Rapport n° 173 (2007-2008) de M. Xavier PINTAT , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 22 janvier 2008

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N° 173

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2007-2008

Annexe au procès-verbal de la séance du 22 janvier 2008

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et l' Organisation internationale ITER pour l'énergie de fusion relatif au siège de l'Organisation ITER et aux privilèges et immunités de l'Organisation ITER sur le territoire français ,

Par M. Xavier PINTAT,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Josselin de Rohan, président ; MM. Jean François-Poncet, Robert del Picchia, Jacques Blanc, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Jean-Pierre Plancade, Philippe Nogrix, André Boyer, Robert Hue, vice - présidents ; MM. Jean-Guy Branger, JeanLouis Carrère, Jacques Peyrat, André Rouvière, André Trillard, secrétaires ; MM. Bernard Barraux, Jean-Michel Baylet, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Pierre Biarnès, Didier Borotra, Didier Boulaud, Robert Bret, Mmes Paulette Brisepierre, Michelle Demessine, M. André Dulait, Mme Josette Durrieu, MM. Hubert Falco, Jean Faure, Jean-Pierre Fourcade, Mmes Joëlle Garriaud-Maylam, Gisèle Gautier, Nathalie Goulet, MM. Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Hubert Haenel, Joseph Kergueris, Robert Laufoaulu, Louis Le Pensec, Simon Loueckhote, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Charles Pasqua, Daniel Percheron, Xavier Pintat, Yves Pozzo di Borgo, Jean Puech, Jean-Pierre Raffarin, Yves Rispat, Roger Romani, Gérard Roujas, Mme Catherine Tasca, M. André Vantomme, Mme Dominique Voynet.

Voir le numéro :

Sénat : 153 (2007-2008)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est saisi d'un projet de loi autorisant l'approbation de l'Accord entre le Gouvernement de la République française et l'organisation internationale ITER pour l'énergie de fusion relatif au siège de l'organisation ITER et aux privilèges et immunités de l'Organisation ITER sur le territoire français.

Ce texte constitue une déclinaison de l'accord signé à Paris le 21 novembre 2006 et établissant l'organisation internationale ITER pour l'énergie de fusion.

Cet accord, qui définit l'objet, la structure institutionnelle et les modes de gestion de l'organisation ITER prévoyait en effet, dans son article 12, qu'un accord de siège devait être conclu entre l'Organisation et son Etat hôte, la France.

L'accord soumis à l'examen du Sénat a, par conséquent, pour objet de régir le statut du personnel, des représentants des Etats parties à ITER et de l'organisation ITER ainsi que de ses experts. Il établit, comme c'est l'usage dans de tels accords, des facilités, privilèges et immunités.

Avant d'exposer le contenu de cet accord de siège, votre rapporteur procédera à un bref rappel de l'objet de l'organisation ITER, la maîtrise de la fusion nucléaire, et l'historique de ce projet.

I. ITER, UNE COOPÉRATION À L'ÉCHELLE MONDIALE POUR LA MAÎTRISE DE L'ÉNERGIE DE FUSION

A. L'ÉNERGIE DE FUSION

L'augmentation continue de la consommation d'énergie, la disparition programmée des énergies fossiles, la dépendance du continent européen en matière énergétique et les conséquences de l'effet de serre sur l'environnement n'offrent que peu d'alternatives à la maîtrise de la consommation et à la recherche de nouveaux modes de production d'énergie.

La fusion est l'une des voies explorées.

1. Le principe

Très rapidement, il existe deux types de réactions nucléaires permettant de produire de l'énergie à grande échelle :

Fusion de deux noyaux légers

Fission d'un noyau lourd (source CEA)

- la fission, phénomène à l'oeuvre dans les centrales nucléaires actuelles, dans laquelle un noyau lourd se brise sous l'effet du choc d'une particule ;

- et la fusion dans laquelle deux noyaux légers se combinent, phénomène à l'origine de l'énergie produite dans le soleil qui nous procure chaleur et lumière par la conversion d'hydrogène en hélium.

Les atomes d'hydrogène du soleil fusionnent sous la pression due à la gravité qu'il n'est pas possible de reproduire sur terre. L'objectif est donc de créer les conditions de la fusion par d'autres moyens.

Parmi les réactions de fusion envisageables, celle qui combine le deutérium et le tritium, deux isotopes de l'hydrogène, est la plus simple à réaliser. On estime que quelques kilogrammes de deutérium et de tritium permettraient de produire autant d'énergie que 10 000 tonnes de pétrole. Le deutérium se trouve en grande quantité dans l'eau et il est peu coûteux à isoler tandis que le tritium, qui n'existe pas dans la nature, peut être obtenu à partir du lithium.

Afin de fusionner, les noyaux atomiques doivent acquérir une vitesse suffisante, obtenue en chauffant le combustible à très hautes températures, de l'ordre de 100 à 150 millions de degrés. A cette température, le mélange deutérium tritium devient ce qu'on appelle un plasma, un état particulier de la matière où les noyaux, animés d'une très grande vitesse, peuvent fusionner par collision.

Contenu dans une enceinte en forme d'anneau et tenu à l'écart des parois, pour éviter le refroidissement, par des champs magnétiques de grande intensité (les aimants représentent près de 30 % du coût de l'installation ITER), le plasma permet d'obtenir des réactions de fusion.

Une partie de la réaction de fusion permet d'entretenir la température de façon quasi autonome, tandis que l'autre partie de la réaction produit une énergie qui peut être orientée vers la production d'électricité selon un processus classique (échangeurs de chaleur, vapeur et turbines).

Un réacteur à fusion est donc composé d'un « coeur », où se produit la réaction nucléaire, entouré d'une enveloppe destinée à la production du tritium ainsi qu'à la récupération de l'énergie produite.

Une fois maîtrisée, la fusion pourra jouer un rôle important dans la production d'énergie : le combustible est disponible et pratiquement inépuisable ; un réacteur de fusion ne produit pas de gaz à effet de serre ; la réaction de fusion peut être arrêtée très rapidement, en quelques secondes et ne présente donc pas de risque d'emballement ; aucun des combustibles de base n'est radioactif et la fusion ne produit pas de déchets radioactifs à vie longue : seuls les matériaux du réacteur devront être stockés environ 100 ans.

2. Les projets en cours

Le projet ITER (International Thermonuclear Experimental Reactor) s'inscrit dans une démarche de coopération internationale engagée de longue date sur l'énergie de fusion. Des premiers résultats ont été obtenus sur plusieurs installations expérimentales spécialisées.

Des réactions de fusion contrôlées ont été obtenues pour la première fois en 1991, mais les défis scientifiques et techniques à relever restent de taille : dans l'installation actuelle la plus performante, l'énergie dégagée par la fusion est voisine de l'énergie injectée dans le processus.

Le projet Joint European Torus (JET) a été lancé en 1978. Il s'agit d'une entreprise européenne commune financée à 80 % par Euratom et à 10 % par l'Autorité britannique de l'énergie atomique. Installé à Culham, en Grande-Bretagne, le JET est en fonctionnement depuis 1983. Il s'agit de la plus grande installation de ce type dans le monde. Elle est plutôt consacrée à l'étude de la physique des plasmas « performants » sur des temps courts (quelques secondes).

La machine Tore Supra , installée à Cadarache depuis 1988, est plus spécialisée dans la maîtrise des plasmas moins performants mais sur des durées beaucoup plus importantes (2 minutes et plus).

Sur le fondement des résultats obtenus par ces différentes installations, l'objectif principal d'ITER est de démontrer la maîtrise de la combustion entretenue d'un plasma deutérium-tritium sur des temps longs.

Le projet ITER vise à produire une puissance de fusion de plusieurs centaines de mégawatts avec une amplification de puissance supérieure à 10, c'est à dire que le rapport entre l'énergie injectée dans le plasma (50 Megawatt) et celle issue de la fusion (500 Megawatt) doit être de un à dix.

B. ITER, UNE COOPÉRATION À L'ÉCHELLE MONDIALE

1. Un processus engagé il y a plus de 20 ans

ITER est un projet de collaboration internationale autour d'un dispositif visant à démontrer la faisabilité scientifique et technique de l'énergie de fusion. Ce projet scientifique à l'échelle planétaire est né en 1985 sur proposition de l'Union soviétique.

Un accord international a été signé en 1988 entre l'Europe, les Etats-Unis, le Japon et l'Union soviétique dont la coopération a abouti, en 2001, à un projet détaillé pour une installation expérimentale.

Chronologie du projet ITER

- Novembre 1985 : Sommet de Genève, l'Union Soviétique de Mikhaïl Gorbatchev propose de construire un « Tokamak » de nouvelle génération

- Octobre 1986 : Les Etats-unis, l'Europe et le Japon acceptent cette proposition et le projet est placé sous l'égide de l'Agence Internationale de l'Énergie Atomique (AIEA)

- Avril 1988 à 1998 : Elaboration technologique du projet

- Fin 1998 : Les Etats-unis se retirent du projet ITER

- Juillet 2001 : Achèvement de l'ingénierie détaillée du nouveau projet

- Janvier 2003 : Les Etats-unis et la Chine rejoignent le projet

- Juin 2003 : La Corée du Sud rejoint le projet

- Novembre 2003 : Cadarache devient le site candidat européen pour accueillir ITER

- Juin 2005 : Décision de l'implantation d'ITER en France

- Décembre 2005 : l'Inde rejoint le projet

- 21 novembre 2006 : signature à Paris de l'Accord sur l'établissement de l'organisation internationale ITER pour l'énergie de fusion en vue de la mise en oeuvre conjointe du projet ITER entre la communauté européenne, la Chine, l'Inde, le Japon, la Corée, la Russie et les Etats-Unis.

- 25 octobre 2007 : entrée en vigueur de l'Accord ITER

- 7 novembre 2007 : signature de l'Accord de siège

2. Le choix du site de Cadarache

Le site de Cadarache (Bouches du Rhône) a été retenu, le 28 juin 2005, au terme d'une compétition avec trois autres sites, au Canada, en Espagne et au Japon. En 2003, l'Espagne s'est rangée à une candidature européenne unique en contrepartie de la localisation à Barcelone de l'Agence ITER-Europe, chargée de la mise en oeuvre des engagements européens dans ITER. Cadarache était en concurrence avec le site japonais de Rokkasho-Mura.

En contrepartie du choix de Cadarache, le Japon a obtenu :

- de fournir 20 % de l'équipe du projet,

- de proposer le nom du chef d'équipe,

- d'obtenir 20 % des contrats industriels,

- la mise en oeuvre d'un programme de recherche complémentaire appelé « l'approche élargie » qui représente environ 700 millions d'euros (50 % Europe, 50 % Japon) et auquel la France contribue pour 50 % de la part de l'Europe, soit un total, pour la France, de 169,5 millions d'euros au maximum, sous forme de contributions en nature,

- la construction d'un centre d'étude des matériaux ainsi que la construction au Japon de DEMO, le prototype de réacteur industriel qui devrait être construit après ITER.

Le site de Cadarache couvre une surface totale de 40 hectares. L'aménagement du site est intégralement pris en charge par la France pour un engagement de 215 millions d'euros.

Le projet créera environ 500 emplois directs pendant la phase de construction et 1 000 pendant la phase d'exploitation. En outre 1 400 emplois indirects devraient être créés dans la région PACA pendant la phase de construction et 2 400 pendant la phase d'exploitation.

II. L'ORGANISATION ITER POUR L'ÉNERGIE DE FUSION

A. L'ACCORD DU 21 NOVEMBRE 2006

1. Une structure à trois niveaux

L'accord ITER, signé le 21 novembre 2006 entre l'Union européenne (plus particulièrement EURATOM), la Chine, l'Inde, le Japon, la Corée, la Russie et les Etats-Unis, est entré en vigueur le 25 octobre 2007 après ratification par tous les signataires 1 ( * ) .

Dans le cadre de sa compétence, la Communauté européenne de l'énergie atomique (CEEA) peut s'engager par la conclusion d'accords et de conventions avec un Etat tiers, une organisation internationale ou un ressortissant d'un Etat tiers. L'accord ITER, dont la France n'est pas signataire en tant que telle, a par conséquent été examiné par le Sénat 2 ( * ) uniquement sous forme de proposition de décision du Conseil concernant la conclusion, par la Commission européenne, de l'accord ITER.

Il établit le siège de l'Organisation à St Paul lez Durance. Il fixe les droits et obligations de chaque partenaire et met en place une organisation à trois niveaux : l'organisation internationale ITER, les agences de chaque partenaire et les agences nationales.

L'Organisation ITER est à la fois le maître d'ouvrage, l'exploitant nucléaire et le responsable scientifique et technique du projet. Elle est administrée par un Conseil composé de représentants des sept parties à l'Accord, qui est l'organe de délibération, et par un directeur général, actuellement le japonais Kaname Ikeda, agent exécutif et représentant légal de l'organisation.

Les agences des partenaires sont chargées des relations avec l'Organisation ITER et de la fourniture des composants prévue lors des négociations. L'Agence de l'Union européenne est située à Barcelone. Elle est chargée de collecter les contributions financières et en nature des Etats membres et du programme Euratom. Dotée d'un budget de 4 milliards d'euros pour 10 ans, elle est responsable de la construction des bâtiments de l'installation nucléaire et d'éléments non transportables. Elle participe à la réalisation de composants fabriqués avec les autres partenaires du projet et finance les projets spécifiques développés en partenariat avec le Japon.

Au niveau français, l'Agence ITER-France, créée au sein du CEA, est responsable de l'accueil des collaborateurs et de leur famille, des travaux de viabilisation du site et de l'élaboration des dossiers de sûreté ainsi que du démantèlement de l'installation à la fin de son exploitation.

Le dépositaire de l'Accord est le directeur général de l'AIEA, l'Agence internationale pour l'énergie atomique.

2. Le partage des coûts

Le projet devrait coûter environ 11 milliards d'euros, dont la moitié pour la construction.

Phase 1 - Construction

Référentiel

En millions d'euros CE 2005

Construction y compris aléas

100 %

5 455

Partenaires hors UE

54,54 %

2 975

dont quote-part Canada, Inde, Japon, Corée, Russie, Etats-unis

9,09 %

496

Europe

45,46 %

2 480

Quote-part de la France

9,09 %

496

Phase 2 - Exploitation - Mise à l'arrêt définitif (MAD) - Démantèlement

Référentiel

En millions d'euros CE 2005

Exploitation (20 ans)

100 %

5 212

Partenaires hors UE

66 %

3 440

dont quote-part Etats-Unis, Japon

13 %

678

dont quote-part Canada, Inde, Corée, Russie

10 %

521

Europe

34 %

1 772

Quote-part de la France

7 %

365

Mise à l'arrêt définitif (5 ans)

100 %

300

Partenaires hors UE

66 %

198

dont quote-part Etats-Unis, Japon

13 %

39

dont quote-part Canada, Inde, Corée, Russie

10 %

30

Europe

34 %

102

Quote-part de la France

7 %

21

Démantèlement (provision constituée durant la phase d'exploitation)

100 %

565

Partenaires hors UE

66 %

373

dont quote-part Etats-Unis, Japon

13 %

73

dont quote-part Canada, Inde, Corée, Russie

10 %

57

Europe

34 %

192

Quote-part de la France

7 %

40

Total ITER

11 532

Quote-part de la France

921

source Maee

Chaque pays membre d'ITER participe au financement du coût de construction d'ITER à hauteur de 9 %. L'Union européenne s'est engagée à financer 45 % du coût de la construction et 34 % de l'exploitation, de la maintenance et du démantèlement. La contribution française, via l'Union européenne représente 9 % du montant de la construction et 7 % du montant de l'exploitation et du démantèlement.

Dix ans seront nécessaires pour construire ITER, sa phase opérationnelle étant estimée à une vingtaine d'années. Après la phase d'exploitation et suivant les résultats obtenus, un autre réacteur expérimental de puissance équivalente à un réacteur industriel pourrait être créé. Nommé DEMO, il sera destiné à étudier la possibilité d'une exploitation commerciale. Le passage de la fusion de l'ère expérimentale à l'ère industrielle n'interviendra sans doute pas avant 2050.

L'engagement financier global de la France pour la période initiale de 10 ans, va au-delà des coûts liés à la construction et à l'exploitation. Incluant l'aménagement du site (206 millions d'euros), la construction (496 millions d'euros) et l'approche élargie (169,5 millions d'euros), il est au total de 871,5 millions d'euros, apportés par les collectivités locales, le CEA et l'Etat. Les collectivités apportent en outre des actions d'accompagnement ne faisant pas partie des engagements internationaux. L'effort des collectivités est notamment consacré à la construction d'un lycée international et à la réalisation d'un itinéraire routier spécifique.

Globalement l'engagement financier de la France en faveur du projet ITER s'élève à 1 296,5 millions d'euros.

B. L'ACCORD DE SIÈGE

L'article 12 de l'Accord établissant l'organisation internationale ITER, relatif aux privilèges et immunités, prévoit que « l'organisation ITER, avec ses biens immobiliers et ses actifs, bénéficie, sur le territoire de chaque Etat membre, des privilèges et immunités nécessaires à l'exercice de ses fonctions », de même que « le directeur général et le personnel de l'Organisation ITER, les représentants des membres du Conseil et des organes subsidiaires, ainsi que leurs suppléants et experts ».

Il prévoit également que ces immunités sont levées « dans tous les cas où l'autorité compétente pour lever l'immunité considère que cette immunité empêche la justice de suivre son cours et que sa levée ne porte pas préjudice aux fins pour lesquelles elle a été accordée ».

Il stipule, dans son dernier alinéa, qu' « un accord de siège est conclu entre l'organisation ITER et l'Etat d'accueil ».

Cet accord de siège fait l'objet du présent projet de loi. Il complète, pour ce qui concerne la France, Etat d'accueil, l'accord sur les privilèges et immunités de l'organisation internationale ITER conclu par EURATOM, la Chine, l'Inde, le Japon, la Corée et la Russie.

1. Des stipulations classiques

L'Accord confère tout d'abord à l'organisation ITER la personnalité civile afin qu'elle puisse assurer la gestion de ses moyens. Il garantit l'inviolabilité de ses bâtiments, locaux, archives et documents tout en prévoyant que des inspections peuvent être réalisées par les autorités françaises pour les besoins de la sûreté nucléaire.

L'organisation jouit des immunités de juridiction et d'exécution, sauf quand elle y a expressément renoncé, pour les infractions au code de la route ou en cas d'exécution d'une sentence arbitrale. Elle bénéficie également, dans le cadre de son activité officielle et pour les biens ou services nécessaires à son fonctionnement, d'exonérations fiscales et douanières.

Le personnel de l'organisation bénéficie, quant à lui, d'une immunité de juridiction pour les actes commis dans l'exercice de ses fonctions et de facilités en matière d'immigration. Les membres du personnel sont exempts d'impôts sur le revenu, en contrepartie d'un impôt interne perçu par l'organisation. Ils sont également exempts de l'ensemble des cotisations sociales obligatoires du régime de sécurité sociale français mais ne bénéficient pas des prestations sociales. A la différence d'autres accords de ce type, les personnels de nationalité française bénéficient de ces privilèges et immunités, à l'exception de la possibilité d'importer des véhicules en franchise de taxe.

Le directeur général et le directeur général adjoint bénéficient des privilèges et immunités reconnus aux chefs de missions diplomatiques.

2. Un accent particulier sur les questions de sécurité et de sûreté

L'Accord rappelle que, parallèlement à ces privilèges et immunités, l'Organisation doit respecter les lois et réglementations applicables dans les domaines de la santé et de la sécurité publiques, de l'hygiène et de la sécurité du travail, de la sûreté nucléaire de la radioprotection, des régimes d'autorisation, des substances nucléaires, de la protection de l'environnement et de la protection contre les actes de malveillance.

A cette fin, une annexe à l'Accord définit les modalités de coopération entre l'organisation ITER et les autorités françaises, dans les domaines de la sûreté et de la sécurité, du transport des substances radioactives, de la gestion des déchets radioactifs, du démantèlement des installations, etc...

CONCLUSION

La maîtrise de la fusion est un défi scientifique et technique qui reste à relever et dont le projet ITER vise à démontrer la faisabilité. L'effort considérable accompli en matière de recherche et développement irrigue le tissu industriel européen bien au-delà du seul secteur de l'énergie (applications à la médecine, au traitement des matériaux, des déchets, à la propulsion spatiale...). En accueillant ce site, la France accueille un grand projet de recherche dans un de ses domaines d'excellence, le nucléaire.

C'est pourquoi votre Commission recommande l'adoption du présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission a examiné le présent rapport lors de sa réunion du mardi 22 janvier 2008.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

M. Josselin de Rohan, président, a souligné ce que l'installation d'ITER sur le sol français devait à l'engagement de l'ancien Président de la République, M. Jacques Chirac.

M. André Rouvière s'est interrogé sur le stockage des déchets, sur le partage des emplois entre les Etats contribuant à l'organisation et sur la date du début des travaux.

M. Xavier Pintat, rapporteur, a précisé que la réaction de fusion ne créait pas de déchets radioactifs à vie longue et que, seuls, les matériaux du réacteur devraient être stockés pour une durée d'environ cent ans, durée que les progrès dans le traitement des matériaux devraient néanmoins permettre de raccourcir.

En contrepartie du choix du site de Cadarache, au détriment de celui de Rokkasho-Mura, le Japon a obtenu un quota de 20 % des emplois liés à ITER pour ses ressortissants et 20 % des contrats industriels. Il proposera par ailleurs le nom du Directeur général de l'Organisation. Les autres emplois devraient être attribués aux ressortissants des autres Etats parties en fonction de leur contribution au projet. Quant aux travaux sur le site de Cadarache, ils ont d'ores et déjà commencé par le déboisement et l'arasement de la zone devant accueillir les installations.

M. Jacques Blanc a souligné la dimension mondiale et européenne du projet ITER, mais aussi sa dimension régionale, qui consacre la vocation dans le domaine nucléaire de l'ensemble de la vallée du Rhône. Il a insisté sur ses applications dans le domaine de la formation et sur la nécessité de développer une capacité de réponse à des crises énergétiques désormais récurrentes.

M. Xavier Pintat, rapporteur, tout en soulignant l'importance de l'implication des autorités politiques dans ce projet, a salué le travail des chercheurs du CEA, dont les résultats, sur le site même de Cadarache, dans le domaine de la fusion, par l'installation Tore Supra, ont favorisé le choix du site pour ITER.

A M. Robert del Picchia qui l'interrogeait sur le rôle de l'AIEA (Agence internationale pour l'énergie atomique) dans le projet ITER, il a précisé que l'Agence avait été impliquée dès l'origine dans la conception du projet, au titre de ses compétences dans le développement du nucléaire civil et que le directeur général de l'AIEA était le dépositaire de l'accord ITER.

La commission a alors adopté le projet de loi et proposé que ce texte fasse l'objet d'une procédure d'examen simplifiée en séance publique.

PROJET DE LOI

( Texte proposé par le Gouvernement )

Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et l'Organisation internationale ITER pour l'énergie de fusion relatif au siège de l'Organisation ITER et aux privilèges et immunités de l'Organisation ITER sur le territoire français (ensemble une annexe), signé à Saint-Paul-lez-Durance (Cadarache) le 7 novembre 2007, et dont le texte est annexé à la présente loi 3 ( * ) .

ANNEXE - ETUDE D'IMPACT4 ( * )

Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et l'Organisation internationale ITER pour l'énergie de fusion relatif au siège de l'Organisation ITER et aux privilèges et immunités de l'Organisation ITER sur le territoire français (ensemble une annexe),

signé à Saint-Paul-lez-Durance (Cadarache) le 7 novembre 2007

1- Contexte, état du droit existant .

L'Organisation internationale ITER a été créée par l'Accord sur l'établissement de l'organisation internationale pour l'énergie de fusion en vue de la mise en oeuvre conjointe du projet ITER, signé le 21 novembre 2006 par Euratom, le Japon, la Russie, les Etats-Unis, la Chine, la Corée et l'Inde.

L'article 12 de cet Accord prévoit que l'Organisation, ses biens et avoirs, son personnel ainsi que les représentants des membres et les experts bénéficient sur le territoire de chaque membre de l'Organisation des privilèges et immunités nécessaires à l'exercice de leurs fonctions.

Par ailleurs, le contenu et la portée des privilèges et immunités précités ont été définis par l'Accord sur les privilèges et immunités de l'Organisation internationale pour l'énergie de fusion en vue de la mise en oeuvre conjointe du projet ITER, signé le 21 novembre 2006.

Cependant, la France n'étant pas directement partie aux Accords susvisés, un accord de siège entre le Gouvernement de la République française et l'Organisation internationale ITER a été signé le 7 novembre 2007, conformément à l'article 12.7 de l'Accord ITER de 2006.

2- Modification de la législation interne .

L'entrée en vigueur de cet accord n'impliquera pas de modification du droit interne. Il ne nécessitera pas davantage de mesures d'application d'ordre législatif ou réglementaire.

Cet accord de siège et son annexe peuvent conduire, le cas échant, à la conclusion de protocoles additionnels, conformément à ce que prévoit l'article 13 de l'annexe.

* 1 Euratom le 5 février 2007, l'Inde le 29 mars 2007, la Corée du Sud le 13 avril 2007, le Japon le 29 mai 2007, les Etats-Unis le 4 juin 2007et la Chine le 24 septembre 2007

* 2 Délégation pour l'Union européenne le 26 juin 2006

* 3 Voir le texte annexé au document Sénat n° 153 (2007-2008)

* 4 Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des parlementaires

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