AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Si la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) ne représente que 3 % de l'ensemble des dépenses des régimes de base de la sécurité sociale, les enjeux soulevés par son financement sont loin d'être négligeables. Compte tenu de sa logique assurantielle, elle a en effet vocation à être structurellement équilibrée.

A cet égard, l'exercice 2013 a enfin permis de renouer avec les excédents après plusieurs années de déficit mais la situation reste particulièrement fragile. Dès l'année prochaine, le solde excédentaire, qui s'élevait à 638 millions d'euros en 2013, serait ramené à moins de 200 millions d'euros. A ce stade, les résultats obtenus ne permettent pas d'apurer la dette de la branche qui s'élève à 1,4 milliard d'euros, sans qu'aucune négociation n'ait été engagée à ce sujet entre partenaires sociaux.

L'augmentation très rapide du montant du versement de la branche AT-MP à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des AT-MP remet quant à elle en question tant l'efficacité des mesures mises en oeuvre pour endiguer ce phénomène que les politiques de prévention des risques professionnels. Ce versement est entièrement supporté par la part mutualisée des cotisations patronales.

A l'heure où la logique de simple réparation des dommages risque de faire de l'ombre à l'objectif de prévention, les orientations définies par la nouvelle convention d'objectifs et de gestion (Cog) de la branche pour les années 2014 à 2017 ne peuvent être accueillies que favorablement. Face à un niveau de sinistralité qui demeure encore trop élevé, elles mettent en effet l'accent sur la nécessité de mieux cibler les efforts de prévention et de poursuivre l'adaptation de la tarification aux risques. Leur mise en oeuvre devrait permettre de rester fidèle aux principes fondateurs de la branche, voire de les consolider, à la condition toutefois que la politique de contractualisation avec les branches professionnelles trouve à se déployer plus largement qu'aujourd'hui.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. UNE SINISTRALITÉ ENCORE TROP IMPORTANTE, DES EFFORTS DE PRÉVENTION À RENFORCER

Conformément au principe assurantiel qui fonde la branche AT-MP, dont les recettes et les dépenses sont étroitement liées à l'ampleur de la sinistralité constatée, la diminution de la fréquence et de la gravité des sinistres d'origine professionnelle constitue un enjeu de tout premier plan.

Si la baisse générale des niveaux de sinistralité au cours du temps constitue incontestablement un motif de satisfaction, cette tendance recèle des évolutions différenciées selon le type de risque, sa fréquence et sa gravité ainsi que le secteur d'activité.

En 2013, la Cnam recense 1,102 million d'accidents du travail, accidents de trajet et maladies professionnelles reconnus au régime général, soit une baisse de 3,1 % par rapport à 2012. Sur ce total, 70 % ont entraîné un arrêt de travail, un chiffre inférieur de 2,8 % au niveau de 2012.

Comme le montre le tableau ci-dessous, le nombre de sinistres a baissé de près de 18 % entre 2007 et 2013.

Figure n° 1 :

Evolution du nombre d'accidents du travail, d'accidents de trajet
et de maladies professionnelles au régime général entre 2007 et 2013

Catégorie de sinistres

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013*

En % entre 2007 et 2013

Accidents de travail

1 165 000

1 132 400

1 021 400

996 900

1 001 500

943 000

904 220

- 22,4

dont accidents de travail avec arrêt

720 150

704 000

651 500

658 800

669 900

640 900

618 263

- 14,1

Accidents de trajet

120 900

125 300

129 700

137 600

133 400

123 000

129 688

+ 7,3

dont accidents de trajet avec arrêt

85 400

87 900

93 800

98 400

100 000

90 100

93 363

+ 9,3

Maladies professionnelles

55 100

62 000

71 600

71 400

80 400

71 600

68 120

+ 23,6

dont maladies professionnelles avec arrêt

43 800

45 400

49 300

50 700

55 100

54 000

51 452

+ 17,47

TOTAL AT-MP

1 341 000

1 319 700

1 222 700

1 205 900

1 215 300

1 137  600

1 102 018

- 17,8

dont AT-MP
avec arrêt

849 400

837 300

794 600

808 000

825 000

785 000

763 078

- 10,2

*  estimé

Source : Cnam, Datamart AT-MP données nationales 2013, réponses du ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes au questionnaire de la commission des affaires sociales du Sénat

Cette diminution globale reste cependant largement imputable aux accidents du travail qui représentent 82 % des sinistres ayant fait l'objet d'un premier règlement au régime général en 2013. L'ampleur des accidents de trajet et des maladies professionnelles, qui comptent pour respectivement 12 % et 6 % du total des sinistres, reste quant à elle croissante. Cet état des lieux contrasté de la sinistralité plaide pour une recrudescence et un meilleur ciblage des efforts de prévention.

A. UNE BAISSE TENDANCIELLE DES ACCIDENTS DU TRAVAIL

Dans le droit fil de la baisse tendancielle entamée dans le milieu des années 1960, le nombre total d'accidents du travail s'est contracté de 22,4 % entre 2007 et 2013. Le nombre d'accidents ayant entraîné un arrêt de travail s'est stabilisé à 700 000 en moyenne dans les années 1990 puis à environ 650 000 entre 2008 et 2012. Il est estimé à moins de 620 000 en 2013 pour près de 905 000 accidents du travail au total.

Cette évolution est réelle si l'on en juge d'après la contraction des indices de fréquence et de gravité. Elle s'explique par l'accroissement indéniable des efforts de prévention observé au cours des dernières décennies. Mais elle tient également à un effet de structure lié à la réduction du poids du secteur industriel, le plus « accidentogène », dans l'économie française. Enfin, dans la période récente, elle résulte en partie de la dégradation de la conjoncture économique.

Les plus forts risques continuent de se concentrer dans quelques secteurs d'activité.

1. Une contraction des indices de fréquence et de gravité qu'il faut relativiser

Comme le montre le tableau ci-dessous, les indices de fréquence et de gravité des accidents du travail ont poursuivi leur diminution l'année dernière.

Figure n° 2 :

Indices de fréquence et de gravité des accidents du travail
(pour 1000 salariés)

2001

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

Accident du travail avec arrêt

42,8

39,4

39,4

38

36,0

36,0

36,2

35,0

33,8

AT ayant entraîné une IP

2,5

2,6

2,5

2,4

2,4

2,3

2,2

2,2

2,1

AT avec décès

n.d

n.d

n.d

0,03

0,03

0,03

0,03

0,03

0,03

Source : annexe 1 du PLFSS pour 2015 - programme de qualité et d'efficience (PQE) pour la branche AT-MP

En 2013, l'indice de fréquence des accidents du travail ayant entraîné un arrêt de travail s'établit à 33,8 pour 1 000 salariés contre 42,8 en 2001, soit une baisse de 21 % sur la période. La fréquence des accidents du travail ayant entraîné une incapacité permanente diminue elle aussi, avec une baisse de 16 % entre 2001 et 2013.

Votre rapporteur se félicite de cette évolution. Il souhaite néanmoins attirer l'attention sur deux éléments qui viennent en tempérer l'importance.

D'une part, selon le programme de qualité et d'efficience annexé au projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2015, le taux moyen d'incapacité partielle permanente (IPP) des accidents du travail stagne à un niveau supérieur à celui du milieu des années 2000 (10,3 % en 2013 contre 9,8 % en 2005).

D'autre part, le nombre de journées de travail perdues en raison d'un accident du travail est en nette progression depuis 2001 . Il s'élève en effet à 1,38 journée pour 1000 heures travaillées en 2013 contre 1,06 en 2001. Malgré une relative stabilisation depuis 2011, il a progressé de 8 % entre 2007 et 2013.

Votre rapporteur reconnaît cependant qu'il demeure malaisé d'évaluer dans quelles proportions cette hausse reflète l'aggravation des sinistres ou l'évolution des comportements de prescription. L'augmentation de la durée moyenne d'un arrêt peut en effet refléter une meilleure reconnaissance par les médecins prescripteurs des dommages subis par les victimes.

2. Une concentration des plus forts risques dans quelques secteurs d'activité

Les accidents du travail se concentrent dans quelques secteurs bien identifiés :

- les activités de services et de travail intérimaire (23 % du nombre total d'accidents en 2013) ;

- les services, commerces et industries de l'alimentation (17 %) ;

- le secteur du BTP (16 %) ;

- et le secteur des transports, eau, gaz et électricité (EGE), livre et communication (15 %).

Votre rapporteur relève que depuis l'année 2000, la diminution de la fréquence des accidents du travail avec arrêt est particulièrement importante dans les secteurs du BTP (- 37 %), de la métallurgie (- 34 %), et de l'industrie de la chimie, du caoutchouc et de la plasturgie (- 32 %). Ces résultats positifs sont le fruit des solides politiques de prévention mises en oeuvre dans ces secteurs à l'échelle du territoire. La poursuite des efforts de ciblage des actions de prévention dans les secteurs à plus forte sinistralité s'en trouve encouragée.

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