Annexe 22 - LE GUIDE DE L'ADEME SUR L'INCIDENCE DES DÉCHARGES SUR LA QUALITÉ DE L'EAU

Source : Mme Dominique DARMENDRAIL, BRGM Orléans, M. Denis N'GUYEN, BRGM Montpellier (Audition du 20 mars 2002) - Commentaire OPECST

A la suite de la loi du 13 juillet 1992 imposant la fermeture et la remise en état des décharges brutes à l'échéance 2002, un recensement des décharges a été réalisé. Un premier recensement, en 1994, dénombrait 5 667 décharges, dont près de 80 % étaient des décharges non autorisées. Des enquêtes plus poussées ont montré que la plupart des estimations initiales transmises par les services de l'État dans les départements étaient optimistes. Le nombre de décharges brutes est aujourd'hui estimé par le Ministère de l'Industrie entre 9.000 et 12.000. Ce chiffre ne tient pas compte des dépôts sauvages estimés à 25.000.

Beaucoup de ces décharges présentent des risques potentiels pour l'environnement et la santé : déchets de bricolage (peintures), déchets toxiques en quantité dispersée, pouvant libérer des éléments toxiques par accumulation, etc... Ces risques étant évidemment renforcés lorsque ces décharges et dépôts sauvages se situent sur des zones sensibles ou à risques (bords de rivières, zones inondables, etc.).

En 1996, l'ADEME publiait un guide méthodologique pour la remise en état des décharges d'ordures ménagères, permettant d'évaluer les impacts environnementaux des décharges et de les classer en fonction de la gravité des situations observées.

Cette méthodologie repose sur un diagnostic établi par une méthode simple, accessible à la plupart des services communaux (1). Le diagnostic (2) et cette analyse des risques permettent normalement de guider une stratégie d'intervention (3).

1. L'analyse multicritères

La méthodologie repose sur un diagnostic et une grille d'analyse multicritères. Plusieurs critères physiques et environnementaux ont été sélectionnés : le contexte géologique, la sensibilité des eaux souterraines aux pollutions, la sensibilité des eaux de surface, la proximité des habitations, la sensibilité du paysage, la taille et l'âge de la décharge, la composition du dépôt. Une note comprise entre 1 et 5 est affectée à chaque critère selon un barème préétabli par l'ADEME.

Les critères sont ensuite pondérés selon le risque que l'on cherche à évaluer. Quatre risques correspondant aux différentes pollutions et nuisances susceptibles d'être induites par une décharge sont ainsi appréhendés : le risque de pollution des eaux souterraines, le risque de pollution des eaux de surface, le risque de nuisances pour les riverains, le risque de dégradation des paysages. Le total (note par critère + pondération) donne un score qui permet d'établir un diagnostic simplifié de la situation et d'évaluer le risque

Deux des quatre risques évalués concernent l'eau. Le risque « eau » est mesuré à partir de cinq critères principaux :

Critères d'évaluation des risques sur l'eau liés aux décharges

(a)

le substratum géologique : nature du substrat, existence de fissures, perméabilité du sol (exemple : sable = 5, calcaire poreux = 4, argile = 1)

(b)

les eaux souterraines : proximité d'une nappe, profondeur de la nappe, distance du forage (exemple : ressource en eau pure = 5, nappe à 20 mètres de profondeur = 3...)

(c)

les eaux de surface : proximité d'un captage, distance par rapport au cours d'eau, présence d'une nappe alluviale (exemple : site situé dans le périmètre de protection = 4, site situé sur nappe alluviale = 4, ...)

(d)

taille de la décharge : superficie et épaisseur du dépôt (exemple : site > 1ha = 5, dépôt de 5 à 10 m = 3...)

(e)

âge de la décharge : temps passé depuis la fermeture, durée d'exploitation, etc.

(f)

composition du dépôt : déchets toxiques ou lixiviats constatés =5, lixiviats supposés =3...)

Les critères sont ensuite pondérés comme suit :

- risque eaux souterraines = 3 a + 3 b + 2 d + 2 e + 2 f

- risque eaux de surface = 3 a + 4 c + 2 d + 2 e + 2 f.

La note obtenue permet de classer les sites en trois catégories : site à risques faibles, site à risques moyens, site à risques forts (lorsque la note finale dépasse 42).

2. Le diagnostic

Ce diagnostic simplifié est établi pour les principaux risques (« eaux souterraines », « eaux de surface », « riverains » et « paysages »). L'ensemble des informations est rassemblé dans un document de synthèse, permettant d'identifier clairement les sites polluants : un même site pourrait être classé « à risque » pour plusieurs impacts analysés. Dans le cas où le diagnostic simplifié conduit à classer un site comme site « à risque fort », un diagnostic approfondi est alors engagé.

La moitié des départements ont entrepris ce travail d'inventaire, qui peut être réalisé par le Bureau de recherches géologiques et minières -BRGM- ou par des bureaux d'études privés. En 2001, 57 départements l'avaient réalisé ou étaient en cours de diagnostic. Un regroupement des informations au niveau national s'est cependant avéré difficile dans la mesure où chaque département étant libre de sa sélection (décharges brutes, décharges sauvages), les résultats ne sont pas forcément cohérents. Sur un échantillon de 1 000 décharges on estime cependant que tous risques confondus, 38 % ont un impact faible sur l'environnement, et 20 % un impact moyen à fort. Le risque fort spécifique à l'eau serait de l'ordre de 5 à 10 %.

Cette méthode est caractérisée par une très grande simplicité. Une fois la grille de notes connue (déterminée par le guide méthodologique de l'ADEME), et avec un minimum de connaissances et d'observation, la plupart des communes pourraient aisément établir ce prédiagnostic simplifié de risque. Pour pallier l'insuffisance de connaissances géologiques, le BRGM a proposé de mettre à la disposition des communes un outil dit « ELDORADO » (élimination des décharges d'ordures ménagères) dans lequel les communes pourraient piocher pour remplir leur grille. Cet outil, proposé par le BRGM est depuis plusieurs mois dans l'attente d'une validation par l'ADEME.

3. L'intervention

Cette première phase de diagnostic est en principe suivie d'un plan  de résorption des décharges. Cette résorption peut prendre deux formes distinctes :

§ Le réaménagement . C'est la forme la plus simple qui consiste à fermer un site en le réintégrant dans son environnement, par des opérations de couverture, apport de terre, revégétalisation... Le coût d'une opération du réaménagement est de l'ordre de 15.000 € à 76.000 € (100.000 F à 500.000 F).

§ La réhabilitation . C'est la forme la plus élaborée, qui consiste à réparer les dégâts sur le milieu et prévenir les effets futurs, par des opérations d'enlèvement et de confinement des déchets, captage des lixiviats ou de biogaz... Les coûts sont beaucoup plus élevés, de l'ordre de 150.000 à 600.000 € (1 à 4 millions de francs).

Les réhabilitations sont précédées d'un diagnostic approfondi, qui nécessite donc de nouvelles études.

Les travaux restent de la compétence de la commune, mais sont aidés par le syndicat compétent sur les ordures ménagères et le Conseil général. Jusqu'en juin 2002, elles étaient aussi aidées par l'ADEME. L'ensemble des taux de cofinancement pouvant atteindre de 60 % à 80 %). Les demandes de subventions à l'ADEME, au titre de la réhabilitation des décharges brutes, qui peuvent représenter 20 à 30 % du coût total devaient être déposées avant juin 2002. Les demandes ne sont plus recevables depuis cette date et les projets de réhabilitation sont compromis (voir annexe suivante : l'exemple des Pyrénées Orientales).

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