N° 243

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès-verbal de la séance du 19 février 2002

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur la proposition de loi, ADOPTÉE AVEC MODIFICATIONS PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN NOUVELLE LECTURE, portant rénovation des rapports conventionnels entre les professions de santé libérales et les organismes d'assurance maladie ,

Par M. Alain VASSELLE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About, président ; MM. Alain Gournac, Louis Souvet, Gilbert Chabroux, Jean-Louis Lorrain, Roland Muzeau, Georges Mouly, vice-présidents ; M. Paul Blanc, Mmes Annick Bocandé, Claire-Lise Campion, M. Jean-Marc Juilhard, secrétaires ; MM. Henri d'Attilio, Gilbert Barbier, Joël Billard, Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Jean Chérioux, Mme Michelle Demessine, M. Gérard Dériot, Mme Sylvie Desmarescaux, MM. Claude Domeizel, Michel Esneu, Jean-Claude Étienne, Guy Fischer, Jean-Pierre Fourcade, Serge Franchis, Francis Giraud, Jean-Pierre Godefroy, Mme Françoise Henneron, MM. Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, André Lardeux, Dominique Larifla, Jean-René Lecerf, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Mme Valérie Létard, MM. Jean Louis Masson, Serge Mathieu, Mmes Nelly Olin, Anne-Marie Payet, M. André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Gérard Roujas, Mmes Janine Rozier, Michèle San Vicente, MM. Bernard Seillier, André Vantomme, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vézinhet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : Première lecture : 3520 , 3524 et T.A. 758

Commission mixte paritaire : 3590

Nouvelle lecture : 3585 , 3591 et T.A. 786

Sénat : Première lecture : 171 et T.A. 56 (2001-2002)

Commission mixte paritaire : 222 (2001-2002)

Nouvelle lecture : 226 (2001-2002)

Sécurité sociale

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Réunie le 12 février 2002 au Sénat, la commission mixte paritaire n'est pas parvenue à un accord sur la proposition de loi portant rénovation des rapports conventionnels entre les professions de santé libérales et les organismes d'assurance maladie.

Ce résultat était attendu : le rejet de cette proposition par le Sénat en première lecture le 7 février laissait difficilement augurer d'une position commune sur ce texte.

Examinant cette proposition de loi en nouvelle lecture, le 12 février 2002, l'Assemblée nationale a rétabli son texte de première lecture, modifié à la marge par deux amendements présentés par le Gouvernement.

Ces modifications apportées en nouvelle lecture ne changent en rien l'économie de ce texte et les critiques que votre commission avait formulées en première lecture conservent dès lors toute leur pertinence.

Votre commission persiste à penser que cette proposition de loi relève d'une gesticulation politique sans lendemain et vise avant tout à masquer les échecs et l'impuissance du Gouvernement en matière d'assurance maladie et de santé.

Elle vous propose en conséquence d'adopter une motion tendant à opposer la question préalable à la proposition de loi telle que rétablie par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture.

I. UN SYSTÈME DE SANTÉ EN CRISE

Notre système de santé traverse aujourd'hui une crise profonde et paradoxale.

Paradoxale, parce que notre système est bon : l'Organisation mondiale de la santé l'a récemment classé au premier rang mondial.

Profonde, parce que de fortes inquiétudes se font jour qui s'étendent, au-delà des professions de santé, à l'ensemble des Français.

Notre système de santé traverse aujourd'hui une crise de confiance, qui révèle un profond désarroi des professionnels de santé. De nouveaux mouvements revendicatifs naissent chaque jour dans le monde de la santé, des grèves s'installent, qui touchent autant les soins de ville que les établissements de santé.

En prenant ses fonctions en 1997, le Gouvernement disposait :

- d'un instrument, les lois de financement de la sécurité sociale, résultant de la réforme constitutionnelle et organique de 1996,

- et d'un principe posé par la loi de 1994, celui de la séparation des branches de sécurité sociale et de la compensation intégrale à la sécurité sociale des exonérations de cotisations décidées par l'Etat.

Or, cet instrument, le Gouvernement l'a progressivement dévoyé ; ce principe, il l'a constamment violé.

Depuis 1997, le Parlement vote un objectif national de dépenses d'assurance maladie. Or, cet objectif, chaque année dérive, avant d'être « rebasé » pour mieux dériver à nouveau. En 2001, les dépenses du régime général ont ainsi progressé de 6 % alors que l'objectif voté par le Parlement n'était que de 3,5 %.

Une telle dérive n'a rien d'étonnant car le Gouvernement n'a pas su ou n'a pas voulu donner à cet objectif un contenu en santé publique. L'ONDAM ne traduit aucune priorité de santé publique et ne repose sur aucune évaluation des besoins en santé de la population. Tout au plus est-il une indexation nécessairement contestée des moyens qui permettent de faire « tourner le système » cahin-caha.

Une telle dérive n'a rien d'étonnant car il est traditionnel, désormais, qu'au mois de mars au plus tard, cette année dès le mois de janvier, le Gouvernement, qui a demandé au Parlement de voter solennellement ce fameux ONDAM au mois de décembre, entame dans l'urgence des négociations, conclut des protocoles ou des avenants et ouvre des dépenses nouvelles ici ou là.

De fait, on n'a guère entendu, lors des négociations avec les médecins généralistes, évoquer l'objectif de dépenses voté par le Parlement qui aurait été une contrainte pour les négociateurs.

En réalité, dès lors que l'instrument ne fonctionne plus, dès lors que les principes ne sont pas respectés, quelles peuvent être les bases d'une négociation entre les pouvoirs publics et les professionnels ? Sur quels fondements s'opposer aux demandes légitimes des généralistes ?

Naturellement pas sur les déficits persistants de l'assurance maladie (14,7 milliards de francs en 1998, 4,8 milliards en 1999, 17,2 milliards en 2000 et 13,3 milliards en 2001) puisque le Gouvernement, lors de la loi de financement pour 2002, les a lui-même creusés.

L'assurance maladie, qui constitue la branche déficitaire par excellence, s'est vu ainsi ponctionnée à un double titre pour assurer le financement des « trente-cinq heures » : d'une part, pour contribuer au financement du Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC), d'autre part, pour assumer la charge des emplois créés au titre de la réduction du temps de travail dans les hôpitaux.

Cette politique, creusant les déficits de la branche maladie et alourdissant son endettement, demeure incompréhensible et rend illusoire toute action tendant à demander un quelconque effort de maîtrise des équilibres aux différents acteurs de notre système de santé.

Dès lors qu'il y a cette hémorragie financière programmée dans notre système d'assurance maladie, cette confusion organisée des caisses de sécurité sociale et des caisses de l'Etat, comment responsabiliser les partenaires sociaux, les assurés et les professionnels de santé ? A quel titre le Gouvernement peut-il prétendre leur demander la rigueur et la vigilance qui sont pourtant le prix de la préservation des fondements sur lesquels repose notre système de soins ?

Pourquoi les professionnels de santé signeraient-ils des conventions si les efforts consentis, le redressement des comptes attendu, n'ont pour seul effet que de permettre d'opérer des prélèvements supplémentaires ?

La théorie pernicieuse des prétendus retours pour les finances sociales de la politique des trente-cinq heures et la multiplication des tuyauteries financières entre les branches de la sécurité sociale déresponsabilisent l'ensemble des acteurs et conduisent le système à la faillite. Pourtant, les principes posés en 1994 avaient précisément pour objet de s'opposer à cette confusion en clarifiant les responsabilités de chacun.

Le bilan de cette législature apparaît en définitive désastreux : le monde de la santé est en ébullition permanente ; privée de pilote, l'assurance maladie est devenue parallèlement une sorte de bateau ivre, livré à lui-même.

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