I. V. OBSERVATIONS SUR LES OBJECTIFS ET INDICATEURS DES PROGRAMMES COMPOSANT CHACUNE DES MISSIONS

A. LES OBJECTIFS ET INDICATEURS DE LA MISSION « ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ETAT » : UN BILAN CONTRASTÉ

1. Des objectifs et indicateurs pertinents et complets pour le programme 117 « Charge de la dette et trésorerie de l'Etat »

Le programme 117 « Charge de la dette et trésorerie de l'Etat » fait l'objet de huit objectifs de performance, assortis chacun d'un indicateur (les objectifs n os 3, 4, 5 et 7) ou deux (les objectifs n os 1, 2, 6 et 8 50 ( * ) ) :

1.- « couvrir le programme d'émission en toute sécurité » ;

2.- « améliorer la pertinence des choix de mise en oeuvre de la gestion de la dette obligataire » ;

3.- « piloter la durée de vie moyenne de la dette après swaps » ;

4.- « gérer de manière satisfaisante l'extinction progressive de la dette financière non négociable » ;

5.- « limiter le solde du compte de l'Etat à la Banque de France en fin de journée » ;

6.- « placer les excédents ponctuels de trésorerie de l'Etat au meilleur prix » ;

7.- « améliorer l'information préalable par les correspondants du Trésor de leurs opérations financières affectant le compte du Trésor » ;

8.- « obtenir un niveau de contrôle des risques de qualité constante et qui minimise la surveillance d'incidents ».

a) Un satisfecit parlementaire
(1) Le constat a déjà été fait, par le Parlement, de la qualité globale des objectifs et indicateurs du programme 117

Votre commission des finances et la commission des finances de l'Assemblée nationale, dans leurs travaux respectifs sur les objectifs et indicateurs de performance 51 ( * ) , ainsi que votre rapporteur spécial, à l'occasion de sa mission de contrôle budgétaire, au titre de l'article 57 de la LOLF, sur la gestion de la dette dans le contexte européen 52 ( * ) , ont déjà exprimé leur satisfaction, d'une manière générale, concernant les objectifs et indicateurs du programme 117 et, plus généralement, concernant la stratégie de performance de gestion de la dette élaborée et mise en oeuvre par l'AFT . Sans revenir sur le détail des objectifs et indicateurs en cause, il convient ici d'en souligner à nouveau les qualités globales de clarté , de précision , et de pertinence pour le programme, fournissant aux gestionnaires, comme au Parlement, une information utile.

Cette stratégie a d'ailleurs été élaborée progressivement par l'AFT depuis le projet de loi de finances pour 2002, en présentant chaque année au Parlement, au sein du fascicule retraçant le budget des charges communes, une sorte de programme de préfiguration. Au reste, le budget général constituant le support explicatif privilégié des politiques publiques, et dans le souci de donner une vision cohérente de son action, l'Agence a choisi de présenter sa démarche à l'appui des crédits du programme 117, alors même que les opérations effectives seront retracées sur le compte de commerce prévu par le II de l'article 22 de la LOLF, déjà mentionné, et que ces crédits sont seulement destinés à assurer l'équilibre de la section 1 du compte 53 ( * ) .

(2) Plusieurs préconisations d'amélioration formulées par le Parlement ont été suivies dans le présent projet de loi de finances

Dans leur rapport sur la mise en oeuvre de la LOLF, nos collègues députés Michel Bouvard, Didier Migaud, Charles de Courson et Jean-Pierre Brard 54 ( * ) relevaient que l'objectif n° 3 du programme 117, alors intitulé « réduire la durée de vie moyenne de la dette après swaps » , ne traduisait pas correctement la nature réelle de la stratégie poursuivie en matière de durée de vie de la dette . Le rapport fait en effet valoir que réduire la durée de vie de la dette n'est pas un objectif en soi, et que l'Etat, à travers la mise en oeuvre du programme de swaps de taux d'intérêt, poursuit en réalité un double but :

- d'une part, « déconnecter la durée de vie effective de la dette de sa structure, qui résulte des émissions effectuées aujourd'hui et par le passé et qui constitue une donnée de fait très rigide (les émissions de l'année ne représentent que 10% à 13% du stock total de dette) » ;

- d'autre part, « utiliser ce degré de liberté pour trouver une durée de vie effective qui optimise le positionnement de la dette de l'État sur la courbe des taux : une durée de vie effective plus courte procure, statistiquement, des économies, mais expose la charge d'intérêt à une variabilité plus forte ; une durée de vie effective plus longue est plus coûteuse, en tendance, mais sécurise la charge d'intérêt. Il y a donc un arbitrage à rendre ».

Nos collègues députés préconisaient en conséquence la reformulation de l'objectif , en vue de clarifier les déterminants du processus d'optimisation en cause. Votre rapporteur spécial constate avec satisfaction que l'AFT a suivi cette recommandation : l'objectif n° 3 est désormais libellé comme « piloter la durée de vie moyenne de la dette après swaps ».

En ce qui concerne les indicateurs, le même rapport avait émis diverses propositions de retouche ou de suppression (s'agissant des objectifs n os 2, 3, 6 et 7), dont plusieurs ont également été suivies dans le présent projet de loi. Il va sans dire que votre rapporteur spécial se félicite de ce « dialogue constructif » entre le Parlement et l'AFT .

L'échange, d'ailleurs, fonctionne dans les deux sens. Par exemple, dans l'une de ses réponses au questionnaire budgétaire, l'AFT s'explique sur le maintien de l'objectif n° 7 du programme (« améliorer l'information préalable par les correspondants du trésor de leurs opérations financières affectant le compte du Trésor »). Nos collègues députés précités avaient reproché à cet indicateur de constituer, plutôt qu'un réel objectif de la politique de l'Etat en matière de gestion de la trésorerie et de maîtrise des risques, une démarche accessoire. Pour l'AFT, « conformément à la décision du Conseil constitutionnel n° 2003-489 du 29 décembre 2003 qui arrête que l'obligation d'information préalable participe au bon usage des deniers publics , qui est une exigence de valeur constitutionnelle », il y avait lieu de maintenir « cet objectif important pour la gestion publique ». Au surplus, si l'indicateur unique retenu pour cet objectif ne concerne que les collectivités territoriales (« taux d'annonce par les collectivités locales de leurs opérations financières supérieures à un million d'euros et affectant le compte du Trésor »), le programme annuel de performance indique que cet indicateur a vocation à être étendu progressivement à l'ensemble des correspondants du Trésor, établissements publics inclus.

b) Une incitation à la « recentralisation » des dettes de l'Etat sous l'égide de l'AFT

La qualité reconnue de la démarche de performance, en termes de rendement mais aussi de risque, définie par l'AFT, a conduit votre rapporteur spécial à préconiser, dans un rapport d'information, précité, sur la gestion de la dette dans le contexte européen 55 ( * ) , en vue d'améliorer la couverture des risques financiers liés à la dette de l'Etat, une « recentralisation » de la gestion de celle-ci, aujourd'hui excessivement fragmentée 56 ( * ) , en faisant de l'AFT le pivot de cette gestion consolidée .

Ne peuvent que conforter cette proposition les signes positifs de « collaboration » de l'AFT avec le Parlement dont témoignent encore, dans le présent projet de loi, la prise en compte par l'Agence des recommandations qui lui ont été adressées , voire les justifications, confirmant son professionnalisme, qu'elle donne aux options différentes qu'elle a retenues.

* 50 Les indicateurs de l'objectif n° 8 font eux-mêmes l'objet de sous-indicateurs (deux pour l'indicateur n° 1, trois pour l'indicateur n° 2).

* 51 Jean Arthuis, rapport d'information n° 220 (2004-2005) sur les objectifs et les indicateurs de la LOLF ; Michel Bouvard, Didier Migaud, Charles de Courson et Jean-Pierre Brard, rapport d'information n° 2161 (XII e législature) sur la mise en oeuvre de la LOLF.

* 52 Rapport d'information n° 476 (2004-2005) précité.

* 53 Cf.ci-dessus, IV, A, 2, a (2).

* 54 Rapports d'information n° 2161 (XII e législature), précité.

* 55 Rapport d'information n° 476 (2004-2005).

* 56 Cf. les dettes gérées par ERAP, Réseau ferré de France (RFF), le Service annexe d'amortissement de la dette (SAAD, pour 9 milliards d'euros), la CADES (représentant 39 milliards d'euros d'émission en 2005), le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ». L'endettement de Charbonnages de France, comme on l'a plus haut relevé déjà, doit faire l'objet d'une reprise par l'Etat.

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