B. L'UTILISATION DÉTOURNÉE DE L'ARTICLE 121 DU STATUT

1. La collégialité et le consensus, principes fondateurs de l'équilibre institutionnel défini par l'accord de Nouméa

Les principes de consensus et de pluralité politique fondent l'équilibre institutionnel défini par l'accord de Nouméa, qui préserve ainsi les droits des minorités et assure la participation des loyalistes et des indépendantistes au gouvernement.

Ce « consensus océanien », comme l'a qualifié M. Paul Néaoutyine, président de l'assemblée de la province Nord, lors de son audition par votre rapporteur, s'illustre dans le fonctionnement collégial du gouvernement. En effet, tous les partis politiques représentés au congrès sont amenés à présenter une liste de candidats pour l'élection des membres du gouvernement.

Le point 2.3 du document d'orientation de l'accord de Nouméa prévoit en effet que « L'Exécutif de la Nouvelle-Calédonie deviendra un gouvernement collégial, élu par le Congrès, responsable devant lui .

« L'Exécutif sera désigné à la proportionnelle par le Congrès, sur proposition par les groupes politiques de listes de candidats, membres ou non du Congrès. L'appartenance au Gouvernement sera incompatible avec la qualité de membre du Congrès ou des assemblées de province. Le membre du Congrès ou de l'assemblée de province élu membre du Gouvernement est remplacé à l'assemblée par le suivant de liste. En cas de cessation de fonctions, il retrouvera son siège.

« La composition de l'Exécutif sera fixée par le Congrès . »

Ainsi, la démission de plein droit du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, telle que la prévoit l'article 121 de la loi organique, permet à un groupe minoritaire au sein du congrès de mettre en cause le fonctionnement de l'exécutif lorsqu'il ne lui semble pas conforme aux principes de consensus et de collégialité.

2. Le détournement des dispositions visant à protéger le principe de collégialité

L'article 121 de la loi organique permet à un groupe politique d'obtenir une recomposition du gouvernement. Il suffit pour cela qu'il fasse démissionner tout ou partie d'une liste, afin d'empêcher que le gouvernement ne se retrouve au complet.

L'étude d'impact rappelle que ce mécanisme a été mis en oeuvre à plusieurs reprises avant février 2011 :

- le gouvernement de M. Pierre Frogier est tombé en 2002 après la démission des élus du parti Union Calédonienne, dénonçant les difficultés de la collégialité ;

- le premier gouvernement de Mme Marie-Noëlle Thémereau est tombé en juin 2004 à l'initiative du « Rassemblement » ;

- le gouvernement de M. Harold Martin a été démissionnaire de plein droit en 2007, après la démission collective des élus de la liste unique indépendantiste, dont le bulletin avait été déclaré nul lors de l'élection du gouvernement.

Toutefois, le mécanisme de la démission de plein droit a été utilisé pour la première fois en 2011 de façon répétée par un groupe politique, dans le but d'empêcher le fonctionnement normal des institutions calédoniennes et de créer ainsi les conditions d'une dissolution du congrès.

Ce détournement manifeste de la procédure définie à l'article 121 de la loi organique rend nécessaire une modification de ces dispositions, afin que le mécanisme qui vise à assurer une représentation équilibrée des forces politiques du congrès demeure compatible avec une plus grande stabilité gouvernementale.

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