III. LE PROGRAMME 151 « FRANÇAIS À L'ÉTRANGER ET AFFAIRES CONSULAIRES »

Ce programme, placé sous la responsabilité du directeur des Français de l'étranger et de l'administration consulaire, a pour objet de fournir aux Français établis ou de passage hors de France des services essentiels et de participer à la définition et à la mise en oeuvre de la politique en matière d'entrée des étrangers en France.

1. Le programme en quelques chiffres

Les crédits demandés pour 2016 au titre de ce programme s'élèvent à 369,9 millions d'euros en AE comme en CP . Ils se répartissent en trois actions de la façon suivante.

Répartition par action des crédits demandés (AE=CP)

Action

Exécution 2014 (CP)

LFI 2015

PLF 2016

Évolution 2015-2016

Offre d'un service public de qualité aux Français à l'étranger

199,3

200,7

204,9

+2,1 %

Accès des élèves français au réseau AEFE

106,5

125,5

115,5

-8,0 %

Instruction des demandes de visa

49,5

48,1

49,7

+3,3 %

Total

376,0

374,3

369,9

-1,2 %

Source : projet de loi de finances pour 2016, annexe « Action extérieure de l'État »

Ces crédits diminuent de 1,2 % à périmètre constant . Cette baisse est intégralement supportée par l'action 2 « Accès des élèves français au réseau AEFE », c'est-à-dire les bourses scolaires aux élèves français, dont la dotation baisse de 8 % .

2. La baisse regrettable des bourses scolaires

La suppression de prise en charge de la scolarité des élèves français à l'étranger (PEC), à compter de 2013, s'était accompagnée d'une réforme du dispositif d'aide à la scolarité , dont les critères d'attribution ont été profondément revus. Dans ce cadre, le Gouvernement avait promis que le montant des bourses serait équivalent au montant cumulé des bourses et de la PEC en 2012, soit 125,5 millions d'euros .

Cette promesse, respectée en loi de finances initiale, ne l'est pas en exécution budgétaire sur 2015 . En effet, en cumulant la réserve de précaution (10 millions d'euros), le surgel et les annulations de crédits (26 millions d'euros), le montant effectivement versé à l'AEFE pour les bourses sur cette action s'établit à 89,5 millions d'euros .

Le montant de 26 millions d'euros annulés en sus de la réserve initiale de précaution « [correspondent] à une avance de trésorerie à l'AEFE non utilisée au cours de l'année comptable de référence », d'après les réponses au questionnaire budgétaire de vos rapporteurs spéciaux. D'après les éléments d'information recueillis par vos rapporteurs spéciaux, l'AEFE présentait en effet une « trésorerie » positive de 42 millions d'euros sur le montant des bourses ; cette trésorerie sera écrêtée en deux fois par annulation de l'enveloppe des bourses : 26 millions d'euros en 2015, et 16 millions d'euros en 2016.

Ainsi, cette annulation de 26 millions d'euros est sans impact sur le montant des bourses distribuées par l'AEFE. Le montant de bourses effectivement disponible s'établit donc à 115,5 millions d'euros. D'après la directrice de l'AEFE, entendue par vos rapporteurs spéciaux, le montant effectivement distribué serait proche de 102 millions d'euros, soit environ 23 millions d'euros de moins que le montant promis dans le cadre de la réforme des aides à la scolarité .

Prévision et exécution des bourses scolaires du programme 151 depuis 2013

(en millions d'euros)

2013

2014

2015

2016 (prévisionnel)

LFI

110,3

118,8

125,5

115,5

% de la réserve de précaution

6,15 %

7 %

8 %

8 %

Montant de la réserve

6,8

8,3

10,0

9,2

Disponible après mise en réserve

103,5

110,5

115,5

106,2

Surgel

4,0

3,0

Annulations

23,0

16*

Montant disponible et versé à l'AEFE

103,5

106,5

89,5

106,2

*Montant d'annulation estimé pour compléter le prélèvement sur la trésorerie de l'AEFE au titre des bourses opéré en 2015.

Source : MAEDI, réponses au questionnaire budgétaire

Le MAEDI indique, dans les réponses au questionnaire budgétaire, que « tous les besoins légitimes [ont] été satisfaits » ; cependant, vos rapporteurs spéciaux soulignent que l'appréciation de la légitimité des besoins, en la matière, relève avant tout d'un arbitrage politique qu'il est anormal de réaliser en cours de gestion , par des annulations de crédits qui réduisent de près de 20 % l'enveloppe votée par le Parlement.

Le projet de loi de finances pour 2016 prévoit, sur cette même action, un montant en baisse significative par rapport au montant de la loi de finances initiale pour 2015, soit 115,5 millions d'euros (- 10 millions d'euros) . En tenant compte de la réserve de précaution de 8 % qui s'appliquera à ce dispositif, l'enveloppe disponible s'établira à 106,2 millions d'euros .

Le MAEDI indique, dans les réponses au questionnaire budgétaire, que cette enveloppe permettrait de « rapprocher l'enveloppe allouée des besoins réels » . Là encore, vos rapporteurs spéciaux soulignent le caractère subjectif des besoins en question, qui dépendent avant tout du barème d'attribution des bourses, qui a été complètement refondu en 2012.

Une réforme du système d'aide à la scolarité des élèves français était en effet nécessaire, car le système, inflationniste, n'était pas soutenable . De façon générale, le nouveau système présente l'avantage d'offrir un nombre de bourses plus important, avec un taux de refus relativement faible (de l'ordre de 10 %) ; ainsi, environ 20 % des 150 000 élèves français inscrits dans un établissement à l'étranger bénéficient d'une aide à la scolarité. La quotité prise en charge, en revanche, a baissé : le nombre d'élèves dont les frais sont financés à taux plein par les bourses est ainsi passé de 59 % en 2013 à 42 % dans la campagne 2014-2015.

Les phénomènes dits de « déscolarisation » , où des élèves seraient désinscrits des établissements en raison du coût de la scolarité, sont suivis par l'AEFE et restent relativement marginaux . En revanche, d'après les informations recueillis par vos rapporteurs spéciaux parmi nos compatriotes expatriés, il existe un certain nombre de situations où les familles ne s'orientent pas, dès le début de la scolarisation à l'étranger, vers le système d'enseignement français . C'est notamment le cas des familles nombreuses, pour lesquelles la scolarisation de plusieurs enfants dans le système d'enseignement français, même partiellement aidée par les bourses, engendre des frais qu'il est difficile de supporter.

En conséquence, vos rapporteurs spéciaux estiment que le niveau actuellement atteint, légèrement supérieur à 100 millions d'euros, constitue un montant plancher qu'il serait difficile de réduire encore sans remettre en cause les principes de solidarité et d'accès universel des Français à l'enseignement français à l'étranger qui font partie de l'identité de ce précieux réseau .

Au regard de l'augmentation du nombre de Français à l'étranger et du nombre d'élèves dans le réseau, vos rapporteurs spéciaux considèrent même que le niveau actuel de la consommation de l'enveloppe boursière témoigne d'une réforme qui est, sans doute, allée trop loin dans le resserrement de certaines conditions d'obtention et la baisse des quotités prises en charge . Son niveau optimal devrait se situer entre 115 et 125 millions d'euros , comme cela était le cas les années précédentes. Un effort devrait être fait pour rétablir ce niveau en deux ou trois ans, dans le cadre d'une analyse détaillée de l'impact de la réforme sur le niveau des aides à la scolarité en fonction du profil des familles concernées.

En conséquence, vos rapporteurs spéciaux vous proposent d'adopter un amendement de crédits, déjà mentionné, visant à transférer cinq millions d'euros du programme 185 (sur la subvention à Atout France) vers le présent programme 151.

3. L'augmentation des dépenses de fonctionnement de l'administration des français de l'étranger dans un contexte de modernisation et d'année pré-électorale

Contrairement à l'année 2015 qui se caractérise par l'absence d'événements électoraux et, partant, par une réduction des dépenses de 6 millions d'euros par rapport à 2014, l'année 2016 voit les crédits de l'administration des français de l'étranger augmenter, passant de 200,7 millions d'euros à 204,9 millions d'euros . Cette hausse est concentrée sur deux principaux postes :

- la modernisation des postes , avec des dépenses en hausse en faveur de la télé-administration et de l'accueil (+ 1 million d'euros) ;

- les frais de tournées consulaires (+ 0,5 million d'euros), ainsi que les dépenses liées aux élections (+ 2 millions d'euros), en raison, notamment de la préparation en 2016 des élections présidentielles et législatives de 2017.

Les dépenses d'intervention de nature sociale sont globalement stables, à un niveau d'environ 18 millions d'euros.

4. Un réseau consulaire en lente mutation

A l'instar du réseau diplomatique, le réseau consulaire voit sa cartographie évoluer . D'une part, le passage de certains postes diplomatiques en « poste de présence diplomatique » entraîne la fermeture du poste consulaire, dont les compétences sont alors exercées par un autre poste diplomatique dit « de rattachement ». En outre, au sein de pays où plusieurs consulats sont implantés, des postes consulaires évoluent en « poste à gestion simplifiée », à l'image du poste de Naples, dont les tâches liées à l'état civil seront désormais effectuées par le poste de Rome.

Tout comme le réseau, les missions des consulats et les conditions dans lesquelles elles sont réalisées doivent continuer d'évoluer.

Comme l'a souligné le rapport de la Cour des comptes de 2013 sur l'évolution des missions et de l'organisation des consulats français à l'étranger 2 ( * ) , les consulats français réalisent plus de prestations que leurs homologues européens, et souvent à un tarif moins élevé . Il en va ainsi des prestations notariales (testaments, donations, etc.) qui sont effectuées gratuitement par les consulats pour les Français de l'étranger, alors qu'ils seraient payants en France devant un notaire. Un relèvement des droits de chancellerie , actuellement en projet, semble opportun pour, a minima , rétablir l'égalité de traitement entre le coût d'une même prestation notariale en France et à l'étranger.

Par ailleurs, la productivité des consulats devrait également être améliorée, à terme, par la possibilité, qui sera généralisée au 7 janvier 2016, de s'inscrire en ligne sur le registre consulaire.

5. Le renforcement des moyens de l'activité de « visas », outil de la politique d'attractivité de la France

En parallèle de la lente mutation des activités traditionnelles des consulats de services aux Français de l'étranger se renforce l'activité d'instruction des demandes de visa pour les nationalités soumises à l'obligation de visa .

Dans le cadre de leur mission de contrôle budgétaire, vos rapporteurs spéciaux constatent que cette activité est à la fois rentable du point de vue des finances publiques, au regard de la recette qu'elle génère, qui s'établit à 160 millions d'euros en 2014, et stratégique pour l'attractivité touristique de la France , dont le ministre des affaires étrangères et du développement international Laurent Fabius a fait une priorité.

Dans ce contexte, les consulats ont bénéficié, en 2015, d'une augmentation du plafond d'emplois de 25 ETP, auxquels se sont ajoutés 43 ETP hors plafond (vacations) , qui devraient être financés par un dégel de la réserve de précaution du titre 2 du présent programme.

S'agissant de 2016, le plafond d'emplois du programme augmente de 10 ETP , qui seront intégralement affectés à cette activité de délivrance des visas. En outre, le système d'attribution de produits mentionné précédemment devrait également permettre de financer des vacations hors plafond d'emplois.


* 2 Rapport sur l'évolution des missions et de l'organisation des consulats français à l'étranger, à la demande de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire de l'Assemblée nationale, en application de l'article 58-2° de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, 29 octobre 2013.

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