AMENDEMENT PROPOSÉ PAR
VOTRE COMMISSION DES FINANCES

PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2011

DEUXIÈME PARTIE

MISSION PENSIONS

1

A M E N D E M E N T

présenté par

M. AUBAN,

au nom de la commission des finances

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ARTICLE 100

Alinéa 11

Rédiger ainsi cet alinéa :

IX. - Le rapport sur les pensions de retraite, annexé au projet de loi de finances de l'année en application du II de l'article 113 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007, présente, chaque année, un bilan de la mise en oeuvre des dispositions du présent article.

OBJET

Amendement rédactionnel et de simplification.

Outre une modification purement rédactionnelle, cet amendement vise à simplifier et rationaliser le travail d'information du Parlement par le Gouvernement. Le souci de rendre compte annuellement de la mise en oeuvre de la décristallisation des pensions est à la fois louable et nécessaire car le succès d'une telle entreprise dépend en premier lieu de ses bonnes conditions d'application : publicité suffisante auprès des bénéficiaires, simplicité des formulaires de demande et fiabilité des procédures de contrôle.

Néanmoins, la demande de remise d'un rapport spécifique à cette mesure semble inutile, le Gouvernement étant déjà tenu par ailleurs de publier en annexe du projet de loi de finances de l'année un rapport sur les pensions de retraite. Il suffit donc que celui-ci comporte une section consacrée au bilan de la mise en oeuvre de la décristallisation.

LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

I. MODIFICATION DES CRÉDITS

Aucune modification des crédits n'a été adoptée en première délibération.

En seconde délibération, l'Assemblée nationale a minoré de 3 133 512 euros en AE et 3 422 239 euros en CP les crédits du programme « Régime sociaux et de retraite des transports terrestres » afin de « gager » les ouvertures de crédits opérées lors de la discussion de la seconde partie du présent projet de loi de finances.

II. MODIFICATION DE L'ARTICLE RATTACHÉ

L'Assemblée nationale a adopté une modification rédactionnelle à l'article 100 (cf. supra dans la rubrique « Examen de l'article rattaché »).

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 20 octobre 2010, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Bertrand Auban , rapporteur spécial, sur la mission « Régimes sociaux et de retraite », le compte d'affectation spéciale « Pensions » et l'article 100 du projet de loi de finances pour 2011.

M. Bertrand Auban , rapporteur spécial . - Il me revient de vous présenter ce matin, au nom de la commission des finances, les crédits pour 2011 de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte spécial « Pensions », ainsi que l'article 100 du projet de loi de finances pour 2011 relatif à la décristallisation des pensions civiles et militaires des anciens combattants ressortissants de pays autrefois placés sous la souveraineté française.

Bien que les sommes en jeu pour financer les pensions de l'Etat soient considérables, je serai très bref. Tout d'abord, je vous ai déjà présenté, le 29 septembre dernier, un premier bilan de la réforme de 2008 du régime spécial de retraite de la SNCF ainsi qu'un suivi des observations que j'ai formulées, il y a deux ans, sur la caisse de retraite du personnel de la RATP ; le rapport n° 732 (2009-2010) vient d'être mis en distribution. Ensuite, les dépenses de pensions des fonctionnaires sont des charges obligatoires pour l'Etat envers les ayant droits. Elles dépendent donc essentiellement de la démographie et du droit applicable.

Avant d'entrer dans le détail, dans le contexte actuel du débat qui agite notre pays sur la réforme des retraites, je souhaite, à titre liminaire et personnel, exprimer mon désaccord profond sur les points fondamentaux du projet de loi présenté par le Gouvernement, à savoir le recul de 60 à 62 ans de l'âge d'ouverture des droits et de 65 à 67 ans de l'âge permettant de percevoir une retraite à taux plein. Ce projet présente également des mesures sur la pénibilité très insuffisantes. Il pénalise les carrières longues, c'est-à-dire ceux qui commencent à travailler très jeune, et les carrières incomplètes, en particulier celles des femmes. Le dossier, important, de la réforme des retraites aurait mérité mieux qu'un projet débattu dans l'urgence au Parlement, mené sans concertation avec les partenaires sociaux, ni écoute de la population, et surtout profondément injuste envers les salariés qui assumeront quasiment seuls les sacrifices exigés par cette réforme.

Je reprends maintenant mes fonctions de rapporteur spécial de la commission des finances et j'en viens à la présentation des chiffres clés et des données de cadrage général des retraites des fonctionnaires de l'Etat qui relèvent du compte spécial « Pensions » et de certains régimes spéciaux bénéficiant d'une subvention d'équilibre de l'Etat dans le cadre de la mission « Régimes sociaux et de retraite ».

Pour 2011, le coût global du compte spécial « Pensions » s'élèvera à 52,6 milliards d'euros, contre 51,12 milliards d'euros en loi de finances initiale pour 2010. Dans ce total, quelque 38,55 milliards d'euros seront consacrés aux pensions civiles et 9,52 milliards d'euros aux pensions militaires.

Afin d'équilibrer les recettes avec les dépenses, l'ensemble des taux de contribution employeur de l'Etat continuent à progresser :

- pour les personnels civils, le taux passera de 62,14 % en 2010 à 65,39 % en 2011 ;

- pour les personnels militaires, le taux passera de 108,63 % à 114,14 %.

En outre, j'ai noté que le projet de loi de finances anticipe l'application de la réforme des retraites en augmentant, dès 2011, de 0,27 point le taux de cotisation de 7,85 % applicable aux fonctionnaires, dans la perspective de la convergence vers le taux de droit commun de 10,55 %.

Or, malgré cette augmentation des recettes, le compte spécial « Pensions » est présenté en déficit de recettes de 200 millions d'euros, soit 0,4 % du total, qui sera comblé par la mobilisation à due concurrence du fonds de roulement d'un milliard d'euros qui lui est affecté.

S'agissant maintenant de la mission « Régimes sociaux et de retraite », je précise que le motif qui a présidé à la création d'une telle mission budgétaire est de regrouper le financement d'un ensemble de régimes spéciaux de retraite en déclin démographique pour lesquels la nation exprime sa solidarité en apportant une subvention d'équilibre. Pour 2010, la contribution de l'Etat s'élèvera à 6,03 milliards d'euros, soit une progression de 5,4 % par rapport à 2010 (5,72 milliards d'euros). Ce budget soutient les régimes sociaux et de retraite de près de 800 000 pensionnés pour moins de 250 000 cotisants.

Les régimes les plus importants au regard du soutien de l'Etat sont au nombre de cinq :

- pour les retraités de la SNCF, la subvention de l'Etat s'élèvera en 2011 à près de 3,2 milliards d'euros, soit 61 % du montant des prestations de pensions vieillesse servies ;

- pour les mineurs : 1,2 milliard d'euros ;

- pour les marins : 789 millions d'euros ;

- pour les personnels de la RATP : 526 millions d'euros ;

- et pour la SEITA : 139 millions d'euros.

Certains régimes sont en voie d'extinction démographique et ne comptent plus de cotisants. Sont ainsi totalement subventionnés par l'Etat, au titre de la solidarité nationale, les régimes de retraite de l'Imprimerie nationale (7 bénéficiaires), des régies ferroviaires d'outre-mer (228 bénéficiaires) et de l'ORTF (284 bénéficiaires).

Je ferai une observation de principe sur le périmètre de la mission « Régimes sociaux et de retraite » car j'ai identifié un certain nombre de régimes spéciaux qui sont subventionnés par l'Etat en dehors de la présente mission. Il s'agit notamment des caisses de retraite de la Comédie française et de l'Opéra de Paris. Outre les 17 millions d'euros attribués à ces deux établissements sur les crédits de la mission « Culture », quelque 675 millions d'euros de prestations sociales et de retraite, issus de la mission « Ecologie, développement et aménagement durable », financent l'après crise des mines (charbonnages de France, houillères, mines de fer, ardoisières, etc.) et les retraites des anciens électriciens et gaziers d'Algérie, du Maroc et de Tunisie. Afin d'améliorer la lisibilité d'ensemble de la contribution de l'Etat aux régimes spéciaux, je propose que le rattachement à la mission « Régimes sociaux et de retraite » du financement de ces régimes soit mis à l'étude pour l'élaboration des prochains budgets.

Au total, le financement des retraites de la fonction publique et des régimes spéciaux dont l'Etat assure l'équilibre financier mobilisera, en 2011, 58,63 milliards d'euros, soit près de 20,5 % des dépenses de l'Etat. Selon les projections de la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques pour la période 2011-2014, l'évolution des dépenses de retraite sur la période 2011-2013 continuera à être très dynamique, suivant une progression de l'ordre de 8 %.

Avant de conclure cette intervention, je souhaiterais dire un mot de la décristallisation des pensions civiles et militaires des anciens combattants ressortissants de pays autrefois colonies ou protectorats de la France. Ils sont encore 32 000 à pouvoir prétendre à une pensions équivalente à celle de nos concitoyens. A la suite de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 qui a institué la procédure de question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a rendu sa première décision, le 28 mai 2010, et a considéré comme « contraires au principe d'égalité » les dispositions légales instituant la cristallisation des pensions de ces anciens combattants. L'article 100 du projet de loi de finances pour 2011 propose au législateur de remédier à cette inconstitutionnalité en alignant les droits à pensions quelle que soit la nationalité du bénéficiaire. Le coût de cette mesure, dont l'entrée en vigueur est prévue au 1er janvier prochain, serait de 150 millions d'euros en année pleine. Pour 2011, le Gouvernement estime que cette charge serait limitée à 82 millions d'euros du fait de la montée en charge progressive des demandes de reconstitution de carrière par les intéressés. J'appellerai naturellement le Gouvernement à la plus grande diligence dans la mise en oeuvre de la mesure et dans le traitement des dossiers compte tenu de l'âge élevé des intéressés.

Pour terminer, et considérant que le paiement des droits à pension constitue pour l'Etat une obligation, je vous propose, au nom de la commission des finances et au bénéfice de mes observations, d'adopter les crédits du compte d'affectation spéciale « Pensions » et de la mission « Régimes sociaux et de retraite ». Je vous propose également d'exprimer un avis favorable à l'adoption de l'article 100 du projet de loi de finances pour 2011, rattaché au compte spécial « Pensions », relatif à la décristallisation des pensions civiles et militaires de retraite, sous réserve d'une modification rédactionnelle et de simplification.

Je vous rappelle que l'article 100 prévoit la remise chaque année par le Gouvernement d'un rapport au Parlement sur le bilan de la mise en oeuvre de la décristallisation.

Outre une modification purement rédactionnelle, mon amendement vise donc à simplifier et à rationaliser le travail d'information du Parlement par le Gouvernement. Le souci de rendre compte annuellement de la mise en oeuvre de la décristallisation des pensions est à la fois louable et nécessaire. J'attire l'attention sur le fait que la réussite pleine et entière des mesures de décristallisation dépendra en premier lieu des conditions d'application : il faudra que l'administration fasse une publicité suffisante auprès des bénéficiaires et qu'elle produise des formulaires de demande les plus claire et simple possible.

La demande de remise d'un rapport spécifique semble donc inutile car le Gouvernement est déjà tenu par ailleurs de publier en annexe du projet de loi de finances de l'année un rapport sur les pensions de retraite. Il suffit que celui-ci comporte une section consacrée au bilan de la mise en oeuvre de la décristallisation.

M. Jean Arthuis , président . - Cet exposé éclaire le débat sur les retraites et souligne l'injustice d'un système dans lequel l'Etat se porte garant de l'équilibre de régimes spéciaux offrant à leurs bénéficiaires des droits plus favorables que ceux des régimes de droit commun.

Mme Nicole Bricq . - Je rappelle toutefois, ainsi que l'a déjà fait notre rapporteur spécial dans son rapport sur le bilan de la réforme de 2008 sur le régime de retraite de la SNCF, que les régimes spéciaux sont en voie de convergence avec le régime de la fonction publique.

Par ailleurs, je constate que les dépenses de pensions seront très dynamiques, avec 8 % de progression de 2011 à 2013 ainsi que l'a souligné Bertrand Auban, alors que le Gouvernement projette de revenir vers l'équilibre à l'horizon 2014. Cela devrait nous amener à nous interroger sur la question des recettes du budget de l'Etat et de la sécurité sociale.

M. Jean-Pierre Fourcade . - Le déclin démographique du nombre des pensionnés des régimes spéciaux devrait à long terme entraîner une diminution des subventions de l'Etat.

M. Bertrand Auban , rapporteur spécial . - Cela est vrai à très long terme, et pas avant 2021 en ce qui concerne la SNCF. Pour les prochaines années, le projet de loi de programmation pluriannuelle des finances publiques pour la période 2011-2014 prévoit que la contribution de l'Etat à la mission « Régimes sociaux et de retraite » progressera de 6,03 milliards d'euros en 2011 à 6,24 milliards d'euros en 2012 et 6,53 milliards d'euros en 2013, soit une augmentation de 8,29 %.

M. Jean-Pierre Fourcade . - Combien d'anciens combattants sont-ils susceptibles de bénéficier de la décristallisation des pensions ?

M. Bertrand Auban , rapporteur spécial . - L'administration compte actuellement 32 000 bénéficiaires potentiels. Mais je souligne que compte tenu de leur âge élevé, ce nombre risque de diminuer rapidement. C'est pourquoi j'appellerai l'administration à traiter les dossiers de revalorisation dans les meilleurs délais.

A l'issue de ce débat, la commission a adopté l'amendement proposé par le rapporteur spécial à l'article 100 du projet de loi de finances pour 2011.

Puis, elle a décidé de proposer au Sénat :

- l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d'affectation spéciale « Pensions »,

- ainsi que l'adoption de l'article 100 ainsi modifié.

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Réunie à nouveau le jeudi 18 novembre 2010, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a confirmé sa position, après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale.

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