EXAMEN DE L'ARTICLE

Article unique (art. L. 1451-1 [nouveau] du code du travail) - Procédure d'examen des prises d'acte de rupture du contrat de travail par les conseils de prud'hommes

Objet : Cet article prévoit que le bureau de jugement du conseil de prud'hommes doit statuer dans un délai d'un mois en cas de saisine consécutive à une prise d'acte de rupture de son contrat de travail par un salarié.

I - Le dispositif proposé

Consacrée par la Cour de cassation dans ses arrêts du 25 juin 2003 comme une modalité à part entière de rupture du contrat de travail par un salarié en raison de faits qu'il reproche à son employeur , la prise d'acte repose sur l'intervention du juge compétent pour connaître des différends liés à l'exécution du contrat de travail, c'est-à-dire le conseil de prud'hommes, afin d'en déterminer les effets . La Cour a jugé qu'ils sont soit ceux d'un licenciement pour cause réelle et sérieuse si les faits invoqués justifiaient la prise d'acte, soit ceux d'une démission dans le cas contraire.

Dans l'attente de ce jugement, dont le délai moyen dépasse un an et atteint plus de deux ans dans certains conseils de prud'hommes, le salarié ne peut, sauf exception, bénéficier de l'assurance chômage. Dans ce contexte, l'article unique de cette proposition de loi vise à remédier à cette situation en transposant au contentieux de la prise d'acte un régime déjà existant en matière de requalification d'un CDD 30 ( * ) ou d'un contrat d'intérim 31 ( * ) en CDI.

Cet article insère, dans la section du code du travail relative aux ruptures du contrat de travail à l'initiative du salarié, une sous-section portant sur la prise d'acte et composée d'un article L. 1237-1-1 nouveau prévoyant une procédure accélérée d'examen , par le conseil de prud'hommes, du contentieux lié à la prise d'acte .

Ainsi, lorsque le conseil de prud'hommes serait saisi d'une demande visant à qualifier la prise d'acte, l'affaire serait portée directement devant le bureau de jugement , ce qui signifie une suppression de la phase préalable de conciliation de droit commun. Le bureau de jugement disposerait d'un mois pour statuer.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

La commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a procédé à une modification de la formulation retenue par cet article unique, sans en altérer le fond. Dans sa rédaction d'origine, il faisait en effet directement référence à la « prise d'acte », notion jusqu'à présent absente du code du travail et dont il aurait ensuite fallu définir le régime juridique en son sein.

Ne jugeant pas souhaitable de figer dans la loi cette création prétorienne, le rapporteur, notre ancien collègue député Thierry Braillard, et le député Denys Robiliard, ont préféré la désigner par le biais de la définition qu'en donne la Cour de cassation, c'est-à-dire une « rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié en raison de faits que celui-ci reproche à son employeur ».

Le titre de la proposition de loi a été modifié en conséquence, celle-ci n'étant pas relative « aux effets de la prise d'acte de rupture du contrat de travail », qu'il appartient toujours au juge de déterminer, mais bien « à la procédure applicable devant le conseil de prud'hommes dans le cadre d'une prise d'acte ».

Dans le même esprit, cette mesure a été déplacée dans le code du travail pour figurer désormais à un article L. 1451-1 nouveau, qui se situe au chapitre I du titre V du même livre I du code qui porte sur les dispositions générales relatives à la procédure devant le conseil de prud'hommes.

Aucun amendement supplémentaire n'a été adopté lors de l'examen de la proposition de loi en séance plénière.

III - Le texte adopté par la commission

Au vu de ses conséquences et de l'incertitude qui pèse sur l'aboutissement du contentieux qui en est le corollaire, la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par un salarié n'est pas un moyen pour celui-ci d'accélérer une transition professionnelle. Elle constitue la reconnaissance, par le juge, de la nécessité d'offrir à un employé la possibilité de mettre un terme, avec effet immédiat , à une situation de travail dans laquelle le comportement de son employeur n'est pas conforme aux obligations qu'il tient du pouvoir de direction qui est le sien.

Dans ces circonstances, la durée du contentieux prud'homal puis, le cas échéant, devant la cour d'appel voire la Cour de cassation est une source d'incertitudes majeure pour le salarié , qui est privé de revenus s'il n'a pas retrouvé de nouvel emploi, mais également pour l'employeur , notamment sur le plan financier puisqu'il peut être amené à provisionner des sommes importantes dans l'attente du jugement. Cette proposition de loi, en s'inspirant de procédures dérogatoires déjà existantes dans le code du travail, constitue donc aux yeux de votre rapporteur une mesure de bon sens, un aménagement souhaitable qui correspond à la spécificité des situations qui peuvent conduire à une prise d'acte.

Comme l'ont fait remarquer à votre rapporteur les partenaires sociaux qu'il a interrogés, fixer dans la loi un délai de jugement d'un mois ne garantit pas qu'il soit respecté mais renvoie au débat sur les moyens des conseils de prud'hommes, qui sont unanimement considérés comme insuffisants. Ce n'est toutefois pas l'objet de cette proposition de loi, qui constitue un ajustement procédural pour un contentieux de niche .

La commission a adopté cet article sans modification.


* 30 Article L. 1245-2 du code du travail.

* 31 Article L. 1251-41 du code du travail.

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