C. UN LISSAGE DES EFFETS SUR LA DETTE

A court et moyen termes, l'emprunt national n'augmente pas la dette de l'Etat de son montant, soit 35 milliards d'euros, mais d'un montant nettement inférieur. En effet, il faut en déduire le montant des sommes déposées par les opérateurs sur le compte du Trésor, de 30 milliards d'euros en début de période.

A titre indicatif, le tableau ci-après synthétise les grandes masses du dispositif, en fonction de diverses hypothèses.

Les grandes masses du dispositif proposé : quelques ordres de grandeur indicatifs

2010

2011

2012

2013

2014

2015

Hypothèses

Taux d'intérêt à moyen et long termes (BTAN et OAT) (en %)

3

3

4

4

4

4

Taux d'intérêt à court terme (BTF) (en %)

0,5

2

3

3

3

3

Rémunération des fonds non consomptibles (en %)

4

4

4

4

4

4

Décaissements par les opérateurs (en Mds €) *

5,3

4,2

4,2

4,2

4,2

0,6

Résultats (en Mds €)

Emissions à moyen et long termes***

35,0

35,0

35,0

35,0

35,0

35,0

Dépôts

30,0

25,8

21,6

17,4

15,9

15,9

Dont dépôts rémunérés****

15,9

15,9

15,9

15,9

15,9

15,9

Impact de l'emprunt national sur la dette de l'Etat

5,0**

9,2

13,4

17,6

19,1

19,1

Charges d'intérêts totales (y.c. rémunération des opérateurs)

0,5**

1,2**

1,4

1,5

1,6

1,6

Charge d'intérêt à moyen et long termes*****

0,0

1,1

1,4

1,4

1,4

1,4

Charge d'intérêt à court terme*****

0,0

-0,5

-0,6

-0,5

-0,5

-0,5

Rémunération des opérateurs

0,5**

0,6**

0,6

0,6

0,6

0,6

* Hypothèses retenues par la commission des finances et explicitées ci-après, quasiment identiques à celles du Gouvernement. ** Résultats identiques aux chiffres indiqués par le Gouvernement. *** Sans augmentation de la dette résultant des charges d'intérêts (que l'on suppose gagée). **** Le montant de 15,9 milliards d'euros retenu ici est l'estimation faite par la commission des finances à partir des justifications au premier euro du présent projet de loi (le Gouvernement retient un montant de 15,5 milliards d'euros). ***** On considère que la charge d'intérêt n'apparaît qu'à compter de 2011 (les montants des coupons échus et des coupons pleins s'annulant l'année d'émission).

Sources : présent projet de loi, calculs de la commission des finances

1. Une augmentation de la dette de l'Etat de 5 milliards d'euros en 2010

En 2010, la dette de l'Etat serait accrue de seulement 5 milliards d'euros. En effet, les 35 milliards d'euros d'émissions rendus nécessaires par l'emprunt national seraient compensés par le dépôt de 30 milliards d'euros sur le compte du Trésor par les opérateurs.

Certes, du point de vue du budget de l'Etat, la totalité des 35 milliards d'euros ont vocation à être décaissés dès 2010 41 ( * ) , ce qui aggrave d'autant son déficit au sens de la comptabilité budgétaire. Par ailleurs, si le Gouvernement communique sur le fait que les remboursements des banques seront de l'ordre de 13 milliards d'euros 42 ( * ) , on ne voit pas la pertinence de cette approche, qui conduit à additionner deux phénomènes indépendants. En fait, il faut distinguer deux sujets :

- l'augmentation de 13 milliards d'euros des prévisions d'émissions par rapport aux prévisions de la loi de finances pour 2010, résultant essentiellement des 35 milliards d'euros de l'emprunt national, et de deux phénomènes tendant à réduire le montant des émissions : 13 milliards d'euros de remboursements des banques, qui auraient dû venir en déduction de la dette de l'Etat, mais aussi 9 milliards d'euros de rachats de titres ;

- le supplément d'émissions suscité par l'emprunt national, par rapport à une situation où celui-ci n'existerait pas : ce supplément est bien de 35 milliards d'euros, les deux phénomènes précités en étant indépendants.

La dette à moyen-long terme est donc accrue de 35 milliards d'euros par l'emprunt national.

Cependant, la dette à court terme de l'Etat sera fortement réduite. En effet, selon l'exposé des motifs de l'article 5 du présent projet de loi, « la variation des dépôts des correspondants atteindrait (...) 30 milliards d'euros de plus qu'en loi de finances, du fait de l'obligation de dépôt imposée aux gestionnaires des fonds versés pour le financement des dépenses d'avenir ». Cela implique que les décaissements des opérateurs liés à l'emprunt national sont évalués à 5 milliards d'euros en 2010 (comme ceci a été confirmé par le Gouvernement).

L'Etat ne bénéficie pourtant pas de 30 milliards d'euros de trésorerie gratuite, parce qu'il doit rémunérer les dépôts des opérateurs correspondant aux crédits non consomptibles, qui en représentent plus de la moitié. Ainsi, la justification au premier euro du programme « Charge de la dette et trésorerie de l'Etat » évalue le coût de « la rémunération des fonds soumis à obligation de dépôt sur le compte du Trésor et conservés en vue de produire intérêt » à 500 millions d'euros. Selon l'Agence France Trésor, ce chiffre de 500 millions d'euros en 2010 correspond au montant des crédits non consomptibles tel qu'estimé par le Gouvernement, de 15,5 milliards d'euros, multiplié par un taux d'intérêt de 4 %, appliqué pendant trois trimestres (le montant exact étant de 465 millions d'euros). Selon les mêmes hypothèses, on calcule qu'en année pleine, le coût est de 620 millions d'euros.

* 41 Selon l'exposé des motifs du présent projet de loi, « les nouveaux programmes ont vocation à être supprimés à la fin de l'année 2010, dans la mesure où l'intégralité des crédits sera décaissée par l'État avant la fin de l'année, au fur et à mesure du rythme de conclusion des conventions prévoyant les modalités d'utilisation des fonds ».

* 42 Le Gouvernement affirme, dans l'exposé des motifs du présent projet de loi : « Les 35 Md€ ouverts par le collectif seront financés de deux manières : - par le remboursement, à hauteur de 13 Md€, des sommes prêtées par l'État aux banques afin de renforcer leurs fonds propres au moment de la crise financière ; ce montant, réservé sur le compte du Trésor à la Banque de France, est disponible pour le financement des investissements et n'augmente donc pas la dette publique ; - par appel aux marchés financiers à hauteur de 22 Md€, dans le cadre du programme d'émissions à moyen long terme de l'État, pour garantir le coût de financement le plus faible possible ». En outre, dans le tableau de financement, 3,5 des 13 milliards d'euros remboursés par les banques sont préemptés pour faire face aux besoins de trésorerie en janvier 2011.

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