N° 129

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2005-2006

Annexe au procès-verbal de la séance du 14 décembre 2005

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances rectificative pour 2005 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE.

Par M. Philippe MARINI,

Sénateur,

Rapporteur général.

(Tome I : Exposé général et examen des articles)

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis, président ; MM. Claude Belot, Marc Massion, Denis Badré, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Yann Gaillard, Jean-Pierre Masseret, Joël Bourdin, vice-présidents ; M. Philippe Adnot, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Moreigne, François Trucy, secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; MM.  Bernard Angels, Bertrand Auban, Jacques Baudot, Mme Marie-France Beaufils, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Mme Nicole Bricq, MM. Auguste Cazalet, Michel Charasse, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Eric Doligé, Jean-Claude Frécon, Yves Fréville, Paul Girod, Adrien Gouteyron, Claude Haut, Jean-Jacques Jégou, Roger Karoutchi, Alain Lambert, Gérard Longuet, Roland du Luart, François Marc, Michel Mercier, Gérard Miquel, Henri de Raincourt, Michel Sergent, Henri Torre, Bernard Vera.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 2700 , 2720 et T.A. 515

Sénat : 123 (2005-2006)

Lois de finances rectificatives.

AVANT-PROPOS

Le projet de loi de finances rectificative de fin d'année occupe une place à part au sein de la procédure budgétaire.

Il est d'abord le moment de faire un premier bilan des conditions d'exécution de la loi de finances en cours ; il constitue, ensuite, selon les cas, soit la « session de rattrapage » pour toutes les mesures à caractère financier qui n'ont pas pu trouver leur place dans le projet de loi de finances de l'année suivante, soit une sorte de « voiture balai » servant à purger toutes ces mesures d'ajustement qui ne demandent qu'à sortir des tiroirs de l'administration.

Enfin, ses modalités de discussion et, en particulier, le fait qu'il intervienne, au Sénat, à l'extrême fin de la « session », à l'issue d'un marathon budgétaire le plus souvent épuisant, et qu'il prenne place à l'intérieur d'un calendrier parlementaire particulièrement contraint, en font un exercice difficile et ingrat.

Le côté « inventaire à la Prévert » des mesures qu'il comporte, souvent ponctuelles mais parfois d'envergure, a tendance à occulter sa portée politique .

La loi de finances rectificative devrait être l'occasion solennelle pour le Parlement de demander des comptes au gouvernement sur sa gestion à un moment où il peut encore peser sur les processus de décision .

A la différence de la loi de règlement qui constitue un moment de vérité budgétaire certes, mais qui, par nature, n'intervient qu'après la fin de la partie, les collectifs budgétaires ont une portée directement opérationnelle.

Le Parlement devrait en saisir l'occasion pour n'accorder son concours que s'il se sent suffisamment informé des raisons pour lesquelles on lui demande d'ajuster les crédits ou de procéder à des adaptations législatives.

La loi de finances rectificative gagnerait à mettre plus l'accent sur sa fonction originelle de « point d'étape » de la politique économique et budgétaire du gouvernement , au cours duquel celui-ci rend des comptes sur sa politique économique et fiscale, au lieu d'être le véhicule commode de tous les ajustements budgétaires ou législatifs, auxquels on ne souhaite pas toujours donner trop de publicité.

Le présent projet de loi de finances rectificative n'échappe pas à « la loi du genre ». Les mêmes causes, produisant les mêmes effets, votre commission des finances a été amenée à traiter d'un grand nombre de sujets, en quelques jours, voire en quelques heures lorsqu'il s'agit de dispositions introduites par voie d'amendement à l'Assemblée nationale, au risque de laisser dans l'ombre, l'analyse, pourtant indispensable à ce stade, de la procédure des conditions d'exécution du budget ainsi que de la pertinence des hypothèses de construction du budget en cours.

*

Une politique de maîtrise de la dépense, qui a permis de faire face à des moins-values de recettes non négligeables.

2004 avait été l'année des bonnes surprises , au cours de laquelle notre pays avait touché les fruits de la prudence avec laquelle avaient été établies les prévisions de croissance et de recettes fiscales.

2005 avait commencé sous des auspices nettement moins favorables . La faiblesse de l'activité en début d'année avait fait même craindre à votre rapporteur général des moins-values de recettes conséquentes.

Aujourd'hui , le rétablissement , au moins relatif, de la conjoncture le conduit à corriger ces anticipations, même si, comme on pouvait s'y attendre les recettes fiscales marqueront un recul sensible par rapport aux prévisions initiales.

Cela est vrai, en particulier, de l'impôt sur les sociétés qui va se trouver en net repli au regard des quelques 42,6 milliards d'euros inscrits en loi de finances initiale.

Si le présent projet de loi de finances parvient à améliorer le solde budgétaire de plus d'un milliard d'euros, très exactement 1,102 milliard d'euros à l'issue des votes de l'Assemblée nationale, cela tient très largement aux efforts remarquables de maîtrise de la dépense .

Le montant total des dépenses ou plafond des charges figurant à l'article 8 relatif à l'équilibre fait apparaître une diminution de plus de 3 milliards d'euros. Il y a là une « ressource » qui va permettre de financer une hausse des prélèvements sur recettes en faveur des Communautés européennes et des collectivités locales à concurrence de 1,07 milliard d'euros, une diminution des recettes de 1,34 milliard d'euros, ainsi que des ouvertures de crédits pour un montant d'un peu plus de 1,3 milliard d'euros.

*

Un fourre-tout législatif qui conduit à se poser des questions de méthode de travail parlementaire.

S'agissant du contenu législatif du présent projet de loi de finances, les chiffres parlent d'eux-mêmes : aux 44 articles du texte initial, se sont ajoutés en première lecture à l'Assemblée nationale, 53 articles additionnels, soit dix articles de plus que l'année dernière, qui était pourtant une « année faste » à cet égard.

La fatalité qui consiste à voir les collectifs de fin d'année enfler de façon considérable et, en l'occurrence, doubler de volume, pose une question de méthode.

Le Parlement peut-il, décemment, étudier en si peu de temps autant de mesures, aussi diverses que ponctuelles, dont on a des raisons de croire qu'elles proviennent très largement du gouvernement, même lorsqu'elles sont déposées par des parlementaires ?

Votre commission des finances comprend parfaitement qu'il y ait des mesures très spécifiques nécessitant une intervention du législateur. Mais, ce qui est contestable c'est de les découvrir sans avoir la possibilité de les expertiser à la fois sur les plans technique, économique, et financier.

Votre rapporteur général est convaincu qu'il y aurait lieu de rassembler ce type de mesures dans des textes portant diverses mesures d'ordre économique et financier, dont l'hétérogénéité du contenu ferait alors partie de la loi du genre, et qui constitueraient des véhicules « tout terrain » pour mettre à jour notre législation économique et financière .

Il y aurait là, aussi, un moyen de limiter au strict nécessaire le nombre de mesures fiscales inscrites dans les textes sectoriels, qui, quelle que soit leur légitimité du point de vue de la lisibilité de la politique gouvernementale, ont l'inconvénient de ne pas garantir la cohérence de la politique fiscale et même parfois d'enclencher un processus de surenchère dans l'octroi des avantages fiscaux.

Mais le présent projet de loi de finances rectificative se distingue de celui de l'année dernière en ce qu'il est aussi porteur d'une réforme d'envergure, celle des plus-values sur valeurs mobilières , dont on note qu'elle ne produira effectivement ses effets qu'à compter de 2014. Peut être aurions-nous pu avoir recours dans le cas d'espèce à une loi fiscale spécifique qui aurait permis au Parlement d'examiner sereinement tous les tenants et les aboutissants de la réforme.

*

L'amélioration du déficit que traduit le présent projet de loi de finances rectificative, est un bon signal mais il faut bien en souligner la portée encore limitée.

D'une part, la réduction du déficit à 44 milliards d'euros, contre 45 milliards d'euros dans le texte initial du présent projet de loi de finances initiale, ne résout pas les problèmes d'exécution. Si dans les chiffres associés à la présentation du projet de loi de finances pour 2006 il est fait mention d'un déficit prévisionnel de 46,8 milliards d'euros, supérieur à celui fixé par le présent projet de loi de finances rectificative, c'est en raison de l'importance des reports dont la consommation sera source de tensions en exécution .

D'autre part, le sens favorable de cette évolution ne doit pas faire oublier l'importance du déficit en valeur absolue et la contribution qu'il apporte à l'augmentation de la dette.

L'état de dépendance dans laquelle ils se trouvent ne peut déboucher que sur des réveils difficiles, quand notamment en raison de la hausse des taux d'intérêts, la charge de la dette va venir absorber une part à nouveau croissante du budget de l'Etat et exercer un effet d'éviction au détriment de toutes les politiques publiques.

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