3. La situation contrastée des trois opérateurs et de RFF
a) L'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF)

Vecteur privilégié du plan de relance, l'AFITF a vu son activité augmenter de 17 % par rapport à 2008 (dont 324 millions d'euros de CP au titre du plan de relance), soit 2 471 millions d'euros de CP. Elle est toutefois restée inférieure aux prévisions initiales en raison de l'insuffisance de certaines recettes (redevance domaniale 100 ( * ) , taxe d'aménagement du territoire et amendes des radars), qui a conduit au report de plusieurs projets. Ces recettes avaient été surestimées, les premiers effets de la crise s'étant fait sentir dès fin 2008, mais les moins-values ont pu être anticipées assez tôt lors des premières décisions modificatives.

Les 655 millions d'euros d'AE mis en place dans le cadre du plan de relance ont été consacrés à l'accélération de plusieurs projets existants : les PDMI (250 millions d'euros), la sécurisation des tunnels routiers (85 millions d'euros), le volet ferroviaire des contrats de projet régionaux pour 2007-2013 (150 millions d'euros), les études et travaux préparatoires de trois lignes à grande vitesse 101 ( * ) et du canal Seine-Nord-Europe (81,1 millions d'euros) et la régénération et l'accessibilité aux personnes handicapées du réseau ferré (88,9 millions d'euros). Au total, l'impact du volet routier du plan de relance a conduit à un infléchissement temporaire du report modal que l'AFITF a vocation à financer, puisqu'elle a consacré 57 % de ses crédits à des moyens de transport alternatifs à la route.

Budgets prévisionnel et réalisé de l'AFITF en 2009

(en millions d'euros)

Recettes

Exécution 2008

Budget prévisionnel 2009

Exécution 2009

Redevance domaniale autoroutière

174

375

180

Taxe d'aménagement du territoire

521

540

528

Produit des amendes des radars

123

200

115

Subvention budgétaire programme 203

0

1 170

1 229

Subvention budgétaire programme 315

0

374

374

Avance du Trésor

0

143

143

Produits exceptionnels

0

0

8

Total

818

2 802

2 577

Dépenses (hors frais de fonctionnement)

Opérations du CIADT

788

794

758

Dont : routes

149

166

192

Autres modes

639

628

566

CPER, contrats de projet et autres contrats

869

1 259

1 166

Dont : routes

543

618

582

Fer et combiné

152

334

310

Ports et littoral

21

40

40

Fluvial

6

7

3

Transports collectifs

147

259

231

Autres investissements

455

779

546

Dont : routes

122

308

290

Autres modes

333

471

256

Total

2 112

2 833

2 471

Source : rapport annuel de performances annexé au projet de loi de règlement pour 2009

La situation financière de l'agence n'en devient pas moins tendue et ne sera pas rétablie à moyen terme . La dotation initiale en capital de 4 milliards d'euros ayant été intégralement consommée, une subvention d'équilibre d'un montant global de 1,6 milliard d'euros (dont 374 millions d'euros au titre du plan de relance) a pour la première fois été versée en 2009 . L'équilibre financier n'a cependant pu être atteint que grâce à une subvention complémentaire de 50 millions d'euros financée sur le programme 315, et à une avance du Trésor de 143 millions d'euros , qui a permis d'abonder le fonds de roulement à hauteur de 104,9 millions d'euros. Sans cette avance du Trésor, le résultat de l'AFITF eût donc été déficitaire de 38,2 millions d'euros.

Compte tenu du report à 2012 de l'entrée en vigueur de l'« éco-redevance poids lourds », qui doit rapporter en année pleine 880 millions d'euros, et de l'important programme d'investissements prévu jusqu'en 2014 (dont 5,8 milliards d'euros d'AE prévus en 2010 et 5,6 milliards d'euros en 2011), la situation de l'AFITF est délicate mais décrite comme une phase de transition par le ministère.

Lors de son audition par votre commission le 16 juin 2010, Jean-Louis Borloo, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, a donné quelques indications sur l'avenir financier de l'agence. La subvention d'équilibre à l'AFITF devrait ainsi s'élever à 1 246 millions d'euros en 2010 , dont 331 millions d'euros au titre du plan de relance, mais l'agence devra malgré tout puiser dans son fonds de roulement. A compter de 2011, il devrait être proposé de stabiliser la subvention budgétaire autour d'un milliard d'euros et les redevances domaniales des sociétés d'autoroute seront réévaluées pour rapporter au moins 400 millions d'euros.

Vos rapporteurs spéciaux jugent néanmoins que ces perspectives ne garantissent pas la pérennité du financement de l'agence et que de nouvelles recettes devront être trouvées, sauf à considérer que le recours à l'endettement par les avances du Trésor soit une variable d'ajustement...

b) Voies navigables de France

L'établissement public industriel et commercial VNF a bénéficié en 2009 d'une subvention globale de l'Etat de 106,9 millions d'euros , imputée sur les programmes 203 et 315. Outre la subvention complémentaire de 50 millions d'euros financée par le programme 315 au titre du plan de relance, évoquée supra , ce montant inclut la subvention de 50 millions d'euros prévue à l'avenant au contrat de performance pour 2009, une enveloppe complémentaire pour mettre en oeuvre les orientations du Grenelle de l'environnement, une subvention pour le fonctionnement des services de l'Etat mis à sa disposition, et 800 000 euros de transferts pour la mise en oeuvre du plan d'aide à la modernisation des transporteurs fluviaux de marchandises.

Sa situation financière est favorable puisque sur un budget exécuté de 244,2 millions d'euros (dont 72 % ont été dédiés aux infrastructures), VNF a enregistré un résultat bénéficiaire de 39,7 millions d'euros , largement supérieur aux prévisions (25,4 millions d'euros). L'opérateur a également employé moins d'effectifs qu'en 2008 , soit 4 689 ETP en fin d'exercice contre 4 830, dont la grande majorité (4 345 ETPT) est mis à disposition par l'Etat.

c) L'Etablissement public de sécurité ferroviaire (EPSF)

L'EPSF, troisième opérateur associé au programme 203, exerce les fonctions dévolues à l'autorité nationale de sécurité ferroviaire au sens de la directive sur la sécurité ferroviaire 2004/49/CE 102 ( * ) . Il est chargé de délivrer un certain nombre d'autorisations et de s'assurer, au moyen d'audits et de contrôles, que les exigences communautaires et réglementaires sont respectées, et ce en garantissant à tous les opérateurs une égalité de traitement.

Son budget, de 14,83 millions d'euros en 2009 (soit un montant proche des prévisions), ne requiert aucune subvention budgétaire et est intégralement couvert par le droit de sécurité (0,5 % du montant des redevances versées par les entreprises ferroviaires à RFF), les redevances d'instruction des dossiers et la facturation de certaines prestations de services. Le fonds de roulement a bénéficié d'un apport de 679 000 euros. L'effectif moyen de l'établissement, de 99 personnes , s'est révélé inférieur à la prévision (110 personnes).

d) Réseau ferré de France (RFF)

Outre la subvention à l'AFITF, l'action 10 « Infrastructures de transports collectifs et ferroviaires » du programme 203 finance les concours de l'Etat à RFF, qui n'est pas un « opérateur LOLF ». Ces concours anticipent en 2009 la réforme du système de tarification de l'infrastructure et le nouveau modèle économique de RFF. Le contrat de performance signé le 3 novembre 2008 assigne ainsi à l'établissement un objectif de couverture , d'ici 2012, de 62 % du coût complet du réseau par ses recettes commerciales (en particulier les péages acquittés par la SNCF).

La subvention n'est donc plus « fonctionnelle » (destinée à couvrir le fonctionnement, l'investissement et le désendettement) mais liée à la rentabilité de l'utilisation du réseau ferré national par les grandes branches de transport ferroviaire. La branche TGV est actuellement couverte par les recettes commerciales. Le concours de 2 319,1 millions d'euros versé en 2009 se répartit ainsi en :

- 1 140,8 millions d'euros pour la subvention relative à l'utilisation du réseau ferré national par les trains régionaux de voyageurs (TER) ;

- 358,7 millions d'euros pour les trains nationaux classiques de voyageurs (soit les « Corail ») ;

- et 819,6 millions d'euros pour les trains de fret.

Les comptes résumés en 2008 et 2009, présentés dans le tableau ci-après, illustrent une amélioration de la santé financière de RFF .

Principales données sur les comptes de RFF en 2008 et 2009

(en millions d'euros)

2008

2009

Variation

Chiffres d'affaires

3 099

3 281

+ 5,9 %

Résultat opérationnel courant

- 397

1 586

+ 1 983 millions d'euros

Résultat net

11 849

304

N.S.

Cash-flow net opérationnel

519

2 368

+ 1 849 millions d'euros

Investissements

2 958

3 296

+ 11,4 %

Source : communiqué de presse de RFF du 27 avril 2010

Les investissements de RFF ont atteint un point culminant en 2009 et ont été pour la première fois davantage consacrés à la rénovation du réseau existant (1,6 milliard d'euros) qu'au développement des gares et lignes à grande vitesse. Vos rapporteurs spéciaux jugent nécessaire de poursuivre cet effort de régénération et d'entretien, qui doit primer la construction de nouvelles lignes.

Malgré la baisse de 23 % du fret et des recettes commerciales inférieures au plan d'affaires, RFF a pour la première fois dégagé un résultat net conjoncturellement bénéficiaire, notamment grâce à une diminution de 22,6 % du coût de l'endettement (1 139 millions d'euros). La situation n'est pas favorable ni stabilisée pour autant, puisque l'endettement net, quoiqu'en baisse de 360 millions d'euros, atteint encore 27,8 milliards d'euros . Les flux nets de trésorerie demeurent très insuffisants pour financer à la fois les intérêts de la dette et la rénovation du réseau. La remontée des taux d'intérêt, sans progression substantielle du trafic de voyageurs et du fret, pourrait également contribuer à dégrader la trajectoire financière en 2011 .


* 100 Dont le relèvement prévu initialement n'a pu être mis en place.

* 101 La seconde phase de la LGV-Est, la LGV Bretagne-Pays-de-Loire et la LGV Sud-Europe-Atlantique.

* 102 Directive 2004/49/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 concernant la sécurité des chemins de fer communautaires et modifiant la directive 95/18/CE du Conseil concernant les licences des entreprises ferroviaires, ainsi que la directive 2001/14/CE concernant la répartition des capacités d'infrastructure ferroviaire, la tarification de l'infrastructure ferroviaire et la certification en matière de sécurité.

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