III. UNE NOUVELLE OCCASION MANQUÉE

Votre rapporteur salue l'impulsion donnée par Arnaud Leroy pour faire avancer des mesures attendues dans un monde maritime constamment négligé par le Gouvernement . Il fallait certes commencer par là. Mais votre rapporteur anticipe d'ores et déjà l' essoufflement de cette dynamique , qui ne suffira pas à redorer le blason de la France maritime, faute d'une véritable vision politique en faveur de la croissance bleue. On se contente trop souvent de poser la première pierre en repoussant au lendemain les choix difficiles : le présent texte n'échappe pas à cette règle.

A. UN MANQUE DE CONSIDÉRATION POUR LE TRAVAIL DU SÉNAT

Entre son dépôt, le 8 juillet 2015 sur le bureau de l'Assemblée nationale, et son examen en séance publique par les députés, les 2 et 3 février derniers, cette proposition de loi est passée de 23 articles et 231 alinéas à 77 articles 2 ( * ) et 515 alinéas, soit plus qu'un triplement de volume en nombre d'articles et un doublement en nombre d'alinéas par rapport à la version initiale.

ÉVOLUTION DU NOMBRE D'ARTICLES ENTRE LA VERSION INITIALE, LE TEXTE DE COMMISSION ET LE TEXTE ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

ÉVOLUTION DU NOMBRE D'ALINÉAS ENTRE LA VERSION INITIALE, LE TEXTE DE COMMISSION ET LE TEXTE ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Votre commission a, elle, dû examiner ce texte dans des conditions déplorables, puisque le Gouvernement a décidé d'engager la procédure accélérée le 12 janvier 2016 et que la majorité présidentielle a fait le choix de l'inscrire au plus vite à l'ordre du jour. Votre rapporteur déplore ce manque de considération pour le Sénat, qui dispose de trois semaines effectives pour mener ses travaux, là où les députés ont eu huit mois.

C'est d'ailleurs la troisième fois, sur un total de trois textes à dimension maritime, que le Gouvernement procède de la sorte . Le projet de loi sur la piraterie maritime avait été transmis au Sénat le 20 avril 2014 après quatre mois de travail des députés, puis examiné en urgence par votre commission le 13 mai 2014 et en séance publique le 15 mai 2015. Le projet de loi, déguisé en proposition de loi, sur les dockers avait connu un sort similaire, que votre rapporteur Michel Vaspart avait alors dénoncé.

À chaque fois, bien sûr, l'urgence à agir est invoquée . Cela est d'autant plus troublant ici, que ce texte contient des mesures qui sont demandées par le monde maritime depuis parfois près d'une décennie .

À cela s'ajoute le fait que cette proposition de loi a tellement été remaniée par l'administration , qu'elle en est presque devenue, une fois de plus, un projet de loi. Les nombreux articles additionnels, écrits dans les bureaux de la direction des affaires maritimes au ministère des Transports, de la direction des douanes au ministère des Finances ou des directions des libertés publiques et des affaires juridiques, de la police judiciaire ou de la police aux frontières au ministère de l'Intérieur, en témoignent. Pour autant, ces dispositions ne font l'objet d'aucune étude d'impact , puisqu'elles ne figurent pas dans un projet de loi clairement assumé par le Gouvernement. Certaines mesures n'ont de surcroît qu'un lien très indirect avec l'économie maritime, en concernant par exemple les migrants de Calais ou la lutte anti-terroriste .


* 2 La proposition de loi comporte formellement 82 articles, mais il convient de retrancher les suppressions d'articles liées à des déplacements pour assurer la cohérence du texte, qui comporte réellement 77 articles.

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