N° 608

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2013-2014

Enregistré à la Présidence du Sénat le 11 juin 2014

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi de MM. François PILLET et René VANDIERENDONCK visant à créer des polices territoriales et portant dispositions diverses relatives à leur organisation et leur fonctionnement ,

Par Mme Virginie KLÈS,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Pierre Sueur , président ; MM. Jean-Pierre Michel, Patrice Gélard, Mme Catherine Tasca, M. Bernard Saugey, Mme Esther Benbassa, MM. François Pillet, Yves Détraigne, Mme Éliane Assassi, M. Nicolas Alfonsi, Mlle Sophie Joissains , vice-présidents ; Mme Nicole Bonnefoy, MM. Christian Cointat, Christophe-André Frassa, Mme Virginie Klès , secrétaires ; MM. Alain Anziani, Philippe Bas, Christophe Béchu, François-Noël Buffet, Vincent Capo-Canellas, Luc Carvounas, Gérard Collomb, Pierre-Yves Collombat, Jean-Patrick Courtois, Mme Cécile Cukierman, MM. Michel Delebarre, Félix Desplan, Christian Favier, René Garrec, Mme Jacqueline Gourault, MM. François Grosdidier, Jean-Jacques Hyest, Philippe Kaltenbach, Mme Isabelle Lajoux, MM. Jean-René Lecerf, Jean-Yves Leconte, Antoine Lefèvre, Roger Madec, Jean Louis Masson, Jacques Mézard, Thani Mohamed Soilihi, Hugues Portelli, André Reichardt, Alain Richard, Simon Sutour, Mme Catherine Troendlé, MM. René Vandierendonck, Jean-Pierre Vial, François Zocchetto .

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

553 (2012-2013) et 609 (2013-2014)

CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Réunie le 11 juin 20014, sous la présidence de M. Jean-Pierre Sueur, président , la commission a examiné, sur le rapport de Mme Virginie Klès , la proposition de loi n° 553 (2012-2013) de MM. François Pillet et René Vandierendonck, visant à créer des polices territoriales et portant dispositions diverses relatives à leur organisation et leur fonctionnement .

Cette proposition de loi vise à traduire dans la loi les recommandations relevant du domaine législatif, formulées par ses deux auteurs dans leur rapport d'information publié en 2012 pour adapter le régime juridique des polices municipales à l'évolution de leur cadre d'intervention et favoriser un fonctionnement et un emploi plus efficaces de ces services. À cette fin, elle crée tout d'abord des services de police territoriale par la fusion des cadres d'emplois des agents de police municipale et des gardes champêtres, qui assumeraient l'ensemble des missions aujourd'hui confiées aux uns et aux autres. Elle tend ensuite à renforcer les obligations de formation des personnels, améliorer le fonctionnement des conventions de coordination entre les collectivités et l'État et favoriser la mutualisation des agents tout en préservant le pouvoir de police des maires.

La commission des lois a adopté 34 amendements de son rapporteur, ainsi que de nos collègues MM. François Pillet et René Vandierendonck, destinés à renforcer le dispositif proposé.

Ils tendent à :

- intégrer expressément la notion de la police des campagnes au sein des missions assumées demain par les futures polices territoriales résultant de la fusion des cadres d'emplois des agents de police municipale et des gardes champêtres (article 1 er ) ;

- prévoir les modalités transitoires de l'intégration des gardes champêtres dans le cadre d'emplois unifié (article 3 bis nouveau) ;

- instituer une transmission des éléments d'agrément en cas de changement d'employeur de l'agent de police territoriale (article 22 A nouveau) ;

- renforcer le cadre juridique d'intervention des personnels, particulièrement par l'adoption de dispositions relatives aux agents de surveillance de la voie publique et aux assistants temporaires des agents de police territoriale (articles 22 C et 22 D nouveaux) ;

- supprimer l'article 16 qui accordait aux présidents d'établissements publics de coopération intercommunale la qualité d'officier de police judiciaire ;

- modifier le régime des conventions de coordination en abaissant de cinq à quatre policiers territoriaux le seuil à partir duquel elles doivent être obligatoirement conclues, en les faisant également signer par le procureur de la République et en rééquilibrant les obligations respectives des forces de police territoriale et des forces de sécurité nationales (article 19) ;

- autoriser l'accès direct des agents de police territoriale au fichier national des permis de conduire (article 22 B nouveau).

L'article 21 a été supprimé par l'adoption d'un amendement de Mme Catherine Troendlé.

La commission des lois a adopté la proposition de loi ainsi modifiée .

Exposé général

Mesdames, Messieurs,

« Confrontés à la violence de plus en plus prégnante au sein de notre société, les policiers municipaux assument, à la satisfaction de la population, leurs fonctions de prévention, de présence dissuasive, de médiation, mais également lorsque c'est nécessaire, de répression et sont, aux côtés des forces de l'État, des acteurs essentiels de la lutte contre la délinquance et l'incivilité et de la sécurité générale de notre pays ». Ce rappel de M. Manuel Valls, alors ministre de l'intérieur, devant la commission consultative des polices municipales réunie le 13 février 2014, résume les évolutions, les difficultés et les défis auxquels sont aujourd'hui confrontées les polices municipales.

Ils ont conduit la commission des lois à confier à deux de ses membres, nos collègues François Pillet et René Vandierendonck, le soin d'établir un état des lieux de l'exercice des pouvoirs de police des maires, et proposer, le cas échéant, des évolutions de son cadre juridique.

Au terme de leurs travaux consacrés à ce domaine sensible de l'administration territoriale, les deux sénateurs ont formulé vingt-cinq propositions dans un rapport d'information auquel renvoie le présent rapport pour toutes précisions sur le cadre juridique des polices municipales, leurs missions et les personnels chargés de les exercer 1 ( * ) .

La présente proposition de loi vise à traduire dans la loi les recommandations relevant du domaine législatif.

Résolus à faciliter l'adoption rapide des évolutions les plus nécessaires, les sénateurs François Pillet et René Vandierendonck ont adopté une démarche pragmatique pour évaluer le cadre législatif et réglementaire en vigueur. Parallèlement à leurs auditions et déplacements sur le territoire, ils ont souhaité recueillir le plus largement possible les observations des élus et des services chargés d'assurer le respect des arrêtés municipaux.

À cette fin, ils ont interrogé l'ensemble des 3 935 collectivités dotées d'une police. Les 1 849 réponses obtenues en retour leur ont permis d'ajuster leurs propositions.

La principale d'entre elles réside dans l'institution de polices territoriales par la fusion des corps des policiers municipaux et des gardes champêtres pour tenir compte de l'évolution du peuplement des territoires et renforcer l'efficacité de ces services face à un certain repli de l'État.

Une préoccupation constante tant de votre rapporteur que des auteurs de la proposition de loi reste cependant de ne pas encourager ce repli mais bien d'y faire face et de faire en sorte que, dans le contexte budgétaire dont nous connaissons tous les contraintes, l'optimisation des forces des uns et des autres soit au rendez-vous.

I. LES POLICES DES MAIRES AU CONFLUENT DE MULTIPLES ENJEUX

La police de la tranquillité publique a vu ses missions s'élargir et ses actions répressives se renforcer.

A. UN CHAMP D'INTERVENTION VARIÉ, DES PRATIQUES DIVERSES

1. Une définition large des pouvoirs de police du maire

L'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales précise les missions de la police municipale, dont le maire est chargé en application de l'article L. 2212-1 du même code.

L'article L. 2212-2 prévoit dans une formulation générale que la police a pour objet « d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques », puis il énumère, de manière non exhaustive, les différentes attributions du maire au titre de ce pouvoir de police générale. Une jurisprudence très abondante a ensuite précisé le contenu de cet article.

Le maire dispose aussi de pouvoirs de polices spéciales, dans de nombreux domaines, relevant par exemple du code de la santé publique, du code rural, du code de la voierie routière ou du code de l'urbanisme.

Comme l'ont souligné nos collègues François Pillet et René Vandierendonck, il s'agit donc d'une « mission de police administrative à dominante préventive » 2 ( * ) .

Dans leur rapport d'information précité, les deux auteurs ont souligné le progressif élargissement des missions exercées par le maire au titre de ses pouvoirs de police et notamment le poids grandissant pris par la préservation de la tranquillité publique qui tend à devenir un élément central du pouvoir de police des maires.

2. Des polices municipales hétérogènes

Il existe actuellement 3 ( * ) 3 682 polices municipales, dont 1 044 en zones police. Près de 2 557 polices municipales comptent moins de cinq agents, cependant que la plus importante, située à Nice, dispose d'un effectif de 366 agents.

En zone gendarmerie, la taille des polices municipales varie de 1 à 45 agents pour les 2 638 communes qui en sont dotées, soit une moyenne de 3 agents par service.

Dans leur rapport, nos collègues François Pillet et René Vandierendonck soulignent l'hétérogénéité des polices municipales, qui peuvent être une police au format modeste, fonctionnant seulement le jour et disposant d'un armement de 6 ème catégorie alors que les polices municipales les plus développées comptent un effectif élevé d'agents, disposant d'un armement de 4 ème catégorie, d'un système de vidéoprotection, d'un centre de supervision urbain et fonctionnent la nuit 4 ( * ) .


* 1 Cf. rapport d'information n° 782 (2011-2012) fait au nom de la commission des lois du Sénat par François Pillet et René Vandierendonck, De la police municipale à la police territoriale : mieux assurer la tranquillité publique (ce rapport peut être consulté à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/rap/r11-782/r11-782.html ).

* 2 Cf. rapport précité, p. 15.

* 3 Source Direction générale de la police nationale, au 1 er janvier 2014.

* 4 Cf. rapport précité, p. 13.

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