2. Une définition de l'objet du texte à géométrie variable, qui exclut des questions majeures

Stricto sensu , les dépenses contraintes se limitent uniquement aux dépenses pré-engagées, c'est-à-dire celles dues par les ménages en vertu d'un contrat ou au titre d'un abonnement.

On y inclut généralement les dépenses liées au logement (loyers, remboursements de prêt immobilier, charges telles que l'eau, le gaz, l'électricité), les assurances à caractère obligatoire (liées au logement, à la santé, aux transports), le coût des services de télécommunication (téléphonie, internet) et les divers remboursements de crédits (hors résidence principale).

Dans le projet de loi cependant, l'expression « dépenses contraintes » est prise dans un sens plus large, qui inclut également certaines dépenses qu'on pourrait qualifier d'incontournables, telles que l'alimentation (les grandes surfaces à dominante alimentaire sont visées par l'article 1 er ) ou la santé (produits d'optique-lunetterie traités à l'article 6). Là où le Gouvernement parle de dépenses contraintes, il vaudrait donc mieux en réalité parler de dépenses non arbitrables , c'est-à-dire de dépenses pour lesquelles les consommateurs ne disposent, au moment de les effectuer, que de peu ou aucune marge de manoeuvre.

Ce n'est pas par un souci excessif de rigueur sémantique que votre rapporteur prend le temps de préciser ces notions, c'est parce que le flottement constaté quant à l'emploi des termes affecte directement l'objet du texte . On a pu observer en effet, lors des débats à l'Assemblée nationale, que le Gouvernement, au gré de ses convenances, fondait ses avis tantôt sur une conception restrictive, tantôt sur une conception large des dépenses contraintes. Ainsi, comme on vient de le voir, il a décidé d'inclure dans le champ du texte les dépenses liées à l'alimentation et à la santé, alors qu'il ne s'agit pas de dépenses juridiquement « pré-engagées ». En revanche, il a choisi d'exclure celles liées aux transports et véhicules, aux services financiers et aux réparations à domicile, alors qu'il s'agit de dépenses souvent incontournables et qui sont, de surcroît, sources de litiges récurrents pour les consommateurs (ces trois secteurs représentent respectivement 12 %, 5 % et 17 % des réclamations reçues par la DGCCRF).

Plus largement, la conviction de votre rapporteur est que ce recours, au demeurant fluctuant, à la notion de dépenses contraintes n'est en définitive qu'une manière, pour le Gouvernement, de s'opposer à la réouverture de certains débats de fond, afin de ne pas remettre en cause les précédentes réformes du quinquennat 3 ( * ) .

Pourtant, votre rapporteur estime que certaines questions, intéressant la protection et le pouvoir d'achat des consommateurs, n'ont pas été réglées de manière satisfaisante jusqu'à présent . On peut citer notamment la formation des prix agricoles et alimentaires (thèmes pourtant centraux de la LME et de la LMAP), la prévention du surendettement des ménages et l'action collective des consommateurs . La question des règles d'urbanisme commercial (au coeur des discussions de la LME et de la proposition de loi « urbanisme commercial » actuellement bloquée à l'Assemblée nationale en raison de l'opposition du Gouvernement) n'est pas non plus tout à fait étrangère à ce texte.


* 3 Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (LME), loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche (LMAP), loi n° 2010-737 du 1 er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation.

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