B. L'ACTION IMPORTANTE DE LA FRANCE POUR CONTRÔLER LA PÊCHE EN HAUTE MER

La France est directement concernée par la pêche illégale, à la fois en haute mer et dans les zones sous sa juridiction.

S'agissant de la pêche en haute mer ou dans les mers semi-fermées dans lesquelles le régime juridique est celui de la haute mer (Méditerranée), la France agit essentiellement dans le cadre de l'Union européenne, qui dispose d'une compétence exclusive en matière de pêche, y compris en ce qui concerne les relations internationales. Ainsi, elle a proposé et soutenu la mise en place de mesures concernant le contrôle au sein des organisations régionales de pêche. Plus récemment, elle a soutenu la mise en place de mesures de suivi des échanges commerciaux de certaines espèces et la prise de sanctions commerciales contre les Etats impliqués dans la pêche illégale.

Les espèces concernées sont principalement les thonidés (stocks de poissons grands migrateurs), dans l'Atlantique, la Méditerranée et l'océan indien, et les espèces profondes dans l'Atlantique du nord est. En particulier, au sein de la commission des pêches de l'Atlantique du nord est (CPANE) et dans le cadre de l'application par l'Union européenne du programme multilatéral de contrôle des activités en haute mer, la France réalise des inspections de navires de Parties contractantes de la CPANE (Danemark au titre du Groenland et des Iles Feroé, Islande, Norvège, Pologne, Russie, UE).

S'agissant des zones sous sa juridiction, la France est confrontée à une pêche illégale importante dans ses départements et territoires d'outre-mer. Etant donné l'immensité de la zone économique exclusive française, il est extrêmement difficile de la contrecarrer. La pêche illégale y est pratiquée par des navires non autorisés, battant pavillon de complaisance.

La France mène une action reposant sur les contrôles en mer et sur les démarches diplomatiques auprès des Etats impliqués et au sein des organisations régionales de pêche compétentes.

Parmi les espèces concernées dans les stocks chevauchants et les grands migrateurs, il faut citer en particulier les espèces à forte valeur ajoutée comme la légine dans les terres australes et antarctiques françaises (TAAF), qui est un stock chevauchant. En ce qui concerne les TAAF, les principales difficultés sont liées à l'étendue des zones considérées (plus de 1,6 million de km 2 ), à leur éloignement des bases françaises. La ressource de pêche y apparaît plus que jamais fragile et nécessite un contrôle strict de l'effort de pêche, en limitant le nombre de navires exploitant la zone.

Le principal problème est celui de la pêche illégale, pratiquée à grande échelle dans les zones économiques exclusives des TAAF, de l'Australie (Heard, limitrophe de Kerguelen), et d'Afrique du sud. L'ampleur des prélèvements illégaux de légine (estimés à plus de 10 000 tonnes/an en 2000 et 2001) nuit directement aux intérêts français, en diminuant les opportunités de pêche des armements français et en mettant en péril la conservation du stock.

La surveillance et le contrôle sont donc un élément essentiel de l'action de la France dans ces zones. Elle se heurte à l'étendue des zones considérées (plus de 1,6 million de km 2 ) et à leur éloignement des bases françaises. Vingt et un navires, battant notamment pavillon de Bélize, de l'Argentine, du Chili, du Panama, du Portugal, des Seychelles, de Sao Tomé ont été arraisonnés en 1997, 1998, 1999, 2000 et 2001 par des bâtiments de la Marine nationale et déroutés sur la Réunion. Ces navires sont souvent liés à des intérêts espagnols (capitaines et armements), ce qui alimente le ressentiment des armements à l'égard de l'Espagne, accusée d'être complice des comportements illégaux de ses ressortissants.

Certains de ces navires ont été relâchés après jugement et paiement d'une amende ou d'une caution, d'autres ont été détruits (en l'absence de réclamation du navire par l'armateur). Les cautions demandées pour obtenir la mainlevée des navires saisis sont beaucoup plus élevées que par le passé et les jugements en première instance sont également bien plus dissuasifs que précédemment (jusqu'à 20 millions de francs d'amendes depuis 1998 contre 400 000 francs en 1997).

Néanmoins, dans le cas de l'arraisonnement d'un navire battant pavillon du Panama, le « Camouco », la France a été traînée devant le Tribunal international du droit de la mer, situé à Hambourg. Celui-ci a finalement ramené le montant de la caution de 20 millions de francs (montant initialement fixé par les autorités françaises) à 8 millions de francs, par une décision rendue le 7 février 2000. Depuis le résultat de cette procédure, la France a été traînée à deux reprises devant le Tribunal de Hambourg pour deux arraisonnements dans les TAAF. Le tribunal a rendu un avis dans le même sens que celui du Camouco dans le cas du navire « Monte Confurco », battant pavillon des Seychelles, en diminuant le montant de la caution exigée par la France (décision du 18 décembre 2000) et un avis dans lequel le tribunal s'est déclaré incompétent, pour le cas du navire « Grand Prince », battant pavillon Bélize (décision du 20 avril 2001).

Dans ce contexte, la France entreprend aussi des actions au plan international. Le premier axe est la coopération régionale au sein de la Commission pour la conservation de la faune et de la flore marine de l'Antarctique (CCAMLR en anglais). Notre pays a activement participé à l'élaboration d'un schéma de documentation des captures de légine, en vigueur depuis le 4 mai 2000. Cette mesure encadre les échanges commerciaux de légine en demandant aux pays importateurs de vérifier la présence d'un certificat attestant l'origine légale des captures. Ce certificat est établi par l'Etat du pavillon du navire qui a réalisé les captures, et validé ensuite par les Etats de débarquements et d'importation. L'absence du certificat d'origine doit entraîner un contrôle de la marchandise, contrôle pouvant mener au refus de l'entrée de ce produit sur le territoire importateur.

Les principaux Etats importateurs de légine (Etats-Unis, Japon) sont membres de la CCAMLR et se sont engagés à appliquer cette mesure. Une application rigoureuse de ce schéma doit mener, à terme, au refus de tout achat de légine à partir des débarquements de navires battant pavillon de complaisance et débarquant à l'Ile Maurice, qui ne peuvent se prévaloir de ces certificats. A l'initiative de la France, de l'Australie et de l'Afrique du sud, le dispositif de la CCAMLR a été renforcé lors de sa dernière réunion annuelle, pour lutter contre l'utilisation frauduleuse des certificats CCAMLR.

En effet, certains Etats (Uruguay, Seychelles, Russie) déclarent un montant invraisemblable de captures dans l'Océan Indien (zone FAO 51), alors que la légine n'est pas présente ou très peu dans cette zone, selon tous les avis scientifiques et les conclusions de la CCAMLR. Cet artifice leur permet de valider des certificats de captures frauduleux et de bénéficier ainsi d'un accès au marché, avec un prix maximum, en toute impunité. Sur proposition de la France, les mesures de la CCAMLR demandent à tous les Etats concernés (membres et coopérants) d'autoriser uniquement les débarquements dans le cas de navires équipés de VMS, et de se préparer à avoir recours aux mesures d'interdiction d'importation de légine en provenance de certains pays (cette question devant être débattue en 2002).

Sur ces bases, la France entreprend régulièrement des démarches auprès de Maurice, qui est le principal port de débarquement des navires illégaux. L'Ile Maurice, avec l'Espagne, est ainsi la principale source de ressentiment des armateurs de la Réunion. Cependant, au contraire des autorités espagnoles, qui ne peuvent être tenues responsables des activités de leurs ressortissants, les autorités mauriciennes adoptent une attitude ambiguë et refusent, pour le moment, de s'engager dans une lutte efficace contre la pêche illégale. En effet, l'Ile Maurice n'étant pas membre de la CCAMLR, elle n'est pas soumise aux mesures de lutte contre la pêche illégale édictées par celle-ci, et refuse d'agir en respectant son obligation de coopération internationale. La France a entrepris, jusqu'ici sans succès, de négocier avec l'Ile Maurice un accord de coopération dans le domaine de la lutte contre la pêche illégale. Ces négociations devraient reprendre rapidement.

La France coopère aussi avec les pays disposant de territoires dans l'Antarctique, voisins de Kerguelen et de Crozet et rencontrant le même problème, principalement l'Australie et l'Afrique du sud. Cette coopération repose sur l'échange d'informations entre les marines nationales, notamment sur la situation des bâtiments de contrôle, le trafic des navires marchands de pêche. Les dernières informations permettent de confirmer le grand intérêt de l'Australie pour une coopération en la matière entre nos deux pays, et un traité est en cours de négociation sur ce sujet (un navire australien avait effectué une mission dans les eaux françaises en 1998).

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