c) La gestion des effectifs par le non-remplacement des départs en retraite

La règle du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant en retraite est présentée par le Gouvernement comme la principale variable de limitation de la masse salariale. Avant d'examiner les déterminants de l'évolution de la masse salariale, il convient d'observer que la règle du « un sur deux » n'est pas appliquée de manière uniforme , traduisant de fait les priorités donnant à certaines politiques publiques.

Le tableau ci-après détaille les flux entrants et sortants d'effectifs (en ETPT) par ministère et mission en 2012.

Au total, pour l'ensemble des ministères, il est prévu 89 912 entrées en ETPT et 120 082 sorties (dont 55 622 départs en retraite ), soit un flux de sorties supérieur au flux d'entrées de 30 170 ETPT, pratiquement égal au schéma d'emplois (-30 401 ETPT à périmètre constant).

La différence entre le solde des entrées et des sorties et le schéma d'emplois s'explique par le fait que le ministère de la défense n'a pas rempli les tableaux des entrées et des sorties à périmètre constant (hors transferts et mesures de périmètre) et que, pour la mission « Outre-mer », les 690 entrées déjà mentionnées liées à la montée en puissance du dispositif SMA.

Répartition par ministère et par mission des entrées et des sorties d'emplois

(en ETPT)

Ministère

Mission

Entrées prévues

Sorties prévues

Dont départs en retraite

Ecart des entrées sorties

Schéma d'emplois

Affaires étrangères et européennes

1 745

1 885

273

-140

-140

Action extérieure de l'État

1 060

1 122

245

-62

-62

Aide publique au développement

685

763

28

-78

-78

Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire

1 162

1 815

891

-653

-653

Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales

488

861

420

-373

-373

Enseignement scolaire

534

814

410

-280

-280

Politique des territoires

4

4

1

0

0

Recherche et enseignement supérieur

136

136

60

0

0

Budget, comptes publics et réforme de l'État

5 588

8 458

4 483

-2 870

-2 870

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

5 588

8 458

4 483

-2 870

-2 870

Culture et communication

598

691

298

-93

-93

Culture

598

691

298

-93

-93

Défense et anciens combattants

27 970

35 891

9 458

-7 921

-7 462

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

127

653

111

-526

-76

Défense

27 843

35 238

9 347

-7 395

-7 386

Écologie, développement durable, transports et logement

3 096

4 537

2 403

-1 441

-1 441

Contrôle et exploitation aériens

302

434

296

-132

-132

Écologie, développement et aménagement durables

2 794

4 103

2 107

-1 309

-1 309

Économie, finances et industrie

1 087

1 332

550

-245

-245

Économie

955

1 194

526

-239

-239

Recherche et enseignement supérieur

132

138

24

-6

-6

Éducation nationale, jeunesse et vie associative

20 074

34 074

27 810

-14 000

-14 000

Enseignement scolaire

20 074

34 074

27 810

-14 000

-14 000

Enseignement supérieur et recherche

1 299

1 299

621

0

0

Recherche et enseignement supérieur

1 299

1 299

621

0

0

Ministère

Mission

Entrées prévues

Sorties prévues

Dont départs en retraite

Ecart des entrées sorties

Schéma d'emplois

Intérieur, outre-mer, collectivités territoriales et immigration

22 259

25 190

5 864

-2 931

-3 621

Administration générale et territoriale de l'État

3 242

3 661

1 150

-419

-419

Immigration, asile et intégration

39

70

16

-31

-31

Outre-mer

4 153

3 463

0

690

0

Sécurité

14 572

17 720

4 677

-3 148

-3 148

Sécurité civile

253

276

21

-23

-23

Justice et libertés

3 509

2 994

2 046

515

515

Justice

3 509

2 994

2 046

515

515

Services du Premier ministre

597

559

150

38

38

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

4

4

0

0

0

Conseil et contrôle de l'État

437

395

102

42

25

Direction de l'action du Gouvernement

150

126

14

24

24

Publications officielles et information administrative

6

34

34

-28

-11

Travail, emploi et santé

928

1 357

775

-429

-429

Solidarité, insertion et égalité des chances

598

855

463

-257

-257

Travail et emploi

330

502

312

-172

-172

Total

89 912

120 082

55 622

-30 170

-30 401

Source : ministère du budget

Si, par convention, on considère que les emplois supprimés portent exclusivement sur des non-remplacements de départ en retraite, les 30 401 emplois supprimés dans le schéma d'emplois correspondent au non-remplacement de 55 % des 55 622 départs en retraite, soit une norme légèrement supérieure à celle du « un sur deux ».

Sur cette base, plus d'un fonctionnaire sur deux partant en retraite n'est pas remplacé aux ministère de l'agriculture, de la pêche de la ruralité et de l'aménagement du territoire, du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, du travail, de l'emploi et de la santé, des affaires étrangères et européennes, de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative. Pour les ministères de la défense et de l'intérieur, les taux de non-remplacement doivent être considérés avec précaution, compte tenu des réserves méthodologiques exposées plus haut.

En revanche, les autres ministères sont en-dessous de la norme du « un sur deux » : l'économie, les finances et l'industrie, la culture et la communication. Pour la troisième année consécutive, le solde des entrées et des sorties d'emplois est nul au ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche. Il est positif au ministère de la justice et des libertés, ainsi que dans les services du Premier ministre, ce qui traduit des créations de postes dans les juridictions et certaines autorités administratives indépendantes assurant la protection des droits et des libertés.

Répartition des non remplacements de départs en retraite par ministère

(en %)

* Des réserves méthodologiques requièrent d'interpréter ces données avec précaution : le tableau des entrées et des sorties du ministère de la défense n'a pas pu être effectué à périmètre constant, et 690 créations de postes correspondant à la montée en puissance du dispositif service militaire adapté ne sont pas prises en compte (en intégrant ces créations de poste, le taux de non-remplacement du ministère de l'intérieur s'établit à 50,0 %).

Source : commission des finances, d'après ministère du budget

Le Gouvernement estimant à 31 800 euros le coût moyen d'un emploi supprimé, la diminution de 30 401 ETPT dans le projet de loi de finances pour 2012 représente une économie de 970 millions d'euros 107 ( * ) , soit 1,2 % du déficit budgétaire dans le projet de loi de finances initiale pour 2012, ou encore 0,05 % du PIB.

Sur la base de 55 600 départs de fonctionnaires en retraite en 2012, le non-remplacement stricto sensu d'un fonctionnaire sur deux représenterait une économie brute de 884 millions d'euros, et de 442 millions d'euros pour un fonctionnaire sur quatre. Mais il s'agit d'économies brutes, auxquelles il faut intégrer les dépenses nettes correspondant aux mesures catégorielles provenant du schéma d'emplois, estimées à 466 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2012 : l'économie nette liée à la suppression , en 2012, de 30 401 ETPT s'élève donc à (970 - 466 =) 504 millions d'euros , soit une économie nette de 16 580 euros en moyenne par emploi supprimé.

De fortes incertitudes entourent l'évaluation des mesures catégorielles provenant du schéma d'emplois , comme le détaille l'encadré ci-après. Initialement estimé à 300 millions d'euros dans le projet de loi de finances initiale pour 2011 (soit en moyenne 9 510 euros par emploi supprimé), le « retour catégoriel » aux agents suite aux suppressions de postes a été réévalué à 405 millions d'euros pour 2011 (soit 12 840 euros par suppression d'emploi), pour être estimé à 466 millions d'euros dans le projet de loi de finances initiale pour 2012, soit 15 330 euros de mesures catégorielles par suppression de poste, en hausse de 61 % par rapport à l'estimation donnée lors de l'examen du projet de loi de finances initiale pour 2011 .

Le Gouvernement sait-il mesurer le « retour catégoriel » aux agents provenant des suppressions de postes ?

Les mesures catégorielles, correspondant à des gains de productivité suite au schéma d'emplois, sont difficilement identifiables, comme l'ont observé nos collègues députés de la mission d'évaluation et de contrôle de l'Assemblée nationale. Par ailleurs, n'existe-t-il pas un biais tendant à considérer que les mesures catégorielles sont en principe liées aux gains de productivité issus des suppressions de postes ?

Dans les réponses au questionnaire budgétaire de cette année, le ministère du budget estime que 89 % des mesures catégorielles (soit 466 millions d'euros sur un total de 526 millions d'euros) sont liées au schéma d'emplois.

Toujours selon ces réponses, l'an dernier, pour 2011, seulement 300 millions d'euros au titre du « retour catégoriel » (sur un total de 605 millions d'euros de mesures catégorielles) étaient liés au schéma d'emplois.

Ce montant pour 2011 a été réévalué à 405 millions d'euros dans les réponses au questionnaire de cette année.

Dans tous les cas, le « retour catégoriel » n'atteint pas le seuil de 50 % des économies induites par le schéma d'emplois : selon les données du Gouvernement, il s'élevait à 37 % dans le projet de loi de finances initiale pour 2011 et atteint 48 % dans le projet de loi de finances pour 2012.


* 107 Il doit être observé que l'estimation par le Gouvernement d'un coût moyen de 31 800 euros est un chiffre arrondi (à la baisse). La direction du budget estime en effet à 969,4 millions d'euros l'impact du schéma d'emplois, ce qui, rapporté aux 30 401 ETP supprimés, représente une économie brute de 31 887 euros par ETPT, et non de 31 800 euros.

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