Section 3 - Le dialogue social au sein de l'entreprise

Article 87 A (art. L. 2312-1, L. 2312-2, L. 2312-3, L. 2312-4, L. 2312-5, L. 2322-2 et L. 2391-1 [nouveau] du code du travail) - Passage de onze à vingt-et-un salariés du seuil de mise en place des délégués du personnel et exonération des effets de seuil pendant trois ans pour les entreprises en croissance

Objet : cet article, supprimé par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, propose de faire passer de onze à vingt-et-un salariés le seuil de mise en place des délégués du personnel et d'exonérer des effets de seuil pendant trois ans les entreprises en croissance.

En nouvelle lecture, la commission spéciale de l'Assemblée nationale a adopté un amendement de suppression de ses rapporteurs et de membres du groupe SRC de cet article introduit par le Sénat qui vise à alléger les obligations des petites et moyennes entreprises (PME) en matière d'institutions représentatives du personnel (IRP).

Le débat sur les effets de seuil relève désormais du projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi. C'est pourquoi votre rapporteur n'a pas proposé le rétablissement de cet article.

Sur proposition de son rapporteur, Catherine Procaccia, la commission des affaires sociales a d'ailleurs introduit dans ce texte un mécanisme expérimental de lissage dans le temps des effets de seuil similaire à celui qui figurait à cet article.

Votre commission spéciale a maintenu la suppression de cet article.

Article 87 B (art. L. 2143-3, L. 2143-6, L. 2313-7, L. 2313-7-1, L. 2313-8, L. 2313-13, L. 2313-16, L. 2322-1, L. 2322-2, L. 2322-3, L. 2322-4, L. 4611-1, L. 4611-2, L. 4611-3, L. 4611-4, L. 4611-5 et L. 4611-6 du code du travail) - Passage de cinquante à cent salariés du seuil de mise en place des délégués syndicaux, du comité d'entreprise et du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail

Objet : cet article, supprimé par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, propose de faire passer de cinquante à cent salariés le seuil de mise en place des délégués syndicaux, du comité d'entreprise et du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail.

Cet article, introduit au Sénat en séance publique, prévoit que le seuil à partir duquel des délégués syndicaux pourront être désignés et un CE et un CHSCT mis en place sera de cent salariés et non plus de cinquante comme c'est le cas dans la législation actuelle.

Il dispose que dans les entreprises de cinquante salariés et plus et dans les entreprises dépourvues de comité d'entreprise par suite d'une carence constatée aux élections, ce seront les délégués du personnel qui exerceront les attributions économiques normalement dévolues au comité d'entreprise.

En nouvelle lecture, la commission spéciale de l'Assemblée nationale a adopté un amendement de suppression de cet article introduit par le Sénat, en considérant que l'effet de seuil dénoncé par les sénateurs était très modéré.

Le débat sur les effets de seuil relève désormais du projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi. C'est pourquoi votre rapporteur n'a pas proposé le rétablissement de cet article.

Votre commission spéciale a maintenu la suppression de cet article.

Article 87 C - Fusion du comité d'entreprise et du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail
au sein d'une instance unique de représentation

Objet : cet article, supprimé par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, propose de fusionner le comité d'entreprise et le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail.

Dans l'état actuel du droit, toute entreprise de plus de cinquante salariés doit mettre en place un comité d'entreprise (CE) et un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT).

L'existence dans les entreprise de plus de cinquante salariés de deux instances distinctes, parfois amenées à discuter de sujets connexes, est génératrice de surcoûts pour les entreprises et renforce les effets négatifs pour la croissance des entreprises du seuil de cinquante salariés.

C'est pourquoi le présent article propose que le comité d'entreprise et le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail fusionnent au sein d'une instance unique de représentation qui reprendrait l'ensemble de leurs attributions.

En nouvelle lecture, la commission spéciale de l'Assemblée nationale a adopté un amendement de suppression, en considérant le débat sur la fusion du comité d'entreprise et du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail relevait du projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi et non du présent projet de loi.

Votre rapporteur n'a pas proposé le rétablissement de cet article.

Votre commission spéciale a maintenu la suppression de cet article.

Article 87 D (art. L. 1235-3, L. 1235-3-1 [nouveau], L. 1235-3-2 [nouveau], L. 1235-4, L. 1235-5 et L. 1235-14 du code du travail) - Encadrement du montant de l'indemnité prononcée par le conseil de prud'hommes en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse

Objet : cet article vise à encadrer, en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, le montant des indemnités prononcées par les conseils de prud'hommes. Il vise également, suite à l'adoption en nouvelle lecture par l'Assemblée nationale d'un amendement du Gouvernement, à supprimer les dérogations dont bénéficient les entreprises employant moins de onze salariés pour diverses indemnités accordées par le juge lorsque le licenciement ne respecte pas des règles de forme et de fond.

I - Le texte adopté par le Sénat en première lecture

Cet article, introduit par le Sénat au stade de l'examen en séance publique, visait, dans sa rédaction initiale, à limiter à douze mois de salaire le montant des indemnités pouvant être mises à la charge de l'employeur par le conseil de prud'hommes en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

II - Le texte adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture

En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a, sur l'initiative du Gouvernement, fait sienne la volonté exprimée par le Sénat d'encadrer le montant des indemnités de licenciement tout en adoptant une nouvelle rédaction du présent article.

1° Encadrement du montant des indemnités de licenciement

Dans sa rédaction issue d'un amendement du Gouvernement sous-amendé par les rapporteurs de l'Assemblée nationale, l'article L. 1235-3 du code du travail fixe un montant minimal et un montant maximal pour les indemnités de licenciement exprimés en mois de salaire, en fonction de la taille de l'entreprise et de l'ancienneté du salarié.

Les paramètres de cet encadrement sont détaillés dans le tableau ci-dessous (en italique, le cas échéant, les paramètres initialement proposés par le Gouvernement).

Encadrement des indemnités prud'homales
en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse

Effectifs de l'entreprise

Moins de 20 salariés

20 salariés et plus

Entre 20 et 299 salariés

À partir de 300 salariés

Ancienneté du salarié

Moins de 2 ans

Maximum :
1/12 e de mois par mois d'ancienneté

Maximum : 3 mois

Maximum :
1/6 e de mois par mois d'ancienneté

Maximum : 4 mois

Maximum : 4 mois

Entre 2 ans et moins de 15 ans

Entre 2 ans et moins de 10 ans

Minimum : 2 mois

Maximum : 6 mois

Minimum : 4 mois

Maximum : 10 mois

Minimum : 6 mois

Maximum : 12 mois

15 ans et plus

10 ans et plus

Minimum : 2 mois

Maximum : 12 mois

Minimum : 4 mois

Maximum : 20 mois

Minimum : 6 mois

Maximum : 27 mois

Source : commission spéciale du Sénat

L'indemnité est due sans préjudice, le cas échéant, des indemnités de licenciement légales, conventionnelles ou contractuelles.

Le nouvel article L. 1235-3-1 précise que l'indemnité s'applique également lorsque la rupture est prononcée par le juge judiciaire ou qu'elle est décidée par le juge prud'homal saisi, en application de l'article L. 1451-1 du code du travail, par un salarié demandant la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur.

Le nouvel article L. 1235-3-2 précise également que cet encadrement est sans préjudice de la faculté pour le juge de fixer un montant supérieur en cas de faute de l'employeur d'une particulière gravité telle que :

- harcèlement moral ou sexuel ;

- licenciement discriminatoire ou consécutif à une action en justice en matière d'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes ou en matière de corruption ;

- violation de l'exercice du droit de grève ou de l'exercice d'un mandat par un salarié protégé ou violation de la protection dont bénéficient certains salariés 30 ( * ) ;

- atteinte à une liberté fondamentale du salarié.

Le juge peut également fixer une indemnité d'un montant supérieur en cas de nullité du licenciement économique pour vice de procédure, de non-respect, dans le cadre d'un licenciement économique, des procédures de consultation et d'information des institutions représentatives du personnel, de non-respect de la priorité de réembauche des salariés licenciés pour motif économique ou d'absence de validation ou d'homologation d'un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE).

2° Modification des dispositions applicables au licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté et au licenciement effectué dans une petite entreprise

Plusieurs dispositions du code du travail prévoient l'octroi d'indemnités spécifiques de licenciement, dont le montant minimum est fixé par la loi, dans certains cas précis. Il s'agit, notamment, des dispositions des articles L. 1235-2 relatives aux irrégularités de procédures, L. 1235-11 relatives à la sanction de la nullité du licenciement, L. 1235-12 relatives au non-respect de la procédure de consultation des représentants du personnel et d'information de l'autorité administrative et L. 1235-13 relatives au non-respect de la priorité de réembauche pour les salariés licenciés pour motif économique.

Par ailleurs, l'article L. 1235-4 prévoit le remboursement par l'employeur des indemnités de chômage indûment versées par l'employeur dans les cas visés par l'article L. 1235-3 (licenciement sans cause réelle et sérieuse) et L. 1235-11 (nullité de la procédure).

Les articles L. 1235-5 et L. 1235-14 précisent respectivement que les dispositions des articles L. 1235-2, L. 1235-3 et L. 1235-4 d'une part et L. 1235-11, L. 1235-12 et L. 1235-13 d'autre part ne sont pas applicables au licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté et au licenciement effectué dans une entreprise de moins de onze salariés.

Aux termes du présent article dans sa version adoptée en nouvelle lecture par l'Assemblée nationale, l'article L. 1235-5 est abrogé, ce qui a pour effet de supprimer les dérogations aux dispositions des articles visés, sauf pour l'article L. 1235-4 qui est modifié afin de maintenir cette dérogation pour les petites entreprises. L'article L. 1235-14 est également modifié, seule l'exception relative au non-respect de la priorité de réembauche étant conservée. Pour les deux dérogations maintenues, le seuil passe de onze à vingt salariés .

Le tableau ci-après résume les modifications apportées par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture.

Modifications apportées en nouvelle lecture par l'Assemblée nationale aux dispositions des articles L. 1235-5 et L. 1235-14 du code du travail

Article L. 1235-5

Article L. 1235-14
(licenciement pour motif économique)

Articles dont les dispositions ne s'appliquent actuellement pas (salariés de moins de deux ans d'ancienneté et entreprises de moins de 11 salariés)

L. 1235-2 (indemnité en cas d'irrégularités de procédure 31 ( * ) )








(maximum : 1 mois de salaire)

L. 1235-3 (indemnité en cas d'absence de cause réelle et sérieuse)








(minimum 6 mois de salaire)

L. 1235-4 (remboursement à Pôle emploi des indemnités chômage indûment versées)







(maximum : six mois d'indemnités de chômage)

L. 1235-11 (indemnité en cas de nullité du licenciement)









(minimum : 12 mois de salaire)

L. 1235-12 (indemnité en cas de non-respect de la procédure de consultation des représentants du personnel)



(en fonction du préjudice subi)

L. 1235-13 (indemnité en cas de non-respect de la priorité de réembauche)







(minimum : 2 mois de salaire)

Texte adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture

Dérogation supprimée

Dérogation supprimée mais encadrement du montant des indemnités à l'article L. 1235-3

Dérogation maintenue (à l'article L. 1235-4) uniquement pour les entreprises de moins de 20 salariés quelle que soit l'ancienneté du salarié licencié

Dérogation supprimée

Dérogation supprimée

Dérogation maintenue, le seuil passant à 20 salariés

Source : Commission spéciale du Sénat

3° Entrée en vigueur

Le présent article entre en vigueur le lendemain de la publication de la loi mais ne s'applique pas aux contentieux introduits avant cette date. Ces dispositions s'appliquent également en appel et en cassation.

Des amendements rédactionnels ont en outre été intégrés au texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l'article 49, alinéa 3 de la Constitution.

III - La position de votre commission

Votre rapporteur ne peut que se féliciter que le Gouvernement ait repris à son compte la volonté exprimée par le Sénat d'encadrer les indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Cette mesure est en effet de nature à réduire l'incertitude suscitée pour les employeurs par les procédures devant les conseils de prud'hommes et donc à favoriser les embauches.

La possibilité maintenue pour le juge d'imposer des indemnités plus importantes en cas de faute de l'employeur d'une particulière gravité apparaît comme une garantie forte pour les salariés, respectueuse de l'office du juge.

L'encadrement esquissé par le Sénat et précisé par l'amendement gouvernemental adopté par l'Assemblée nationale ne concerne que les indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse prévues par l'article L. 1235-3 du code du travail. Or, les articles L. 1235-4, L. 1235-5 et L. 1235-14 visent d'autres cas de licenciement. Votre rapporteur s'est interrogé sur leur recevabilité en nouvelle lecture au regard de la règle dite de l'entonnoir. L'Assemblée nationale n'ayant pas jugé ces dispositions irrecevables, votre rapporteur vous propose de considérer qu'il reviendra au Conseil constitutionnel, s'il est saisi, de se prononcer sur ce point.

Néanmoins, ces dispositions abrogent des dérogations favorables aux entreprises et notamment aux petites entreprises. Elles pourraient avoir pour effet de renchérir le licenciement de salariés de moins de deux ans d'ancienneté ou le licenciement effectué dans une petite entreprise. Leur adoption contredit donc l'esprit dans lequel a été introduit l'article 87 D. C'est pourquoi, sur proposition de votre rapporteur, votre commission a supprimé par amendement ( COM-65 ) ces dispositions tout en maintenant l'abrogation du 2° de l'article L. 1235-5 du code du travail, cette disposition étant inutile compte tenu de la nouvelle rédaction de l'article L. 1235-3.

Votre commission spéciale a adopté cet article ainsi modifié.

Article 87 (art. L. 2314-11, L. 2314-20, L. 2314-31, L. 2324-13, L. 2324-18 et L. 2327-7 du code du travail) - Transfert au juge judiciaire du contentieux en matière de préparation des élections professionnelles

Objet : cet article transfère le contentieux des décisions administratives en matière de préparation des élections professionnelles au juge judiciaire.

I - Le texte adopté par le Sénat en première lecture

Estimant que la légitimité du juge judiciaire pour traiter de l'ensemble des questions portant sur les élections professionnelles était incontestable et que cet article 87 permettrait une simplification salutaire en mettant fin à une dichotomie peu compréhensible pour les salariés comme pour les employeurs, votre commission spéciale avait adopté cet article sans modification lors de l'examen du texte en première lecture.

En séance publique, en revanche, le Sénat a supprimé cet article à l'initiative de sénateurs des groupes CRC, UMP et RDSE avec un avis de sagesse de la commission et un avis favorable du Gouvernement.

Le Sénat a en effet considéré que le recours systématique au juge pour prendre des décisions relevant de l'organisation des élections serait de nature à rendre plus difficile l'exercice de leurs droits par les salariés, dans la mesure où ceux-ci seraient plus réticents à saisir le juge judiciaire qu'à s'adresser à l'autorité administrative.

II - Le texte adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture

En nouvelle lecture, la commission spéciale de l'Assemblée nationale a adopté un amendement de ses rapporteurs rétablissant cet article mais dans une rédaction différente de celle qu'elle avait adoptée en première lecture.

En effet, dans sa nouvelle rédaction, l'article 87 ne prévoit plus que le juge judiciaire aura lui-même la charge de prendre des décisions en matière préélectorale en l'absence d'accord entre l'employeur et les organisations syndicales. Ces décisions continueront de relever de l'autorité administrative, c'est-à-dire soit du directeur régional de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte), soit de l'inspecteur du travail.

En revanche, le recours contre les décisions de l'autorité administrative ne relèvera plus du juge administratif mais du juge judiciaire, assurant ainsi l'unité du contentieux des élections professionnelles, jusqu'ici éclaté entre les deux ordres de juridiction.

III - La position de votre commission

La répartition du contentieux des élections professionnelles entre juge judiciaire et juge administratif n'est pas satisfaisante. Cette dichotomie est source de complexité et d'insécurité juridique pour les salariés comme pour les employeurs.

La solution proposée par l'Assemblée nationale, et qui revient à maintenir intégralement la compétence de l'autorité administrative pour l'organisation des élections professionnelles, en l'absence d'accord préélectoral, tout en confiant le contentieux relatif à ces décisions au juge judiciaire en lieu et place du juge administratif, paraît de nature à opérer une simplification salutaire tout en évitant les risques mis en avant par certains de nos collègues.

Votre commission spéciale a adopté cet article sans modification.


* 30 Les dispositions visées sont celles des articles L. 1225-71 et L. 1226-13 applicables en cas de naissance d'un enfant et L. 1226-15 applicables en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle.

* 31 Sauf en cas de méconnaissance des dispositions relatives à l'assistance du salarié par un conseiller.

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