LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

I. MODIFICATION DES CRÉDITS À TITRE NON RECONDUCTIBLE

En seconde délibération , l'Assemblée nationale a majoré , à titre non reconductible , de 54.000 euros les crédits de la mission « Sécurité » en autorisations d'engagement et en crédits de paiement.

Ces crédits se répartissent comme suit :

- une majoration de 22.500 euros du titre 6 de l'action n° 2 « Sécurité et paix publiques » du programme « Police nationale » ;

- une majoration de 5.000 euros du titre 6 de l'action n° 3 « Sécurité routière » du programme « Police nationale » ;

- une majoration de 4.500 euros du titre 6 de l'action n° 6 « Commandement, ressources humaines et logistique » du programme « Police nationale » ;

- une majoration de 16.000 euros du titre 6 de l'action n° 2 « Sécurité routière » du programme « Gendarmerie nationale » ;

- une majoration de 6.000 euros du titre 6 de l'action n° 4 « Commandement, ressources humaines et logistique » du programme « Gendarmerie nationale ».

II. MODIFICATION DES CRÉDITS À TITRE RECONDUCTIBLE

En seconde délibération , l'Assemblée nationale a minoré de 18,5 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 13,1 millions d'euros en crédits de paiement les crédits de la mission « Sécurité », afin de gager les ouvertures de crédits opérées lors de cette seconde délibération.

Cette réduction de crédits est répartie comme suit :

- une minoration de 8,5 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 5,9 millions d'euros en crédits de paiement du programme « Police nationale » ;

- une minoration de 10 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 7,2 millions d'euros en crédits de paiement du programme « Gendarmerie nationale ».

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 10 novembre 2009, sous la présidence de Mme Fabienne Keller, secrétaire, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial, sur la mission « Sécurité ».

M. Aymeri de Montesquiou , rapporteur spécial , a indiqué que la mission « Sécurité » est dotée de 16,649 milliards d'euros en autorisations d'engagement et de 16,397 milliards d'euros de crédits de paiement (hors fonds de concours), soit une augmentation de 1,3 % par rapport à l'exercice précédent.

Il a relevé que, avec 14,084 milliards d'euros, les dépenses en personnel constituent 85,9 % des crédits. La mission « Sécurité » est donc, avant tout, une mission de personnel, et cette caractéristique forte induit une vraie rigidité dans son pilotage.

Il a ajouté que, depuis 2009, elle est marquée par une évolution notable : le rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l'intérieur. Ce rattachement ne remet pas en cause le statut militaire de la gendarmerie, ni le dualisme « policier », mais consiste en un rattachement organique et opérationnel en vue d'améliorer l'efficacité de la politique de sécurité.

Il a rappelé que la baisse de la délinquance, sous toutes ses formes, est le premier objectif de la mission. De ce point de vue, alors que depuis 2002 les statistiques en matière de lutte contre la délinquance ont marqué une amélioration continue et incontestable, un infléchissement de la performance doit être relevé depuis les mois de mars et avril 2009.

Il a indiqué que le nombre de crimes et délits constatés entre janvier 2009 et septembre 2009 a crû de 0,45 % par rapport à la même période en 2008. En zone police, cet indicateur a augmenté de 0,39 % et, en zone gendarmerie, de 0,58 %.

Il a regretté que, sur la même période, les atteintes volontaires à l'intégrité physique aient progressé de 4,08 %. En zone police, cet indicateur s'est encore plus fortement dégradé (+ 4,61 %) qu'en zone gendarmerie (+ 2,12 %).

M. Aymeri de Montesquiou , rapporteur spécial , a toutefois jugé qu'il est encore trop tôt pour savoir si cette tendance à la dégradation des résultats en matière de lutte contre la délinquance est passagère ou plus durable.

Puis il a souligné l'importance de la coopération internationale, dont l'instrument est le service de coopération technique internationale de police (SCTIP). Il a salué le savoir-faire, l'expérience et la maîtrise technologique des forces de sécurité françaises qui constituent un atout à valoriser dans le contexte international. Il a affirmé que la coopération en matière de sécurité permet non seulement un retour en termes de sécurité intérieure, mais aussi de créer ou d'entretenir des relations avec des pays qui sont parfois tenus en marge des relations internationales. Il s'agit donc là d'un levier diplomatique à ne pas sous-estimer.

M. Aymeri de Montesquiou , rapporteur spécial , a ensuite exposé le programme « Police nationale », comportant 8,915 milliards d'euros en crédits de paiement, soit une hausse de 1,9 %.

Il a expliqué que ce programme enregistre une réduction de ses effectifs de 1 390 équivalents temps plein travaillés (ETPT), avec un plafond d'emploi fixé à 144 790 ETPT. La baisse des effectifs s'inscrit dans une programmation triennale portant sur la période 2009-2011 et prévoyant, à son terme, la suppression de 4 000 ETPT de policiers.

Il s'est félicité de l'effort d'investissement au sein du programme : les crédits de paiement progressent de 5,8 % et les autorisations d'engagement enregistrent une très forte hausse de 88,2 %. Ces investissements vont tout particulièrement porter sur la modernisation technologique de la police.

M. Aymeri de Montesquiou , rapporteur spécial , a ensuite indiqué que le programme « Gendarmerie nationale » s'appuie sur 7,665 milliards d'euros en crédits de paiement, soit une légère hausse de 0,7 %.

Il a expliqué que, comme la police, la gendarmerie connaît, en 2010, une réduction de ses effectifs : son plafond d'emploi est fixé à 98 155 ETPT, soit une baisse de 1 354 ETPT. Ce mouvement s'inscrit dans une programmation triennale prévoyant, à son terme, la suppression de 3 000 ETPT de gendarmes.

Il a en outre souligné que le projet de loi de finances pour 2010 prévoit les mesures nécessaires en vue d'aligner le déroulement de carrière des sous-officiers et des officiers de gendarmerie sur celui des fonctionnaires des corps actifs de la police nationale. Il a précisé que la réalisation du plan d'adaptation des grades aux responsabilités exercées (PAGRE) rénové débouchera sur un équilibre « police - gendarmerie » en 2012, date de la mise en oeuvre complète du protocole « corps et carrières » de la police nationale.

Il a constaté que les dépenses de fonctionnement de la gendarmerie progressent de 9,7 %, tandis que ses dépenses d'investissement enregistrent une chute de 42,1 % en crédits de paiement en 2010.

Toutefois, il a souligné que ces deux mouvements de sens contraire résultent d'une « illusion d'optique budgétaire », du fait d'un changement de principe d'affectation des catégories de dépenses entre le titre 3 (dépenses de fonctionnement) et le titre 5 (dépenses d'investissement).

M. Aymeri de Montesquiou , rapporteur spécial , a regretté ces changements qui nuisent à la bonne lisibilité de la trajectoire budgétaire du programme dans le temps. Par ailleurs, en tendant à assimiler des dépenses de fonctionnement (hors fonctionnement courant) à de l'effort d'investissement, ils induisent un fort risque de confusion et d'altération de la sincérité du budget de ce programme.

Ainsi, à périmètre constant et après retraitement des affectations de dépenses, il a constaté une reprise de la politique d'investissement : + 7,1 % des autorisations d'engagement.

Enfin, il a observé que la présence française en Afghanistan explique, pour une très large part, les surcoûts prévisionnels des opérations extérieures (OPEX) pour la gendarmerie nationale en 2009. Alors que l'autorisation initiale de dépense était fixée à 15 millions d'euros, il a déploré un surcoût de 21,7 millions d'euros. A elle seule, l'OPEX en Afghanistan représente un budget total de 16,1 millions d'euros.

M. Aymeri de Montesquiou , rapporteur spécial , a estimé que les crédits consentis aux programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » contribuent d'autant plus à l'efficacité des forces de sécurité que celles-ci continuent d'avancer sur la voie de la rationalisation de leurs moyens. Il a souligné que le rattachement de la gendarmerie au ministère de l'intérieur ne peut en aucun cas être une fin en soi et qu'il ne constitue qu'une étape.

Il a préconisé de sortir des querelles sémantiques qui ont trop souvent brouillé la réflexion autour de la question de la « police de proximité ». Il a estimé que la récente mise en place des unités territoriales de quartier (UTeQ) et des compagnies de sécurisation illustre une façon plus moderne d'aborder ce sujet. Il a ajouté que les premiers résultats de ces unités sont d'ailleurs encourageants. A la différence de la « police de proximité » telle qu'on a pu la connaître dans sa version précédente et qui se traduisait, en particulier, par la création de locaux de police coûteux en effectifs et peu utiles (au regard notamment du nombre de plaintes), il a constaté que ce nouveau mode d'action ne fige pas la capacité opérationnelle des forces de police.

Par ailleurs, dans le cadre du rapprochement entre les deux forces, M. Aymeri de Montesquiou , rapporteur spécial , a estimé que la priorité doit désormais être donnée à la « chasse aux doublons ». Les gains espérés du rattachement de la gendarmerie ne pourront être pleinement perçus qu'à cette seule condition impérative.

Dans le domaine du renseignement et de la collecte de l'information, il s'est demandé s'il est encore judicieux d'éparpiller nos moyens entre deux structures parallèles.

Il s'est félicité que la récente réforme du renseignement intérieur, avec la création de la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI), ait permis de renforcer la cohérence et l'efficacité du dispositif de renseignement et de détection précoce des menaces.

Dans ces conditions, il s'est demandé s'il est opportun que la gendarmerie conserve une compétence générale l'amenant à exercer, elle aussi, une mission de renseignement.

De même, dans le domaine de la police scientifique et technique, il s'est interrogé sur la coexistence de six laboratoires de police nationale et du laboratoire de gendarmerie nationale, l'institut de recherches criminelles de la gendarmerie nationale (IRCGN). Il a estimé qu'une plus grande concentration des moyens s'imposerait dans cette matière.

M. Aymeri de Montesquiou , rapporteur spécial , a par ailleurs évoqué la superposition des missions de l'unité de Recherche, d'assistance, d'intervention et de dissuasion (RAID) et du Groupement d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN). Il s'est interrogé sur le dualisme « policier » qui conduit à maintenir ces deux structures, certes d'élite, mais redondantes.

Il a estimé que la police et la gendarmerie n'en ont pas fini de leur processus de mutation. Le scénario souhaitable paraît être, au minimum, une spécialisation de ces deux forces sur des secteurs géographiques et de compétences distinctes : à la police, par exemple, la police judiciaire et le renseignement, et à la gendarmerie, la sécurisation des zones non urbaines et la lutte contre la délinquance routière.

Il a reconnu que la réflexion mérite certes d'être poursuivie, mais que seul ce schéma permettra la « survie » de la gendarmerie. Dans le cas contraire, le risque sera de voir, dans les dix années à venir, les deux forces de sécurité fusionner au détriment de la gendarmerie nationale.

Un large débat s'est ensuite instauré.

Considérant la suppression d'un nombre conséquent d'emplois au sein de la mission, et parallèlement le redémarrage à la hausse de la délinquance, M. Roland du Luart s'est interrogé sur la pertinence des effectifs affectés à la garde des hautes personnalités, en particulier celles n'ayant plus de fonctions gouvernementales.

M. Aymeri de Montesquiou , rapporteur spécial , a indiqué que le ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sera interpellé sur le niveau de ces effectifs, et cela d'autant plus que des économies d'emploi sont probablement possibles dans ce domaine. Il a par ailleurs souligné que les transfèrements mobilisent, eux-aussi, des effectifs importants et que l'administration pénitentiaire pourrait se voir confier cette mission. Par ailleurs, afin de limiter ces transfèrements, le déplacement des magistrats devrait être préféré à celui des détenus et les nouveaux moyens de vidéoconférence être mis le plus largement possible à profit.

M. Roland du Luart a jugé qu'un éclairage sur la protection des hautes personnalités est nécessaire et qu'il pourra être utilement rapproché du nombre d'heures travaillées par chaque policier.

M. Aymeri de Montesquiou , rapporteur spécial , a rappelé qu'il avait commandé, auprès d'un cabinet de conseil en 2003 et au nom de la commission des finances, une étude portant précisément sur le temps de travail au sein de la police nationale.

M. François Trucy a insisté sur l'importance de l'action des forces de l'ordre dans la vie quotidienne des citoyens. Il a souligné les différences de culture entre la gendarmerie et la police nationales. Il a par ailleurs considéré que l'implantation locale de la gendarmerie nationale constitue un atout considérable en matière de collecte d'informations et de renseignements, et que cet avantage ne doit pas être dilué dans un rapprochement entre la police et la gendarmerie.

M. Aymeri de Montesquiou , rapporteur spécial , a reconnu l'importance du rôle de la gendarmerie en matière de renseignement en zone rurale, comme l'illustrent les succès remportés face à l'organisation terroriste ETA. Il a toutefois mis l'accent sur la nécessaire rationalisation des activités de renseignements pour l'avenir.

Dans le domaine de la police scientifique et technique, M. François Trucy a souligné l'intérêt de l'émulation entre les laboratoires de police et de gendarmerie.

M. Philippe Dallier a estimé qu'il est difficile de reprocher à l'ancienne police de proximité un certain immobilisme. Il s'est par ailleurs interrogé sur le développement des UTeQ alors que les effectifs de la mission « Sécurité » diminuent.

M. Aymeri de Montesquiou , rapporteur spécial , a indiqué que ce développement passera par un rééquilibrage des forces entre les différentes zones placées sous la surveillance de la police et de la gendarmerie. Il a rappelé que, par le passé, la police de proximité a nécessité des investissements importants, notamment pour les commissariats, et que sa mobilité n'a pas été suffisante. Il a toutefois jugé probants les premiers résultats obtenus par la nouvelle police de proximité que constituent les UTeQ.

Mme Fabienne Keller , présidente , a rappelé l'importance du rôle joué par la gendarmerie nationale en matière de sécurité et l'intérêt de tirer profit de sa complémentarité avec la police nationale.

M. Aymeri de Montesquiou , rapporteur spécial , a reconnu la forte affection que chacun peut avoir pour la gendarmerie, mais il a précisé que la « survie » de cette force passera par une attribution de missions distinctes de celles confiées à la police.

La commission a alors décidé de proposer au Sénat l'adoption sans modification des crédits de la mission « Sécurité» inscrits dans le projet de loi de finances pour 2010.

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Réunie à nouveau le jeudi 19 novembre 2009, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a confirmé sa position, après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale.

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