définition de cet article et son champ
d'application
. La difficulté réside cependant par exemple
dans le fait que certains projets des collectivités locales ne sont pas
fondamentalement différents de ceux de l'Etat (comme des contournements
de grandes villes).
Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter un
amendement
rétablissant la condition d'intérêt national du projet
.
2. La définition du débat public
Le
deuxième alinéa
du texte prévu pour l'article L.
121-1 du code de l'environnement prévoit que
la participation du
public peut prendre la forme d'un débat public
. Il précise
également son objet.
L'actuel article L. 121-1 du code de l'environnement prévoit que le
débat porte alors sur les objectifs et les caractéristiques
principales des projets, pendant la phase de leur élaboration
.
Le projet de loi ne comprenait quant à lui aucune disposition
précisant l'objet du débat public.
Cette lacune a été réparée par un amendement
présenté par M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis, et
adopté par l'Assemblée nationale avec l'avis favorable du
gouvernement, tendant à préciser que le débat porte sur
l'
opportunité
, les objectifs et les caractéristiques
principales du projet.
La mention de l'opportunité est nouvelle et tout à fait
intéressante, car en pratique, la discussion se focalise souvent sur cet
aspect, comme l'a montré la démarche d'utilité
concertée pour un site aéroportuaire international (DUCSAI)
relative au troisième aéroport, qui devait préfigurer les
nouvelles attributions de la Commission nationale du débat public.
En effet, il y a actuellement un malentendu sur l'objet de la consultation. La
population consultée sur le projet d'une grande ville ne
s'intéresse que de façon annexe aux expropriations qu'il
engendre, d'autant qu'en général la collectivité publique
utilise des terrains expropriés depuis longtemps. Au contraire, les
populations demandent à être consultées sur l'ensemble des
intérêts, souvent conflictuels.
3. Les modalités de la participation du public aux différentes
étapes du projet
Le
troisième alinéa
du texte prévu pour l'article
L. 121-1 du code de l'environnement précise
à quel moment la
participation du public a lieu
.
La participation à l
'élaboration
de projets répond
à une revendication récurrente du public.
L'enquête publique, de l'avis de tous, intervient trop tardivement. Le
public concerné a trop souvent l'impression que les principales options
du projet ont déjà été arrêtées et que
l'opportunité de l'infrastructure en cause ne peut plus être
remise en cause.
La convention d'Aarhus précise pourtant dans son article 6 que cette
participation doit intervenir très en amont, alors même que toutes
les possibilités sont encore ouvertes.
De plus, le dépistage aussi précoce que possible de projets
techniquement ou socialement irréalisables préviendrait
l'engagement de dépenses d'études qui pèsent parfois
lourdement sur les budgets de certaines administrations ou
collectivités, notamment des collectivités locales.
Or, le droit actuel ne semble connaître véritablement qu'une
étape de la décision et lui attribuer une importance
disproportionnée par rapport à la réalité.
L'intervention d'une seule décision reconnaissant l'utilité
publique d'un projet méconnaît la réalité de sa
maturation progressive (qui continue également après la
déclaration d'utilité publique, comme lors de la conclusion des
contrats avec les constructeurs).
L'actuel article L. 121-1 du code de l'environnement circonscrit la
participation du public à la phase d'élaboration du projet
.
Le projet de loi explicite en le complétant ce principe
.
En premier lieu, il précise ainsi que
la phase d'élaboration
du projet va de « l'engagement des études préliminaires
jusqu'à la clôture de l'enquête publique »
,
qu'il s'agisse d'une enquête préalable à la
réalisation d'aménagements, d'ouvrages ou de travaux susceptibles
d'affecter l'environnement (prévue au chapitre III du Titre II du livre
I du code de l'environnement : enquête dite
« Bouchardeau »), ou d'une enquête préalable
à une déclaration d'utilité publique (prévue par le
code de l'expropriation pour cause d'utilité publique).
Actuellement, le stade à partir duquel le débat public ne peut
plus être organisé est défini par l'annexe du décret
n° 96-388 du 10 mai 1996
(reproduit en annexe du présent
rapport)
. Il dépend à la fois de la nature du projet, de son
coût ou de son ampleur.
Par ailleurs, le projet de loi introduit une nouveauté puisqu'il
précise que
« le cas échéant »,
la Commission veille au respect de bonnes conditions d'information du public du
public
durant la phase de réalisation du projet jusqu'à la
réception des équipements et des travaux
.
Dans ce dernier cas, il ne s'agit plus de participation à proprement
parler, mais d'information. En effet, de nouveaux problèmes,
indécelables lors de la phase d'élaboration proprement dite,
peuvent surgir à l'occasion de la réalisation des travaux.
Par cette disposition,
le principe de participation semble connaître
une nouvelle extension
. Un embryon de
suivi
apparaît
donc, même s'il ne s'agit que d'un droit à l'information.
Cette extension s'inspire de la circulaire n° 92-71 du 15 décembre
1992 relative à la conduite des grands projets nationaux
d'infrastructure, dite «
circulaire Bianco
», qui
prévoit déjà que les préfets constituent
« avec les responsables locaux concernés (élus,
forces sociales, économiques, associations locales), un comité de
suivi des engagements de l'Etat », devant lequel le maître
d'ouvrage doit rapporter régulièrement.
Cependant, ces dispositions ne concernent pour l'instant que les grands projets
nationaux d'infrastructure de l'Etat, et en pratique uniquement les lignes
ferroviaires à grande vitesse et les autoroutes.
Cet article donne donc, d'une part, une base législative à ces
comités de suivi et, d'autre part, en encourage la création, y
compris pour les projets locaux.
Cette disposition pose toutefois problème. En effet, elle paraît
augmenter les risques contentieux, le terme « le cas
échéant » pouvant être utilisé par une
association afin de demander l'annulation d'une procédure. Il
paraît également
opportun de distinguer clairement les deux
phases : l'une préalable à la clôture de
l'enquête publique, pendant laquelle le public peut participer à
l'élaboration, et l'autre, après la clôture de
l'enquête publique, pendant laquelle sa participation doit être
circonscrite à une bonne information.
Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter un
amendement
en
ce sens, qui circonscrit cette information aux projets dont la Commission
nationale du débat public a été saisie.
4. Une mission de diffusion de la culture de la concertation
Par ailleurs, le
quatrième alinéa
du texte prévu
pour l'article L. 121-1 du code de l'environnement prévoit que
la Commission nationale du débat public, outre veiller au respect de la
participation du public, peut exercer
une fonction de conseil sur toute
question relative à la concertation avec le public, et ce tout au long
de l'élaboration d'un projet
.
Il s'agit d'une disposition nouvelle. L'Assemblée nationale a cependant
adopté en première lecture deux amendements
présentés par M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis, avec l'avis
favorable du gouvernement, afin de préciser, d'une part, que la
Commission nationale du débat public peut, outre les autorités
compétentes, conseiller tout maître d'ouvrage (ce qui vise les
personnes privées) et, d'autre part, que cette fonction de conseil
s'exerce à leur demande, afin de ne pas constituer une tutelle rampante.
Cette mission de conseil
pourra donc porter sur tout projet
, qu'il
remplisse ou non les conditions fixées par décret en Conseil
d'Etat pour pouvoir faire l'objet d'un débat public.
En pratique
,
il s'agit donc de conseiller les maîtres d'ouvrage désireux
d'organiser une concertation avec le public dans le cadre de
petits projets
locaux
.
Cette disposition est tout à fait conforme à l'esprit du texte
qui est que la Commission nationale du débat public contribue
essentiellement à développer une culture de la concertation, par
la voie de recommandations méthodologiques.
Enfin, le
cinquième alinéa
du texte prévu pour
l'article L. 121-1 du code de l'environnement est en outre prévu que la
Commission a également pour mission
d'émettre tous avis et
recommandations à caractère général ou
méthodologiqu
e de nature à favoriser et développer la
concertation avec le public.
Le rapport du Conseil d'Etat de 1999 « L'utilité publique
aujourd'hui » préconisait déjà que la Commission
nationale du débat public endosse ce genre de responsabilités et
soit chargée d'élaborer des « guides de bonne
pratique » en matière de concertation, ce qui justifie qu'elle
soit érigée en autorité administrative
indépendante. Ces guides,
dépourvus de caractère
réglementaire
, devraient, si la Commission nationale du débat
public parvient à asseoir sa crédibilité, s'imposer
naturellement aux maîtres d'ouvrages, soucieux de prévenir les
risques de contentieux et d'assurer la sécurité juridique de
leurs opérations.
La Commission nationale du débat public a donc vocation à devenir
une instance permanente de réflexion et de proposition.
Le groupe d'étude du Conseil d'Etat envisageait également que la
Commission nationale du débat public puisse être
associée à l'activité normative
s'exerçant
en matière d'information et de consultation. Ceci paraît cependant
prématuré.
5. Une magistrature d'influence
D'une manière plus générale, on peut s'interroger sur la
crédibilité de la Commission nationale du débat public,
qui quoiqu'érigée en autorité administrative
indépendante, ne dispose d'
aucun pouvoir d'injonction ni de
sanction
.
Le rapport public du Conseil d'Etat 2001 relatif aux autorités
administratives indépendantes
soulignait l'extrême
hétérogénéité des pouvoirs des
autorités administratives indépendantes
:
«
Elles disposent de pouvoirs plus ou moins étendus qui,
dans certains cas, combinent à la fois un pouvoir de
réglementation, d'autorisation individuelle, de contrôle,
d'injonction, de sanction, voire même de nomination et se limitent, dans
d'autres cas, à un simple pouvoir d'influence
(...) ».
S'agissant de la Commission nationale du débat public, elle exercera
principalement une magistrature d'influence puisqu'elle
n'aura ni pouvoir
réglementaire, ni pouvoir d'injonction ou de sanction
. Elle ne sera
d'ailleurs pas la seule autorité administrative dans cette situation,
puisque tel est également le cas du Médiateur de la
République par exemple.
A titre principal, l'influence de la Commission nationale du débat
public se construira en fonction de la crédibilité qu'elle
acquerra au fil des débats. Ce pouvoir ne s'étend pas à
une capacité d'appréciation sur le fond des projets qui lui sont
soumis.
Cependant, elle
pourra décider de l'opportunité d'un
débat public et des modalités de son organisation
. Par
ailleurs, un avis négatif obérera l'avenir d'un projet et le
maître d'ouvrage devra en tenir compte.
Néanmoins, la sanction du non respect d'une décision de la
Commission nationale du débat public est envisageable
au
contentieux
à deux étapes :
-
à l'issue du débat public
, le maître
d'ouvrage doit prendre une décision indiquant son intention de
poursuivre le projet et ses modalités. Si le maître d'ouvrage n'a
pas respecté les prescriptions de la Commission nationale du
débat public,
cette décision faisant grief
(texte
prévu pour l'article L. 121-12 du code de l'environnement) pourra
être attaquée par la voie du recours pour excès de pouvoir
;
- soit en aval,
lors de la déclaration d'utilité
publique, si le maître d'ouvrage n'a pas réalisé le
débat demandé et s'il n'a pas pris la décision post
débat public par la voie de l'exception d'illégalité
.
Le système adopté est un système souple, qui minimise les
procédures et les décisions supplémentaires afin de ne pas
compliquer les textes.
Le juge devra cependant rythmer son intervention en sachant que le
développement de réglementations minutieuses crée un
risque important d'annulation sur la forme. Ces affaires doivent
bénéficier d'un traitement d'urgence. Avec l'arrivée de
règles plus souples, entraînant moins de formalisme automatique,
il appartiendra au juge de nuancer davantage son contrôle de la forme et
de
raisonner plus en terme de sincérité de la
consultation
, comme il le fait en matière électorale. S'il ne
retrouve pas cette sincérité, il annule la procédure et
demande une nouvelle consultation.
Afin de tenir compte du fait que la Commission nationale du débat public
ne dispose ni du pouvoir d'injonction ni du pouvoir de sanction, ont
été adoptés en première lecture à
l'Assemblée nationale avec l'avis favorable du Gouvernement des
amendements du rapporteur pour avis M. Pierre Cohen, remplaçant le
terme « garantir » par « veiller
à ».
Par ailleurs,
si le commissaire enquêteur a pour fonction
essentielle de donner son avis sur le bien fondé du projet, il n'en va
pas de même du
médiateur,
à la fois mémoire
et modérateur du débat, qui
n'aura pas pour mission de donner
un avis sur le fond du débat, mais de veiller à la bonne
organisation du débat public
.
Cependant, cette précision ne figure pas dans le projet de loi.
Un amendement tendant à l'indiquer a été
présenté en première lecture à l'Assemblée
nationale par MM. Léonce Deprez et Marc-Philippe Daubresse, du groupe
UDF. Il a néanmoins été rejeté, M. Pierre Cohen,
rapporteur, ayant émis un avis défavorable, ainsi que le
Gouvernement, en arguant que l'exposé des motifs précisait bien
que la mission de la Commission se limitait à organiser le débat
public sans donner d'avis quant au contenu du projet.
L'exposé des motifs n'ayant pas de valeur normative, il parait utile de
prévoir expressément cette disposition, et votre rapporteur vous
propose d'adopter un
amendement
en ce sens.
Enfin, ont été adoptés deux amendements
rédactionnels du rapporteur ayant reçu l'avis favorable du
Gouvernement, ainsi qu'un amendement du rapporteur supprimant une mention aux
modalités de l'organisation du débat public, traitées en
détail à l'article L. 121-8 du code de l'environnement (avis
favorable du Gouvernement).
Votre commission des Lois vous propose donc d'
adopter trois amendements,
puis d'adopter le texte prévu pour l'article L. 121-1 du code de
l'environnement ainsi modifié
.
Article L. 121-2 du code de l'environnement
Dérogations aux
dispositions relatives au débat
public
Le
projet de loi procède à une réécriture totale de
cet article, qui traite actuellement des modalités de saisine de la
Commission nationale du débat public, question renvoyée par le
projet de loi au nouvel article L. 121-7 du même code.
Cet article prévoit des dérogations aux dispositions du chapitre
Ier du titre II du livre Ier du code de l'environnement, tel que modifié
par le présent projet de loi, c'est à dire relatif au
débat public et à la Commission nationale du débat public.
Ces dispositions ne seront donc pas applicables aux documents
d'urbanisme
(c'est à dire les plans locaux d'urbanisme, les
schémas de cohérence territoriale et les cartes communales),
ni aux opérations d'aménagement
prévues par le
livre III du code de l'urbanisme. Ces opérations sont définies
à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme comme celles ayant pour
objet de «
mettre en oeuvre un
projet urbain
, une politique
locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des
activités économiques, de favoriser le développement des
loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs,
de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain,
de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non
bâti et les espaces naturels
». Elles comprennent donc les zones
d'aménagement concerté.
Cette dérogation se justifie par l'existence d'une
procédure
de consultation spécifique, prévue à l'article L. 300-2 du
code de l'urbanisme
. Aux termes de cet article, le conseil municipal ou
l'organe délibérant de l'établissement public de
coopération intercommunale adopte une délibération
portant à la fois sur les objectifs poursuivis et sur les
modalités d'une concertation associant pendant toute la durée
d'élaboration du projet les habitants, les associations locales et
« les autres personnes concernées ».
Cette procédure, introduite par la loi n° 85-729 du 18 juillet 1985
relative à la définition et à la mise en oeuvre de
principes d'aménagement, semble bien adaptée. Afin de ne pas
encore alourdir la procédure en superposant des dispositifs de
concertation, alors même que les procédures semblent avoir atteint
une limite en terme de complexité, il est proposé de ne rendre
applicable que la procédure de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme
en cette matière.
Par ailleurs,
il faut distinguer entre les plans et programmes
, d'une
part, qui relèvent de la concertation prévue à l'article
L. 300-2 du code de l'urbanisme en amont,
et certains projets
visés
à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, d'autre
part, dont le texte prévu pour l'article L. 121-2 du code de
l'environnement prévoit qu'ils
pourraient être soumis à
la procédure de débat public.
Il s'agit de
projets d'investissement
dont la liste sera fixée
par décret en Conseil d'Etat. Ces projets devraient être ceux
déjà listés dans l'annexe au décret n° 96-388
du 10 mai 1996 pris en application de la loi du 2 février 1995, c'est
à dire les
grandes infrastructures terrestres, d'équipements
culturels, sportifs, industriels, scientifiques ou touristiques
.
En effet, certains projets d'aménagement particulièrement
importants, tant d'un point de vue socio-économique que d'un point de
vue environnemental, devraient légitimement pouvoir être soumis
à débat public. Tel est par exemple le cas de projets de
création de zones d'aménagement concerté devant accueillir
de grands équipements, comme le stade de Saint-Denis.
Dans ce cas et
dans un souci de simplicité, la procédure de
concertation prévue à l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme
ne serait pas utilisée.
Votre commission des Lois vous propose d'adopter le texte prévu pour
l'article L. 121-2 du code de l'environnement
sans modification
.
Section 2
Composition et fonctionnement de
la
Commission
nationale du débat public
Article L. 121-3 du code de l'environnement
Composition de la Commission
nationale du débat public
1. La composition actuelle
L'actuel
article L. 121-3 du code de l'environnement relatif à la
composition
de la Commission nationale du débat public indique assez
succinctement qu'elle se compose « à parts
égales » :
- de parlementaires et d'élus locaux ;
- de membres du Conseil d'Etat et des juridictions des ordres
administratif et judiciaire ;
- de représentants d'associations de protection de l'environnement
agréées au titre de l'article L. 141-1 exerçant leur
activité sur l'ensemble du territoire national, de représentants
des usagers et de personnalités qualifiées.
Il prévoit en outre qu'elle est présidée par un conseiller
d'Etat.
L'article 2 du décret n° 96-388 du 10 mai 1996
précité en a précisé la composition. Actuellement,
la Commission compte
18 membres
:
- un conseiller d'Etat en activité ou honoraire, qui est son
président, actuellement M. Pierre Zémor, le premier
président ayant été M. Hubert Blanc ;
- un membre du Conseil d'Etat, un membre de la Cour de cassation, un
membre de la Cour des comptes, un membre du corps des tribunaux administratifs
et des cours administratives d'appel, un magistrat des cours et tribunaux de
l'ordre judiciaire ;
- un député et un sénateur (depuis le
3 mai 2001 et jusqu'au 3 mai 2006, M. Jean
Bizet) ;
- un président de conseil régional, un président de
conseil général, deux maires ;
- deux représentants d'associations agréées de
protection de l'environnement, deux représentants des usagers ;
- deux personnalités qualifiées.
On retrouve donc l'idée d'un équilibre entre trois
collèges (magistrats, élus et personnalités
qualifiées).
2. Le projet de loi initial
La nouvelle rédaction de l'article L. 121-3 du code de l'environnement
ne bouleverse pas cette composition, mais
porte à 21 le nombre de
membres.
Cependant, la composition de la commission passe du domaine
réglementaire au domaine législatif, puisqu'elle acquiert le
statut d'autorité administrative indépendante.
Le projet de loi ne précise plus la qualité du
président
mais introduit deux vice-présidents.
Cette modification devra permettre au gouvernement de choisir plus largement et
plus facilement le président de la Commission nationale du débat
public.
Ces trois membres permanents sont nommés par décret simple. En
effet, la nomination par décret simple est apparue la plus courante pour
les autorités administratives indépendantes, et est
validée par le Conseil d'Etat.
Ces personnes auront notamment à assurer la montée en puissance
de la Commission, puisque l'objectif du Gouvernement est de parvenir à
une vingtaine de débats par an.
La Commission ne comptera plus de magistrat des cours et tribunaux de l'ordre
judiciaire parmi ses membres.
Le
nombre d'élus locaux
nommés sur proposition des
associations représentatives d'élus
passe de quatre à
cinq,
afin d'introduire parmi les membres de la Commission nationale du
débat public un représentant d'établissement public de
coopération intercommunale.
De plus, il est prévu que le nombre de personnes qualifiées passe
de deux à trois et que l'une d'entre elles devra désormais avoir
exercé les fonctions de commissaire-enquêteur, cette
dernière précision paraissant en effet tout à fait
souhaitable.
S'agissant des rémunérations, le projet de loi
prévoit que le président, et les vice-présidents, qui
exercent leurs fonctions à plein temps, sont
rémunérés (les fonctions des autres membres donnant
simplement lieu à indemnité). Il s'agit là d'une
disposition que l'on retrouve couramment dans les lois régissant les
autorité administratives indépendantes. Ceci devrait permettre
à la Commission d'asseoir financièrement son indépendance.
3. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a adopté un amendement de M. Pierre Cohen,
rapporteur pour avis, apportant des précisions quant à la
désignation de chacun des membres. Le Gouvernement a indiqué
qu'il ne pensait pas entrer dans un tel niveau de détail, mais il s'en
est remis à la sagesse de l'Assemblée.
Le rapporteur a cependant indiqué qu'afin de garantir
l'indépendance de la Commission nationale du débat public,
désormais autorité administrative indépendante, il
convenait d'inscrire dans la loi la procédure de désignation de
ses membres, ainsi qu'il avait été fait par exemple, pour la
Commission nationale de l'informatique et des libertés, la Commission
des opérations de bourse, l'Autorité de régulation des
télécommunications, ou plus récemment la Commission de
régulation de l'électricité.
Les conditions de nomination des membres sont donc minutieusement
décrites.
Il est ainsi prévu que le député et le sénateur
sont nommés respectivement par le président de l'Assemblée
nationale et par le président du Sénat, sur proposition de la
commission permanente de leur assemblée compétente en
matière d'équipement, de travaux publics et d'aménagement
du territoire (la commission des Affaires économiques au Sénat).
Les élus locaux sont pour leur part nommés par décret sur
proposition des associations représentatives des élus
concernés, les membres du conseil d'Etat, de la cour de cassation, de la
Cour des comptes étant quant à eux élus par leur
assemblée générale, le membre du corps des tribunaux
administratifs et cours administratives d'appel étant lui nommé
par décret sur proposition du Conseil supérieur des tribunaux
administratifs et des cours administratives d'appel.
Les représentants d'associations de protection de l'environnement
agréées, des consommateurs et des usagers sont nommés par
arrêté
du Premier ministre, respectivement sur
proposition du ministre chargé de l'environnement, du ministre
chargé de l'économie et du ministre chargé des transports.
Les personnalités qualifiées sont nommées par
décret du Premier ministre sur proposition du ministre chargé de
l'environnement, du ministre chargé de l'industrie et du ministre
chargé de l'équipement.
Il est toujours prévu deux représentants d'associations de
protection de l'environnement, mais les deux représentants des usagers
seront désormais des représentants des usagers et des
consommateurs.
L'Assemblée nationale a précisé que
les membres (y
compris le président et les vice-présidents) sont nommés
pour 5 ans ou pour la durée de leur mandat
. En effet, les
élus membres de la Commission nationale du débat public ne le
sont pas intuitu personae mais en fonction de leur mandat. A la fin de leur
mandat, ils quittent automatiquement la Commission nationale du débat
public.
Le décret de 1996 prévoyait que le président et les
membres étaient nommés pour une durée de 5 ans, leur
mandat étant renouvelable une fois.
Le projet de loi était plus laconique. Il prévoyait que le
président et les vice-présidents sont nommés par
décret pour une durée de 5 ans et que leur mandat est
renouvelable une fois, mais il n'était rien précisé pour
les membres. Pour pallier cette imprécision, l'amendement du rapporteur
adopté par l'Assemblée nationale en première lecture
prévoit que le mandat des membres (y compris le président et les
vice-présidents) est renouvelable une fois.
Au contraire, le
rapport du Conseil d'Etat
préconisait une
professionnalisation de la Commission nationale du débat public, dont
les membres permanents devraient être des personnalités de haut
niveau présentant toutes les garanties d'impartialité et de
compétence. Ils devraient selon lui être désignés
pour un
mandat de 4-5 ans non renouvelable
et lui consacrer une part
importante de leur activité professionnelle.
4. Les propositions de votre commission des Lois
Il convient de
supprimer la limite d'âge de 65 ans
. En effet, le
rôle du président de la Commission nationale du débat
public est essentiellement d'être un modérateur du débat,
même si une telle fonction peut apparaître frustrante. Cette
disposition, si elle était maintenue, conduirait à se priver de
personnalités ayant montré à bien des égards leur
aptitude à assumer des missions comme celle de la présidence de
la Commission nationale du débat public. Votre commission vous proposera
donc d'adopter un
amendement
en ce sens.
En outre, il apparaît que 5 élus locaux sur 21 membres
représente une proportion insuffisante, étant donnée
l'implication des élus locaux dans ces projets et leur impact sur le
territoire des communes.
Votre commission des Lois vous propose d'adopter un
amendement portant de
cinq à six le nombre d'élus locaux
et supprimant la
personnalité qualifiée nommé par le ministre chargé
de l'environnement, étant donné que deux représentants
d'associations de protection de l'environnement seront membres.
Enfin, il ne parait pas nécessaire de préciser dans la loi la
commission compétente afin de proposer les parlementaires amenés
à siéger au sein de la Commission nationale du débat
public. Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter un
amendement
supprimant cette précision qui n'est pas de nature
législative.
S'agissant des commissions particulières qui seront mises en place
à l'occasion de débats particuliers, il n'est pas prévu de
règles de composition et de désignation. En effet, l'objectif du
Gouvernement étant de passer d'un débat public à une
vingtaine par an, il ne faut pas leur imposer trop de contraintes, puisqu'il
peut être délicat de trouver des personnalités
qualifiées mobilisables pendant parfois 6 mois. Il apparaît en
outre que l'article L. 121-5 du code de l'environnement, tel que modifié
par le présent projet de loi relatif aux incompatibilités,
permettra d'assurer l'indépendance et l'impartialité de ces
personnes vis à vis notamment du maître d'ouvrage.
Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter
trois amendements
,
puis d'
adopter le texte prévu pour l'article L. 121-3 du code de
l'environnement ainsi modifié
.
Article L. 121-4 du code de l'environnement
Personnels de la Commission
nationale du débat public
Actuellement, l'article L. 121-4 du code de l'environnement
traite
du bilan du débat public. Tout le chapitre III étant
réécrit par le projet de loi, ces dispositions se trouvent
insérées dans un nouvel article L. 121-10, que l'on
étudiera ultérieurement.
Le projet de loi prévoit que la Commission nationale du débat
public disposera de deux catégories de personnels.
- D'une part, elle pourra bénéficier de
fonctionnaires
mis à disposition
235(
*
)
.
- D'autre part, la Commission nationale du débat public pourra
recruter (grâce à son budget) des
agents contractuels
.
Ceux-ci seront donc des agents contractuels de droit public directement
recrutés par le président de la Commission nationale du
débat public.
Cette solution avait été préconisée par le rapport
du Conseil d'Etat de 1999 « L'utilité publique
aujourd'hui ». Elle devrait permettre d'avoir des personnes
compétentes en fonction des différents sujets dont aura à
traiter la Commission nationale du débat public. Une technicité
accrue doit également permettre aux commissions particulières
d'être plus crédibles, tant vis à vis des maîtres
d'ouvrage que du public.
Actuellement, le secrétariat de la Commission nationale du débat
public est assuré par la Direction des études économiques
et de l'évaluation environnementale du ministère chargé de
l'environnement.
Un amendement rédactionnel de M . Pierre Cohen, rapporteur, a
été adopté avec l'avis favorable du Gouvernement.
Votre commission des Lois vous propose d'
adopter le texte prévu pour
l'article L. 121-4 du code de l'environnement sans modification
.
Article L. 121-5 du code de
l'environnement
Incompatibilités
Actuellement, l'article L. 121-5 du code de l'environnement
précise qu'il revient à un décret en Conseil d'Etat de
déterminer les conditions d'application du chapitre Ier du titre II du
livre Ier du code de l'environnement. Le projet de loi réécrivant
totalement ce chapitre, l'article L.121-5 du code de l'environnement traitera
désormais des incompatibilités, qui étaient
précédemment traitées à l'article L. 121-3 du code
de l'environnement.
Le paragraphe IV de l'actuel article L. 121-3 du code de l'environnement
prévoit ainsi que
les personnes intéressées à
l'opération à titre personnel ou en raison de leurs fonctions ne
pouvaient faire partie de la commission particulière chargée
d'organiser le débat public sur ladite opération.
Le projet de loi
étend cette disposition à la commission
nationale
et précise que ceci est valable
qu'il s'agisse d'un
débat ou d'une procédure de concertation
. Il est donc tenu
compte de l'élargissement des moyens d'action de la Commission nationale
du débat public et des commissions particulières.
Il s'agit d'une disposition classique, qui devrait permettre de lever les
doutes quant à l'impartialité des membres des commissions
particulières soulevés précédemment.
Votre commission des Lois vous propose d'
adopter le texte prévu pour
l'article L. 121-5 du code de l'environnement sans modification
.
Article L. 121-6 du code de l'environnement
Fonctionnement de la Commission
nationale du débat public
Ce
nouvel article du code de l'environnement vise à tirer les
conséquences sur le plan financier du nouveau statut
d'autorité administrative indépendante
acquis par la
Commission nationale du débat public.
Actuellement,
le décret du 10 mai 1996 précité
précise que les crédits nécessaires à
l'accomplissement des missions de la commission sont inscrits au
budget du
ministère de l'environnement
.
Or, la Commission nationale du débat public devrait connaître une
augmentation importante de ses charges du fait des seuils prévus en
matière de saisine ou d'information obligatoire de la Commission
nationale du débat public. Pour ce faire, la Commission nationale du
débat public disposera d'un budget de fonctionnement (dont les
crédits seront inscrits au budget de l'Etat).
En effet, même si l'organisation d'un débat public est
supportée financièrement par le maître d'ouvrage, elle
devra faire face aux dépenses de gestion courante liées notamment
aux travaux d'instruction des dossiers préalablement à la tenue
d'un débat public. Elle devra également rémunérer
son personnel, cette dépense -contrairement aux frais de tenue du
débat public- ne pouvant être mise à la charge du
maître d'ouvrage. Cette précision ne figure pas dans le projet de
loi, puisqu'elle est de nature réglementaire.
Comme cela est généralement le cas pour les autres
autorités administratives indépendantes, il est également
précisé que le président de la Commission nationale du
débat public est ordonnateur des dépenses et a autorité
sur les services.
Pour éviter toute tutelle budgétaire a priori sur la Commission
nationale du débat public, qui nuirait, sinon à son
indépendance, du moins à sa crédibilité, il est
prévu que les dispositions de la loi du 10 août 1922 relative au
contrôle financier ne sont pas applicables aux dépenses de la
Commission nationale du débat public, ce qui constitue une disposition
classique s'agissant des autorités administratives indépendantes.
Votre commission des Lois vous propose d'
adopter le texte prévu pour
l'article L. 121-6 du code de l'environnement sans modification
.
Section 3
Organisation du débat public
Article L. 121-7 du code de l'environnement
Modalités de saisine de
la Commission nationale du débat
public
Cet
article détermine les modalités de saisine de la Commission
nationale du débat public.
L'innovation principale consiste dans l'introduction d'une obligation de
saisine de la Commission nationale du débat public par le maître
d'ouvrage s'agissant des projets les plus importants. De plus, certains projets
devront être rendus publics par le maître d'ouvrage, afin de
permettre le cas échéant une saisine de la Commission nationale
du débat public.
Actuellement, les modalités de saisine de la Commission nationale du
débat public sont définies par l'article L. 121-2 du code de
l'environnement, qui ne prévoit pas de saisine obligatoire de la
Commission et encadre strictement les personnes susceptibles de saisir la
Commission.
Cet article reprend dans une large mesure les préconisations du
rapport du Conseil d'Etat.
1. Institution d'une saisine obligatoire de la commission nationale du
débat public
Le paragraphe I
constitue donc l'avancée principale en instituant
une saisine obligatoire pour certains projets
.
Ces projets sont définis comme étant «
tous les
projets d'aménagement ou d'équipement qui, par leur nature, leurs
caractéristiques techniques ou leur coût prévisionnel, tel
qu'il peut être évalué lors de la phase
d'élaboration, répondent à des critères ou
excèdent des seuils fixés par décret en Conseil
d'Etat »
.
Il conviendra de
cadrer la procédure de saisine obligatoire pour
éviter que des projets de moindre importance ne viennent encombrer la
Commission nationale du débat public
. Selon les informations
fournies à votre rapporteur, les critères financiers et
techniques auxquels devra répondre le projet pour donner lieu à
une saisine obligatoire devraient largement s'inspirer de ceux figurant dans
l'annexe du décret du 10 mai 1996 précité. Toutefois,
certains seuils pourraient être revus à la baisse.
Actuellement, le champ d'action de la Commission nationale du débat
public se limite aux seuls très grands projets d'infrastructures, selon
des critères physico-financiers : coût minimum de 2 à
4 milliards de francs (300 à 600 millions d'euros), 30
kilomètres d'autoroutes ou de voies ferrées,
10 kilomètres pour les lignes à très haute tension,
les centres de production nucléaire de base et un certain nombre
d'équipements massifs.
Or, les seuils pressentis, par exemple, pour les grandes infrastructures
linéaires, seraient de l'ordre du milliard de francs (150 millions
d'euros) pour le seuil haut (saisine obligatoire de la Commission nationale du
débat public par le maître d'ouvrage) et de 500 millions de
francs (76 millions d'euros) pour le seuil bas (information obligatoire),
l'établissement du seuil bas devant correspondre à l'annexe de la
convention d'Aarhus pour les projets concernés.
Il apparaît que la
fixation de seuils relativement faibles
banaliserait la procédure de débat public
, alors que l'esprit
de la loi est bien de faire du débat public une procédure
adaptée aux grands projets.
Particulièrement en matière routière et ferroviaire, on
risque d'assister à un engorgement très rapide de la Commission
nationale du débat public, au moins au stade de l'instruction des
dossiers.
Cependant, il est difficile de déterminer les seuils dans la loi,
ceux-ci devant différer en fonction de la catégorie des projets.
Il faut donc obtenir du ministre l'engagement que les seuils retenus
respecteront l'esprit de la réforme.
Il est intéressant de noter qu'il reviendra
au maître d'ouvrage
(ou à la personne publique responsable du dossier, s'il n'est pas
identifié)
d'en informer la Commission en lui adressant un
dossier
relatif au projet.
Si le maître d'ouvrage ne saisit pas la Commission nationale du
débat public, l'enquête publique ne pourra pas être ouverte
(en vertu du texte prévu pour l'article L. 121-11 du code de
l'environnement), ce qui constitue une contrainte forte.
Le
deuxième alinéa
du texte prévu pour le
paragraphe I de l'article L. 121-7 du code de l'environnement définit le
contenu de ce dossier
. Il devra indiquer les objectifs et les
principales caractéristiques techniques du projet, ainsi que les enjeux
socio-économiques, le coût estimatif et l'identification des
impacts significatifs du projet sur l'environnement ou l'aménagement du
territoire.
A été adopté un amendement rédactionnel de M.
Pierre Cohen, rapporteur pour avis, après avoir reçu un avis
favorable du Gouvernement.
Il n'est cependant
pas précisé à quel moment le
maître d'ouvrage devra saisir la Commission nationale du débat
public
. Cette omission est volontaire. En effet, il apparaît que le
maître d'ouvrage sera mieux à même d'apprécier
à quel stade de l'élaboration il est le plus opportun de saisir
la Commission nationale du débat public, en sachant que le projet ne
doit pas être trop avancé, celui-ci servant surtout de
« réactif » afin de susciter le débat et des
contre-propositions.
Par ailleurs, les processus d'élaboration des projets étant
variables selon les catégories d'ouvrages, il est difficile de
définir dans la loi un moment à partir duquel serait
défini un délai de saisine.
Toutefois, ceci devra intervenir obligatoirement avant la date au-delà
de laquelle un débat n'est plus possible (lors de la publication au
Journal officiel des principales caractéristiques de l'ouvrage par
exemple).
2. Une saisine élargie de la commission nationale du
débat public
Le paragraphe II
traite quant à lui des
modalités de
saisine
facultative de la Commission nationale du débat
public
.
Cette possibilité était également préconisée
par le rapport du Conseil d'Etat qui ne prévoyait cependant pas de
seuil, tout en insistant sur la nécessité d'une saisine stricte
afin de ne pas encombrer la Commission nationale du débat public.
Sont concernés les projets d'aménagement ou
d'équipement répondant à l'un de ces deux
critères :
- un coût prévisionnel, qui, sans atteindre le seuil
défini précédemment, est supérieur à un
seuil qui sera défini par décret en Conseil d'Etat ;
- des critères techniques conformes à ceux fixés par
décret en Conseil d'Etat pour chaque nature de projets.
Les seuils devraient être abaissés, selon les informations
fournies à votre rapporteur. Le Conseil d'Etat insistait cependant sur
le fait qu'il ne fallait pas donner à la Commission nationale du
débat public une vocation générale. Plusieurs milliers
d'enquêtes étant réalisées chaque année, il
importe d'éviter que la Commission nationale du débat public soit
submergée par des demandes plus ou moins dilatoires pour des projets
d'importance modeste.
Dans ce cas également,
les projets sont rendus publics par le
maître d'ouvrage
(ou la personne publique responsable du projet s'il
ne peut être identifié), qui en publie les objectifs et les
caractéristiques essentielles. Ceci constitue une
obligation
pour
le maître d'ouvrage. Ces projets, même s'ils sont d'une moindre
ampleur que ceux qui donnent lieu à saisine obligatoire, peuvent ainsi
faire l'objet d'un débat public.
L'information effectuée,
il est alors possible de saisir la
Commission nationale du débat public qui décide de la pertinence
d'organiser un débat public
.
Votre commission des Lois vous propose d'adopter un
amendement
rédactionnel.
3. L'élargissement du mode de saisine facultative de la
Commission nationale du débat public
Actuellement, l'article L. 121-2 du code de l'environnement ne connaît
que cette saisine facultative.
Le
deuxième alinéa
du paragraphe II du texte prévu
pour cet article indique les personnes habilitées à saisir la
Commission nationale du débat public.
Actuellement, l'article L. 121-2 du code de l'environnement prévoit que
la Commission nationale du débat public peut être saisie :
- conjointement
par les ministres
dont dépendent les projets
pouvant donner lieu à débat public et par le ministre
chargé de l'environnement ainsi que, pour les projets des
collectivités territoriales ou de leurs établissements publics,
par le ministre chargé des collectivités locales, après
consultation desdites collectivités territoriales ;
-
par au moins 20 députés ou 20
sénateurs
ou
par les conseils régionaux
territorialement concernés
par le projet. Dans ces cas, le
décret du 10 mai 1996 précise que la
Commission nationale du
débat public doit alors solliciter l'avis des ministres
intéressés sur le caractère d'intérêt
national du projet, sur son enjeu socio-économique et sur son impact sur
l'environnement. Au vu de cet avis, la Commission décide alors ou non
l'organisation d'un débat public ;
-
par les associations agréées de protection de
l'environnement
exerçant leur activité sur l'ensemble du
territoire national. La commission sollicite alors l'avis des ministres
intéressés si elle envisage de donner suite à la demande.
La Commission nationale du débat public en examine donc la
recevabilité avant même de solliciter l'avis des ministres
intéressés.
Pour les quatre débats déjà organisés, on compte
une saisine conjointe du ministre de l'aménagement du territoire et de
l'environnement et du ministre de l'équipement (pour le port du Havre),
une saisine parlementaire (pour le projet d'autoroute A 32 Metz-Nancy) et deux
saisines par l'Association France Nature Environnement (pour le projet de ligne
à très haute tension entre Boutre et Carros et le projet de TGV
Rhin-Rhône).
Ces modalités de saisine de la Commission nationale du débat
public apparaissent donc assez restrictives, même s'il ne semble pas que
le faible taux de saisine de la Commission nationale du débat public
depuis son installation soit véritablement lié à cette
question, la plupart des saisines ayant été
déclarées irrecevables en raison de la publication au Journal
officiel de la décision ministérielle de prise en
considération.
Cette saisine est d'autant plus restrictive que soumise à l'avis des
ministres.
Le projet de loi
assouplit considérablement les modalités
de saisine, et ceci à plusieurs niveaux.
L'avis des ministres intéressés est supprimé.
En
effet, la Commission nationale du débat public acquerrant le statut
d'autorité administrative indépendante, le maintien d'une telle
disposition paraissait difficile.
Enfin, le champ des personnes pouvant saisir la Commission nationale du
débat public est élargi :
- au
maître d'ouvrage
(ou à la personne publique
responsable du projet si le maître d'ouvrage ne peut encore être
déterminé) ;
- à un seul conseil général ou à un seul
conseil régional (une décision de leur organe
délibérant saisissant la Commission nationale du débat
public) territorialement intéressés ;
- à un établissement public de coopération
intercommunale ayant compétence en matière d'aménagement
de l'espace territorialement intéressé.
Les associations agréées de protection de l'environnement
exerçant leur activité sur l'ensemble du territoire national
conservent leur faculté de saisine.
Le projet de loi initial modifiait
la condition de vingt sénateurs ou
vingt députés
pour saisir la Commission nationale du
débat public, en prévoyant qu'il s'agissait dorénavant de
vingt parlementaires, sans distinguer entre les deux assemblées. A
l'initiative de M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis, l'
Assemblée
nationale
a en première lecture
ramené ce nombre à
trois membres du Parlement
(sans distinguer sénateurs ou
députés), estimant qu'il n'était pas possible qu'un seul
établissement public de coopération intercommunale puisse saisir
la Commission nationale du débat public, et que soit maintenue
l'exigence de vingt parlementaires. Sur ce point, Mme Dominique Voynet, alors
ministre de l'environnement, s'en était remise à la sagesse de
l'Assemblée nationale, reconnaissant que vingt était un chiffre
excessif mais craignant que trois soit trop peu.
Votre commission des Lois considère pour sa part que l'abaissement de la
condition à trois parlementaires n'est pas justifiée, ce type de
saisine devant avoir un caractère d'intérêt plus national.
Par conséquent, elle vous propose d'adopter un
amendement
rétablissant à vingt le nombre de sénateurs ou de
députés pouvant saisir la Commission nationale du débat
public
.
En contrepartie, votre commission des Lois vous propose de
permettre qu'une
commune territorialement intéressée puisse saisir la Commission
nationale du débat public
. Elle vous propose donc d'adopter un
amendement en ce sens.
S'agissant de cette saisine facultative, et contrairement au cas où la
saisine est obligatoire, le projet de loi prévoit que le délai de
saisine sera fixé par décret, afin de ne pas bloquer la
procédure et d'éviter des contentieux ultérieurs. Votre
commission des Lois vous propose d'adopter un
amendement
prévoyant que ce délai de saisine est de deux mois à
partir du moment où le maître d'ouvrage a rendu public son projet
dans un but de clarification, et afin d'éviter d'allonger inutilement la
procédure.
Le
troisième alinéa
du paragraphe II prévoit que
sur demande de la Commission nationale du débat public, le maître
d'ouvrage constitue un
dossier
présentant les mêmes
caractéristiques qu'en cas de saisine obligatoire.
C'est notamment au
vu de ce dossier que la Commission décidera ou non d'organiser un
débat public
.
Votre commission vous propose d'adopter un
amendement précisant que
le maître d'ouvrage transmet lui-même un dossier à la
Commission nationale du débat public
.
La teneur de ce dossier, qui est destiné à s'enrichir tout au
long du débat, est essentielle. Le dossier final de la DUCSAI a ainsi
comporté plus de 1.500 pages. Cependant, il convient avant tout de
permettre une meilleure accessibilité de l'information. En effet, trop
d'information tue l'information, et la constitution d'un index
thématique paraît être un préalable indispensable.
Par ailleurs, on constate une véritable asymétrie d'information
entre un expert et un citoyen moyen, du fait de la nature très technique
et donc difficilement appréhendable de la plupart des documents. La
fourniture de synthèses intelligibles constitue une revendication
récurrente des associations.
En première lecture à l'Assemblée nationale ont
été adoptés des amendements présentés par le
rapporteur pour avis, M. Pierre Cohen, tendant à :
- préciser que la Commission nationale du débat public est
saisie « d'une demande de débat public » afin de
bien préciser qu'elle n'est pas saisie du projet. Le Gouvernement a
donné un avis défavorable, estimant que la rédaction de
l'amendement introduisait plus de formalisme et donc de risques
contentieux ;
- préciser que le maître d'ouvrage doit publier les objectifs
de son projet lorsque celui-ci doit donner lieu à une information
préalable du public (avis favorable du Gouvernement).
En outre, votre commission des Lois vous propose d'adopter deux amendements
rédactionnels.
Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter sept amendements, puis
d'
adopter le texte prévu pour l'article L. 121-7 du code de
l'environnement ainsi modifié.
Article L. 121-8 du code de l'environnement
Suites données à
la saisine
de la Commission nationale du débat
public
Ce
nouvel article du code de l'environnement précise les critères
à partir desquels la Commission nationale du débat public se
prononce sur l'organisation ou non d'un débat public, les
modalités de cette décision et ses conséquences
financières.
1. Pouvoir d'appréciation de la Commission nationale du
débat public
En effet, la Commission nationale du débat public a
un pouvoir
d'appréciation
lui permettant de refuser de se saisir d'une affaire
lorsqu'elle estime son intervention est inutile. Cette précision est
essentielle afin de déterminer la nature de la Commission nationale du
débat public.
La solution préconisée par le rapport du Conseil d'Etat de
créer des instances déconcentrées dont le nombre (de 5
à 10) et le ressort pourraient être calqués sur ceux des
cours administratives d'appel, l'instance nationale disposant d'un pouvoir
d'évocation, n'a finalement pas été retenue, car il lui a
été préféré une instance plus souple,
contribuant à diffuser une culture de la concertation et des
prescriptions méthodologiques plutôt que se saisissant de tous les
projets.
Cette volonté, à laquelle souscrit totalement votre commission,
pourrait cependant être battue en brèche par l'imprécision
des dispositions relatives aux seuils, respectivement prévus pour
définir les projets devant obligatoirement être soumis à la
Commission nationale du débat public, et d'autre part ceux devant faire
l'objet d'une publicité du maître d'ouvrage afin d'être
éventuellement soumis à la Commission nationale du débat
public.
L'étude de l'opportunité de l'organisation d'un débat
public se fait dans les mêmes conditions, que la Commission nationale du
débat public ait été saisie dans le cadre de la
procédure obligatoire, ou dans celui de la procédure facultative.
Le premier alinéa du paragraphe I
définit le
faisceau
de critères
en fonction duquel la commission décide de
l'opportunité de l'organisation du débat public, pour chaque
projet.
La Commission nationale du débat public décide
en
« fonction de
l'intérêt national du projet
,
de son incidence territoriale, des enjeux socio-économiques qui s'y
attachent et de ses impacts sur l'environnement ou l'aménagement du
territoire ». Ces critères sont extrêmement larges et le
projet de loi ne prévoyant pas de hiérarchie entre eux, la
Commission nationale du débat public devrait disposer d'une marge
d'appréciation non négligeable.
On remarquera qu'
à ce stade, la Commission nationale du débat
public peut donc prendre en considération l'intérêt
national du projet
qui ne constitue cependant plus une condition pour une
saisine de la Commission. Cette mention est très importante, afin
d'éviter que des projets ayant une incidence purement locale soient
soumis à l'instance nationale, ce qui paraît incompatible avec la
décentralisation.
Votre commission a toutefois rétabli cette condition
d'intérêt national à l'article L. 121-1 du code
de l'environnement.
Lors de l'examen à l'Assemblée nationale a été
discuté
l'intérêt de laisser à la Commission
nationale du débat public le pouvoir de décider en
opportunité de l'organisation d'un débat public.
MM. Philippe Marchand, André Aschieri, Yves Cochet, Noël
Mamère et Mme Aubert, du groupe radical, citoyen et vert, ont
présenté un amendement afin de réfuter cette
possibilité de filtre. En revanche, M. Pierre Cohen, rapporteur pour
avis, a souligné que certains événements très
importants pouvaient exiger une grande célérité (citant
l'exemple de la construction du stade de France).
Mme Dominique Voynet, alors ministre de l'Environnement, a également
récusé cette idée, en soulignant que le Gouvernement, en
transformant la Commission nationale du débat public en autorité
administrative indépendante, avait fait le pari de la
responsabilité et de l'engagement des membres de la Commission nationale
du débat public. Elle a estimé important que celle-ci puisse
concentrer ses moyens, qui seront nécessairement limités, sur les
sujets les plus intéressants.
Cet amendement n'a donc pas été adopté, ce dont votre
commission des Lois se félicite.
2. Détermination des modalités d'organisation du
débat public
Le deuxième alinéa du paragraphe I
du texte proposé
pour l'article L. 121-8 du code de l'environnement définit ensuite les
modalités d'organisation du débat public
, lorsque la
Commission l'estime nécessaire.
Deux procédures sont alors possibles :
*
La commission peut décider d'organiser elle-même un
débat public.
Dans ce cas, elle doit mener un travail d'investigation et
d'
instruction
, ce qui justifie son budget de fonctionnement ainsi que le
recrutement de personnels spécialisés. Elle devra par exemple
vérifier que le projet se situe à un stade suffisamment
avancé pour assurer un débat public de qualité. En outre,
elle valide le dossier présenté par le maître d'ouvrage, et
demande éventuellement des études complémentaires.
Enfin, elle organise des réunions publiques, diffuse des informations
sur ces dernières dans la presse et des dossiers établissant les
positions des différents intervenants, et tient un journal du
débat public.
Ainsi, lors de la DUCSAI, près de 40 réunions publiques ont
été organisées, dont huit sur les sites pressentis pour
accueillir un nouvel aéroport. Le dossier, enrichi tout au long du
débat, comprend près de 1.500 pages. Ceci a
nécessité un important travail de mise en forme.
Il est précisé que le débat public sera animé par
une commission particulière constituée par la Commission
nationale du débat public. Cette précision a été
apportée par un amendement du rapporteur pour avis, M. Pierre Cohen,
adopté en première lecture par l'Assemblée nationale, qui
a reçu un avis favorable du Gouvernement. Tel est déjà le
cas actuellement, la DUCSAI ayant là encore constitué une
exception, puisque le président de la Commission nationale du
débat public, M. Pierre Zémor, a directement organisé le
débat public, une commission de suivi destinée à
évaluer le débat et présidée par M. Poignant,
député européen, ayant été
ultérieurement mise en place.
L'objectif étant d'atteindre une vingtaine de débats publics par
an, il est clair que
les commissions particulières ne pourront
être intégralement composées de membres de la Commission
nationale du débat public
.
Selon les informations fournies à votre rapporteur, elles devraient
comprendre de 4 à 7 personnes, des personnalités locales et, le
cas échéant, un ou plusieurs membres de la Commission nationale
du débat public, la participation de ces derniers n'étant pas
systématique. On peut regretter, dans ces conditions, que ne soient
précisés ni les critères, ni les modalités selon
lesquels les personnalités seront désignées pour
être membres de commissions particulières. Celles-ci ayant une
mission d'animation du débat public, elles auront à piloter
chacune des réunions publiques, ce qui exige de leur part une totale
indépendance.
Cependant, il faut rappeler que le texte prévu pour l'article L. 121-5
du code de l'environnement prévoit déjà des règles
strictes relatives aux incompatibilités.
* Si la
Commission nationale du débat public
peut
décider d'organiser le débat public elle-même en
créant une commission particulière, elle
peut également
décider d'en confier l'organisation au maître d'ouvrage
ou
à la personne publique responsable du projet (si le projet se situe
à un stade insuffisamment avancé pour permettre de le
déterminer).
Cette solution peut sembler assez paradoxale
.
En effet, on se retrouve clairement dans une situation dans laquelle un
mélange des genres
, qui a trop souvent été
reproché à l'Etat, est transposé au niveau du débat
public. Il est à craindre que le public doute de la
crédibilité d'un tel débat, dans lequel le maître
d'ouvrage choisirait les questions et déciderait du droit à la
parole.
Afin d'éviter une telle situation, il est uniquement prévu que la
Commission nationale du débat public définit les modalités
d'organisation du débat et veille à son bon déroulement.
La Commission nationale du débat public pourra ainsi intervenir en cours
de débat et demander au maître d'ouvrage de compléter
certaines phases ou d'apporter de nouveaux éléments
d'information.
On peut cependant douter de la portée effective d'une telle disposition,
en l'absence de pouvoir d'injonction ou de sanction de la commission, si elle
juge que l'information fournie au public est erronée ou insuffisante. La
Commission aura pour mission de veiller à ce que le droit à la
contre-expertise soit effectivement mis en oeuvre. Il lui appartiendra de
veiller à ce que les conclusions du débat soient
entièrement tirées et à ce que les interrogations
soulevées par le public reçoivent des réponses
adaptées et suffisantes. Sa fonction principale sera de veiller à
la transparence et à la sincérité du débat,
notamment au regard de la pertinence des éléments soumis au
public. Elle pourra également faire fixer par les administrations
concernées un calendrier pour instruire les dossiers.
La question de faire bénéficier la Commission nationale du
débat public d'un pouvoir d'injonction à l'encontre du
maître d'ouvrage
est complexe. Elle conduirait à faire de la
Commission nationale du débat public une instance quasi-juridictionnelle
ayant compétence pour suspendre un débat public en cours. Les
procédures, déjà longues, pourraient être
considérablement alourdies en cas de suspension d'un débat
public. Si celui-ci répond à une exigence légitime de nos
concitoyens, il doit cependant être mis en parallèle avec
l'intérêt général qui peut s'attacher au projet
soumis à débat public. Il convient de ne pas tomber dans des
excès.
En outre, pourrait se poser un problème de constitutionnalité, un
tel pouvoir pouvant être analysé comme une atteinte au principe de
libre administration des collectivités territoriales, lorsqu'elles sont
maîtres d'ouvrages.
Néanmoins, la Commission nationale du débat public n'est pas
totalement dépourvue de pouvoir.
Si un maître d'ouvrage ne prenait pas en compte les observations
émises par la Commission sur le déroulement du débat
public, il serait possible de
contester ultérieurement les
modalités d'organisation du débat devant le juge
administratif
.
En effet, il est prévu au nouvel article
L. 121-10
du code de
l'environnement qu'il revient à la Commission nationale du débat
public de publier, à l'issue du débat, un compte-rendu et d'en
dresser le bilan. Ses
observations au maître d'ouvrage devront donc
figurer dans ce bilan
.
En outre, le nouvel article
L. 121-12
du code de l'environnement dispose
que dans un délai de six mois après la publication du bilan,
le maître d'ouvrage doit décider, par un acte publié, du
principe et des conditions de la poursuite du projet
.
Selon les informations transmises à votre rapporteur, l'acte du
maître d'ouvrage serait attaquable, notamment sur le fondement du
non-respect par ce dernier des observations émises par la Commission
nationale du débat public sur le bon déroulement du débat.
Ainsi, si le débat public n'est pas organisé dans de bonnes
conditions, la possibilité serait ouverte, à l'issue de
débat public, d'en contester le déroulement.
Le gouvernement a fait le pari d'une autorité administrative
indépendante aux pouvoirs limités à une
« magistrature d'influence ».
La portée des observations faites par la Commission nationale du
débat public ne pourra être constatée que dans la
pratique
.
Le troisième alinéa du paragraphe I
du texte
proposé pour l'article L. 121-8 du code de l'environnement
prévoit que,
lorsque la commission estime qu'un débat public
n'est pas nécessaire, elle peut toutefois recommander au maître
d'ouvrage l'organisation d'une concertation selon des modalités qu'elle
propose
.
La non organisation d'un débat public n'est donc pas synonyme d'absence
de participation du public.
Là encore se pose la question de la portée juridique des
recommandations de la Commission. A priori, elle n'a aucune valeur
contraignante, puisqu'il est dit que la Commission
« propose » des modalités de concertation et qu'elle
ne fait que recommander au maître d'ouvrage ou à la personne
publique responsable du projet l'organisation d'une concertation. Cependant, il
est de l'intérêt du maître d'ouvrage de réaliser une
concertation dans de bonnes conditions, afin de prévenir des contentieux
ultérieurs qui retarderaient la réalisation du projet.
Là encore, la Commission nationale du débat public a
anticipé le présent projet de loi en recommandant l'organisation
de débats locaux sous la responsabilité du maître d'ouvrage
concernant :
- le conditionnement, l'entreposage de déchets radioactifs au
centre de Cadarache (Bouches-du-Rhône) du Commissariat à l'Energie
atomique. Neuf réunions publique sont intervenues jusqu'à la fin
novembre 2001, sous le regard d'un groupe de scrutateurs ;
- la ligne à Très haute tension Quercy blanc (Lot et
Lot-et-Garonne). Le « Réseau de transport
d'électricité » envisage un débat local et
devrait prochainement en communiquer les modalités à la
Commission nationale du débat public.
3. Principe d'une concertation continue
Le
quatrième alinéa du paragraphe I
du texte
proposé pour l'article L. 121-8 du code de l'environnement
prévoit que la commission peut émettre des
recommandations
à caractère particulier
sur la participation du public,
s'agissant de
projets dont elle a été saisie
. Ceci couvre
donc également les projets pour lesquels elle n'a pas jugé
opportun d'organiser un débat public.
Dans ce cas, ses recommandations peuvent
porter sur les modalités de
la participation du public jusqu'à la mise en oeuvre du service
.
Elles peuvent donc préciser la forme que doit prendre la concertation et
l'information du public,
au-delà de la réception des
équipements et travaux
, sur les conditions de gestion et
d'exploitation de l'aménagement ou de l'équipement. Cela revient
en pratique à recommander la création de l'équivalent des
« comités de suivi » prévus par la circulaire
dite « Bianco », et qui visent à assurer un suivi
des engagements du maître d'ouvrage.
Rappelons que l'article L. 121-1
du code de l'environnement, qui
concerne plus largement la participation du public au processus
d'élaboration de certains projets, prévoit que « le cas
échéant », la Commission nationale du débat
public veille au respect de
bonnes conditions d'information
du public
durant la phase de réalisation du projet
jusqu'à la
réception des équipements et travaux
. La présente
disposition va encore au-delà, puisqu'on parle de participation du
public et non plus seulement de son information.
Cette disposition pose problème. En effet, si on maintient un seuil
très bas comme cela semble être le cas, on risque d'aboutir en
fait à une concertation continue pour un très grand nombre de
projets, alors même que la circulaire
Bianco
s'appliquait
seulement à un nombre restreint de projets de grandes infrastructures
de l'Etat.
Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter un
amendement
de suppression de cette disposition
, le texte prévu par cet
article pour l'article L. 121-1.1 du code de l'environnement paraissant
suffisant. Il convient en effet de dissocier clairement la période de
concertation, qui intervient avant la clôture de l'enquête
publique, de la période de réalisation des travaux.
En outre ont été adoptés trois amendements
rédactionnels du rapporteur pour avis, M. Pierre Cohen.
Le paragraphe II
précise que la Commission doit se prononcer sur
la
suite à donner aux saisines (facultatives ou obligatoires) dans un
certain délai
. Le projet de loi prévoit que ce délai
sera fixé par décret.
Votre commission des Lois vous propose d'adopter un
amendement
précisant que ce délai est de deux mois, toujours dans un souci
de clarification, et afin d'éviter de rallonger inutilement la
procédure.
4. Motivation de la décision de la commission sur les suites
à donner aux saisines
A l'initiative de M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis, a été
adopté par l'Assemblée nationale un amendement tendant à
préciser d'une part, que cette
décision devait être
motivée
et, d'autre part, que la décision portait sur la
demande de débat
236(
*
)
.
Cette précision semble tout à fait utile, puisque la convention
d'Aarhus préconise une motivation, en tant que facteur de transparence.
Enfin, il est prévu qu'en l'absence de décision explicite
à l'issue de ce délai, la commission sera réputée
avoir renoncé à organiser le débat public, ou à en
confier l'organisation au maître d'ouvrage ou à la personne
publique responsable du projet.
Actuellement
, l'annexe du décret du 10 mai 1996
précité indique que
le débat public ne peut plus
être organisé à partir de la parution au Journal officiel
de la décision du ministre intéressé de prendre en
considération le projet
. Cette règle, qui implique de suivre
attentivement le Journal officiel, a été source de nombreuses
saisines irrecevables, car postérieures à la parution au Journal
officiel.
Le rappel à la règle générale devrait au
contraire permettre d'éviter de nombreux contentieux
.
5. Charge des dépenses d'organisation du débat public
Le paragraphe III
tend à clarifier le
régime des
dépenses relatives à l'organisation matérielle du
débat public
.
Actuellement, l'article 8 du décret du 10 mai 1996 prévoit que le
maître d'ouvrage prend en charge les frais d'organisation
et de
déroulement du débat public, notamment ceux relatifs à
l'élaboration et à la reproduction des documents mis à
disposition du public, aux annonces dans les journaux, aux communications
audiovisuelles et aux frais d'organisation des réunions publiques.
La règle demeure.
Néanmoins, s'agissant des indemnités attribuées aux
membres des commissions particulières
, actuellement à la
charge du maître d'ouvrage
237(
*
)
, elles sont désormais à
la charge du budget de fonctionnement de la Commission nationale du
débat public prévu à l'article L. 121-6 du code de
l'environnement par le projet de loi. En effet, il s'agit de dépenses
destinées à financer une mission de l'Etat. Cette disposition est
cependant de nature réglementaire.
Ont été adoptés, avec l'avis favorable du Gouvernement,
plusieurs amendements identiques présentés par MM. Bernard
Derosier, rapporteur et Jean-Antoine Leonetti, M. Pierre Cohen, rapporteur pour
avis et MM. Léonce Deprez, Marc-Philippe Daubresse et Philippe Marchand,
tendant à préciser que le
coût des expertises
complémentaires est à la charge de la Commission nationale du
débat public
.
Ceci paraît tout à fait logique, puisque la Commission nationale
du débat public a vocation à assurer le droit à la
contre-expertise.
Cette disposition est de nature à faciliter la mise en oeuvre de
l'expertise et à en réduire les délais et les
formalités, dès lors que le maître d'ouvrage n'en sera plus
le payeur.
Au sens des marchés publics, il est en effet illogique que le
maître d'ouvrage paie. Lorsque dans le cadre de la DUCSAI il a
été décidé de faire droit à une demande de
contre-expertise formulée par une association, la direction
générale de l'aviation civile, le maître d'ouvrage, a ainsi
dû verser une subvention à l'association qui a ensuite librement
choisi un expert.
Ont été en outre adoptés, après avoir reçu
l'avis favorable du Gouvernement, un amendement de correction matérielle
et un amendement rédactionnel présentés par M. Pierre
Cohen, rapporteur pour avis.
En outre, votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement
rédactionnel.
Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter trois amendements, puis
d'
adopter le texte proposé pour l'article L. 121-8 du code de
l'environnement ainsi modifié
.
Article L. 121-9 du code de l'environnement
Saisine de la Commission
nationale
du débat public par les
ministres
Ce
nouvel article élargit considérablement les possibilités
de saisine de la Commission nationale du débat public par les ministres.
Il vise à répondre à une disposition prévue au
dernier alinéa de l'article 7 de la convention d'Aarhus relatif à
la participation du public en ce qui concerne les plans, programmes et
politiques relatifs à l'environnement, qui stipule que
«
chaque Partie s'efforce autant qu'il convient de donner au
public la possibilité de participer à l'élaboration des
politiques relatives à l'environnement
».
Si les ministres peuvent d'ores et déjà saisir la Commission
nationale du débat public sur un projet répondant aux
critères énoncés à l'article L. 121-1 du
code de l'environnement, le
ministre de l'environnement
(qui
apparaît ainsi comme le ministre tête de file) pourra
désormais également
saisir, conjointement avec le ministre
intéressé, la Commission nationale du débat public
en
vue de l'organisation du débat public sur un dossier
« présentant des
questions générales
ou
sur les diverses options préalables à l'élaboration d'un
ou plusieurs projets d'aménagement ou d'équipement ».
Il n'est pas précisé que la Commission nationale du débat
public est tenue de donner suite à la saisine, ce qui semblerait
incompatible avec le statut d'autorité administrative
indépendante.
En pratique, les ministres pourront donc demander la tenue d'un débat
public sur des sujets tels que la politique des transports dans le massif alpin
ou la réintroduction de l'ours dans les Pyrénées.
Il s'agira de débats publics en amont de tout projet, qui devraient
permettre de fixer un cadre à l'élaboration de véritables
projets. Il s'agit de développer une réflexion à plus long
terme et non plus de répondre à une difficulté ponctuelle.
Le
débat public organisé en 2001 sur un projet de nouvel
aéroport international
était une anticipation à titre
expérimental des débats sur des questions générales
institués par cet article, puisqu'il n'entrait pas dans le champ
d'application de la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au
renforcement de la protection de l'environnement, ne portant pas sur un projet
à proprement parler, mais sur des problématiques d'implantation
d'infrastructures.
A la suite d'une lettre de mission conjointe en date du 13 février 2001
du ministre de l'équipement, des transports et du logement, et du
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement au
président de la Commission nationale du débat public a donc
été organisé le débat public par le
président de la Commission nationale du débat public, M. Pierre
Zémor, tandis qu'une commission de suivi et d'évaluation du
débat de 27 membres présidée par M. B. Poignant
était chargée d'en surveiller le déroulement.
Le débat public s'est déroulé sur six mois, d'avril
à octobre 2001, au cours desquels 37 réunions ont
été organisées, soit près de 300 heures de
débat. Plusieurs phases se sont succédé, au cours
desquelles les problématiques des besoins, du type de plate-forme, des
solutions techniques et enfin de l'implantation du site ont été
étudiées. Dans un premier temps, dix réunions se sont
tenues à Paris, puis douze dans les grandes villes régionales ou
aéroportuaires, avant la tenue de huit débats sur les sites
candidats en septembre et octobre. Le dossier, enrichi au cours du
débat, a fini par atteindre près de 1.500 pages.
Ce débat public exceptionnel a coûté 18 millions de francs,
contre 17 millions de francs pour le débat sur les transports en
1990, sachant qu'un débat « normal » de la
Commission nationale du débat public coûte entre 5 et 15
millions de francs.
Cependant, l'expérience de la DUCSAI n'a pas véritablement
été concluante. En effet, le débat était largement
biaisé, puisque le Gouvernement avait décidé de
l'opportunité de principe de réaliser un troisième
aéroport par un arbitrage du 26 octobre 2000. Néanmoins, la
question de l'opportunité a été débattue
continuellement, et a été qualifiée par certains
intervenants de «
véritable serpent de mer
».
Or, le débat public ne peut être une instance d'appel de
décisions ministérielles.
Par ailleurs, le débat a souffert d'un manque de temps en amont pour
préparer le dossier (durée nécessaire pour réaliser
l'appel d'offres pour la communication et pour l'écriture des dossiers
de base).
De plus, la Commission nationale du débat public y a joué un
rôle à la fois de garant du débat public et de conseil au
Gouvernement, ce qui a été mal perçu.
La phase de réunions sur les sites en particulier a été
marquée par le plus grand chaos, face à de violentes
manifestations de collectifs, particulièrement à Laon. Les
intervenants ont en effet dû affronter la colère de ceux que l'on
plaçait par anticipation en situation de riverains, alors même si
seul un site serait finalement choisi. En effet, il parait
très
difficile de faire comprendre aux riverains potentiels qu'il ne s'agit pas
d'une enquête publique, que ce débat se situe très en amont
et que, par conséquent, il n'y a pas encore de dossier très
précis
.
Ainsi, lors du référendum local du 9 décembre dernier
(déclaré illégal par le préfet), 91,42% des
habitants des 46 communes de Picardie concernées par le projet de
construction du troisième aéroport parisien à Chaulnes
(Somme) ont refusé ce projet.
La participation s'est élevée à 61,78%, ce qui montre
qu'un tel débat public sur des questions générales n'est
pas opératoire.
Il revient au Parlement et au Gouvernement de se saisir de telles questions.
Cette expérience ayant révélé de graves
difficultés intrinsèques et structurelles, votre commission des
Lois vous propose donc d'adopter un
amendement
tendant à
supprimer le texte prévu pour l'article L. 121-9 du code de
l'environnement
.
Article L. 121-10 du code de l'environnement
Durée maximale du
débat public -
bilan et compte rendu
Actuellement, l'article 6 du décret du 10 mai 1996
prévoit que le débat public ne peut avoir une durée
supérieure à quatre mois, ce délai pouvant cependant, par
décision motivée de la Commission nationale du débat
public, être prolongé pour une durée maximum de deux mois
en cas d'expertise complémentaire.
Le projet de loi
maintient ce délai de quatre mois ainsi que la
possibilité de le proroger de deux mois. Cependant, cette prolongation
n'est plus conditionnée
au recours à des expertises
complémentaires.
En effet, un délai de 4 mois peut être trop court s'agissant de
projets donnant lieu à une participation massive du public. Ainsi,
l'expérience de la DUCSAI a montré qu'il fallait
particulièrement préparer la tenue des réunions publiques,
et qu'un travail important d'information préalable de la population
était nécessaire avant de pouvoir véritablement envisager
d'entamer le débat public de façon constructive.
Par ailleurs, le
deuxième alinéa
du texte prévu
pour cet article précise que, dans le cas où la Commission
nationale du débat public demande au maître d'ouvrage de
compléter le dossier soumis au public, le
délai
de 4 mois
(voire de 6 mois)
ne court qu'à compter de la constitution du dossier
complet
par le maître d'ouvrage. Ceci doit permettre d'avoir un
débat public effectif, le public étant correctement
informé des enjeux, grâce au dépôt de demandes de
renseignements complémentaires.
Cette précision résulte de l'adoption par l'Assemblée
nationale avec l'avis favorable du Gouvernement de deux amendements identiques
présentés par MM. Pierre Cohen, rapporteur pour avis et Philippe
Marchand, ainsi que par MM. Philippe Marchand, André Aschieri, Yves
Cochet, Noël Mamère et Mme Marie-Hélène Aubert, du
groupe radical, citoyen et vert.
Votre commission des Lois vous propose d'adopter un
amendement tendant
à fixer avec précision le commencement du débat
public
, en prévoyant que la Commission nationale du débat
public établit et publie le calendrier de déroulement du
débat public. Par ailleurs, il précise que
le débat
public ne peut être prolongé que par une décision
motivée de la Commission nationale du débat public. Il
prévoit en outre que le délai ne court, lorsque la Commission
nationale du débat public a demandé au maître d'ouvrage de
compléter le dossier, qu'à compter de la réception du
dossier complet par la Commission nationale du débat public
.
Le
troisième alinéa
du texte prévu pour l'article
L. 121-10 du code de l'environnement dispose ensuite que le
président
de la Commission nationale du débat public publie un compte-rendu du
débat et en dresse le bilan dans les trois mois à compter de la
date de clôture du débat public
.
Le projet de loi prévoyait simplement que le bilan devait intervenir
à l'issue du débat, renvoyant le délai exact à un
décret. Cependant, un amendement présenté par M. Pierre
Cohen, rapporteur pour avis, et adopté avec l'avis favorable du
Gouvernement, a repris les dispositions de l'article 7 du décret du 10
mai 1996, qui enserrent ces actes dans les trois mois à compter de la
date de clôture du débat public.
L'imposition d'un délai semble indispensable afin d'éviter de
bloquer ou de retarder les procédures ultérieures du débat
public. En effet, la publication du compte rendu et du bilan n'est pas
dépourvue de portée juridique, puisque l'ouverture de
l'enquête publique y est subordonnée.
Ce délai a été respecté pour la publication du
compte-rendu et du bilan des débats sur les projets du port du Havre et
de la ligne à très haute tension entre Boutre et Carros. En
revanche, il a fallu plus de 4 mois pour publier ces deux documents s'agissant
de l'autoroute A 32 et du TGV Rhin-Rhône branche sud (la fin du
débat ayant coïncidé avec la période estivale).
Le compte-rendu du débat sera rédigé soit par une
commission particulière désignée à cet effet si la
Commission nationale du débat public a décidé d'organiser
elle-même le débat, soit par le maître d'ouvrage si la
Commission nationale du débat public lui a délégué
l'organisation du débat.
Le bilan est établi par le président de la Commission nationale
du débat public. Il s'agit uniquement d'un bilan de forme. Il
apparaît par conséquent, de l'avis même du président
de la Commission nationale du débat public, que ce délai pourrait
être réduit à deux mois, la Commission nationale du
débat public devant voir ses moyens en personnel fortement
étoffés. Votre commission des Lois vous propose donc un
amendement en ce sens.
En outre, votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement
rédactionnel.
En définitive, votre commission des Lois vous propose d'adopter
trois
amendements
, puis d'
adopter le texte prévu pour l'article L.
121-10 du code l'environnement ainsi modifié
.
Article L. 121-11 du code de l'environnement
Date d'ouverture de
l'enquête publique
Cet
article précise expressément que
l'enquête publique ne
peut intervenir qu'après la fin du débat public.
Il s'agit de
s'assurer que toutes les questions soulevées lors du débat public
pourront être prises en compte lors de l'enquête publique, qui
cette fois-ci, doit se prononcer sur le fond du projet.
Actuellement, il n'existe pas de disposition énonçant
expressément cette règle de bon sens. L'article 7 du
décret du 10 mai 1996 indique simplement que le compte-rendu et le bilan
sont mis à disposition du commissaire enquêteur ou de la
commission d'enquête lors des enquêtes publiques. Cependant, il
n'est pas précisé à quel moment de l'enquête
publique cette remise intervient.
Le projet de loi précise donc la
règle
d'antériorité du débat public sur l'enquête
publique.
Ceci concerne les projets ayant donné lieu à saisine obligatoire
ou facultative de la Commission nationale du débat public.
L'ouverture de l'enquête publique ne peut être
décidée qu'à compter
:
- soit
de la date à partir de laquelle un débat public ne
peut plus être organisé
(c'est à dire à
l'expiration du délai de deux mois après la saisine de la
Commission nationale du débat public si elle ne se prononce pas
explicitement sur l'organisation du débat) ;
- soit de
la date de publication du bilan
;
- soit à l'expiration du délai de trois mois (deux mois
selon votre commission) fixé précédemment pour publier le
compte-rendu et le bilan.
Cette précision vise à ne pas entraver la suite des
opérations et résulte d'un amendement présenté par
M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis, et adopté avec l'avis favorable
du Gouvernement à l'Assemblée nationale.
L
'ouverture de l'enquête publique devra intervenir au plus tard cinq
ans après ces dates
. Au-delà de ce délai, l'avis de la
commission sera sollicité avant de pouvoir ouvrir l'enquête
publique.
Ceci résulte de l'adoption par l'Assemblée nationale avec l'avis
favorable du Gouvernement d'un amendement présenté par MM.
Philippe Marchand, André Aschieri, Yves Cochet, Noël Mamère
et Mme Marie-Hélène Aubert du groupe radical, citoyen et vert.
Cette disposition vise à
éviter que des projets ne soient trop
modifiés entre la clôture du débat public et l'ouverture de
l'enquête publique
.
M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis, a indiqué qu'après
discussion, il était apparu à la commission opportun de ne pas
laisser indéfiniment le débat public en suspens, pour
éviter qu'une opération ne soit réalisée à
un moment où elle ne serait plus en concordance avec le débat, et
que le délai fixé paraissait raisonnable, étant
donné que les autorisations de police spéciale et la mise en
place des éléments nécessaires à la
réalisation de l'enquête publique nécessitaient
déjà plus de deux ans.
Cette disposition, bien que justifiée, pose des difficultés
pratiques.
Tout d'abord, un délai de cinq ans ne semble pas exorbitant s'agissant
d'un projet d'infrastructure. Un projet routier nécessite ainsi
après le débat public des concertations plus techniques
s'agissant de la faune, de la flore (celles-ci devant être menées
pendant les quatre saisons), des reconnaissances archéologiques et
autres études.
De plus, tel qu'est actuellement rédigé le texte, rien n'interdit
à la Commission nationale du débat public d'exiger, cinq ans
après un premier débat, d'en organiser un second, sur des motifs
qui ne sont pas précisés dans le texte. La procédure de
débat public pourrait alors se transformer en procédure
dilatoire. On peut même envisager qu'un projet n'ayant pas
substantiellement changé en cinq ans, mais ayant vocation à
être inséré dans un environnement économique, social
ou naturel modifié nécessite un nouveau débat. Or, il est
pratiquement certain que l'environnement aura changé, la
réalisation d'un projet se faisant sur le moyen terme.
Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter un
amendement
encadrant cette disposition, en prévoyant que
la Commission
nationale du débat public ne peut décider de rouvrir un
débat public que si l'économie générale du projet a
été altérée
.
Votre commission des Lois vous propose d'adopter cet article
ainsi
modifié
.
Article L. 121-12 du code de l'environnement
Décision prise par le
maître d'ouvrage de poursuivre le projet
Cet
article vise à
remédier aux critiques visant l'après
débat public
. En effet, il arrive fréquemment que des
études complémentaires soient décidées après
la fin du débat public, et que leur prise en compte conduise à
l'adoption de modifications, parfois importantes, par rapport à ce qui
était exposé.
Les populations ont alors un sentiment de frustration, lorsqu'après
avoir été abondamment informées, elles découvrent
plusieurs mois plus tard un projet totalement bouleversé.
Le projet de loi oblige donc désormais le maître d'ouvrage (ou,
à défaut, la personne publique responsable du projet) à
rendre publiques, dans un délai de six mois après la publication
du bilan du débat public, sa décision de poursuivre ou non le
projet, ainsi que les modalités de cette poursuite et les modifications
éventuellement apportées au projet
.
Le maître d'ouvrage a intérêt à prendre et à
publier la décision post-débat public afin de purger le
contentieux de légalité externe au plus tôt et de rompre
ainsi avec la théorie des opérations complexes. S'il ne le fait
pas, la déclaration d'utilité publique pourra être
annulée en aval, au motif de l'absence de cette décision et/ou en
invoquant l'exception d'illégalité à l'encontre d'actes
irréguliers relatifs au débat en amont.
Il s'agit de responsabiliser le maître d'ouvrage. De plus, cet acte
pourrait emporter des conséquences juridiques et permettre au juge
administratif de vérifier si le maître d'ouvrage a bien tenu
compte des observations formulées par la Commission nationale du
débat public ou la commission particulière ayant suivi le projet.
Afin d'assurer la plus grande transparence, cet acte est publié et
transmis la Commission nationale du débat public. Il est donc attaquable
dans les deux mois de cette publication dans le cadre d'un recours pour
excès de pouvoir.
En outre, le
deuxième alinéa
de cet article prévoit
lorsque le maître d'ouvrage ou la personne publique responsable du projet
est une
collectivité territoriale
, cet acte donne lieu à
une
délibération
, toujours dans un objectif de
responsabilisation du maître d'ouvrage.
Il apparaît en effet normal que le public soit dûment
informé des suites du débat public.
Le délai de six mois prévu pour que le maître d'ouvrage
publie sa décision de poursuivre le projet semble excessif. Votre
commission des Lois vous propose donc d'adopter un
amendement
le
réduisant à trois mois.
En outre, votre commission des Lois vous propose d'adopter un amendement
rédactionnel.
Votre commission des Lois vous propose donc d'
adopter deux amendements
,
puis d'
adopter le texte prévu pour l'article L. 121-12 du code de
l'environnement ainsi modifié.
Article L. 121-13 du code de l'environnement
Forclusion du délai de
recours à l'encontre
d'irrégularités de la
procédure de débat
public
Le
présent projet de loi vise à réduire le risque contentieux
par une plus grande participation du public, en désamorçant en
amont les difficultés
.
Le rapport du Conseil d'Etat avait indiqué qu'un consensus existait pour
affirmer que les limites en matière de complexité étaient
atteintes, et qu'il ne pouvait être question d'augmenter encore les
risques d'annulation pour vice de procédure.
Par conséquent, cet article indique les
règles de forclusion
des délais de recours à l'encontre de la procédure de
débat public, afin d'assurer une sécurité juridique aux
actes intervenant ultérieurement
.
Ainsi,
aucune irrégularité relative à la
procédure de débat public ne peut être
invoquée
:
-
lorsque l'acte par lequel la Commission nationale du débat
public a renoncé à organiser un débat public
(elle-même ou par l'entremise du maître d'ouvrage)
est devenu
définitif
, c'est à dire deux mois à compter de la date
à laquelle la Commission nationale du débat public a
renoncé au débat public (soit deux mois à compter de sa
décision explicite, soit deux mois à compter de sa
décision implicite, c'est à dire en tout quatre mois après
sa saisine) ;
-
lorsque l'acte par lequel le maître d'ouvrage décide de
la poursuite du projet après la fin du débat public est devenu
définitif
;
. si le maître d'ouvrage est une personne publique, l'acte devient
définitif à l'expiration d'un délai de deux mois à
compter de sa publication ;
. si le maître d'ouvrage est une personne privée, un recours
devant le juge civil reste ouvert si l'acte a causé un dommage à
autrui. A cette occasion, le requérant peut demander au juge de
constater la nullité de l'acte pour non conformité aux lois et
règlements.
Cette décision pourra faire l'objet d'un recours pour excès de
pouvoir mais ne pourra être ultérieurement contestée par la
voie de l'exception d'illégalité après l'expiration du
délai de recours contentieux.
A ensuite été adopté avec l'avis favorable du Gouvernement
par l'Assemblée nationale un amendement rédactionnel
présenté par M. Pierre Cohen, rapporteur pour avis.
Cette disposition revêt une importance considérable. Reste
cependant l'hypothèse d'un projet dont le maître d'ouvrage est une
personne privée.
Votre commission des Lois vous propose d'
adopter le texte prévu pour
l'article L. 121-13 du code de l'environnement ainsi modifié
.
Article L. 121-14 du code de l'environnement
Décret en Conseil
d'Etat
Cet
article prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat précisera
les conditions d'application du chapitre Ier du titre II du livre Ier du code
de l'environnement.
En première lecture à l'Assemblée nationale a
été adopté un amendement présenté par M.
Pierre Cohen, rapporteur pour avis, avec l'avis favorable du Gouvernement,
tendant à supprimer des dispositions que ce décret devait
« notamment » prendre, au motif que cette précision
était sans portée normative, précision à laquelle
votre rapporteur ne peut que souscrire.
Ce décret définira essentiellement la listes des
catégories de projets d'équipement ou d'aménagement soumis
à débat public.
Votre commission des Lois vous propose d'
adopter le texte prévu pour
l'article L. 121-14 du code de l'environnement sans modification
.