TRAVAUX DE LA COMMISSION

Réunie le mercredi 23 juin 2004, sous la présidence de M. Nicolas About, président , la commission a procédé à l'examen, en deuxième lecture, du rapport de MM. Francis Giraud et Jean-Louis Lorrain sur le projet de loi n° 278 (2003-2004), adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif à la politique de santé publique .

M. Francis Giraud, rapporteur, a présenté les dispositions du projet de loi relatif à la politique de santé publique restant en discussion pour la deuxième lecture. Il a rappelé que ce texte participait de la réforme générale conduite sur notre système de santé et que de nombreux articles y avaient été ajoutés au cours de la discussion parlementaire, afin d'y intégrer notamment des dispositions consécutives à la canicule, des précisions sur les compétences de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) et diverses mesures relatives aux professions de santé.

En outre, la deuxième lecture à l'Assemblée nationale a été l'occasion d'adopter treize articles supplémentaires relatifs à la représentativité des associations de malades et d'usagers, à l'interdiction des distributeurs automatiques de produits sucrés dans les établissements scolaires, à la lutte contre l'alcoolisme, à la protection de l'environnement, à la cosmétovigilance, à la revente des dispositifs médicaux, au groupement de coopération sanitaire, à la validation législative de trois concours et à l'évaluation de la « convention Belorgey » sur l'accès à l'emprunt et à l'assurance des personnes présentant un risque de santé aggravé.

M. Francis Giraud, rapporteur, a indiqué que les dispositions centrales tenant à la nouvelle architecture de la politique de santé, à la sécurité sanitaire, à la recherche et à la formation n'avaient, en revanche, pas fait l'objet de modifications importantes.

Il a donc choisi d'orienter son propos sur les points essentiels qui demeurent en discussion sur la nutrition et la lutte contre l'obésité, la prévention de l'alcoolisme et l'encadrement de la profession de psychothérapeute.

Concernant la nutrition, il a annoncé qu'il proposerait une nouvelle rédaction du dispositif organisant la publicité télévisée pour les produits alimentaires et un encadrement des modalités d'implantation des distributeurs automatiques dans les établissements d'enseignement.

Abordant la lutte contre l'alcoolisme, il a indiqué qu'il proposerait un amendement aménageant la taxation des boissons alcoolisées aromatisées, dites « premix », afin de la rendre applicable et d'assurer sa compatibilité avec la réglementation européenne. L'objectif de ce dispositif est de taxer spécifiquement les boissons dont le goût alcoolisé ou l'amertume ont été masqués par l'ajout d'autres produits sucrés ou aromatisés destinés à attirer les jeunes consommateurs.

Examinant l'article 18 quater relatif aux psychothérapeutes, il a souhaité l'adoption d'une nouvelle rédaction, plus conforme à l'esprit du texte voté par le Sénat en première lecture.

M. Francis Giraud, rapporteur, a enfin précisé qu'il présenterait par ailleurs à la commission quelques amendements rédactionnels ou de précision et qu'il lui proposerait l'adoption conforme de quarante-huit articles.

Il a ensuite présenté les principales modifications apportées par l'Assemblée nationale au volet « santé et environnement » du présent projet de loi, en remplacement de M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur, empêché.

Il a rappelé que ce volet du projet de loi avait pour objectif d'améliorer la planification des actions de recherche et de prévention en matière de sécurité sanitaire environnementale et de moderniser les dispositifs de gestion des risques, dans les domaines où les connaissances scientifiques permettent déjà la mise en oeuvre d'actions concrètes.

Estimant que les modifications apportées par l'Assemblée nationale apportaient d'utiles précisions au texte voté par le Sénat et n'appelaient aucun amendement, M. Francis Giraud, rapporteur , a souhaité s'attarder sur les deux articles additionnels introduits, à juste titre, par les députés, à l'initiative du Gouvernement.

Le premier ouvre la possibilité d'étendre les dispositifs de protection des prélèvements d'eau aux captages détenus par des personnes privées, qui alimentent actuellement trois millions de consommateurs.

Le second attribue aux inspecteurs de la Direction générale de la sûreté nucléaire et de la radioprotection la compétence de constater et réprimer le non-respect des textes qui concourent à assurer la protection des travailleurs et du public contre les dangers des radiations des rayonnements ionisants. Il a pour but de remédier à la situation de vide juridique survenue après l'annulation, par le Conseil d'État, du décret qui transférait cette compétence aux agents de la Direction générale de la sûreté nucléaire et de ses services déconcentrés.

M. Louis Souvet a regretté que le Parlement légifère sur les distributeurs automatiques dans les écoles avant que les conclusions du rapport relatif à l'obésité, confié à M. Gérard Dériot au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé (OPEPS), ne soient connues. Il s'est également interrogé sur les conditions de mise en oeuvre du message nutritionnel lié à la publicité pour les aliments, qui risque de susciter des réticences de la part des chaînes de télévision.

M. Guy Fischer a admis que plusieurs sujets abordés par le projet de loi, tels l'alcoolisme, l'obésité ou les psychothérapeutes, étaient d'actualité, mais a jugé l'ensemble du texte insuffisant. Il a souhaité que l'amendement sur les « premix » soit l'occasion d'un examen plus général de l'état de la consommation alcoolique en France et a critiqué la modification apportée à la loi Evin au profit du vin à l'occasion du débat sur le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux.

Comme il l'avait fait en première lecture, M. Gilbert Chabroux a déploré que le projet de loi définisse un très grand nombre d'objectifs de santé publique, sans hiérarchisation ni cohérence, et sans préciser les moyens financiers attachés à ces actions. Concernant la lutte contre l'alcoolisme, il a invité Mme Anne-Marie Payet à défendre à nouveau, en deuxième lecture, l'amendement qu'elle avait précédemment déposé pour informer les consommateurs du caractère nocif de la consommation d'alcool pour les femmes enceintes. Il s'est interrogé sur l'articulation entre ce projet de loi et d'autres initiatives du Gouvernement, telles que le plan Santé-environnement qui vient d'être présenté ou la réforme de l'assurance maladie.

Mme Sylvie Desmarescaux a souhaité la suppression de l'interdiction systématique des distributeurs automatiques dans les établissements scolaires, estimant qu'il était plus raisonnable de s'en remettre au sens des responsabilités des directeurs d'établissements scolaires.

M. Francis Giraud, rapporteur , a indiqué que l'amendement qu'il proposait prévoyait une solution de compromis plus mesurée que l'interdiction pure et simple en organisant la sélection des produits alimentaires en fonction de leur composition nutritionnelle.

M. Jean Chérioux s'est préoccupé du rétablissement du privilège des « bouilleurs de cru » par l'Assemblée nationale, alors que le Sénat l'avait supprimé en première lecture. Il a considéré que ce dispositif n'était pas cohérent avec les objectifs de santé publique soutenus par le présent texte et a annoncé qu'il était disposé à déposer un nouvel amendement de suppression à titre personnel.

M. Paul Blanc a souhaité avoir des précisions sur la disposition relative à l'extension des dispositifs de protection des prélèvements d'eau aux captages détenus par les personnes privées.

M. Alain Vasselle a demandé quel serait l'impact financier des mesures prévues par ce texte et s'est interrogé sur le rôle des médias en matière de santé publique.

M. Gilbert Barbier a regretté que le projet de loi privilégie les mesures d'interdiction au détriment des politiques d'éducation à la santé et de prévention que l'on pouvait valablement conduire avec de plus grandes chances de succès auprès des enfants.

Abondant dans ce sens, M. Marcel Lesbros a dit croire plus à l'éducation des jeunes qu'aux mesures d'interdiction pour améliorer la santé publique et a souhaité que quelques grands messages de prévention soient diffusés auprès du public.

Mme Brigitte Bout a alors fait part de l'expérience menée depuis douze ans dans sa commune en matière d'éducation des enfants à la nutrition et qui a produit de bons résultats dans la lutte contre l'obésité.

Mme Anne-Marie Payet a confirmé son intention de déposer à nouveau l'amendement qu'elle avait défendu en première lecture, en le ciblant toutefois mieux sur les femmes enceintes. Elle s'est dit préoccupée par le manque d'information des jeunes sur les dangers de l'alcool et a demandé des précisions sur le contenu de l'amendement « premix ».

M. Francis Giraud a souligné que le présent projet de loi s'inscrit dans la réforme d'ensemble du secteur de la santé, dont il constitue le premier élément. Il s'est dit convaincu de l'importance d'une véritable politique d'éducation à la santé, qui doit être prise en charge par l'éducation nationale.

Il a exposé le dispositif de l'amendement relatif à la publicité télévisée, précisant qu'il ne se limitait plus aux seuls programmes destinés à la jeunesse, compte tenu de l'amplitude horaire de consommation télévisée des enfants. Les obligations financières mises à la charge des annonceurs devraient permettre de consacrer dix millions d'euros par an à la diffusion de messages d'information nutritionnelle et elles ne s'appliqueraient pas aux produits naturels dépourvus d'additifs.

Il a enfin rappelé le cheminement législatif du dispositif organisant la disparition, d'ici à cinq ans, de l'actuel privilège des « bouilleurs de cru », moyennant l'instauration d'un nouvel allègement fiscal au bénéfice des producteurs familiaux d'alcool.

M. Nicolas About, président , a considéré qu'il était justifié de mettre en garde les consommateurs, et notamment les enfants, contre les méfaits des aliments et boissons excessivement sucrés. Il a toutefois reconnu que la rédaction de l'amendement relatif à la publicité télévisée pour les produits alimentaires devait être précisément ajustée pour atteindre l'objectif visé.

M. Louis Souvet a souligné que la majorité des produits ne pouvait être conservée sans additifs et qu'une rédaction aussi systématique imposera à leurs annonceurs ces nouvelles obligations, sans qu'elles soient toujours justifiées par leur valeur calorique effective.

M. Francis Giraud, rapporteur , a précisé que le but de l'amendement était bien de réduire la consommation de produits trop gras ou trop sucrés et de favoriser l'information de nos concitoyens sur la qualité nutritionnelle des aliments.

Mme Sylvie Desmarescaux a considéré que l'excès de consommation de certains aliments, même s'ils n'étaient pas excessivement dosés en glucides ou en lipides pouvait être tout aussi préjudiciable à la santé et qu'il fallait en tenir compte au même titre que la composition nutritionnelle de certains produits.

Dans le même esprit, M. Jean-Claude Etienne a estimé que l'essentiel était de promouvoir une consommation équilibrée et non de rejeter a priori certains aliments.

M. Nicolas About, président , a indiqué qu'il lui paraîtrait logique de taxer les annonceurs des produits dont le taux en sucre ou en graisse excède un certain seuil. Il s'est toutefois interrogé sur le bien-fondé de confier aux annonceurs eux-mêmes, qui réalisent les messages publicitaires pour inciter à la consommation des produits incriminés, le soin de réaliser aussi les messages de prévention.

M. Alain Vasselle a considéré qu'il serait plus simple et plus judicieux de définir des normes, par exemple le taux maximal autorisé de sucre ou de graisse dans un aliment, plutôt que ce dispositif complexe s'appliquant aux messages publicitaires.

Mme Françoise Henneron a exprimé des craintes concernant l'avenir des industries agroalimentaires qui pourraient pâtir de ces nouvelles contraintes.

M. Nicolas About , président, a proposé qu'une nouvelle rédaction de ce dispositif soit élaborée en commun lors de l'examen de l'article 14 A.

La commission a ensuite procédé à l'examen des amendements présentés par le rapporteur.

A l'article 2 (politique de santé publique régionale), elle a adopté un amendement corrigeant une erreur matérielle et un amendement tendant à associer les organismes d'assurance maladie complémentaire aux conférences régionales de santé.

A l'article 14 A (publicité télévisée en faveur de produits alimentaires), la commission a adopté un amendement imposant aux annonceurs d'accompagner la publicité de certains produits alimentaires de messages d'information ou d'éducation nutritionnelle ou, à défaut, de verser une contribution à un organisme chargé d'élaborer ces actions.

A l'article 14 BA (interdiction des distributeurs automatiques dans les établissements scolaires), elle a adopté un amendement subordonnant la présence des distributeurs dans les établissements scolaires à la signature d'une charte de bonnes pratiques.

A l'article 14 (approbation du rapport annexé relatif aux objectifs de santé publique 2004-2005), la commission a adopté un amendement améliorant la prise en compte de la lutte contre les pathologies auditives parmi les objectifs de santé publique fixés par le projet de loi.

A l'article 15 bis AA (programme de dépistage du cancer spécifique à certaines populations), elle a adopté un amendement indiquant que le programme spécifique de dépistage concernerait les populations confrontées à l'exclusion.

Après un large débat au cours duquel sont intervenus M. Guy Fischer , Mme Brigitte Bout, M. Francis Giraud, rapporteur, Mme Françoise Henneron, MM. Alain Vasselle, Jean Chérioux, Nicolas About, président et Mme Sylvie Desmarescaux, la commission a adopté, à l'article 17 bis A (taxation de mélanges de boissons alcooliques), un amendement de suppression et a souhaité que cette question soit réexaminée globalement lors du débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005. Elle a de même adopté, par cohérence, un amendement de suppression de l'article 17 ter A (taxation de boissons alcooliques sucrées).

A l'article 18 (modification de la législation relative aux médicaments), elle a adopté un amendement de coordination et un amendement de cohérence rédactionnelle.

A l'article 18 quater (usage du titre de psychothérapeute), à l'issue d'un large débat au cours duquel sont intervenus Mme Sylvie Desmarescaux et MM. Alain Vasselle, Francis Giraud, rapporteur, et M. Nicolas About, président , la commission a adopté un amendement précisant les conditions exigibles pour utiliser le titre de psychothérapeute.

A l'article 42 (principes généraux de protection des personnes qui se prêtent à la recherche biomédicale), la commission a adopté un amendement rédactionnel, ainsi qu'un amendement réservant aux seules associations agréées le droit de se voir transmettre des éléments relatifs aux protocoles de recherche.

A l'article 43 (règles de consentement de la personne se prêtant à une recherche biomédicale), elle a adopté un amendement supprimant le droit pour une personne se prêtant à des recherches biomédicales de demander communication des résultats individuels de la recherche.

A l'article 44 (comités de protection des personnes), la commission a adopté un amendement prévoyant qu'un décret fixera les modalités particulières applicables aux recherches lorsque leur promoteur est une institution publique ou associée au service public hospitalier.

A l'article 84 (rapport sur l'application de la convention du 19 septembre 2001 relative à l'accès à l'assurance et au crédit des personnes présentant un risque de santé aggravé), elle a adopté un amendement élargissant l'objet du rapport devant être présenté au Parlement sur l'application de la convention Belorgey.

La commission a enfin adopté le projet de loi ainsi amendé .

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