III. LE BUDGET DU TRAVAIL OFFRE UNE VISION DE PLUS EN PLUS PARTIELLE DE LA POLITIQUE DE L'EMPLOI

Le budget du travail a subi, ces dernières années, de multiples modifications de son périmètre qui en ont fortement restreint la cohérence et qui nécessitent de procéder à un calcul consolidé, afin d'avoir une vision satisfaisante du coût de la politique de l'emploi .

A. LA QUASI-DISPARITION DE LA COMPENSATION DES EXONÉRATIONS DE CHARGES SOCIALES DU BUDGET DU TRAVAIL

La politique d'allègement des charges sociales, pesant en particulier sur les emplois peu qualifiés, a connu une montée en charge progressive, notamment à partir de la mise en place, en 1993, de la ristourne dégressive sur les bas salaires, (« ristourne Juppé »).

Dans un premier temps, la compensation par le budget de l'Etat de ces exonérations de cotisations sociales a été à l'origine de la croissance du budget du travail, passé de 12,87 milliards d'euros en 1993 à 22,93 milliards d'euros en 1997, soit une progression de 78,2 % en quatre ans. Au cours de la même période, en effet, le montant des exonérations de cotisations sociales compensées est passé de 1,84 milliard d'euros à 10,17 milliards d'euros. Logiquement, une part croissante des crédits inscrits au budget du travail était consacrée au financement de ces compensations d'exonérations de charges sociales, de 14,3 % en 1993 à 44,4 % en 1997.

Toutefois, la politique de réduction du temps de travail décidée par le précédent Gouvernement à partir de 1997 a conduit ce dernier à procéder à de multiples modifications du périmètre du budget du travail.

Certes, la première, intervenue en loi de finances initiale pour 1999, allait dans le bon sens, puisqu'elle consistait en un transfert des crédits finançant la « ristourne Juppé », soit environ 6,10 milliards d'euros (40 milliards de francs), du budget des charges communes vers le budget du travail.

Mais en 2000, la création du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC) destiné à compenser aux régimes de base de sécurité sociale les pertes de cotisations liées aux mesures générales d'allégements de charges portant sur les bas salaires et la réduction du temps de travail, s'est traduite par une débudgétisation massive, le budget du travail se voyant priver, au profit du FOREC, des crédits destinés à compenser les exonérations de cotisations sociales. Jusqu'en 2002, cette orientation a été systématisée.

Le graphique suivant rend compte de ces dernières évolutions.

Cette orientation est confirmée en 2003, car le FOREC est appelé à prendre en charge le dispositif unifié de compensation d'exonération de charges sociales programmé par la « loi Fillon ».

Dès lors, le montant du budget du travail poursuit sa diminution, sans rendre compte de la politique d'exonérations générales sur les bas salaires , qui est devenue la principale politique de l'emploi.

En effet, le coût des allègements de charges financés par le FOREC en 2003 s'élèvera à 16,56 milliards d'euros, soit un montant pour la première fois supérieur à celui prévu pour le budget du travail (15,72 milliards d'euros).

Alors que la compensation des exonérations de charges représentait 38,5 % des crédits du budget du travail en 1999 , elle n'en représente plus que 15,8 % en 2002 , et 14,6 % en 2003 , le tableau suivant rendant compte de cette dernière évolution.

EXONERATIONS DE COTISATIONS PRISES EN CHARGE PAR LE BUDGET DU TRAVAIL

En milliers d'euros

2002 (2 )

LFI 2003

évolution

2003 / 2002

Contrats d'apprentissage

824 750

814 520

-1,24%

Contrats de qualification - jeunes

423 700

411 980

-2,77%

Contrats de qualification - adultes

31 710

3 200

-89,91%

Contrats initiative-emploi (CIE)

427 920

142 000

-66,82%

Insertion par l'économique

57 920

42 230

-27,09%

Contrats de retour à l'emploi (CRE)

9 910

9 910

0,00%

Exonérations relevant le la promotion de l'emploi (agrégat 04) (1) (2)

901 850

873 630

-3,13%

Total des exonérations

2 677 760

2 297 470

-14,20%

Budget du Travail (2)

16 923 779

15 718 993

-7,12%

Part des exonérations dans le budget du travail

15,82%

14,62%

-7,63%

(1) cf tableau figurant au B du IV

(2) compte tenu de la part de l'ajustement opéré en loi de finances rectificative pour 2002 correspondant à un ajustement aux besoins (170 M€)

La récente annonce gouvernementale de la suppression du FOREC, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2004, porte, entre autres espoirs, celui du retour à une plus grande lisibilité de la politique de l'emploi.