II. LA LOI « BICHET », ICÔNE DE LA RÉGULATION DU SYSTÈME COOPÉRATIF DE DISTRIBUTION DE LA PRESSE

A. L'ESPRIT DE LA LOI « BICHET » : GARANTIR LE PLURALISME DE LA PRESSE À TRAVERS L'IMPARTIALITÉ DE SA DISTRIBUTION

1. Les quatre principes fondamentaux qui gouvernent le système de distribution de la presse en France depuis l'après-guerre

Adoptée dans un contexte d'après-guerre, dans le sillage d'une ordonnance du 30 septembre 1944 qui avait placé sous administration provisoire l'entreprise dite « Messageries de la coopérative des journaux français » (Hachette) et mis sous séquestre ses biens, la loi n° 47-585 du 2 avril 1947 relative au statut des entreprises de groupage et de distribution des journaux et publications périodiques, dite loi « Bichet », pose quatre principes fondamentaux qui gouvernent le système de distribution de la presse en France depuis l'après-guerre :

- son article 1 er consacre le principe de la liberté de la diffusion de la presse imprimée et, en conséquence, le droit pour toute entreprise de presse d'assurer, par ses propres moyens, les opérations de distribution de ses publications ;

- son article 2 institue le principe selon lequel la distribution groupée des titres de presse 5 ( * ) ne peut être assurée que par des sociétés coopératives de messageries de presse soumises aux dispositions de la loi du 2 avril 1947, c'est-à-dire contrôlées majoritairement par des coopératives d'éditeurs ;

- son article 6 consacre l'égalité de traitement entre tous les titres de presse dans le cadre d'une distribution par le biais d'une coopérative de presse, en disposant que « devra être obligatoirement admis dans la société coopérative tout journal ou périodique qui offrira de conclure avec la société un contrat de transport (ou de groupage et de distribution) sur la base du barème des tarifs » établis par l'assemblée générale de la coopérative concernée. Le modèle coopératif du système de distribution de la presse en France mis en place par le législateur en 1947 a ainsi été conçu afin que soit respectée la règle fondamentale d'égalité et d'impartialité de traitement entre tous les éditeurs, quelle que soit leur importance en termes de tirages et de chiffres d'affaires réalisés par les ventes au numéro ;

- ses articles 16, 17 et 21 confient au Conseil supérieur des messageries de presse le soin de veiller, dans le cadre du contrôle comptable qu'il exerce sur les sociétés coopératives de messageries de presse, à ce qu'aucune des décisions prises par ces dernières n'altère leur caractère coopératif ou ne compromette leur équilibre financier.

LE RÉGIME JURIDIQUE DE LA DISTRIBUTION DE LA PRESSE
Extraits de la décision n° 01-D-65 du Conseil de la concurrence en date du 10 octobre 2001 relative à la saisine de l'Association nationale de défense des intérêts des marchands de presse (ANDIMAP)

« [...] Le régime juridique de la distribution de la presse est prévu par la loi n° 47-535 du 2 avril 1947 relative aux statuts des entreprises de groupage et de distribution des journaux et publications périodiques, dite « loi Bichet », qui prévoit, notamment, que l'éditeur peut distribuer son produit par ses propres moyens en constituant une messagerie de presse intégrée. S'il ne constitue pas sa propre messagerie, l'éditeur doit s'affilier à une coopérative d'éditeurs. Ces coopératives peuvent organiser elles-mêmes leurs activités de messageries et constituer ainsi des coopératives de messagerie de presse. Elles peuvent également, conformément à l'article 4 de la loi Bichet, confier ces activités à des entreprises commerciales dénommées entreprises commerciales de messagerie de presse. Lorsque les opérations de messagerie ne sont pas assurées par les sociétés coopératives, un contrat de groupage et de distribution lie les coopératives à la société commerciale. Ce contrat comporte, en particulier, une clause d'exclusivité de la distribution accordée à la société commerciale par les éditeurs adhérant aux coopératives concernées et précise que les ventes confiées à la société commerciale sont effectuées exclusivement par ses dépositaires et ses agents. La loi a, par ailleurs, créé un Conseil Supérieur des Messageries de Presse dont le rôle est de coordonner l'emploi des moyens de transport à longue distance utilisés par les sociétés coopératives de messagerie de presse, de faciliter l'application du texte et d'assurer le contrôle comptable.

Trois sociétés se partagent le marché national de la messagerie : les Nouvelles messageries de la presse parisienne (NMPP), la Société auxiliaire pour l'exploitation des messageries parisiennes Transports Presse (TP) et les Messageries lyonnaises de presse (MLP). Le réseau de distribution comprend, d'une part, les dépositaires de presse qui assurent la répartition des journaux auprès des diffuseurs de presse, d'autre part, les diffuseurs qui vendent la presse au public. Les diffuseurs de presse sont normalement rattachés à un dépositaire de presse qui les approvisionne. À Paris et en proche banlieue, les Nouvelles messageries de la presse parisienne sont en relation directe avec les diffuseurs de presse ; une structure interne, Paris Diffusion Presse, assurant la gestion de la distribution des publications à partir de six centres de diffusion. [...] »


* 5 À l'exception des exemplaires destinés aux abonnés.

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