LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

I. MODIFICATION DES CRÉDITS EN SECONDE DÉLIBÉRATION

A. À TITRE RECONDUCTIBLE

A l'initiative du Gouvernement, dans le cadre de la seconde délibération, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de minoration de crédits, à titre reconductible, de 7.317.066 euros en AE et 5.608.401 euros en CP, destinée à gager les ouvertures de crédits en faveur de la mission « Agriculture » pour laquelle le Gouvernement a inscrit 203 millions d'euros de mesures exceptionnelles.

Cette minoration est répartie de la façon suivante :

- 5.114.822 euros en AE et 3.917.372 euros en CP sur le programme « Développement des entreprises et de l'emploi » ;

- 419.907 euros en AE et 320.601 euros en CP sur le programme « Tourisme » ;

- 441.530 euros en AE et 321.429 euros en CP sur le programme de « Statistiques et études économiques » ;

- 1.340.807 euros en AE et 1.048.998 euros en CP sur le programme « Stratégie économique et fiscale ».

B. À TITRE NON RECONDUCTIBLE

L'Assemblée nationale a également majoré, à titre non reconductible et conformément au souhait de la commission des finances, les crédits de la mission « Economie » pour un montant de 965.500 euros en AE et en CP.

II. ARTICLE ADDITIONNEL RATTACHÉ

En première délibération, l'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative du Gouvernement et sur l'avis favorable de la commission des finances, un article 54 bis ( nouveau ) afin de prolonger d'un an les dispositifs de complément d'assurance-crédit public (CAP et CAP +) 16 ( * ) .

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 3 novembre 2009, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l'examen du rapport spécial de MM. André Ferrand et François Rebsamen, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Economie », les articles 53 et 54 rattachés, et le compte spécial « Gestion et valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien ».

Après avoir souligné que la mission « Economie » créée par la loi de finances pour 2009, issue de la fusion des deux anciennes missions « Développement et régulation économiques » et « Pilotage de l'économie française », est reconduite pour la première fois sans changement de périmètre budgétaire, M. André Ferrand , rapporteur spécial , a indiqué que les crédits proposés pour la mission s'élèvent à 1,94 milliard d'euros, soit une évolution de 0,14 % entre 2009 et 2010.

S'agissant des crédits du programme 134 « Développement des entreprises et de l'emploi », il a souligné que les quelque 1 115 millions de crédits de paiement pour 2010 ne représentent qu'un septième du montant des 74 dépenses fiscales rattachées au programme. Celles-ci avec 7,8 milliards d'euros constituent l'axe majeur de la politique suivie par le Gouvernement en ce domaine.

Le programme 134 regroupe un ensemble très divers d'actions publiques mises en oeuvre par différents services de l'Etat :

- la nouvelle direction générale de la compétitivité, de l'industrie et des services (DGCIS), qui regroupe depuis janvier 2009 la direction du commerce, de l'artisanat, des services et des professions libérales, la direction du tourisme et la direction générale des entreprises ;

- les DIRECCTE (directions régionales de l'entreprise, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi) qui déclineront au niveau régional les services de la DGCIS, de la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) et de la DGEFP (Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle).

En outre, ce programme accueille les moyens de la DGEFP dont le champ d'activité relève par ailleurs de la mission « Travail et emploi ».

M. André Ferrand , rapporteur spécial , a indiqué que l'exercice 2010 sera marqué par l'achèvement de la dévolution de l'activité de service aux entreprises sur les marchés extérieurs à l'opérateur Ubifrance, pour lequel une subvention de 91 millions d'euros est prévue.

Outre l'accumulation jugée regrettable, au fil des années, de « niches fiscales » supposées incitatives dont la lecture est de plus en plus difficile pour les entreprises, il a regretté que s'ajoute encore pour 2010 une nouvelle dépense fiscale : l'abaissement de 19,6 % à 5,5 % de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) dans le secteur de la restauration.

A cet égard, il s'est inquiété du fait que la perte de recettes prévisible à ce titre pour 2010 s'élève à 3 milliards d'euros alors même que l'objectif de baisse des prix pour les consommateurs est infirmé par l'INSEE et que le conseil des prélèvements obligatoires a émis de fortes réserves sur le respect de l'engagement d'embaucher 40 000 nouveaux salariés de la restauration en deux ans.

Abordant les crédits du programme 223 « Tourisme », qui regroupe 58 millions d'euros d'autorisation d'engagement et 56,7 millions d'euros de crédits de paiement, soit seulement 2,9 % des crédits de la mission, M. André Ferrand , rapporteur spécial , a indiqué que ces dotations sont principalement axées sur deux chantiers : la création de l'opérateur Atout France, issu de la fusion de « Maison de la France » avec Odit-France, qui recevra 34,7 millions d'euros pour 2010, et la construction du pavillon de la France pour l'exposition universelle de Shanghai 2010, qui mobilisera 7 millions d'euros de crédit. Le coût prévisionnel de ce projet, emblématique pour l'image de notre pays, est de 50 millions d'euros. Or, du fait de la crise, le cofinancement à parité public-privé qui était envisagé est largement remis en cause car les entreprises n'ont à ce jour apporté que 5 millions d'euros. Tout en indiquant qu'il suivra avec attention cette question en 2010, il a exprimé sa crainte que l'effort de l'Etat doive être plus important pour assurer l'équilibre financier de l'opération.

Enfin, s'agissant des dépenses fiscales, il a noté que les quelque 1,86 milliard d'euros de pertes de recettes prévisibles représentent trente fois les crédits budgétaires et sont de très loin le premier levier d'action de l'Etat en matière de politique touristique. Il a appelé de ses voeux une évaluation de l'efficacité de ces dispositifs, s'associant ainsi aux demandes formulées par M. Philippe Marini, rapporteur général, et par la commission de l'économie, en particulier dans le domaine de l'hôtellerie et des résidences de tourisme.

M. François Rebsamen , rapporteur spécial , a présenté les crédits du programme 220 « Statistiques et études économiques », en précisant d'emblée que l'année 2010 constitue une année charnière pour le développement des activités de l'INSEE. En effet, elle marque la clôture du premier contrat pluriannuel de performance 2007-2009 qui prévoyait sur trois ans une baisse des effectifs de 5,4 %. Il a souligné que cet objectif est rempli puisque depuis 2008, une diminution de 5,75 % des effectifs a été constatée, ceux-ci étant passés de 5 822 à 5 487 ETPT.

En outre, l'INSEE a mis en oeuvre ou prépare de nombreuses réformes :

- la rationalisation des périmètres et de la coordination des services ministériels, en particulier par la fusion du service statistique du ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi avec l'INSEE ;

- la création, par la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008, d'une autorité chargée de garantir l'indépendance du système statistique ;

- le développement de la mutualisation des fonctions support des directions régionales de l'INSEE ;

- l'augmentation du tarif des études de l'INSEE pour que celui-ci reflète autant que possible leur coût réel.

M. François Rebsamen , rapporteur spécial , a rappelé le démarrage dès 2010 de la délocalisation à Metz d'une partie de l'INSEE tout en précisant que l'effet budgétaire pour l'année prochaine sera limité puisque seulement quinze personnes s'installeront dans un premier temps en Moselle. Il a toutefois souligné que la question des locaux et des modalités d'affectation du personnel, sur la base du volontariat, se pose d'ores et déjà de façon cruciale compte tenu de l'inadaptation des bâtiments militaires proposés pour héberger l'INSEE et de l'installation de deux cents personnes dès 2011.

Il a ensuite dressé un panorama des réformes touchant l'institut : la révision générale des politiques publiques, la réduction des effectifs, la délocalisation et la reconfiguration profonde de nombreux outils tels que la nouvelle enquête emploi et la méthode de recensement de la population en continu, ainsi que l'optimisation et la dématérialisation des modes de collecte des informations en provenance des entreprises. Dans ce contexte, il a estimé que le budget de l'INSEE qui s'élèvera en 2010, comme en 2009, à 418 millions d'euros a atteint un plancher, notamment en ce qui concerne la réduction des effectifs, la poursuite de ce mouvement étant susceptible de remettre en cause la qualité reconnue des services rendus par l'institut. La masse salariale représente 361 millions d'euros, soit un taux de 86 % sur le total du budget, caractéristique des institutions à forte part de « matière grise ».

A cet égard, il a tout particulièrement souligné l'étendue des missions de l'INSEE qui dépasse largement le strict cadre d'un organisme statistique car il gère aussi les grands fichiers de l'Etat (par exemple le répertoire SIRENE) et produit, notamment pour les collectivités locales, de très nombreuses études. Ces sujétions de service public ne doivent pas être sous-estimées : ainsi, pour la constitution du fichier électoral, les communes ont transmis en 2008 près de 1,2 million de documents à traiter par l'INSEE.

C'est pourquoi, tout en soutenant le projet de modernisation et de délocalisation de l'INSEE, il a fait part les observations suivantes :

- la question des effectifs constitue un volet majeur de la réorganisation de l'institut non seulement dans le cadre de la négociation des conditions de délocalisation, pour laquelle les engagements statutaires présentés par le directeur général, M. Jean-Philippe Cotis constituent une réponse adaptée, mais aussi du point de vue du redéploiement stratégique des équipes de l'INSEE vers une montée en gamme des études, de la statistique descriptive à l'évaluation et à l'aide à la décision des politiques publiques nationales et régionales ;

- la recherche d'une meilleure tarification des services rendus par l'INSEE bute sur deux limites. La première concerne les recettes des publications (les fonds de concours sont évalués à 17 millions d'euros pour 2010), qui risquent de s'inscrire dans une baisse tendancielle de leur rendement à mesure que se développe l'usage de l'Internet et donc l'accès gratuit au fonds documentaire statistique. A titre d'illustration, le nombre de téléchargements de documents constatés en 2008 sur le site www.insee.fr s'est élevé à 13,8 millions, pour plus de 20 millions de visites. Par ailleurs, la facturation des études fournies aux collectivités locales pose le problème de la détermination du coût du service et de sa prise en charge tout en conservant l'esprit de partenariat entre INSEE et collectivités. A cet égard, et sans fixer les modalités de rétribution, M. François Rebsamen , rapporteur spécial , a formulé une recommandation tendant à assurer une meilleure appréhension des coûts grâce à l'affichage sur l'étude du prix estimé de la prestation et de la charge de travail occasionnée en homme/jour.

Il a ensuite présenté les crédits du programme 305 « Stratégie économique et fiscale ». Celui-ci est structuré en trois actions et concourt à la conception et à la mise en oeuvre par l'exécutif de la politique économique et financière de la France dans le cadre national, international et européen ainsi qu'à l'élaboration de la législation fiscale. Les crédits du programme s'élèvent à 348 millions d'euros pour 2010, en baisse de 2,6 % par rapport à 2009 du fait notamment de réductions des effectifs concernés par le transfert des activités de service à Ubifrance. Ils sont consacrés au soutien de la direction générale du Trésor et de la politique économique (DGTPE) et de la direction de la législation fiscale (DLF), à la rémunération des prestations réalisées par la Banque de France pour le compte de l'Etat (procédure de surendettement), pour 145 millions d'euros, et au réseau international de services économiques de la DGTPE.

Sans changement par rapport à 2009, le programme comprend 18 millions d'euros de dépenses fiscales. Celles-ci poursuivent des objectifs divers : favoriser les prêts familiaux, aider les personnes divorcées, favoriser le secteur de l'assurance-retraite et de la prévoyance ainsi que les dons aux organismes d'intérêt général.

A cet égard, M. François Rebsamen , rapporteur spécial , s'est interrogé sur les raisons du rattachement de ces dépenses fiscales au programme 305, alors qu'elles ne correspondent pas à une politique particulière du programme. Aussi, il a estimé opportun que soit étudiée une mise en relation de ces mesures avec des missions budgétaires plus en rapport avec leurs objectifs telle que la mission « solidarité, insertion et égalité des chances ».

Abordant les recettes et les dépenses du compte d'affectation spéciale (CAS) « Gestion et valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien », M. André Ferrand , rapporteur spécial , a rappelé que ce compte a été créé par la loi de finances pour 2009 afin d'optimiser la gestion des bandes hertziennes et de procurer des recettes nouvelles pour l'Etat en provenance de la vente des fréquences libérées.

Il a précisé que si aucune fréquence civile ne devait être concernée en 2009, il avait été envisagé que le ministère de la défense libère des bandes hertziennes dans le cadre de la rationalisation de l'équipement futur du fantassin sur le « champ de bataille numérisé » (la tenue de combat « Félin ») et du système « Rubis » de communication de la gendarmerie. Les recettes correspondantes étaient estimées à 600 millions d'euros, soit le montant total attendu des recettes issues de ces cessions.

Or, le CAS est demeuré inopérant en 2009, aucune des procédures de mise sur le marché annoncées n'ayant encore abouti.

M. André Ferrand , rapporteur spécial , a fait remarquer que les opérations de cessions de fréquences ont donc été reconduites pour 2010 à l'identique, sur la base des mêmes estimations de recettes qu'en 2009. Il a considéré cette prévision de recettes très approximative dans la mesure où viendrait s'ajouter au produit des ventes potentielles des fréquences issues de « Félin » et de « Rubis » la cession future de tout ou partie des systèmes de communication militaire par satellite « Syracuse », dont la durée de vie opérationnelle est estimée à une dizaine d'année.

Cette dernière opération demeure soumise à l'adoption préalable de l'article 29 du projet de loi de finances pour 2010 qui prévoit :

- d'autoriser la cession de l'usufruit de tout ou partie des systèmes de communication militaires par satellite ;

- et d'élargir le périmètre du compte d'affectation spéciale afin que celui-ci puisse « accueillir » ce nouveau type de recettes.

Le modèle économique du transfert de la gestion du système « Syracuse » est le suivant : la gestion du système serait confiée à un opérateur moyennant une soulte payée à l'Etat dont le montant, de l'ordre de 400 millions d'euros, reste à préciser. L'Etat paierait ensuite une redevance annuelle, qui pourrait être comprise entre 40 et 70 millions d'euros, pour l'utilisation des services de l'opérateur, à charge pour ce dernier de commercialiser les capacités non utilisées, évaluées à 10 %, pour assurer la rentabilité économique de l'opération.

Tout en ne s'opposant pas par principe à cette cession, M. André Ferrand , rapporteur spécial , a toutefois relevé que le modèle économique sur lequel se fonde l'opération demeure une hypothèse qui reste à valider par l'expérimentation.

Enfin, il a mis en lumière une particularité du CAS : l'article 54 de la loi de finances pour 2009 prévoit que les versements au profit du budget général ou du désendettement de l'Etat ne peuvent être inférieurs à 15 % du montant du produit des redevances acquittées par les opérateurs privés pour l'utilisation des bandes de fréquences libérées par les ministères affectataires. Mais ce principe souffre d'une exception car ce même article prévoit que la contribution au désendettement de l'Etat ne s'applique pas au produit des redevances acquittées par les opérateurs privés pour l'utilisation des bandes de fréquences libérées par le ministère de la défense jusqu'au 31 décembre 2014.

C'est pourquoi, dans la mesure où seul le ministère de la défense est actuellement susceptible de libérer des fréquences, aucun crédit n'a été inscrit pour le désendettement de l'Etat en 2010. Pour ce faire, M. André Ferrand , rapporteur spécial , a recommandé qu'à l'avenir, des ministères « civils » identifient et cèdent des bandes de fréquences hertziennes afin de participer au désendettement de l'Etat.

S'agissant des deux articles rattachés à la mission « Economie », M. André Ferrand , rapporteur spécial , a proposé de donner un avis favorable à l'adoption, sans modification, de l'article 53 tendant à la prorogation de la garantie accordée par l'Etat à Dexia, et de l'article 54 visant à prolonger jusqu'au 31 décembre 2010 la date d'émission des titres de créance de la société de financement de l'économie française (SFEF) en cas de circonstances exceptionnelles caractérisées par une perturbation grave de l'accès des établissements de crédit aux marchés financiers.

Mme Nicole Bricq s'est interrogée sur la date de la dernière réunion du comité de suivi de la crise financière et sur le respect de l'obligation d'information du Parlement par le Gouvernement sur la mise en oeuvre du dispositif de soutien au financement de l'économie. En réponse, M. Jean Arthuis , président , a souligné que depuis la remise du dernier rapport du Gouvernement en juillet 2009, la commission des finances exerce son droit de contrôle, l'audition de M. Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France, le 27 octobre dernier, ayant à cet égard apporté les éclaircissements nécessaires. Il a ajouté qu'il conviendra qu'un nouveau point d'étape soit établi par le Gouvernement avant la fin de l'année.

Sur la recommandation de ses rapporteurs spéciaux, la commission a alors décidé de proposer au Sénat l'adoption sans modification des crédits de la mission « Economie » et du compte spécial « Gestion et valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2010, ainsi que des articles 53 et 54 rattachés.

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Réunie à nouveau le jeudi 19 novembre 2009, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a confirmé sa position, après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale aux crédits de la mission « Economie », et a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 54 bis .

* 16 Cf. supra, commentaire de l'article 54 bis (nouveau).

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