N° 123

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011

Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 novembre 2010

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant l'approbation de l' accord de sécurité sociale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de l' Inde ,

Par M. Michel BILLOUT,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Josselin de Rohan , président ; MM. Jacques Blanc, Didier Boulaud, Jean-Louis Carrère, Jean-Pierre Chevènement, Robert del Picchia, Jean François-Poncet, Robert Hue, Joseph Kergueris , vice-présidents ; Mmes Monique Cerisier-ben Guiga, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. André Trillard, André Vantomme, Mme Dominique Voynet , secrétaires ; MM. Jean-Etienne Antoinette, Robert Badinter, Jean-Michel Baylet, René Beaumont, Jean-Pierre Bel, Jacques Berthou, Jean Besson, Michel Billout, Didier Borotra, Michel Boutant, Christian Cambon, Marcel-Pierre Cléach, Raymond Couderc, Mme Michelle Demessine, M. André Dulait, Mmes Bernadette Dupont, Josette Durrieu, MM. Jean Faure, Jean-Paul Fournier, Mme Gisèle Gautier, M. Jacques Gautier, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Robert Laufoaulu, Simon Loueckhote, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Rachel Mazuir, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Jean Milhau, Charles Pasqua, Philippe Paul, Xavier Pintat, Bernard Piras, Christian Poncelet, Yves Pozzo di Borgo, Jean-Pierre Raffarin, Daniel Reiner, Roger Romani, Mme Catherine Tasca.

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

345 et 124 (2009-2010)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi a pour objet d'autoriser l'approbation de l'accord de sécurité sociale signé à Paris le 30 septembre 2008 entre la France et l'Inde.

La France a conclu avec près d'une trentaine de pays extérieurs à l'Union européenne et à l'Espace économique européen des accords de sécurité sociale destinés à lever les difficultés liées à la mobilité professionnelle à l'étranger en matière de couverture sociale.

La signature d'un tel accord avec l'Inde s'inscrit dans la volonté de développer le courant des échanges et des investissements réciproques entre les deux pays.

L'accord permettra en effet d'améliorer et de simplifier les règles applicables aux travailleurs expatriés des deux pays dans le domaine de la sécurité sociale, que ce soit lors de l'expatriation elle-même ou, ultérieurement, pour la prise en compte, par les régimes sociaux, des années passées à l'étranger.

Votre rapporteur présentera l'accord de sécurité sociale franco-indien avant d'évoquer son intérêt dans le cadre des relations économiques bilatérales.

I. L'ACCORD DE SÉCURITÉ SOCIALE FRANCO-INDIEN DU 30 SEPTEMBRE 2008

En l'absence d'accord de sécurité sociale entre la France et l'Inde, les travailleurs de l'un des deux pays expatriés dans l'autre sont jusqu'à présent affiliés au régime de sécurité sociale de l'Etat dans lequel ils exercent leur activité. Cette situation peut constituer un frein à l'expatriation des salariés ou les pénaliser dans leurs droits. Ainsi, faute de coordination entre régimes, l'ensemble des périodes de cotisation ne sont pas prises en compte pour le calcul des pensions de retraite.

C'est à l'initiative des autorités indiennes qu'ont été pris, au début de l'année 2008, les premiers contacts bilatéraux en vue de la préparation d'un tel accord. Après quelques mois de négociations, l'accord définitif à été signé à Paris le 30 septembre 2008.

Dernier en date des accords bilatéraux de sécurité sociale conclus par la France, l'accord franco-indien se distingue des accords précédents de même nature en prévoyant des règles de rattachement différentes selon les risques. Le salarié détaché à l'étranger pourra être maintenu durant cinq ans dans le régime d'assurance-vieillesse de son Etat d'origine. En revanche, il relèvera de la législation locale pour les assurances maladie, maternité et accidents du travail.

A. LA MISE EN PLACE D'UN STATUT DE DÉTACHEMENT CIRCONSCRIT À L'ASSURANCE VIEILLESSE-INVALIDITÉ

L'article 2 définit le champ d'application matériel de l'accord. Celui-ci est limité aux régimes d'assurance vieillesse et invalidité , y compris les pensions de survivants.

Sont couvertes, pour la France, les législations relatives aux régimes d'assurance vieillesse et d'invalidité des salariés et des non salariés, des professions non agricoles comme agricoles, ainsi que des salariés des régimes spéciaux, sauf dispositions contraires de l'accord. S'agissant de l'Inde, l'accord s'applique aux législations pourtant sur la pension de vieillesse et de survivants des salariés, et à la pension d'invalidité totale permanente pour les salariés.

En revanche, les dispositions spécifiques de l'accord n'ont pas vocation à s'appliquer en matière d'assurance maladie et maternité, ni en matière d'assurance accidents du travail et maladies professionnelles, ou de prestations familiales. Pour ces risques, c'est le principe selon lequel l'intéressé est assujetti à la législation de l'Etat dans lequel il exerce son activité qui s'applique.

Les accords bilatéraux de sécurité sociale

Les expatriés relèvent en principe, en matière de protection sociale, de la législation du pays de résidence, sous réserve que cette dernière ne comporte pas de restrictions quant à la nationalité. Des dispositions spécifiques peuvent également être prévues à leur égard dans la législation de leur pays d'origine. C'est le cas en France, avec la procédure du détachement, qui permet le maintien temporaire du rattachement à la sécurité sociale française, ou la possibilité de souscrire à l'assurance volontaire mise en place dans le cadre de la Caisse des français de l'étranger.

Les accords bilatéraux de sécurité sociale permettent quant à eux de compléter les règles fixées par les législations nationales , en vue notamment d' éliminer ou limiter les restrictions fondées sur la nationalité ou relatives au versement de prestations à l'étranger , et de garantir la continuité des droits et la prise en compte des périodes d'assurance au titre du pays d'origine comme du pays d'accueil.

Enfin, la situation des expatriés au sein de l'Union européenne, des pays de l'Espace économique européen (Islande, Liechtenstein, Norvège) et en Suisse, constitue un cas particulier puisqu'elle est régie par les règlements communautaires.

La France est actuellement liée à près d'une trentaine d'Etats , autres que ceux auxquels s'appliquent les règlements européens, par un accord bilatéral de sécurité sociale : Algérie, Andorre, Bénin, Bosnie-Herzégovine, Cameroun, Canada, Cap-Vert, Chili, Congo, Corée, Côte d'Ivoire, Croatie, Etats-Unis, Gabon, Israël, Japon, Macédoine, Madagascar, Mali, Maroc, Mauritanie, Monaco, Monténégro, Niger, Philippines, Saint Marin, Sénégal, Serbie, Togo, Tunisie, Turquie. Un accord spécifique est également en vigueur avec la province de Québec.

S'étendant à plus d'une soixantaine d'Etats au total, le réseau français de sécurité sociale est l'un des plus importants au monde , avec le réseau britannique. La plupart des Etats de l'Union européenne n'ont conclu qu'une dizaine de conventions au-delà des Etats membres. Les Etats-Unis et le Canada n'ont pour leur part qu'une vingtaine de conventions.

Il est stipulé que l'accord s'appliquera aux modifications ou compléments apportés à ces régimes postérieurement à son entrée en vigueur, ainsi qu'à la création de nouvelles catégories de bénéficiaires, sauf si l'autre Etat contractant s'y oppose dans un délai de trois mois après la publication du nouvel acte législatif.

Le principe posé par l'accord (article 7) est que les personnes qui exercent une activité salariée ou non salariée sur le territoire de l'un des deux Etats sont soumises uniquement à la législation de cet Etat .

Ce principe général connaît toutefois plusieurs dérogations .

Ainsi, le personnel navigant des entreprises de transports internationaux est soumis à la législation de l'Etat sur le territoire duquel l'entreprise a son siège. Il en est de même pour les personnes exerçant une activité salariée à bord d'un navire battant pavillon de l'un des deux Etats.

L'article 9 précise également que les fonctionnaires et membres des missions diplomatiques et consulaires demeurent soumis à la législation de l'Etat qui les emploie.

Enfin, la dérogation principale, habituelle dans ce type d'accords, concerne les personnels salariés détachés , dont la situation est régie par l'article 8.

D'une manière générale, le statut de salarié détaché, à la différence de celui de salarié expatrié, permet à la personne envoyée temporairement à l'étranger de continuer à relever du régime de protection sociale de son pays d'origine et de conserver l'ensemble des droits qui s'y attachent. Le détachement est une procédure dont la durée, nécessairement limitée, est fixée par la législation nationale (trois ans renouvelables une fois, soit six ans au maximum dans le droit commun français), mais peut être adaptée dans le cadre d'une convention bilatérale de sécurité sociale.

L'accord franco-indien se distingue des accords habituels en ce qu'il réserve le détachement aux seuls risques vieillesse et invalidité . La durée maximale retenue pour le détachement est de soixante mois.

Ainsi, en ce qui concerne les risques maladie, maternité ou accidents du travail, les salariés indiens en France devront cotiser au régime français et seront couverts par celui-ci. Les ressortissants français en Inde seront affiliés au régime indien d'assurance maladie, cette affiliation n'étant pas exclusive d'une couverture financée par les entreprises ou d'une assurance volontaire, par exemple auprès de la Caisse des Français de l'étranger.

L'article 10 permet aux autorités compétentes des deux Etats de prévoir éventuellement, d'un commun accord, d'autres dérogations aux règles générales d'assujettissement en faveur d'une personne ou d'une catégorie de personnes, à condition que les intéressés soient soumis à la législation de l'un ou l'autre des deux Etats.

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