B. LES FORCES ET FAIBLESSES DU BUDGET DE LA MISSION « JUSTICE »

La mission « Justice », composée de cinq programmes 4 ( * ) , est dotée, dans le projet de loi de finances pour 2008, de 6,519 milliards d'euros de crédits de paiement , soit une progression de + 4,5 % .

Le tableau ci-après ventile les crédits, ainsi que les plafonds d'emploi en équivalents temps plein travaillé (ETPT).

Dans un contexte budgétaire globalement tendu, la progression de 4,5 % des crédits de la mission marque l'importance attachée à la justice et la priorité accordée à ses moyens.

Toutefois, votre rapporteur spécial rappelle que la progression des crédits ne saurait seule suffire à porter un jugement positif sur le projet de budget de cette mission . La logique de la loi organique n° 2001-649 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) renvoie en effet à un impératif de performance. Aussi, l'augmentation des moyens budgétaires renforce d'autant l'obligation de résultat incombant aux acteurs de la justice.

De ce point de vue, votre rapporteur spécial souligne, pour s'en réjouir, certains éléments de progrès au sein de la mission :

- la maîtrise des frais de justice , amorcée en 2006 et poursuivie en 2007, devrait se confirmer en 2008. Après avoir connu une progression exponentielle analysée par votre rapporteur spécial dans ses rapports d'information sur « La LOLF dans la justice : indépendance de l'autorité judiciaire et culture de gestion » 5 ( * ) et consécutif à l'enquête demandée à la Cour des comptes en application de l'article 58-2° de la LOLF 6 ( * ) , ces frais ont été contenus sous le double effet bénéfique de mesures volontaristes décidées par la chancellerie et d'une prise de conscience salutaire de la part des magistrats prescripteurs. Cette maîtrise a été obtenue sans remise en cause de la liberté de prescription du magistrat ;

- le développement d'une culture de gestion dans l'esprit de la LOLF , comme a pu le souligner votre rapporteur spécial dans son rapport d'information sur la formation des magistrats et des greffiers en chef à la gestion 7 ( * ) ;

- la poursuite de la mise en oeuvre de la LOPJ 8 ( * ) pour la rénovation et la construction d'établissements pénitentiaires .

Pour autant, la mission « Justice » se caractérise également par un certain nombre d'interrogations persistantes :

- le système de l'aide juridictionnelle est à bout de souffle , ainsi que l'a montré le récent rapport d'information de votre rapporteur spécial 9 ( * ) . Face à un accroissement considérable du nombre des bénéficiaires de cette aide depuis 1991, le dispositif court un risque d'asphyxie budgétaire appelant une remise à plat de ce mécanisme. Seule une réforme en profondeur pourra permettre de préserver l'esprit même de ce « filet de sécurité » pour les justiciables les plus démunis ;

- alors qu'aucune réforme de structure n'a été engagée depuis 1958, une rationalisation des moyens de l'institution judiciaire sur le territoire s'impose. La réforme engagée de la carte judiciaire répond donc à une exigence d'efficacité, mais elle doit se concilier avec le souci de ne pas éloigner la justice du justiciable ;

- le rythme de sortie et le volume des promotions de l'école nationale des greffes (ENG) ne permet pas de compenser le déficit actuel de greffiers au regard du nombre de magistrats en juridiction . L'allongement de la durée de scolarité à l'ENG (passée de 12 à 18 mois en 2003) ainsi que la pyramide des âges des greffiers (nombreux départs à la retraite dans les années à venir) constituent autant de circonstances aggravantes au regard de ce déséquilibre des effectifs ;

- la vétusté de certains établissements pénitentiaires ainsi que la surpopulation carcérale renvoient à des dizaines d'années d'insuffisance. Elles se conjuguent pour créer une situation tout à la fois attentatoire à la dignité humaine et source de promiscuité , c'est-à-dire facteur de « contagion » de la délinquance , contraire à l'objectif premier de la peine, à savoir l'amendement du condamné.

* 4 « Justice judiciaire », « Administration pénitentiaire », « Protection judiciaire de la jeunesse », « Accès au droit et à la justice » et « Conduite et pilotage de la politique de la justice et organismes rattachés ».

* 5 Sénat, rapport d'information n° 478 (2004-2005).

* 6 Sénat, rapport d'information n° 216 (2005-2006) « Frais de justice : l'impératif d'une meilleure maîtrise ».

* 7 Sénat, rapport d'information n° 4 (2006-2007) : « La justice, de la gestion au management ? Former les magistrats et les greffiers en chef à la gestion ».

* 8 Loi d'orientation et de programmation pour la justice n° 2002-1138 du 29 septembre 2002, concernant les moyens pour les années 2003 à 2007.

* 9 Sénat, rapport d'information n° 23 (2007-2008) : « L'aide juridictionnelle : réformer un système à bout de souffle ».

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