186. Article 63 quater (nouveau)
(art. L. 331-9 du code de l'organisation judiciaire)
Disposition transitoire relative aux juridictions de proximité

Le présent article additionnel, introduit par l'Assemblée nationale en deuxième lecture à l'initiative de MM. Emile Blessig et Jean-Paul Garraud avec l'avis favorable tant du gouvernement que du rapporteur, tend à prévoir une disposition transitoire destinée à remédier aux difficultés liées à la mise en place progressive des juridictions de proximité .

L'institution de ces juridictions nouvelles constitue une innovation notable proposée par la loi n° 2002-1138 d'orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002, complétée par la loi organique n° 2003-153 du 26 février 2003 relative aux conditions de recrutement et au statut des juges de proximité.

Ont été transférées à ce nouvel échelon judiciaire certaines des compétences dévolues aux tribunaux d'instance -en matière d'affaires civiles personnelles et mobilières d'un montant inférieur à 1.500 euros et d'injonctions de payer- et aux tribunaux de police -jugement des infractions pénales susceptibles de donner lieu à des contraventions de la première à la cinquième classe prévues par le code pénal (atteintes aux personnes, aux biens, à l'intégrité d'un animal), le code de la route et le code de la santé publique. En outre, les juges de proximité peuvent, par délégation du président du tribunal de grande instance, valider les mesures de composition pénale applicables à certaines contraventions et certains délits (articles 41-2 et 41-3 du code de procédure pénale).

Le nombre de juridictions de proximité, leur siège et leur ressort sont identiques à ceux des tribunaux d'instance. Compte tenu des délais incompressibles de recrutement des futurs juges de proximité, le gouvernement a fait le choix de mettre en oeuvre cette réforme progressivement , inscrivant dans la loi de programmation l'objectif de recruter 3.300 juges de proximité (soit l'équivalent de 330 emplois « temps plein »).

En 2003 -première année de mise en oeuvre de la réforme-, 32 juges de proximité ont été nommés par le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), dont 19 ont pris leurs fonctions depuis quelques semaines 70 ( * ) . Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2004, le garde des Sceaux a annoncé son intention de recruter 750 nouveaux juges de proximité entre septembre 2003 et décembre 2004. Une deuxième vague de recrutements a eu lieu en décembre 2003, le CSM ayant accepté 83 candidatures soumises par le ministère de la justice, dont 63 devront être réexaminées après un stage probatoire en juridiction.

Dans l'attente de la montée en puissance de cette réforme , la loi quinquennale de septembre 2002 a confié aux juges d'instance le soin de traiter le contentieux désormais dévolu aux juridictions de proximité en insérant un article L. 331-9 dans le code de l'organisation judiciaire.

Il est ainsi prévu qu'en cas d'absence, d'empêchement du juge de proximité, ou encore lorsque le nombre de juges de proximité se révèle insuffisant, les fonctions de juges de proximité sont exercées par un juge du tribunal d'instance. Si ce dispositif paraît adapté pour remédier aux vacances de poste conjoncturelles qui perturbent le fonctionnement des juridictions, il s'est en revanche révélé trop rigide et contraignant pour régler le problème de la période transitoire de mise en place progressive des juridictions de proximité.

En effet, la plupart des juges d'instance assurent encore à titre transitoire la majeure partie du contentieux relevant désormais de la justice de proximité. Outre un manque de lisibilité pour le justiciable, cette situation conduit à alourdir leurs tâches ainsi que celles des personnels des greffes, les juges d'instance étant conduits à multiplier les audiences pour une même affaire selon qu'elle relève de la juridiction de proximité ou du tribunal d'instance.

Ainsi, dans le cas d'un accident de la route avec refus de priorité, le juge d'instance statue sur la contravention principale, mais doit se déclarer incompétent pour la contravention connexe sur laquelle il doit statuer en qualité de juge de proximité.

Notre excellent collègue M. Christian Cointat, rapporteur pour avis des crédits des services généraux de la justice affectés par le projet de loi de finances pour 2004, a d'ailleurs souligné les vives inquiétudes des juges d'instance, et tout particulièrement de l'Association nationale des juges d'instance 71 ( * ) , suscitées par cette situation. Au cours de son audition du 19 novembre 2003 sur le projet de budget pour 2004, le garde des Sceaux, sensible à ces difficultés passagères, avait souhaité qu'une solution soit rapidement trouvée pour y remédier.

Ainsi, le présent article tend à compléter l'article L. 331-9 du code de l'organisation judiciaire par un second alinéa pour prévoir une disposition adaptée à la situation actuelle. Dans l'attente de l'arrivée des juges de proximité dans leurs tribunaux , il tend à permettre aux juges d'instance de statuer en cette qualité sur le contentieux relevant désormais de la juridiction de proximité. Ce dispositif plus souple que celui prévu au premier alinéa de l'article L. 331-9 permettra de faciliter l'intérim des juges d'instance entre 2004 et 2007, dernière étape de la mise en oeuvre de la réforme de la justice de proximité.

Votre rapporteur approuve l'initiative pragmatique des députés qui permettra d'alléger les tâches incombant aux juges d'instance et aux personnels des greffes.

Votre commission vous propose donc d'adopter l'article 63 quater sans modification .

* 70 Les autres candidats ont été soumis à l'obligation d'accomplir un stage probatoire préalablement à leur entrée en fonction.

* 71 Fin octobre dernier, l'Association nationale des juges d'instance a adressé au garde des Sceaux une motion signée par près de 180 magistrats pour protester contre cette situation.

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