II. TROIS ACCORDS RENFORÇANT LES SYNERGIES FRANCO-ANDORRANES AUTOUR DE LA FRONTIÈRE

A. DIX ANNÉES CONSACRÉES À DÉFINIR LE TRACÉ DE LA FRONTIÈRE

Fixée par aucun texte 13 ( * ) , la délimitation de la frontière entre la France et Andorre était source de divergences. Le principal litige concernait une zone de plus de 46 hectares entre l'Etang de Font Nègre (2 261 m) et le Pic Nègre d'Envalira (2 815 m), appelée Clot des Abelletes 14 ( * ) .

Afin de résoudre ces litiges, le principe de la délimitation du tracé de la frontière a alors été introduit, à la demande de la France, dans le traité du 12 septembre 2000 , portant rectification de la frontière sur une partie consensuelle 15 ( * ) qui suivait le cours de l'Ariège 16 ( * ) .

Les échanges de terrain ont été effectués en deux étapes. Tout d'abord, lors du traité en 2000, un échange portant sur 1,5 hectare, sur des terrains inhabités, a été effectué afin que les Andorrans puissent exécuter, à leur charge, des travaux d'élargissement de route, nécessitant la construction d'un viaduc au-dessus de l'Ariège. Les terrains accueillant les piliers de l'ouvrage devaient se trouver en territoire andorran. La France, à cette occasion, a récupéré un terrain où se situe une station de mesure.

Puis aux termes du traité, des négociations devaient être engagées, sur la délimitation des frontières (définition de frontière inexistante et tracé non fixé). La commission franco-andorrane de délimitation de la frontière s'est réunie pour la première fois, le 5 juillet 2001 .

Elle a identifié une zone de 47,9 hectares correspondant au « clos des Abelettes », une zone de 4,96 hectares sur les communes de l'Hospitalet près-l'Andorre (Ariège) et Palomera-Olette (Pyrénées-Orientales) et enfin une zone de 3,56 hectares au Pic de Ruf.

Dix réunions de la commission, sur une période de dix années, ont été nécessaires afin de réaliser le tracé définitif entre juillet 2001 et décembre 2011 17 ( * ) . Après avoir constaté que les arguments historiques étaient difficilement conciliables , la commission de délimitation a proposé dès 2002 une partition de la zone contestée.

S'agissant du déroulement des négociations , il a été indiqué à votre rapporteur que « il a alors fallu un certain temps aux deux gouvernements pour accepter le principe de cette partition. La Partie andorrane (peu motivée par cette négociation à partir du moment où la construction du viaduc n'était plus retardée par l'opposition de la française commune de Porta à la cession du terrain nécessaire à l'aménagement du rond-point le raccordant à la route nationale française) se heurtait à l'opposition constante de la paroisse d'Encamp à tout compromis qui ne lui laisserait pas la totalité de la zone contestée : le rythme des réunions a été soumis aux échéances électorales et à l'influence de cette paroisse dans la politique intérieure d'Andorre.

Du côté français, il avait aussi fallu rassurer les collectivités locales sur la possibilité d'aménager l'unité touristique nouvelle (UTN) « Porte des Neiges » (projetée en face du Pas de la Casa, sur une partie du territoire de Porta accessible depuis le chef-lieu uniquement en passant par Porte-Puymorens et le futur BCNJ) . » 18 ( * )

La première mouture de partage du principal secteur contesté 19 ( * ) , le Clot des Abelletes, en deux zones de surfaces égales a été présentée en mars 2006 par la Partie française .

La Partie andorrane a alors formulé une contre-proposition dans laquelle le partage en surfaces égales concernait l'ensemble des divergences entre les deux cartographies 20 ( * ) , avec un partage inégal du secteur du Clot des Abelletes.

A la suite d'une proposition de la Partie française visant à améliorer ce tracé 21 ( * ) , un projet de ligne a été convenu en septembre 2009 22 ( * ) , lors de la huitième réunion de la commission . Le cadastre français a mesuré sur le terrain les positions de points par lesquels pourrait passer la frontière

Toutefois, le gouvernement andorran d'alors a remis en cause le consensus obtenu pour le partage de la zone contestée, après élections de 2009 , à la demande de la paroisse d'Encamp.

Lors de la neuvième réunion du 7 juin 2010, la détermination en coordonnées des points formant le tracé de ce projet de limite a été confiée au Centre des Impôts Fonciers de Perpignan 23 ( * ) . Le dossier a été remis à la Partie française, le 3 septembre 2010.

Sur la base de ce tracé, la dixième réunion du 9 décembre 2011 , qui s'est tenue postérieurement aux élections de 2011, a validé ce tracé de la frontière, tout en y apportant les modifications permettant une répartition des surfaces par moitié entre les deux pays , en considérant les zones de litiges.

En janvier 2012 le texte de l'accord portant délimitation, avec les coordonnées de points de la frontière , a été mis au point par les cartographes des deux délégations, en appliquant les plans et calculs de surfaces adoptés le 9 décembre 2011.

Au total, la Partie française a obtenu :

- dans les Pyrénées-Orientales, de conserver , d'une part, une partie du Clot des Abelletes, avec la partie du sentier « permettant d'aller de Porta à Porta » construite dans les éboulis stabilisés ainsi que la possibilité de créer une variante qui passerait en territoire français au sud et à l'est du lac et, d'autre part, l'accès aux deux sommets du Pic Nègre d'Envalira , au sud.

- dans l'Ariège , de conserver les prés cadastrés en rive gauche du ruisseau de la Palomera et d'assurer que la frontière suive la ligne de partage des eaux sur tout le reste de son tracé.

La surface totale contestée de 52,86 hectares a été répartie en deux , à raison de 26,43 hectares pour chacune des Parties à l'Accord, de la manière retracée à la figure n° 7.

Figure n° 7 : Répartition des surfaces contestées à l'issue du présent accord

Zone du Clot de les Abelletes (66-Porta/ Envalira)

47,9 ha

France : 19,4 ha

Andorre : 28,5 ha

Zone de la Palomera (09-L'Hospitalet-près-l'Andorre/Canillo

4,96 ha

France : 3,47 ha

Andorre : 1,49 ha

Zone Pic de Ruf (09-Aston / Canillo)

3,56 ha

France : 3,56 ha

Andorre : 0

Source : Ministère des affaires étrangères et du développement international.

Enfin votre rapporteur tient à souligner qu'à ses interrogations sur un éventuel impact du tracé de la frontière sur les populations, il y a été répondu négativement.


* 13 La frontière n'était, en effet, fixée que par la coutume. Elle n'avait fait l'objet d'aucun accord international ; les textes fondateurs du XIIIe siècle n'étaient pas assez précis ; l'Arrêt de l'intendant de Foix et Perpignan au XVIIe siècle avait réglé la seule question de la Soulane (rive gauche de l'Ariège) sans en préciser les limites.

* 14 Cette zone constitue un chevauchement de plus de 46 hectares contenant l'étang du même nom, constituant la réserve en eau du Pas de la Case, mais aussi celle d'un projet, désormais abandonné, de la station de Porte des Neiges. Il s'agissait de la liaison française entre les stations du Pas de la Case et de Porte-Puymaurens.

* 15 Elle couvrait une section non contestée où la frontière suivait le cours de l'Ariège.

* 16 Cf. Loi n° 2001-590 du 6 juillet 2001 autorisant la ratification du traité entre la République française et la Principauté d'Andorre portant rectification de la frontière.

* 17 Les réunions se sont tenues le 5 juillet 2001, 28 septembre 2001, 30 janvier 2002, 1 er mars 2006, 23 juin 2006, 20 octobre 2006, 4 novembre 2008, 12 février 2009, 7 juin 2010 et 9 décembre 2011.

* 18 In réponses au questionnaire de votre rapporteur.

* 19 Cette zone représente une surface de 46 hectares.

* 20 Cette proposition concernait 57 hectares, soit sensiblement 1/1000e du territoire andorran et seulement 1/100 000e du territoire français.

* 21 Il a été indiqué à votre rapporteur que cette amélioration du tracé a été proposée « sans approuver formellement que la correction des erreurs cartographiques soit mise sur le même plan que la transaction dans le secteur contesté . » Source : ministère des affaires étrangères et du développement international.

* 22 Lors de la huitième réunion de la commission, le 12 février 2009, un accord sur le tracé de la frontière partageant par moitié l'Etang du clos des Abelletes et laissant le chemin des Izards en territoire français, a été trouvé, sous réserve de la matérialisation de ce trajet. Cette dernière a été réalisée en septembre 2009.

* 23 Le Centre des Impôts Fonciers est l'organisme en charge du cadastre.

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