EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat a été saisi, le 15 janvier 2007, au titre de l'article 88-4 de la Constitution, d'une proposition de décision du Conseil portant création de l'Office européen de police (Europol). Elle est présentée par la Commission européenne.

Le titre de cette proposition est trompeur puisqu'en réalité, Europol a été créé en 1995 par une convention conclue entre les Etats membres 1 ( * ) , son démarrage effectif remontant au 1 er juillet 1999. Depuis lors, trois protocoles adoptés en 2000, 2002 et 2003 sont venus modifier la Convention Europol, notamment pour élargir son champ de compétences et renforcer ses capacités d'analyse. La Convention Europol est une convention internationale classique dont l'adoption et les éventuelles modifications sont soumises à ratification ou approbation parlementaire dans les Etats membres. Cette procédure lourde explique qu'aucun de ces trois protocoles ne soit à ce jour entré en vigueur faute d'avoir été ratifié rapidement par tous les Etats membres 2 ( * ) .

La proposition de la Commission européenne vise à modifier la base juridique d'Europol en l'instituant sur le fondement d'une décision du Conseil englobant toutes les modifications déjà prévues par les trois protocoles précités ainsi que de nouvelles modifications accroissant encore ses compétences et capacités d'action.

Le débat autour du fondement juridique d'Europol n'est pas nouveau. Le traité constitutionnel ouvrait la voie à la normalisation de la base juridique. Plus récemment, le Conseil « Justice Affaires intérieures » de juin 2006 a demandé que soit étudié « l'éventualité et les modalités d'un remplacement, au plus tard le 1 er janvier 2008 ou dans les plus brefs délais après cette date, de la Convention Europol par une décision du Conseil ».

L'abandon d'une convention intergouvernementale classique au profit d'un instrument de droit dérivé aurait pour principale conséquence que les parlements nationaux se verraient privés du droit d'autoriser ou non toute modification d'Europol. Les gouvernements conserveraient en revanche leur droit de veto, la décision du Conseil ne pouvant être modifiée qu'à l'unanimité.

Les parlements nationaux perdraient donc sans contrepartie un pouvoir de contrôle dans un domaine où la souveraineté des Etats reste très marquée.

C'est la raison pour laquelle la délégation pour l'Union européenne a adopté, le 24 janvier 2007 et en application de l'article 73 bis du règlement, une proposition de résolution présentée par notre collègue Robert Del Picchia. Renvoyée à votre commission des lois, elle fait l'objet du présent rapport.

La proposition de résolution a un unique objet : exiger une meilleure association des parlements nationaux au contrôle des activités d'Europol , en particulier à travers la création d'une commission, composée de parlementaires européens et nationaux, chargée du suivi des activités d'Europol.

En réalité, il s'agit d'une idée désormais ancienne régulièrement évoquée, voire soutenue, par l'ensemble des institutions européennes et nationales, mais qui ne se concrétise jamais. Le Sénat en est l'un des défenseurs les plus ardents et constants.

En novembre 2003, votre commission des lois avait d'ailleurs adopté une proposition de résolution, devenue résolution du Sénat, ayant déjà pour seul objet la création d'une commission parlementaire de contrôle d'Europol 3 ( * ) . La présente proposition de résolution répond très exactement aux mêmes motivations.

Après avoir rappelé l'histoire et la légitimité de l'idée de créer une commission de contrôle composée notamment de parlementaires nationaux, votre rapporteur exposera les raisons pour lesquelles l'adoption de la proposition de décision du Conseil en justifierait plus encore la création.

I. UNE COMMISSION MIXTE PARLEMENTAIRE POUR CONTRÔLER UN OFFICE EUROPÉEN DE POLICE AUX POUVOIRS CROISSANTS

A. L'ÉVOLUTION D'EUROPOL DEPUIS 1995 : DES COMPÉTENCES ET DES MOYENS ACCRUS SANS UNE AMÉLIORATION ÉQUIVALENTE DES CONTRÔLES

1. Des moyens croissants

Les effectifs et le budget d'Europol ont connu une progression très forte depuis le démarrage effectif de la structure, le 1 er juillet 1999.

De 210 en 1999, les effectifs sont passés à 536 personnes à la fin de l'année 2005. Quant au budget, il est passé de 19 millions d'euros en 1999 à 65,8 millions d'euros en 2005.

* 1 Convention sur la base de l'article K 3 du traité sur l'Union européenne portant création d'un Office européen de police dite Convention Europol publié au JOCE du 27 novembre 1995 et entrée en vigueur le 1 er octobre 1998.

* 2 Ils devraient entrer en vigueur dans le courant des mois de mars et avril 2007.

* 3 Résolution n° 13 (2003-2004) adoptée sur le rapport de notre collègue Alex Türk (n° 58. 2003-2004). Cette résolution avait été adoptée à propos du protocole du 27 novembre 2003 modifiant la Convention Europol.

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