ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 36
quindecies (nouveau)
Adaptations du régime des sociétés
immobilières cotées
Commentaire : le présent article additionnel procède à plusieurs adaptations du régime des sociétés immobilières cotées (SIIC) en vue, notamment, d'empêcher la constitution de SIIC captives et de supprimer l'effet d'aubaine fiscale pour certains investisseurs étrangers.
I. LE SUCCÈS ÉCONOMIQUE DES SIIC
Votre commission des finances, depuis trois ans, a accompagné la mise en oeuvre d'une réforme des sociétés françaises d'investissements immobiliers cotées qui a été inspirée par le double objectif d'accroître la capitalisation boursière de la place de Paris et d'attirer l'épargne vers un secteur immobilier important pour le développement de l'économie.
En 2003, les SIIC françaises étaient peu nombreuses, d'une faible capitalisation boursière (12,5 milliards d'euros pour 22,5 milliards d'euros d'actifs gérés) et fortement défavorisées par rapport à leurs concurrents européens allemands, belges et néerlandais qui bénéficiaient de régimes fiscaux plus favorables.
Elles sont aujourd'hui un moteur du secteur de l'immobilier d'entreprise et commercial, une source non négligeable de ressources pour l'Etat et les collectivités territoriales et un modèle suivi par de nombreux pays européens (Grande-Bretagne et Italie notamment).
A. UN RÉGIME JURIDIQUE ET FISCAL NOVATEUR
Le premier étage du statut des sociétés d'investissements immobiliers cotées (SIIC), dont l'objet principal est « l'acquisition ou la construction d'immeubles en vue de la location, ou la détention directe ou indirecte de participations dans des personnes dont l'objet social est identique », a été mis en place par l'article 11 de la loi de finances pour 2003 (n° 2002-1575 du 30 décembre 2002).
Les SIIC se sont vues offrir la possibilité d'opter pour un régime de transparence fiscale en contrepartie duquel, d'une part, elles sont assujetties à une obligation de distribution de la quasi-totalité (soit 85 %) de leurs bénéfices et de 50 % des plus-values de cessions d'actifs et, d'autre part, elles doivent verser, lors de l'option pour le régime SIIC, une taxe au taux réduit de 16,5 % (« exit tax ») sur la réévaluation des actifs, le versement étant étalé sur quatre ans et ce taux étant conditionné par une durée de conservation des titres de cinq ans.
Ce régime initial a été complété par un volet « SIIC 2 » depuis le 1 er janvier 2005.
En vue de favoriser l'externalisation de la gestion de leur patrimoine immobilier , les sociétés assujetties à l'impôt sur les sociétés ont été autorisées à apporter leurs actifs immobiliers (immeubles ou contrats de crédit-bail immobilier) à des sociétés foncières faisant appel public à l'épargne en s'acquittant d'un impôt sur les sociétés en bénéficiant du taux réduit de 16,5 %, à la condition que la société bénéficiaire de l'apport s'engage à conserver ces actifs pendant 5 ans.
A compter du 1 er janvier 2006, le statut « SIIC 3 » a élargi cette faculté, sous les mêmes conditions, aux opérations de cessions (et non uniquement aux apports) d'actifs immobiliers à des sociétés foncières faisant appel public à l'épargne ou agrées par l'Autorité des marchés financiers. L'objectif de cette mesure, qui doit expirer le 31 décembre 2007, est de simplifier les opérations de transfert des patrimoines immobiliers des utilisateurs vers les SIIC, SCPI et OPCI.
Le régime « SIIC 3 » a permis également de clarifier le traitement fiscal des filiales des sociétés d'investissement immobilier cotées. La neutralité fiscale est assurée aux « SIIC filles » dès lors que les « SIIC mères » en ont le contrôle de droit ou de fait.
B. UN EFFET DYNAMISANT QUI A PROFITÉ À L'ENSEMBLE DE L'ÉCONOMIE NATIONALE
Après quatre ans de mise en oeuvre, le bilan économique, fiscal et sociétal du nouveau statut SIIC, sur le secteur de l'immobilier, sur le développement de l'activité des foncières cotées, et sur l'ensemble de l'économie française est incontestablement très positif .
Il fait apparaître que l'adoption du statut en 2003 a eu cinq effets de levier majeurs sur les fondamentaux économiques du secteur immobilier en France, devenu en 2006 le premier marché pour l'immobilier tertiaire en Europe par la taille de son parc et les montants investis annuellement :
- sur les investissements à long terme : les investissements de long terme réalisés par les SIIC ont été multipliés par 5 en trois ans, ce qui a contribué à la dynamique de l'ensemble du secteur immobilier, avec des incidences très positives sur la croissance de l'économie française ;
Investissements réalisés par les SIIC et autres foncières en France 2003-2006
(en milliards d'euros)
Source : Institut de l'épargne immobilière et foncière
- sur la création d'entreprises : le nombre de SIIC a doublé depuis 2003, avec environ 40 sociétés existantes en 2006 ;
- sur la capacité de financement des SIIC et d'autres secteurs d'activités : près de 2,5 milliards d'euros de fonds propres nouveaux ont été levés en trois ans par les SIIC, permettant de financer efficacement le développement de leurs activités et celles des entreprises, tous secteurs confondus, qui font appel à elles ;
Répartition des investissements des SIIC par secteur d'activités 2004-2006
(en milliards d'euros)
Source : Institut de l'épargne immobilière et foncière
- sur les performances boursières de la place de Paris : la capitalisation boursière des SIIC a presque triplé depuis 2001, s'élevant à plus de 37 milliards d'euros en novembre 2006. Les SIIC représentent, en 2006, 2 % de la capitalisation boursière totale de la place de Paris (contre environ 1 % en 2003) ;
- sur les recettes fiscales de l'Etat et des collectivités territoriales : s'agissant de l' exit tax payée à l'Etat par les SIIC depuis 2003, elle a créé un flux moyen de recettes annuelles de 300 millions d'euros, soit 1,65 milliard d'euros de 2003 à 2006. S'y ajoutent la fiscalité acquittée par les entreprises qui externalisent leurs actifs immobiliers vers les SIIC ainsi que les droits de mutation perçus par les collectivités territoriales, qui ont crû à due proportion.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Dans l'esprit du statut mis en place durant ces dernières années, votre rapporteur général propose de nouvelles modifications de la réglementation relative aux SIIC et sociétés immobilières faisant appel public à l'épargne.
Il est apparu nécessaire, en effet, de mieux garantir le respect des objectifs de la réforme de 2003 et d'éviter les effets d'aubaine fiscale notamment en limitant la création de sociétés détenues très majoritairement par le même actionnaire ainsi que le cumul d'exonérations fiscales par les investisseurs étrangers.
Le présent article additionnel a donc pour objet d'aménager le régime d'exonération d'impôt sur les sociétés en faveur des sociétés d'investissements immobiliers cotées (SIIC), prévu aux articles 208 C et suivants du code général des impôts, et le dispositif de taxation à taux réduit des plus-values de cession d'immeubles à des sociétés immobilières faisant appel public à l'épargne, prévu à l'article 210 E du même code. Il inclut également un aménagement du régime des plus-values professionnelles et du régime des SIIC en faveur du secteur des hôtels, cafés et restaurants (HCR).
A. EVITER LES SIIC « CAPTIVES » ET LES AUBAINES FISCALES
S'agissant du régime des SIIC, afin de faciliter et de diversifier l'accès au capital de ces sociétés et d'éviter la création de SIIC captives c'est-à-dire contrôlées par un actionnaire dominant, situation contraire à l'esprit du dispositif, il est proposé de limiter la participation d'un actionnaire ou d'un groupe d'actionnaires à 60 % du capital et d'introduire une condition de dispersion du capital, à hauteur de 15 % de celui-ci , appréciée à l'entrée dans le régime.
La participation de l'actionnariat majoritaire est définie par la détention du capital directe ou indirecte , par une ou plusieurs personnes agissant de concert au sens de l'article L. 233-10 du code de commerce.
La condition de dispersion du capital est définie par la détention à hauteur de 15 % au moins, du capital et les droits de vote des sociétés visées par des personnes qui détiennent chacune, directement ou indirectement, moins de 2 % du capital et des droits de vote.
Ces deux conditions seraient exigées à compter du 1 er janvier 2009.
Par ailleurs, le champ de l'exonération des activités de location immobilière serait étendu à la location et aux plus-values de cession de certains droits réels immobiliers strictement énumérés : usufruits, baux emphytéotiques et baux à construction.
Divers aménagements techniques sont en outre proposés, visant à neutraliser les conséquences des restructurations des groupes de SIIC en cas d'acquisition d'une SIIC par une autre, ou en cas de cession d'immobilisations au sein du même groupe exonéré formé par une SIIC et ses filiales. Il est également proposé d'autoriser l'exonération des filiales qui seraient détenues conjointement par plusieurs SIIC, et d'assouplir les conditions d'exonération des dividendes versés par une SIIC à une autre SIIC. Ces dispositions ont pour objectif de permettre les restructurations internes des SIIC, visant notamment à créer des SIIC spécialisées, mais aussi à donner la possibilité aux SIIC de mener des opérations communes.
En complément de ces propositions techniques, un dispositif anti-abus est proposé visant les distributions pour lesquelles les associés bénéficient d'une exonération au titre des règles d'imposition qui leur sont propres : la SIIC serait alors redevable d'un prélèvement, fixé forfaitairement à 20 %, sur ces distributions lorsqu'elles sont versées à des associés qui détiennent une quote-part importante du capital et qui ne seraient pas imposés sur ces revenus. Cette disposition vise plus particulièrement les investisseurs de certains pays pour lesquels les conventions fiscales aboutissent à une double exonération.
S'agissant du régime de taxation à taux réduit prévu à l'article 210 E du code général des impôts, le dispositif précise que les sociétés cessionnaires faisant appel public à l'épargne concernées s'entendent uniquement de celles le faisant au moyen de titres donnant obligatoirement accès au capital.
En outre, ce dispositif serait étendu aux filiales de SIIC et de sociétés de placement à prépondérance immobilière à capital variable mentionnées au 3° nonies de l'article 208 du code général des impôts ayant le même objet.
B. L'OUVERTURE DES SIIC AU SECTEUR DES HÔTELS, CAFÉS ET RESTAURANTS
Poursuivant la diversification des secteurs économiques dans lesquels elles exercent leur activité, les sociétés immobilières cotées se sont intéressées au secteur des hôtels, cafés et restaurants (HCR). Après une large concertation entre les professionnels concernés, un dispositif a été mis au point, qui permettrait de satisfaire les deux parties, en ouvrant de nouvelles possibilités de développement aux SIIC et en favorisant le maintien de l'activité dans le secteur HCR.
Votre rapporteur général a estimé que cette opportunité méritait d'être soutenue même si elle ne paraît pas devoir constituer un élément très important de l'activité des foncières cotées.
Le présent article additionnel propose donc un nouveau dispositif consistant à aménager un report d'imposition sur les plus-values réalisées par des personnes exerçant leur activité dans le secteur des hôtels, cafés, restaurants (HCR) lors de la cession de leur actif immobilier à une société d'investissements immobiliers cotée (SIIC) ou à une société de placement à prépondérance immobilière à capital variable (SPPICAV) ou à une de leur filiale.
La plus-value à long terme dégagée lors de la cession à une SIIC d'un actif immobilier d'exploitation détenu depuis au moins cinq ans par une entreprise individuelle soumise à un régime réel d'imposition pourrait faire l'objet d'un report d'imposition et d'un abattement de 10 % par année de détention . Pour pouvoir bénéficier de ce régime, le cédant devrait continuer d'exploiter son hôtel, café ou restaurant dans les murs cédés, qui doivent lui être mis à disposition par le cessionnaire.
Corrélativement, les sociétés cessionnaires (SIIC, SPICAV ou leurs filiales) bénéficieraient d'une obligation de distribution réduite (50 %) par rapport à celle qui est actuellement prévue en matière de revenus locatifs (85 %) ; cet avantage serait subordonné à une condition de mise à disposition des murs acquis au cédant , et en cas de cessation de l'activité de celui-ci, au maintien du bien immobilier dans le secteur des hôtels, cafés, restaurants. La mise à disposition des murs acquis au cédant devrait être réalisée dans le cadre d'une durée d'au moins neuf ans à compter de la date de cession.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.