B. CRÉATION D'UNE AUTORITÉ EUROPÉENNE

1. Les missions de l'Autorité

Afin d'améliorer le fonctionnement du marché intérieur des communications électroniques, la Commission propose un règlement (texte E-3703) établissant une Autorité européenne du marché des communications électroniques (EECMA), qui aurait un rôle essentiellement consultatif auprès de la Commission européenne , concernant notamment la réglementation des marchés et la gestion du spectre radioélectrique : cette Autorité aura essentiellement pour fonction d'émettre des avis, de sa propre initiative ou à la demande de la Commission, et d'aider cette dernière en lui fournissant des conseils techniques, en réalisant des études, en collectant des informations et des rapports...

Plus précisément, s'agissant de la régulation des marchés , l'Autorité sera consultée sur la définition et l'analyse des marchés nationaux et la mise en oeuvre des solutions aux défaillances de la concurrence sur un marché. Elle pourrait aussi publier des orientations non contraignantes pour promouvoir les bonnes pratiques au sein des régulateurs nationaux. Elle sera enfin invitée à émettre un avis dans les cas où la Commission exprime des « doutes sérieux » sur un projet de mesure notifié en vertu de l'article 7 de la directive-cadre, dont la rédaction est revue par le texte E-3701. Lorsqu'un régulateur national n'a pas procédé à l'analyse des marchés dans le délai requis, la Commission pourrait demander à l'Autorité de la conseiller par rapport à ce marché national spécifique.

Concernant les marchés transnationaux , l'Autorité proposerait à la Commission européenne d'identifier de tels marchés, dont la croissance pourrait découler de la mobilité, de la convergence fixe/mobile, des services par satellite... L'analyse de ces marchés serait alors confiée à l'Autorité et leur régulation serait effectuée au niveau communautaire. L'Autorité serait aussi chargée de contrôler le développement des services d'itinérance, pour la transmission de la voix et des données.

L'Autorité devrait également aider la Commission pour les questions portant sur les aspects techniques et économiques relatifs aux radiofréquences utilisées pour la fourniture de services de communications électroniques : elle serait en charge de travaux d'analyse et de compte rendu, de l'identification du potentiel et des moyens pour le développement de nouveaux services, de la tenue d'un registre de l'utilisation du spectre à travers l'UE, du conseil en matière de procédures communes pour l'octroi des autorisations, de l'assistance technique pour la sélection des demandes de licences pour le spectre radioélectrique, et du conseil en matière de retrait des droits de l'utilisation en cas de non-respect des conditions relatives aux licences.

Elle contribuera en outre à recenser les services définis comme étant « d'envergure communautaire » qui bénéficieraient d'une procédure commune de sélection. Un service serait réputé « d'envergure communautaire » s'il répondait à une demande dans plusieurs Etats membres et si, de par ses caractéristiques, il franchissait les frontières nationales et serait, à ce titre, susceptible de faire l'objet d'une réglementation européenne ou régionale plutôt que nationale. En ce cas, l'Autorité mènerait la procédure de sélection et émettrait un avis proposant la ou les entreprises auxquelles les droits nationaux d'utilisation du spectre pourraient être accordés.

Mais l'Autorité aurait aussi pour mission de fournir un cadre de coopération pour les régulateurs nationaux : l'Autorité offrirait des procédures de coopération entre les régulateurs nationaux, notamment en ce qui concerne l'échange d'informations, la fourniture de conseils et l'assistance technique. Elle serait habilitée à négocier et à résoudre les litiges transfrontières entre les ARN et encouragerait également la coopération entre les régulateurs nationaux de l'UE et les pays. Elle assumerait aussi des fonctions générales d'information et de consultation en étant chargée de présenter un rapport annuel sur le développement du secteur des communications électroniques et de contrôler l'interopérabilité et l'accessibilité en ligne en Europe.

Enfin, afin de garantir une utilisation fiable et sûre des communications électroniques, la Commission propose, à l'article 1 er du texte E-3701 qui modifie la directive-cadre, de s'appuyer sur l'Autorité pour remplir certaines des missions actuellement assumées par l'actuelle Agence européenne chargée de la sécurité des réseaux et de l'information (ENISA 2 ( * ) ) : l'Autorité contribuera à l'harmonisation des mesures techniques et organisationnelles appropriées en matière de sécurité en donnant à la Commission un avis d'expert. De nouvelles dispositions étendent le champ des exigences d'intégrité des réseaux au-delà des réseaux de téléphone fixe pour couvrir les réseaux mobiles et internet. Les ARN se voient conférer des pouvoirs d'application dans ce domaine.

Finalement, c'est en matière d'administration de la numérotation que l'Autorité serait dotée de réels pouvoirs de décision : l'Autorité serait chargée d'administrer et de développer l'Espace de numérotation téléphonique européen (ETNS) et travaillerait avec les ARN et les Etats membres sur les aspects européens de la numérotation et de la portabilité des numéros, en s'occupant notamment de faire rapport sur le déploiement du numéro européen « 112 » pour les appels d'urgence, de déterminer les séries de numéros pour les services transfrontières, d'identifier le potentiel et les moyens pour le développement de nouveaux services, et de fournir des conseils en matière de procédures communes pour l'octroi des autorisations.

2. L'organisation de l'Autorité

Cette autorité européenne mobiliserait à partir de 2012 un personnel permanent de 134 ETP (équivalents temps plein) pour un budget annuel de 28 millions d'euros (en tenant compte de l'incorporation de l'ENISA à partir de 2011), pour partie financé par des taxes administratives. En termes de gouvernance, l'Autorité comprendrait un conseil d'administration de douze membres nommés paritairement par la Commission européenne et le Conseil, d'un conseil des régulateurs formé des chefs des autorités de régulations nationales des 27 États membres, d'un directeur nommé en conseil d'administration, d'un responsable de la sécurité des réseaux, d'un groupe permanent des parties prenantes concernées par la sécurité des réseaux et enfin d'une commission de recours permettant des procédures d'appel des décisions de l'Autorité en matière de numérotation. La Commission serait habilitée à participer aux réunions du conseil des régulateurs, mais sans droit de vote, et les avis et décisions adoptés par ce conseil devraient l'être à la majorité simple.

3. Le renforcement des autorités de régulation nationales (ARN)

L'autorité européenne n'aurait donc pas vocation à se substituer aux régulateurs nationaux. A fortiori , le projet de la Commission est de consolider les ARN pour faciliter la résolution ex ante des problèmes de concurrence qui subsistent. Il propose de renforcer leurs pouvoirs et leur indépendance et prévoit l'introduction de la séparation fonctionnelle comme remède disponible en dernier ressort pour résoudre des problèmes de discrimination persistants :

- l'article 1 er du texte E-3701 modifiant la directive-cadre renforce l'indépendance du régulateur national en encadrant la possibilité de congédier son président et en veillant à ce que le régulateur dispose de son propre budget distinct et de ressources humaines suffisantes ;

- l'article 3 du texte E-3701 modifiant la directive « autorisation » renforce les pouvoirs des ARN, notamment en leur permettant d'assortir les autorisations générales de conditions relatives aux communications des pouvoirs publics destinées aux publics en cas de danger imminent et de conditions relatives aux droits d'auteur et de propriété intellectuelle ;

- surtout, les modifications proposées à la directive « accès » prévoient de permettre à l'ARN d'imposer -et non plus seulement d'encourager- le partage des infrastructures passives (fourreaux, antennes, pylônes...) et d'ajouter la séparation fonctionnelle à la boîte à outils des régulateurs nationaux. Cet élément important est développé ci-après.

* 2 European Network and Information Security Agency.

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