N° 293

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011

Enregistré à la Présidence du Sénat le 9 février 2011

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (1) sur la proposition de loi de MM. Roland COURTEAU, Jean-Pierre BEL, Serge LARCHER, Mmes Bernadette BOURZAI, Françoise CARTRON, Maryvonne BLONDIN, M. Robert NAVARRO, Mme Françoise LAURENT-PERRIGOT, M. Claude BÉRIT-DÉBAT, Mme Patricia SCHILLINGER, M. Michel TESTON, Mme Annie JARRAUD-VERGNOLLE, M. Jean-Jacques MIRASSOU, Mme Gisèle PRINTZ, MM. Gérard MIQUEL, Alain ANZIANI, Roland RIES, Mme Renée NICOUX, MM. Jean-Jacques LOZACH, Michel BOUTANT, René-Pierre SIGNÉ, Jean-Pierre SUEUR, Louis MERMAZ, François MARC, Simon SUTOUR, Marcel RAINAUD, Edmond HERVÉ, Didier GUILLAUME, Jean-Etienne ANTOINETTE, Jean-Marc TODESCHINI, Mme Michèle ANDRÉ, M. Daniel RAOUL, Mme Nicole BONNEFOY, MM. Philippe MADRELLE, Jean-Marc PASTOR, Yves CHASTAN, Pierre-Yves COLLOMBAT, Bernard PIRAS, Claude DOMEIZEL, Jean BESSON, Claude HAUT, Jean-Claude FRÉCON, Jacques BERTHOU, Jacky LE MENN, Michel SERGENT, Daniel REINER, Mme Jacqueline ALQUIER, M. Martial BOURQUIN, Mme Odette HERVIAUX, MM. Yannick BOTREL, Marc DAUNIS, François PATRIAT, Yves DAUGE, Ronan KERDRAON, Mme Josette DURRIEU , MM. Alain FAUCONNIER, André VANTOMME et des membres du groupe socialiste, relative à l' installation de panneaux d' entrée et de sortie d' agglomération en langue régionale ,

Par Mme Colette MÉLOT,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jacques Legendre , président ; MM. Ambroise Dupont, Serge Lagauche, David Assouline, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Ivan Renar, Mme Colette Mélot, MM. Jean-Pierre Plancade, Jean-Claude Carle , vice-présidents ; M. Pierre Martin, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Christian Demuynck, Yannick Bodin, Mme Catherine Dumas , secrétaires ; M. Claude Bérit-Débat, Mme Maryvonne Blondin, M. Pierre Bordier, Mmes Bernadette Bourzai, Marie-Thérèse Bruguière, Françoise Cartron, MM. Jean-Pierre Chauveau, Yves Dauge, Claude Domeizel, Alain Dufaut, Jean-Léonce Dupont, Louis Duvernois, Mme Françoise Férat, MM. Jean-Luc Fichet, Bernard Fournier, Mmes Brigitte Gonthier-Maurin, Sylvie Goy-Chavent, MM. Jean-François Humbert, Soibahadine Ibrahim Ramadani, Mme Marie-Agnès Labarre, M. Philippe Labeyrie, Mmes Françoise Laborde, Françoise Laurent-Perrigot, M. Jean-Pierre Leleux, Mme Claudine Lepage, M. Alain Le Vern, Mme Christiane Longère, M. Jean-Jacques Lozach, Mme Lucienne Malovry, MM. Jean Louis Masson, Philippe Nachbar, Mmes Mireille Oudit, Monique Papon, MM. Daniel Percheron, Jean-Jacques Pignard, Roland Povinelli, Jack Ralite, André Reichardt, René-Pierre Signé, Jean-François Voguet.

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Sénat :

136 (2010-2011)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

La présente proposition de loi a été déposée par notre collègue Roland Courteau et les membres du groupe socialiste. Elle vise à compléter la loi du 4 août 1994 relative à l'emploi de la langue française, en précisant que les panneaux d'entrée et de sortie d'agglomération peuvent être complétés d'une traduction en langue régionale.

La défense des langues régionales est un sujet passionnant qui mobilise le Parlement, quels que soient les courants politiques. En témoignent les propositions de loi qui se multiplient au Sénat comme à l'Assemblée nationale, telles que celles de M. Jean-Paul Alduy ou de M. Robert Navarro, relatives au développement des langues et cultures régionales, et déposées respectivement les 12 et 25 janvier 2011 avec certains de nos collègues membres de la commission de la culture. Parallèlement, des initiatives similaires ont été prises à l'Assemblée nationale par MM. Marc Le Fur et Armand Jung. La vivacité du débat est déjà perceptible comme l'attestent les nombreuses questions orales ou écrites relatives à ce sujet, soit près d'une dizaine en un an.

Cette mobilisation s'inscrit dans la dynamique suscitée par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. En effet, le nouvel article 75-1 de la Constitution reconnaît les langues régionales comme constitutives du patrimoine de la France.

Pour autant, il ne s'agit pas ici de se prononcer sur la portée de cette réforme et d'entamer les débats qui ne manqueront pas de naître à l'occasion de l'examen de l'un des textes précités. Loin de s'attaquer à la question très générale de la promotion des langues régionales, la présente proposition de loi vise à traiter une question très précise et circonscrite : la signalisation bilingue des entrées et sorties de ville. L'objectif est de transcrire dans la loi ce qui n'est pas interdit, et qui est d'ailleurs pratiqué dans de nombreux endroits en France.

Votre commission souhaite donc limiter son examen à ce seul sujet.

I. UNE INTERROGATION SUR L'UTILITÉ JURIDIQUE DE LA PROPOSITION DE LOI

De nombreuses communes ont déjà fait le choix d'installer des panneaux bilingues, utilisant à la fois la langue française et une langue régionale. Comme le rappelle l'exposé des motifs de la proposition de loi, la combinaison des articles 3 et 21 de la loi du 4 août 1994, relative à l'emploi de la langue française, permet aux communes d'installer des panneaux d'entrée d'agglomération en langue régionale.

En effet, si l'article 3 dispose que « toute inscription ou annonce apposée ou faite sur la voie publique, dans un lieu ouvert au public ou dans un moyen de transport en commun et destinée à l'information du public doit être formulée en langue française », l'article 21 précise que « les dispositions de la présente loi s'appliquent sans préjudice de la législation et de la réglementation relatives aux langues régionales de France et ne s'opposent pas à leur usage ».

Le Conseil Constitutionnel a confirmé cette interprétation dans sa décision n° 94-345 du 29 juillet 1994 sur la loi du 4 août 1994 précitée : « Considérant que la loi relative à l'emploi de la langue française prescrit sous réserve de certaines exceptions l'usage obligatoire de la langue française dans les lieux ouverts au public, dans les relations commerciales, de travail, dans l'enseignement et la communication audiovisuelle ; qu'elle n'a toutefois pas pour objet de prohiber l'usage de traductions lorsque l'utilisation de la langue française est assurée (...) ».

Les langues régionales peuvent donc figurer sur les panneaux d'entrée de ville, mais à condition qu'il s'agisse d'une signalisation bilingue comprenant le nom en langue française. C'est d'ailleurs cette réponse qui a été régulièrement donnée aux parlementaires ayant abordé ce sujet lors de questions écrites ou orales. Ainsi, à une question de notre collègue M. Bérit-Débat du 14 janvier 2010, le ministre de la culture a tout d'abord rappelé à la fois l'article 75-1 de la Constitution disposant que « Les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France » et la hiérarchie des normes entre la Constitution et tout autre texte législatif. Il a en outre ajouté que l'« on peut envisager le développement des langues régionales sans avoir nécessairement à légiférer. En effet l'appareil législatif et réglementaire actuel offre des possibilités qui ne sont pas toujours exploitées. De la signalisation routière à la publication des actes officiels des collectivités territoriales, il y a maintes occasions de manifester un bilinguisme français-langue régionale ». Les réponses 1 ( * ) aux questions de MM. Robert Navarro, Roland Courteau ou de Mme Maryvonne Blondin ont permis de préciser la position du gouvernement sur le sujet. Ainsi a-t-il été indiqué par le ministre de la culture et de la communication que « le cadre législatif actuel permet une présence plus affirmée des langues régionales dans l'espace public : d'importantes marges de progression subsistent, qui ne sont pas toujours exploitées, qu'il s'agisse par exemple de signalisation routière ou urbaine, ou des actes officiels des collectivités territoriales qui, du moment qu'ils le sont aussi en français, peuvent être publiés en langue régionale ». La réponse du 23 décembre 2010 va plus loin puisqu'elle indique que « les collectivités (...) sont incitées à adopter une signalisation routière ou urbaine bilingue et les formes traditionnelles et correctes de la toponymie, parallèlement à la dénomination officielle ».

Aussi peut-on s'interroger sur l'opportunité d'inscrire dans la loi une disposition qui semble a priori inutile, car autorisant une pratique non proscrite.


* 1 Respectivement publiées au JO Sénat des 4 mars 2010, 22 avril 2010, 1 er juillet 2010, 2 septembre 2010, et 23 décembre 2010.

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