TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. PRÉSENTATION DU PROJET PAR M. XAVIER BERTRAND, SECRÉTAIRE D'ÉTAT À L'ASSURANCE MALADIE

Réunie le mercredi 9 mars 2005 sous la présidence de M. Nicolas About, président, la commission a procédé à l'audition de M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie, sur le projet de loi organique n° 208 (2004-2005) relatif aux lois de financement de la sécurité sociale.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie , a indiqué que le projet de loi a pour objectif de donner plus de cohérence et de lisibilité aux lois de financement de la sécurité sociale.

L'expérience des neuf exercices passés a mis en évidence les apports majeurs des lois de financement de la sécurité sociale. Tout d'abord, le Parlement s'est vu attribuer de nouveaux pouvoirs, sans que soit pour autant remis en cause le rôle des partenaires sociaux. Le débat sur les lois de financement rythme la vie parlementaire, comme l'action gouvernementale, et permet de sensibiliser l'ensemble des acteurs à la situation financière des organismes de sécurité sociale, qui gèrent plus de 350 milliards d'euros par an, soit un montant largement supérieur au budget de l'État.

Les lois de financement ont cependant aussi montré leurs limites. Elles manquent de lisibilité, dans la mesure où le vote sur les recettes s'effectue par catégorie de recettes, tandis que le vote sur les dépenses s'effectue par branche, sans qu'il soit possible de les rapprocher. Le cadre annuel apparaît également trop contraignant. Sensible à la conjoncture, le solde des caisses de sécurité sociale devrait idéalement être apprécié sur l'ensemble du cycle économique, c'est-à-dire sur plus longue période qu'un exercice annuel. De plus le vote sur l'Objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) est global, alors que cet objectif recouvre des sous-catégories, dont la dynamique et les facteurs d'évolution sont très différents.

Les lois de financement sont également incomplètes. Les fonds concourant au financement de la sécurité sociale ou les dispositions relatives à l'amortissement de la dette n'y figurent pas. Elles négligent également la dimension « objectifs-résultats », très présente dans la loi organique sur les lois de finances ou dans les conventions d'objectifs et de gestion liant l'État aux caisses.

Le projet de loi organique vise à combler ces lacunes. Il doit permettre un véritable débat sur l'équilibre financier de chacune des branches. Le Parlement se prononcera sur le solde de l'ensemble des régimes obligatoires, en votant des tableaux d'équilibre par branche. Les prévisions de recettes et de dépenses seront présentées pour les quatre années à venir, permettant ainsi un cadrage pluriannuel des dépenses de sécurité sociale. Un dispositif de certification des comptes du régime général par la Cour des comptes est également introduit. Le Parlement votera sur les différentes composantes de l'ONDAM, ce qui permettra d'avoir un débat sur les moyens de l'hôpital, de la médecine de ville ou du secteur médico-social.

Le périmètre des lois de financement de la sécurité sociale est également étendu, puisque le Fonds de solidarité vieillesse (FSV), le fonds de financement des prestations sociales agricoles (FFIPSA) ou la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) seront désormais intégrés dans son champ. Les règles relatives à l'amortissement de la dette ou modifiant la gestion interne des régimes y figureront également.

Le projet de loi organique introduit enfin une démarche d'objectifs et de résultats, ce qui suppose l'élaboration d'indicateurs de performance, qui pourront porter, par exemple, sur l'état de santé de la population ou sur le niveau de vie des retraités.

Au total, M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie, a estimé que le projet de loi organique devrait permettre de répondre aux trois questions que se posent les citoyens concernant la sécurité sociale : à quoi servent les moyens qui lui sont attribués ? Quels sont les objectifs fixés aux politiques de sécurité sociale ? Les résultats sont-ils à la hauteur des objectifs fixés ?

M. Alain Vasselle, rapporteur , a tout d'abord souligné le peu de crédibilité de l'ONDAM, qui n'a été respecté qu'une seule fois en neuf ans, et s'est interrogé sur les moyens à mettre en oeuvre pour y remédier, suggérant notamment une meilleure association de l'ensemble des acteurs concernés à son élaboration. Il a ensuite demandé s'il est opportun d'envisager un vote du Parlement sur les soldes cumulés des régimes de sécurité sociale et des différents fonds. Enfin, il a relevé que de nombreux dispositifs d'allégements de cotisations sociales figurent dans des lois ordinaires, ce qui ne contribue pas à leur lisibilité d'ensemble, et a souhaité connaître l'avis du ministre sur l'idée de réserver ce type de mesures aux seules lois de financement de la sécurité sociale ou aux lois de finances.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie , a répondu que l'ONDAM doit retrouver sa crédibilité, ce qui suppose de définir des modalités de fixation acceptées par tous. La loi du 13 août 2004 relative à la réforme de l'assurance maladie prévoit déjà que les caisses nationales d'assurance maladie doivent faire des propositions concernant son évolution. L'adoption de la loi organique permettra de voter sur les différentes composantes de l'ONDAM, ce qui améliorera la transparence du processus de décision. Il a ensuite insisté sur l'idée qu'il n'existe pas de fatalité à ce que soient constatés chaque année des dépassements de l'ONDAM.

Sur le deuxième point, il a souhaité que les lois de financement statuent sur les dépenses et les recettes courantes, et non sur des éléments de solde, qui seront cependant explicités dans les documents figurant en annexe des lois de financement.

Répondant à la troisième question du rapporteur, il a indiqué que le ministère de la santé n'est pas opposé à la proposition consistant à regrouper en loi de finances ou en loi de financement les mesures relatives aux allégements de charges sociales, mais que cette question n'a pas encore fait l'objet d'une décision à un niveau interministériel. Il a toutefois craint qu'une telle mesure ne fût source de rigidités. Il a également rappelé l'attachement du ministère à une compensation intégrale des allégements de cotisations sociales, qui apparaît indispensable pour assainir la situation financière des caisses.

M. Guy Fischer a fait observer que les allégements prévus dans la loi de cohésion sociale récemment adoptée ne font cependant pas tous l'objet d'une compensation intégrale.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a expliqué que la version initiale du projet de loi organique réaffirmait l'obligation d'une compensation intégrale des allégements supportés par les caisses, mais que cette disposition avait été retirée du texte, à la suite de l'avis du Conseil d'État, qui l'aurait estimée inconstitutionnelle. Il a demandé si le Gouvernement envisage une révision de la Constitution afin de rendre possible l'inscription de cette disposition dans la loi organique.

M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie , après avoir rappelé que le principe de compensation figure déjà dans une loi de 1994, a dit partager la préoccupation du rapporteur, mais a exprimé ses réserves quant à l'opportunité d'une nouvelle révision constitutionnelle. Il a précisé la position du Conseil d'État, qui estime que ce principe ne peut figurer dans la loi organique, dans la mesure où ces lois n'ont pas pour objet de fixer des règles de fond, mais seulement de compléter les dispositions relatives à l'organisation des pouvoirs publics figurant dans la Constitution.

Mme Marie-Thérèse Hermange a fait observer qu'il n'y a pas de concordance entre le calendrier des conventions d'objectifs et de gestion (COG) et les prévisions quadriennales contenues dans les lois de financement et a souhaité connaître le moyen d'y remédier.

M. Guy Fischer a demandé si le ministre considère qu'il aura, grâce aux dispositions nouvelles du projet de loi organique, les moyens de contraindre la dépense sociale et de résorber les déficits.

M. Alain Vasselle a souhaité avoir des précisions sur la manière dont les professionnels de santé seraient associés à la fixation de l'ONDAM.

En réponse à Mme Marie-Thérèse Hermange, M. Xavier Bertrand, secrétaire d'État à l'assurance maladie , a déclaré qu'il n'est pas prévu de modifier le calendrier des COG pour le faire coïncider avec celui des lois de financement. Il a en revanche jugé nécessaire d'assurer une cohérence entre les indicateurs de performance retenus dans les COG et ceux inscrits en loi de financement. Il a fait part de l'intention du Gouvernement d'exploiter toutes les potentialités des COG pour optimiser la gestion des caisses.

En réponse à M. Guy Fischer, il a souligné que la loi organique sera un outil utile à l'ensemble des acteurs, et notamment aux parlementaires. Il a ajouté que le Gouvernement n'envisage pas cette réforme avec l'idée ou l'objectif d'avoir les moyens de contraindre la dépense sociale et qu'il confirme son choix de mener une politique de maîtrise médicalisée des dépenses de santé. Il a d'ailleurs considéré que le volume de ces dépenses continuera d'augmenter dans les années à venir, comme tel est le cas dans tous les pays développés.

En réponse à M. Alain Vasselle, rapporteur, il a rappelé que les professionnels de santé siègent dans les conseils de surveillance des caisses, qui se prononcent sur les avis exprimés par les caisses. Ils seront donc associés de cette manière au processus de fixation de l'ONDAM. Il a enfin insisté sur la nécessité de fixer des ONDAM réalistes et crédibles.

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