b) Des documents budgétaires insuffisants, compte tenu des enjeux associés à l'Etat garant

Ainsi que le précise le projet annuel de performances, les dépenses que supporte le programme 114 « sont la traduction budgétaire des engagements hors bilan de l'Etat retracés en annexe au rapport de la présentation du Compte général de l'Etat ». Outre les engagements de retraite des fonctionnaires et les engagements fiscaux de l'Etat 19 ( * ) , ces engagements hors bilan sont constitués par :

1) la dette garantie par l'Etat , qui concerne les engagements des sociétés, organismes bancaires, collectivités ou établissements publics pour lesquels l'Etat s'est engagé, en cas de défaillance du débiteur, à régler lui-même les intérêts et les échéances d'amortissement prévues au contrat. De 150 milliards d'euros en 2009, la dette garantie est passée à 138 milliards d'euros en 2010 (-12 milliards d'euros). En 2010, cette catégorie d'engagements hors bilan a notamment enregistré les conséquences de la garantie octroyée par la France au Fonds européen de stabilité financière (FESF), autorisé à contracter des emprunts sur les marchés au bénéfice des pays rencontrant des difficultés de financement. La garantie maximale accordée par la France au FESF, dont la contribution correspond à une quote-part de 21,83 %, était initialement de 111 milliards d'euros, portée en 2011 à 159 milliards d'euros ;

3) les garanties de protection des épargnants , qui intéressent l'ensemble des dépôts effectués par ces derniers sur des livrets réglementés (livret A, livret bleu, livret de développement durable, livret d'épargne populaire) et sur les créances détenues pat les établissements de crédits sur le fonds d'épargne tenu par la Caisse des dépôts et consignations. Cette garantie représente un engagement hors bilan de 313,7 milliards d'euros fin 2010 contre 307 milliards d'euros fin 2009 (+4,7 milliards d'euros) 20 ( * ) .

A l'occasion de l'examen du projet de loi de règlement pour 2010, votre commission s'est avisée du caractère lacunaire de l'information transmise au Parlement au sujet des engagements hors bilan .

En premier lieu, le PAP « Engagements financiers de l'Etat » retrace assez mal les enjeux financiers liés aux appels en garantie . Votre rapporteur spécial entend bien que des objectifs et indicateurs de performance consacrés à ces enjeux seraient inappropriés, dans la mesure où le responsable de programme - en l'occurrence le directeur général du Trésor - ne maîtrise pas la survenue des risques faisant jouer la garantie de l'Etat. Néanmoins, la présentation du programme et des actions pourrait être l'occasion de rappeler les ordres de grandeur concernés et leur évolution au fil du temps, de mentionner quelles recettes l'Etat tire des garanties rémunérées, ainsi que de mieux faire apparaître l'articulation entre les informations retracées dans les PAP et les RAP et les éléments figurant au compte général de l'Etat.

Ce dernier ne permet pas davantage de disposer d'une information exhaustive et consolidée sur les engagements hors bilan, pas plus qu'il ne propose une totalisation et une appréciation pro forma de leur évolution au cours du temps . S'agissant spécifiquement des garanties, aucune liste complète n'est donc disponible dans la documentation officielle adressée au Parlement 21 ( * ) et ce défaut d'exhaustivité se double de problèmes de cohérence , certains dispositifs de garantie mentionnés dans le projet annuel de performances ne figurant pas au compte général...

Enfin, les questionnaires budgétaires adressés au Gouvernement par le Parlement en vue de la préparation de l'examen des projets de loi de finances ne sont d'aucun secours en la matière, dans la mesure où il n'est tout simplement pas répondu aux questions portant sur le recensement des garanties octroyées par l'Etat.

Votre commission des finances ne méconnaît pas les obstacles, notamment techniques, qui se heurtent au recensement et à la comptabilisation exhaustifs des engagements hors bilan, notamment liés aux garanties. Pour autant, ces obstacles ne sauraient justifier que le Parlement ne dispose pas d'une information plus claire et plus complète sur ces questions, dans un contexte de crise financière et de crise des dettes souveraines où l'Etat garant est sollicité comme jamais et où ses engagements constituent un critère d'appréciation des agences de notation.

Entendu dans le cadre de la préparation du débat d'orientation des finances publiques pour 2012, le ministre du budget s'était dit prêt à travailler à l'amélioration de la présentation des engagements hors bilan dans les mois à venir. L'enquête que votre rapporteur spécial suggère de confier à la Cour des comptes sur ce sujet, en application de l'article 58-2° de la LOLF, lui en donnera donc l'occasion.


* 19 Qui correspondent principalement aux déficits restant à reporter sur les exercices suivants par les contribuables à l'impôt sur les sociétés.

* 20 Selon le rapport de présentation du compte général de l'Etat 2010, « l'existence de règles prudentielles déjà suivies actuellement par le fonds d'épargne (et portant notamment sur le niveau minimal des fonds propres ou la liquidité du fonds) sécurise l'ensemble du dispositif et rend improbable la mise en jeu de la garantie de l'Etat » à ce titre.

* 21 A titre d'exemple, l'Assemblée nationale et le Sénat ont ainsi été amenés à statuer, au cours de l'examen du quatrième projet de loi de finances rectificative pour 2010, sur la mise en jeu d'une garantie de l'Etat couvrant une charge financière engagée par la CDC lors de la liquidation de la « Compagnie BTP »... qui n'était répertoriée nulle part.

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