N° 667

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011

Enregistré à la Présidence du Sénat le 23 juin 2011

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur la proposition de loi , MODIFIÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, modifiant certaines dispositions de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l' hôpital et relative aux patients , à la santé et aux territoires ,

Par M. Alain MILON,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : Mme Muguette Dini , président ; Mme Isabelle Debré, M. Gilbert Barbier, Mmes Annie David, Annie Jarraud-Vergnolle, Raymonde Le Texier, Catherine Procaccia, MM. Jean-Marie Vanlerenberghe, Alain Milon , vice-présidents ; MM. François Autain, Paul Blanc, Jean-Marc Juilhard, Mmes Gisèle Printz, Patricia Schillinger, Anne-Marie Payet , secrétaires ; Mmes Jacqueline Alquier, Brigitte Bout, Claire-Lise Campion, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Mme Roselle Cros, M. Yves Daudigny, Mme Christiane Demontès, M. Gérard Dériot, Mme Catherine Deroche, M. Jean Desessard, Mme Sylvie Desmarescaux, M. Guy Fischer, Mme Samia Ghali, MM. Bruno Gilles, Jacques Gillot, Adrien Giraud, Mme Colette Giudicelli, MM. Jean-Pierre Godefroy, Alain Gournac, Mmes Françoise Henneron, Marie-Thérèse Hermange, Gélita Hoarau, M. Claude Jeannerot, Mme Christiane Kammermann, MM. Ronan Kerdraon, Marc Laménie, Serge Larcher, André Lardeux, Dominique Leclerc, Jacky Le Menn, Mme Valérie Létard, M. Jean-Louis Lorrain, Mme Isabelle Pasquet, M. Louis Pinton, Mmes Janine Rozier, Michèle San Vicente-Baudrin, MM. René Teulade, Alain Vasselle, François Vendasi, André Villiers.

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

Première lecture : 65 , 294 , 295 et T.A. 80 (2010-2011)

Deuxième lecture : 543 et 668 (2010-2011)

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) :

Première lecture : 3238 , 3293 et T.A. 665

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

L'ampleur de la loi HPST, dont le présent texte se donnait à l'origine pour objet de corriger quelques dispositions ponctuelles, a permis à l'initiative parlementaire de se déployer dans de nombreuses directions.

Cette inflation créative trouve ici une traduction manifeste : la proposition de loi initiale comptait seize articles ; après sa première lecture au Sénat, trente articles ont été transmis à l'Assemblée nationale ; celle-ci en a adopté neuf conformes, a modifié, souvent très largement, les autres et en a ajouté quarante-cinq. Soixante-six articles , soit quatre fois plus que dans le texte d'origine, sont aujourd'hui soumis, en deuxième lecture, à l'examen du Sénat.

Parmi les dispositions initiales, plusieurs avaient trait à l'organisation des soins de premier recours. Il s'agissait en particulier de faciliter l'exercice en commun par les professionnels de santé, par le biais de la création de la société interprofessionnelle ambulatoire, et de lever certaines contraintes pesant sur les médecins et l'exercice libéral de la médecine.

Sur le premier de ces points, les deux assemblées se sont montrées également désireuses de faire de la Sisa un instrument utile au service d'une pratique pluridisciplinaire. S'associant, de même, au souhait de préciser le statut des maisons de santé, elles ne semblent cependant pas avoir exactement les mêmes vues sur les conditions de la protection du secret médical dans les maisons et centres de santé.

Sur le second point, l'Assemblée nationale a confirmé le caractère non contraignant du contrat santé solidarité et la prorogation des contrats de bonne pratique et de santé publique votés au Sénat. Elle a également adopté la suppression de l'obligation de déclaration des absences auprès du conseil départemental de l'Ordre, dans le cadre de la continuité des soins ; au Sénat, cette suppression avait été approuvée par votre commission mais l'obligation avait été rétablie en séance publique.

Par ailleurs, elle a réaffirmé les principes de la liberté d'installation des professionnels de santé et de la non-opposabilité du volet ambulatoire du schéma régional d'organisation des soins à ces professionnels.

Enfin, à l'initiative du Gouvernement, elle a assuré une meilleure base légale à l'obligation de transmettre les feuilles de soins par voie électronique, tout en renvoyant à la négociation conventionnelle le soin de déterminer les modalités de la sanction. A défaut d'accord, le directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie pourra fixer ces dispositions.

Sur les autres sujets de la proposition de loi initiale, notamment relatifs au secteur médico-social, les modifications adoptées par les députés n'appellent pas d'observation particulière.

En revanche, l'Assemblée nationale a introduit dans le texte de nouveaux sujets, à la fois substantiels et divers , n'hésitant pas à reprendre des éléments, plus ou moins aboutis, contenus dans plusieurs propositions de loi de députés. Il s'agit par exemple du dépistage de la surdité, de l'expérimentation de l'implantation du dossier médical sur clé USB, du diagnostic du saturnisme, de la reconnaissance de la profession d'assistant dentaire ou encore de la publication des tarifs des cliniques sur internet.

Parmi ces ajouts, trois méritent particulièrement d'être mentionnés : la biologie médicale, la modulation des prestations par les mutuelles, la responsabilité civile professionnelle des médecins.

La biologie médicale

Neuf articles sont consacrés à la réforme de la biologie médicale opérée par l'ordonnance du 13 janvier 2010.

Dans le cadre de la discussion du projet de loi sur la bioéthique, l'Assemblée nationale avait inopinément proposé l'abrogation de cette ordonnance.

Cette fois, elle a adopté une série d'articles qui en modifient les dispositions, au point d'en remettre en cause certains aspects. Cette série d'articles se conclut par l'article 20 decies , qui ne compte pas moins de soixante-douze alinéas et qui procède à la ratification de l'ordonnance, non sans lui apporter de nombreuses modifications supplémentaires.

Les principaux points abordés par ces articles concernent :

- la défense de l'indépendance des laboratoires et la crainte de la mainmise sur la biologie médicale de grands groupes financiers ;

- l'organisation de la phase pré-analytique des examens de biologie médicale en dehors des laboratoires et des établissements de santé, c'est-à-dire le problème, largement débattu dans la période récente, de la réalisation des prélèvements dans les cabinets d'infirmières ;

- l'accès des vétérinaires au DES de biologie médicale, question qui ressurgit au moment où va s'achever la phase transitoire qui aurait dû permettre la mise en place d'une spécialisation de biologie vétérinaire ;

- la réapparition des « ristournes », qui heurte profondément tous les biologistes médicaux, profondément attachés au caractère médical de leur spécialité et attentifs à tout risque de dérive commerciale ;

- la nomination à des postes de responsables hospitaliers de personnes non titulaires du DES de biologie médicale, dont le Sénat avait, il y a quelques mois déjà, écarté le principe ;

- enfin, et ce dernier sujet n'est pas le moindre, l'accréditation, qui est certes la garantie de la qualité et une orientation fondamentale de la réforme, mais qui impose aux laboratoires privés des efforts extrêmement importants.

Tous les biologistes médicaux, hospitaliers ou libéraux, réagissent avec beaucoup d'inquiétude à ces mesures inattendues et en particulier les jeunes, chez qui la réforme de 2010 a fait naître beaucoup d'espoirs et qui redoutent que l'avenir leur soit fermé, à l'hôpital comme dans le privé.

Il est sans doute difficile de répondre à toutes les attentes à la satisfaction de tous, mais votre commission s'efforcera de le faire, dans le souci de défendre une réforme qui avait eu le grand mérite de rassembler toute une profession autour d'une ambition commune pour l'avenir de sa discipline.

La modulation des prestations des mutuelles

L'article 22, qui n'a rigoureusement aucun lien avec le présent texte, ni surtout avec la loi HPST elle-même que la proposition de loi vise à réajuster sur quelques points ponctuels, reprend l'article 1 er d'une proposition de loi précédemment déposée à l'Assemblée nationale par Yves Bur et Jean-Pierre Door.

Il a pour objet de modifier le code de la mutualité afin de permettre aux mutuelles de mieux rembourser leurs adhérents lorsque ceux-ci s'adressent à un professionnel ou un établissement de santé membre d'un réseau de soins ou avec lequel elles ont contracté.

Actuellement, le code de la mutualité leur interdit cette pratique, à la différence des autres organismes complémentaires d'assurance maladie et, à la suite d'un récent arrêt de la Cour de Cassation qui leur a rappelé cette interdiction, elles souhaitent une modification législative, pour rétablir l'égalité de la concurrence.

La Mutualité française soutient que la jurisprudence de la Cour de Cassation remet en cause le fondement même du conventionnement mutualiste.

Cette affirmation peut être discutée car le code de la mutualité n'interdit nullement l'établissement de relations contractuelles entre les mutuelles et les prestataires ou établissements de soins.

Dans son principe d'ailleurs, ce conventionnement, pratiqué depuis une dizaine d'années, est tout à fait défendable s'il peut permettre aux Ocam d'obtenir pour leurs adhérents des prestations de qualité et à des tarifs avantageux et aux professionnels de santé d'élargir leur patientèle, et s'il peut aussi contribuer à une certaine régulation des tarifs.

Mais comment fonctionne-t-il ? Avec quels résultats ? Quels sont exactement le rôle et la nature des réseaux de soins ? Quelles sont les exigences de qualité imposées aux contractants et comment leur respect peut-il être contrôlé ? N'y a-t-il pas un risque de surtout favoriser le low cost ?

Autant de questions auxquelles, à ce stade, il est encore difficile d'obtenir des réponses.

Il convient également de s'interroger sur les incitations financières que les mutuelles veulent pouvoir pratiquer. Sont-elles d'ailleurs bien légales de la part des autres Ocam ? Cela n'est pas certain dans la mesure où le libre choix du médecin est un principe fondamental de notre législation sanitaire, inscrit dans le code de la santé publique. Il n'y a pas de libre choix pour ceux qui, faute de moyens, sont obligés de choisir la solution la moins onéreuse.

Votre commission estime qu'une mesure d'une portée aussi importante mériterait un travail de réflexion approfondi et large que la brièveté des délais d'examen de cette deuxième lecture ne permet pas.

La responsabilité civile des professionnels de santé

Ce sujet est récurrent dans nos travaux. Plusieurs dispositifs ont même été adoptés mais sans jamais régler la question dans son entier et de manière satisfaisante.

L'article 24, adopté par l'Assemblée nationale, prévoit la création, au plus tard le 1 er janvier 2013, d'un dispositif de mutualisation assurantiel des risques encourus par les professionnels de santé libéraux, au titre de leur responsabilité civile professionnelle, pour les risques dont la nature justifie le groupement des capacités de couverture.

L'objectif est de faire disparaître l'ensemble des « trous de garantie » pouvant exister pour les professionnels libéraux et, ainsi, de répondre aux inquiétudes manifestées depuis de nombreuses années par les médecins libéraux.

Ceux-ci seront à l'avenir tenus de s'assurer pour un montant minimal de 8 millions d'euros par sinistre et le nouveau système mutualisé interviendra dès lors qu'une indemnité dépassera ce montant.

Toutefois, le dispositif proposé est très général et il conviendra que les professionnels, les assureurs et le Gouvernement - puisqu'il s'agira d'un mécanisme de nature publique - apportent rapidement des précisions sur l'organisation de ce système. Il serait en effet souhaitable qu'il puisse entrer en vigueur avant la date limite du 1 er janvier 2013 ici prévue par la proposition de loi.

*

Telles sont brièvement évoquées, quelques-unes des très nombreuses mesures que comporte désormais ce texte, dont les premières intentions paraissent bien éloignées du résultat auquel elle est parvenue à mi-parcours de son processus parlementaire d'adoption.

Réunie le jeudi 23 juin 2011, sous la présidence de Muguette Dini, la commission a adopté l'ensemble de ce texte dans la rédaction résultant de ses travaux.

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