EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Lors de l'examen en première lecture par le Sénat du projet de loi relatif à la représentation des Français établis hors de France, un consensus s'est dégagé au sein de la Haute Assemblée sur la nécessité d'une réforme des instances représentatives de nos compatriotes expatriés. Cette réforme est d'autant plus nécessaire qu'elle s'insère dans un paysage institutionnel renouvelé par l'élection de députés élus par les Français établis hors de France, au sein de onze circonscriptions, en application de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 qui a étendu la représentation des Français de l'étranger à l'Assemblée nationale. Cette élection a eu lieu pour la première fois en juin 2012.

Les Français établis hors de France disposent désormais d'une représentation parlementaire complète qui oblige nécessairement à réformer la représentation institutionnelle spécifique des Français vivant à l'étranger, rôle tenu jusqu'à présent exclusivement par l'Assemblée des Français de l'étranger. Elle jouait un rôle de conseil du Gouvernement sur les questions où les Français établis hors de France pouvaient apporter une valeur ajoutée, que ce soit pour notre coopération culturelle et scientifique ou notre présence économique dans le monde. Elle avait également compétence pour faire des propositions sur les politiques publiques menées en faveur de nos compatriotes expatriés : fonctionnement des services consulaires, sécurité, politique d'enseignement et accès à celle-ci, action sociale, emploi et formation professionnelle.

Dans ce contexte, le Gouvernement a déposé au Sénat dès le mois de février 2013 le présent projet de loi pour lequel il a engagé la procédure accéléré. Notre assemblée l'a adopté, après de multiples modifications, le 18 mars 2013. Il lui est désormais soumis en nouvelle lecture, à la suite de l'échec de la commission mixte paritaire le 22 mai 2013. Malgré des différences d'appréciation ayant conduit à des textes adoptés très différents, la première lecture au sein des deux assemblées a démontré une approche convergente sur les principes essentiels de la réforme proposée par le Gouvernement et sensiblement enrichie par le Sénat. Compte tenu d'un calendrier parlementaire contraint et faute du temps nécessaire, la commission mixte paritaire n'a cependant pu aboutir à un accord, constatant toutefois un « désaccord contrôlé ».

A cet égard, votre rapporteur tient à saluer la disponibilité et la qualité d'écoute de son homologue de l'Assemblée nationale, notre collègue Hugues Fourage, qui a su entendre les préoccupations exprimées par votre commission, dans un dialogue constructif engagé lors de la préparation de la commission mixte paritaire. Ce dialogue a trouvé un prolongement fructueux au cours de la nouvelle lecture par les députés, permettant un rapprochement entre les deux chambres.

Adopté en nouvelle lecture par l'Assemblée nationale le 21 juin 2013, le présent projet de loi ainsi modifié constitue, selon votre rapporteur, un compromis acceptable entre les positions respectives des deux assemblées. Votre commission n'a cependant pas adopté de texte.

Si elle était adoptée, cette réforme s'appliquerait en 2014, la loi n° 2013-498 du 13 juin 2013, très récemment promulguée, ayant prorogé le mandat des actuels membres de l'Assemblée des Français de l'étranger de la série B jusqu'en juin 2014. Saisi de cette loi, le Conseil constitutionnel a admis sa conformité à la Constitution au regard des règles relatives aux mandats électoraux, reconnaissant implicitement mais nécessairement que les mandats au sein des instances représentatives des Français établis hors de France, dès lors que les élus procèdent du suffrage universel, doivent respecter les règles constitutionnelles quant à la périodicité raisonnable des élections, au découpage des circonscriptions électorales et à la répartition des sièges.

Cette réforme n'en appellera pas moins, d'ici les futures élections, de nombreuses dispositions réglementaires. En effet, ce texte laisse une place importante au pouvoir réglementaire pour son application, en particulier pour l'organisation et le fonctionnement des conseils consulaires. Ainsi, la réussite de cette réforme reposera largement sur le soin que le Gouvernement apportera à l'élaboration de ses textes d'application, sous le contrôle du Parlement.

I. UN NOUVEAU SYSTÈME DE REPRÉSENTATION DES FRANÇAIS ÉTABLIS HORS DE FRANCE

Sur le plan formel, votre commission, à l'initiative de son rapporteur, avait fortement remanié en première lecture la structure du texte qui lui était soumis par le Gouvernement.

Pour renforcer la clarté de la loi, votre commission avait distingué au sein de titres et de chapitres distincts les dispositions statutaires, fixant l'organisation et le fonctionnement des instances représentatives des Français établis hors de France, de celles à caractère électoral, déterminant le mode de désignation de leurs membres. Dans un souci d'accessibilité de la loi, votre commission, sur proposition de son rapporteur, avait également introduit au sein du présent projet de loi les dispositions régissant l'élection des sénateurs représentant les Français établis hors de France, actuellement contenues au sein de l'ordonnance n° 59-260 du 4 février 1959.

A. L'ORGANISATION ET LE FONCTIONNEMENT DES INSTANCES REPRÉSENTATIVES DES FRANÇAIS ÉTABLIS HORS DE FRANCE

La principale innovation du projet de loi réside dans la création d'un double degré de représentation pour les Français établis hors de France, avec la création des conseils consulaires parallèlement au maintien de l'Assemblée des Français de l'étranger (AFE) ( articler 1 er ).

L'Assemblée nationale est revenue à la rédaction initiale du projet de loi concernant le financement des campagnes électorales. Toutefois, afin de reconnaître le rôle historique des associations représentatives des Français établis hors de France au niveau national, que ce soit Français du Monde -ADFE ou l'UFE, l'Assemblée nationale a introduit une disposition reconnaissant leur rôle dans l'exercice des droits civiques de nos compatriotes expatriés et leur contribution à la vie démocratique de la Nation au-delà de nos frontières ( article 1 er bis ). Cette disposition symbolique fait écho aux craintes exprimées par ces associations, dont le rôle démocratique est indéniable, de disparaître de la vie politique française à l'étranger du fait des nouvelles règles relatives au financement des campagnes électorales.

S'agissant des règles d'organisation et de fonctionnement des instances représentatives, le Sénat, rejoint par l'Assemblée nationale, a souhaité élever au niveau de la loi des règles qui lui paraissaient consubstantielles au caractère démocratique de ces instances : délai de tenue de la réunion constitutive ( articles 2 bis et 20 AA ), mode de désignation du vice-président du conseil consulaire ainsi que du président et du bureau de l'AFE ( articles 2 et 20 B ), consécration du règlement intérieur de l'AFE ( articles 20 B ), règles de convocation de l'AFE et nombre de réunions annuelles obligatoires ( article 20 C ). Dans le même esprit, le Sénat a précisé l'habilitation du pouvoir règlementaire en reconnaissant dans leur principe, notamment, une indemnisation des élus, un droit à la formation et l'exercice de prérogatives individuelles ( articles 19 et 29 ).

1. Les conseils consulaires : une nouvelle instance de proximité

Assurant une proximité avec les communautés françaises établies à l'étranger, les conseillers consulaires siègeraient au sein de conseils consulaires placés auprès des ambassades et postes consulaires. Ces conseils disposeraient d'une compétence consultative facultative sur les questions intéressant nos compatriotes expatriés, avec la possibilité d'émettre des avis ( article 2 ). Ces instances, dont la composition serait précisée par voie règlementaire, devraient comprendre, outre les conseillers consulaires qui en sont membres de droit, des personnalités qualifiées désignées en fonction des thèmes abordés.

L'Assemblée nationale a amélioré l'information de ces conseils en prévoyant la présentation devant ces instances d'un rapport annuel par l'ambassadeur ou le chef de poste consulaire.

2. Le maintien de l'Assemblée des Français de l'étranger

Au niveau central, la représentation des Français établis hors de France continuerait d'être assurée par l'AFE, qui disposerait d'une compétence consultative facultative sur les questions intéressant nos compatriotes à l'étranger, avec la possibilité de formuler des avis, des résolutions et des motions ( article 21 ).

A ce titre, un rapport lui serait présenté annuellement, pouvant donner lieu à débat en présence du Gouvernement ( article 20 ), et elle pourrait faire part de ses observations à la suite du dépôt des projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale ( article 21 ).

En première lecture, l'Assemblée nationale a modifié le nom de cette instance au profit de l'appellation de Haut Conseil des Français de l'étranger. Une telle modification aurait eu des implications lourdes, dans la mesure où l'AFE est évoquée dans des textes organiques, en particulier à l'article 3 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel s'agissant du parrainage des candidats, faculté traditionnellement très utilisé par les conseillers à l'AFE. En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a finalement rétabli le nom d'Assemblée des Français de l'étranger, à la satisfaction de votre commission.

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