II. ÉLARGIR LA FORMATION ET LE RÔLE DES PROFESSIONNELS

Selon l'architecture mise en place par le présent projet de loi, l'État est responsable de la fixation des objectifs nationaux, arbitrés après débat au sein de la Conférence nationale de santé publique. Il est également en charge de l'application des normes nationales et internationales tendant à réduire le risque ou l'exposition aux risques collectifs. En revanche, c'est au niveau régional que s'élabore la mise en oeuvre des plans avec la collaboration de tous les acteurs.

Conformément aux observations du rapport annuel 2003 de l'IGAS, « cette organisation administrative vise à promouvoir une prévention dont les objectifs et les moyens d'action seraient largement partagés par les citoyens, compte tenu de leurs modes de vie et de leurs valeurs. »

La politique de promotion de la santé ainsi définie doit se doter des instruments indispensables à sa réussite, parmi lesquels figurent des outils de connaissances et de formation adaptés, la promotion de la qualité comme mode de régulation du système de santé et la coopération entre les professions de santé.

A. DONNER TOUTE SA PLACE À LA FORMATION EN SANTÉ PUBLIQUE

1. Une discipline encore mal connue

La prévention, comme la santé publique, n'est pas une discipline en soi ; elle se définit plutôt comme une manière d'appréhender les questions de santé. Pour ce faire, elle doit disposer d'outils de recherche, de surveillance, de diagnostic et d'actions spécialisées. A ce titre, et compte tenu de cette spécificité, les professionnels susceptibles d'être associés à des actions de prévention doivent recevoir une formation ad hoc .

Afin d'accompagner les objectifs du présent projet de loi, il convient de ne pas se limiter à la seule formation de ceux qui se destinent à la santé publique (médecins de santé publique de l'État, médecins scolaires), mais plus largement, d'y englober l'ensemble des professionnels susceptibles, en raison de leur métier, de concourir ponctuellement aux actions de santé publique.

Or, aujourd'hui, l'enseignement en santé publique, orienté massivement vers l'informatique médicale et la biostatistique, et moins vers la promotion de la santé, n'est dispensé que dans les facultés de médecine et, selon l'IGAS, « elle demeure une spécialité relativement peu dotée et peu attractive » . Il existe également une école nationale de santé publique (ENSP), qui forme les cadres gestionnaires du système de santé dans les différentes administrations et établissements de santé, mais elle ne dispose ni du statut, ni de l'autonomie d'un établissement scientifique et culturel ou d'un établissement d'enseignement supérieur.


La formation en santé publique à l'étranger :
quelques points de repère

La formation en santé publique des professionnels de santé donne rarement satisfaction. L'OMS constate par exemple, dans le cadre de la mission d'appui qu'elle assure en Finlande, que la place de la santé publique dans la formation médicale y est insuffisante. L'existence de l'École nordique de santé publique (NHV) permet pourtant de disposer d'un institut de formation pluridisciplinaire de haut niveau.

L'École nordique de la santé publique (NHV) : créée en 1953 par les cinq pays nordiques (Danemark, Finlande, Islande, Norvège et Suède), l'École offre des formations en santé publique aux professionnels de santé comme aux autres professionnels . Les diplômes de formation vont jusqu'à la maîtrise et au doctorat de santé publique. Depuis 1997, la réforme des programmes a permis de créer une filière de recherche avec une maîtrise de science en santé publique. L'école accueille environ 750 étudiants chaque année. En 1999, l'école a été évaluée, à sa demande, par l'Association européenne des écoles en santé publique. Celle-ci reconnaît la qualité de la formation offerte tout en soulignant l'enjeu d'une plus grande ouverture internationale et d'un développement du secteur de la recherche notamment.

Au Québec , s'il est difficile de connaître le nombre d'infirmières travaillant en santé publique, les quelque 62.000 infirmières diplômées reçoivent une solide formation en santé publique : le programme de base comprend entre cinq et dix cours de santé publique avec l'intervention de sociologues et de doctorants en santé publique ; en outre certaines suivent une maîtrise de santé publique (deux ans) après leur formation initiale (trois ans et demi dans la voie universitaire).

Depuis la fin des années 1970, en s'inspirant des recherches sur les déterminants sociaux de la santé, les facultés de médecine canadiennes ont développé des pôles à forte composante sociale et pluridisciplinaire (départements de médecine sociale et préventive, administration de la santé, hygiène des milieux et santé au travail) : l'intérêt du système québécois est ainsi d'offrir à la fois des formations et des possibilités de recherche grâce à une synergie forte entre l'université et les professionnels de la santé publique.

La formation médicale de base reste cependant lacunaire sur les déterminants sociaux de la santé. La santé publique est une spécialité qui s'acquiert en quatre ans après la formation de base (maîtrise de santé communautaire ou d'administration de la santé, un an de pratique clinique et un an de pratique générale). Même si la formation des professionnels de santé est perfectible au Québec, l'interface avec les sciences sociales est un acquis important par rapport à la France : ce sont des spécialistes reconnus de leurs disciplines qui enseignent et non pas exclusivement des médecins .

Au Royaume-Uni , la réforme du système de santé s'accompagne d'une réflexion sur la formation des professionnels de santé publique : les conditions d'obtention du diplôme de médecin en santé publique ont été modifiées en juin 2002 ; le futur médecin doit suivre une formation de deux ans en médecine générale, quatre ans de spécialisation (dont un an de formation de higher specialist , trois mois de formation en surveillance épidémiologique et santé-environnement dans un service du NHS et un an supplémentaire dans un service du NHS).

L'objectif des autorités britanniques est simultanément d'étendre la spécialisation de santé publique au-delà des médecins et de renforcer la professionnalisation . La carrière de santé publique va ainsi être ouverte aux non-médecins : le ministère de la santé travaille à la création de postes de directeurs de la santé publique dans les primary care trusts qui pourront être occupés par des spécialistes non-médecins. La création de l'agence, Health development agency , est destinée à renforcer la professionnalisation dans le champ de la santé publique (révision des programmes de formation, diffusion d'information...) et soutenir les différents acteurs, notamment dans le secteur de la santé scolaire.

Source : Inspection générale des Affaires sociales (IGAS) - Rapport annuel 2003.

Page mise à jour le

Partager cette page