III. ONDAM 2006 : POURSUIVRE LE REDRESSEMENT DES COMPTES DE L'ASSURANCE MALADIE

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 s'inscrit dans la continuité de la réforme de l'assurance maladie mise en oeuvre depuis l'été 2004. Son objectif est de consolider l'action entreprise au cours des douze derniers mois et de bonifier les premiers résultats positifs déjà engrangés (décélération des dépenses de soins de ville, respect de l'Ondam 2005, réduction de 25 % du déficit de l'assurance maladie).

Par construction, l'Ondam pour 2006 rassemble les mesures de consolidation arrêtées par le Gouvernement, mais il se caractérise aussi par certains traits qui le distinguent des Ondam précédents :

tout d'abord, en raison de dispositions contenues dans la loi du 13 août 2004 qui invitent chaque caisse nationale d'assurance maladie à transmettre « avant le 30 juin de chaque année [...] des propositions relatives à l'évolution de ses charges et de ses produits au titre de l'année suivante et aux mesures nécessaires pour atteindre le cadrage financier pluriannuel des dépenses d'assurance maladie ». Si le mystère de la construction de l'Ondam n'est toujours pas percé, il convient de souligner que les caisses d'assurance maladie sont désormais associées, quoique de façon indirecte, à sa conception et au cadrage pluriannuel qui l'accompagne ;

ensuite, car après l'adoption de la loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale, l'Ondam est désormais décliné en un minimum de cinq sous-objectifs de dépenses, sur lesquels le Parlement est amené à se prononcer.

A. UN ONDAM AMBITIEUX POUR 2006

Pour 2006, et après avoir réussi un exercice 2005 déjà audacieux, le Gouvernement a fixé le taux de progression de l'Ondam à 2,5 %.

Au regard des taux de progression constatés au cours des neuf dernières années (4,6 % en moyenne), il s'agit incontestablement d'un choix ambitieux arrêté par le Gouvernement.

Taux de l'Ondam voté et réalisé

(en pourcentage)

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Ondam voté

1,7

2,4

1,0

2,9

2,6

4,0

5,3

4,0

3,2

2,5

Ondam réalisé

1,5

4,0

2,6

5,6

5,6

7,2

6,4

5,2

3,2

Ce taux de progression représente un objectif de dépenses de 140,7 milliards d'euros.

Ondam voté et réalisé

(en milliards d'euros)

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006*

Ondam voté

91,5

93,6

96,0

100,4

105,7

112,8

123,5

129,7

134,5

140,7

Ondam réalisé

91,4

95,1

97,6

103,0

108,8

116,7

124,7

131,0

134,9

Dépassement

- 0,1

1,5

1,6

2,7

3,1

3,9

1,2

1,3

0,4

*prévisions

Par ailleurs, les objectifs de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès sont fixés à :

- 153,4 milliards d'euros pour l'ensemble des régimes obligatoires de base ;

- 131,9 milliards d'euros pour le régime général de la sécurité sociale.

Pour respecter ces limites, le Gouvernement table sur un ralentissement des dépenses de soins, rendu possible par les effets conjugués de la maîtrise médicalisée et du plan médicament, et sur une progression modérée des dépenses hospitalières.

Mesures à effet sur les comptes 2006

(en millions d'euros)

Régime général

Tous régimes

Mesures d'économies sur les dépenses d'assurance maladie

3.968

4.708

Mesures sur les produits de santé

1.751

2.085

Mesures sur les établissements de santé

958

1.140

Revalorisation du forfait journalier hospitalier

84

100

Maîtrise médicalisée

748

890

Lutte contre les fraudes

126

150

Maintien d'un ticket modérateur plafonné sur les actes au-delà de 91 euros

84

100

Autres mesures (dont solde net sur les indemnités journalières : 20 millions d'euros tous régimes)

80

95

Revalorisation du forfait CMU

138

148

Source : Annexe 9 - PLFSS 2006

Toutefois, la comparaison des dépenses autorisées en 2006 avec les dépenses des exercices précédents ne peut être menée qu'après avoir pris en compte les modifications du périmètre de l'Ondam pour 2006.

1. La redéfinition des périmètres

Comment les précédents, l'Ondam 2006 connaît des évolutions de périmètre provoquées par l'intégration de dépenses qui, jusqu'ici, étaient demeurées hors Ondam. Cette année, ces modifications tiennent notamment compte des remarques émises par la Cour des comptes 5 ( * ) sur « les anomalies persistantes du périmètre de l'Ondam ».

a) Les recommandations de la Cour des comptes pour crédibiliser le périmètre de l'Ondam

Dans son rapport annuel sur la sécurité sociale, la Cour des comptes rappelle qu'avant l'adoption de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, le périmètre de l'Ondam n'était défini de manière exhaustive par aucun texte législatif ou réglementaire.

C'est désormais chose faite, puisque l'annexe 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale précise le périmètre de l'Ondam et ses modifications éventuelles.

La Cour souligne aussi que certaines dépenses supportées par le régime général de l'assurance maladie ne figuraient pas dans le périmètre de l'Ondam « alors même qu'elles relèvent de la régulation des dépenses ».

A titre d'exemple, elle cite la part des cotisations sociales des professionnels de santé libéraux (1,9 milliard d'euros annuels) prise en charge par l'assurance maladie et qui peut faire l'objet de négociations conventionnelles au même titre que les honoraires, ou encore la contribution des régimes obligatoires au fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP), fixée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 à 470 millions d'euros.

Pour la construction de l'Ondam 2006, une partie des recommandations de la Cour des comptes relatives à l'intégration de certaines dépenses dans le périmètre de l'Ondam ont ainsi été retenues, conformément au tableau ci-après :

Impact des changements de périmètres sur l'ONDAM 2006

(en milliards d'euros)

Objectif 2006

Dépenses de soins de ville (à périmètre 2005)

62,4

Prise en charge des cotisations sociales des professions de santé

2,1

Exonération de ticket modérateur sur ALD 31-32

0,3

FAQSV

0,1

Aides à la télétransmission

0,1

Clause de sauvegarde

0,4

Dépenses de soins de ville (à périmètre 2006)

65,4

Dépenses relatives aux établissements de santé tarifés à l'activité

45,8

Autres dépenses relatives aux établissements de santé (à périmètre 2005)

17,6

FMPESPP

0,3

Autres dépenses relatives aux établissements de santé (à périmètre 2006)

17,9

Contribution de l'assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes âgées (à périmètre 2005)

4,9

Apport de la CNSA

- 0,6

Contribution de l'assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes âgées (à périmètre 2006)

4,3

Contribution de l'assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes handicapées (à périmètre 2005)

6,9

Apport de la CNSA

- 0,2

Contribution de l'assurance maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes handicapées (à périmètre 2006)

6,6

Dépenses relatives aux autres modes de prises en charge (à périmètre 2005)

0,7

Transferts de l'Etat vers l'assurance maladie du financement des CAARUD

0,0

Dépenses relatives aux autres modes de prise en charge (à périmètre 2006)

0,7

Total ONDAM à périmètre 2005

138,2

Impact des modifications de périmètre

2,5

TOTAL ONDAM à périmètre 2006

140,7

Source : Annexe 7 du PLFSS 2006

b) Des problèmes persistants de définition des sous-objectifs de l'Ondam

Toujours dans son rapport de septembre, qui consacre de larges développements aux problèmes de définition des périmètres, de construction et de suivi des objectifs de dépenses, la Cour des comptes rappelle que « définies principalement selon le critère de versement des régimes obligatoires d'assurance maladie à des catégories d'établissements et de services, plusieurs lignes de l'Ondam présentent des périmètres de dépenses peu significatifs parce que très partiels ».

La Cour met en évidence les défauts de répartition des dépenses entre sous-objectifs. Plus précisément elle montre comment certaines dépenses comptabilisées au sein d'un sous-objectif sont en réalité imputables à un autre.

L'exemple de l'enveloppe des soins de ville illustre particulièrement ces difficultés puisqu'une part importante de dépenses inscrites sur cette ligne ne devrait pas relever du secteur ambulatoire mais des sous-objectifs hospitaliers. C'est le cas pour deux catégories de dépenses bien précises que sont d'une part, les prescriptions hospitalières, d'autre part, les honoraires des praticiens rattachés aux cliniques privés qui représentent 31 % du total des honoraires des spécialistes pris en charge dans le cadre de l'enveloppe « soins de ville ».

2. La ventilation des sous-objectifs de l'Ondam

En application de la nouvelle loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale du 2 août 2005, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 se caractérise par une nouvelle présentation de l'Ondam qui est désormais ventilé entre différents sous-objectifs sur lesquels le Parlement est appelé à se prononcer par un vote.

Le nombre de ces sous-objectifs ne peut être inférieur à cinq, par analogie avec les grandes catégories de dépenses de l'assurance maladie (soins de ville, hôpital public, cliniques privées, secteur médico-social, réseaux).

Après consultation des commissions parlementaires compétentes, le Gouvernement a choisi de retenir six sous-objectifs, en scindant les dépenses hospitalières en deux rubriques, suivant leurs modes de financement (tarifées à l'activité et non tarifées à l'activité).

a) Le sous-objectif « dépenses de soins de ville »

Ce sous-objectif regroupe deux grandes catégories de dépenses : d'un côté, les honoraires des professionnels de santé libéraux et de l'autre, les prestations en espèces (indemnités journalières) et les dépenses résultant des prescriptions délivrées par les professionnels de santé (médicaments et dispositifs médicaux).

Pour 2006, son montant est fixé à 65,3 milliards d'euros mais il est le produit d'une redéfinition du périmètre du sous-objectif. A périmètre constant, c'est la somme de 62,4 milliards d'euros qui doit être retenue pour procéder à une comparaison avec l'objectif de l'année précédente. Le respect de cet objectif suppose la consolidation des efforts déjà entamés en matière de gestion du risque (par exemple sur les indemnités journalières, les antibiotiques) et la réalisation de mesures d'économies (par exemple le déremboursement de certains médicaments).

C'est dans le respect de ce sous-objectif que les professions de santé libérale et l'assurance maladie pourront définir de nouveaux objectifs de maîtrise médicalisée des dépenses. C'est au sein de cette discussion conventionnelle que les partenaires pourront « prévoir les modalités selon lesquelles une partie des dépenses évitées pourra être utilisée pour valoriser la rémunération des actes. »

b) Les sous-objectifs « dépenses hospitalières »

Le projet de loi de financement la sécurité sociale pour 2006 propose deux sous-objectifs de dépenses hospitalières.

Le premier, d'un montant de 45,8 milliards d'euros, regroupe les dépenses consacrées aux établissements de santé tarifés à l'activité . Il englobe à la fois les établissements publics et les établissements privés exerçant des activités de médecine, chirurgie, obstétrique, les dépenses entraînées par l'exercice des missions d'intérêt général et d'aides à la contractualisation (Migac) et les dotations complémentaires versées aux établissements de santé anciennement financés par dotation globale. La répartition des sommes entre les activités de médecine, chirurgie et obstétrique et les missions d'intérêt général ne sera connue qu'à l'issue de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, après que le conseil de l'hospitalisation aura fait connaître son avis aux ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.

Le second d'un montant de 17,9 milliards d'euros regroupe les dépenses de soins de suite et de réadaptation, de psychiatrie mais également les dotations budgétaires des hôpitaux locaux, des unités de soins de longue durée ainsi que la contribution de l'assurance maladie au fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés.

Consolidé, « l'Ondam hospitalier » s'élève à 63,7 milliards d'euros pour 2006, soit une progression de 3,44 % par rapport à 2005. L'annexe 9 du projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit 1,14 milliard de mesures d'économies pour les établissements de santé, essentiellement grâce à la poursuite du programme de rationalisation des achats.

c) Les sous-objectifs « dépenses médico-sociales »

Les deux sous-objectifs médico-sociaux concernent pour l'un, les dépenses consacrées aux établissements et services pour personnes âgées, pour l'autre, les dépenses des établissements et services pour personnes handicapées.

Leur montant total est fixé à 10,9 milliards d'euros (respectivement 4,3 milliards et 6,6 milliards d'euros). Cette forte progression des dépenses médico-sociales s'explique par le développement de l'offre de structures assurant une prise en charge sanitaire.

Le plan vieillissement et solidarité a prévu, sur la période 2004-2007, la poursuite de la médicalisation des 8.000 établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, la création de 10.000 places nouvelles en établissements, de 17.000 places de services de soins infirmiers à domicile supplémentaires, de 8.500 places supplémentaires d'accueil de jour et de 4.500 places supplémentaires d'hébergement temporaire.

Le plan adultes handicapés prévoit, sur la période 2005-2007, la création de 6.000 places de services de soins infirmiers à domicile et de services d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés, de 7.900 places en maisons d'accueil spécialisé et foyers d'accueil médicalisé.

Le plan enfance inadaptée prévoit la création de 3.750 places en service d'éducation spéciale et de soins à domicile, 540 places en établissements pour polyhandicapés, 750 places en établissements pour autistes et 360 places d'instituts thérapeutiques éducatifs et pédagogiques.

d) Le sous-objectif « dépenses relatives aux autres modes de prise en charge »

Ce sous-objectif, dont le montant est fixé à 700 millions d'euros, regroupe la dotation nationale en faveur des réseaux, des soins pour les ressortissants français à l'étranger et des dépenses médico-sociales non déléguées à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) tels que les dépenses de centres de soins spécialisés pour toxicomanes, des centres de cure en alcoologie et des appartements de coordination thérapeutique. En 2006, le champ de ces dépenses sera élargi aux centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogues (CAARUD), pour lesquels l'article 33 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 crée un objectif spécifique.

La création de cet objectif peut être source de confusion. Il convient de bien distinguer les sous-objectifs de l'Ondam, prévus par la loi organique relative au lois de financement de la sécurité sociale et d'autres objectifs prévus par le code de la sécurité sociale et dans la filiation desquels s'inscrit le nouvel objectif prévu par l'article 33. Il existe ainsi deux objectifs hospitaliers prévus aux articles L. 162-22-9, qui définit un objectif de dépenses d'assurance maladie commun aux activités de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologique, dit ODMCO, et L. 174-1-1, qui délimite un objectif de dépenses d'assurance maladie, ou Ondam, constitué des activités suivantes : hôpitaux locaux, soins de suite et réadaptation, activités psychiatriques. Afin d'éviter les confusions, il serait opportun de ne plus parler dans ces derniers cas « d'objectifs » mais plutôt « d'agrégats comptables ».

* 5 Cour des comptes, la sécurité sociale, septembre 2005.

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