SECONDE PARTIE - LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. LA JUSTICE JUDICIAIRE

Par rapport à 2016, les crédits du programme « Justice judiciaire » augmentent de près de 120 millions d'euros, dont 80 millions d'euros correspondent à des dépenses de personnel.

Détail de l'évolution (2016-2017) des crédits par « brique » de budgétisation

(en millions d'euros)

LFI 2016

PLF 2017

Variation (CP) 2016-2017

AE

CP

AE

CP

DEPENSES DE PERSONNEL (TITRE 2)

2 229

2 229

2 309

2 309

80

3,59%

AUTRES DEPENSES (HORS TITRE 2)

1 019

981

1 126

1 020

39

3,98%

Frais de justice

509

509

475

475

-34

-6,68%

Fonctionnement courant - hors immobilier

142

142

157

157

15

10,56%

Intervention

3

3

2

2

-1

-33,33%

ENM

32

32

33

33

1

3,13%

Immobilier - Occupant

212

176

215

198

22

12,50%

Immobilier - Propriétaire

120

119

244

155

36

30,25%

Total

3 248

3 210

3 435

3 329

119

3,71%

Source : commission des finances du Sénat à partir des réponses du ministère de la justice au questionnaire

A. LE DÉFI DU RECRUTEMENT ET DE LA GESTION PRÉVISIONNELLE DES EFFECTIFS

Sur 80 millions d'euros d'augmentation des dépenses de personnel, 35,5 millions d'euros correspondent à l'impact du schéma d'emplois et 16 millions d'euros sont destinés à financer des mesures statutaires et indemnitaires.

Évolution (2010-2017) de l'écart au plafond d'emplois
(programme 166 « Justice judiciaire »)

(en ETPT)

Source : commission des finances du Sénat à partir des réponses au questionnaire

Interrogé sur l'écart grandissant entre l'exécution et le plafond d'emplois, le ministère de la justice a indiqué que « cette sous-consommation est liée à différents facteurs :

« - les moindres recrutements qu'attendus (par exemple, recrutement des magistrats latéraux en 2012) ;

« - le report en fin d'année de recrutements prévus en cours d'année ;

« - la sous-évaluation des départs en retraite ».

La gestion prévisionnelle des effectifs et des compétences devient un véritable défi pour la direction des services judiciaires, en raison d'un nombre important des départs en retraite dans les cinq prochaines années, qu'il s'agisse des magistrats ou surtout des fonctionnaires .

S'agissant des fonctionnaires, le nombre maximum de départ en retraite devrait être atteint en 2020. Selon la direction des services judiciaires, « après les importants recrutements dans le corps des greffiers ces dernières années, le renouvellement des effectifs se poursuivra à un rythme élevé puisque ce sont 32,5 % des effectifs actuels de fonctionnaires qui devraient partir en retraite dans les dix prochaines années ».

Évolution du nombre de départs en retraite (magistrats et fonctionnaires)

(en nombre)

(fonctionnaires) (magistrats)

Source : commission des finances du Sénat à partir des réponses au questionnaire

La localisation des fonctionnaires :
un problème d'attractivité de l'Île-de-France

« Les cours d'appel les plus confrontées à des difficultés liées à leur défaut d'attractivité pour les fonctionnaires, toutes catégories confondues, sont les cours d'appel de Paris et de Versailles . Les juridictions de ces cours d'appel connaissent les plus forts taux de départs d'agents en mutation.

« Faute de candidats suffisants par voie de mutation entrantes vers ces juridictions, les vacances de postes entraînées par ces départs importants sont généralement comblées par des sorties d'école de directeurs des services de greffe et de greffiers ainsi que des recrutements de secrétaires administratifs et d'agents de catégorie C. Ces fonctionnaires, issus de recrutements nationaux, obtiennent par la suite leur mutation après environ deux années de présence au sein de ces juridictions de l'Île-de-France, expliquant ainsi les forts taux de départs constatés et entretenant un phénomène de rotation rapide des personnels.

« Un des freins à la « fidélisation » des agents tient, dans certaines juridictions, entre autres, à la difficulté rencontrée par les agents pour trouver un logement proche de leur nouvelle affectation. Ce constat, qui touche en priorité la région parisienne, se vérifie également dans l'ensemble des grandes métropoles.

« Afin de limiter les conséquences de cette situation, le ministère de la justice, sous la coordination du secrétariat général et son bureau d'action sociale (BASCT), mène depuis 2004 une politique active en faveur du logement social en priorité dans les villes où le marché de l'immobilier est le plus tendu.

« En quelques années, le ministère s'est doté de son propre parc de logements sociaux au profit de ses agents. Cette politique volontariste se concrétise notamment par la mise à disposition des personnels de logements construits par des bailleurs sociaux sur des terrains appartenant au ministère et de logements réservés en contrepartie d'un financement (1 922 logements).

« Afin de poursuivre cette politique, le ministère a prévu en 2016 un budget de 2 900 000 €.

« Ce budget doit aussi permettre de procéder, dans les régions enregistrant de fortes arrivées en primo-affectation, à des réservations de logements meublés, type studios ou F1, qui sont particulièrement adaptés à la demande des intéressés, notamment à Paris et en région parisienne.

« Ces réservations viendront compléter les démarches faites directement, sur le plan local, auprès des bailleurs et des SRIAS, par les départements des ressources humaines et de l'action sociale. Ainsi, la section régionale interministérielle d'action sociale (SRIAS) Île-de-France a engagé depuis plusieurs années une action en faveur des agents nouvellement nommés dans la région francilienne qui rencontrent des difficultés pour se loger. Cette action vient en complément des dispositifs ministériels sans s'y substituer et s'élargit en 2016 à une aide pour les agents rencontrant des difficultés temporaires de logement. Cette aide prend la forme d'un carnet de chèques nuitées d'une valeur de 300 ou 600 euros selon les situations. Ces coupons sont utilisables en paiement de nuitées hôtelières auprès d'hôtels adhérant au dispositif ou à défaut, pour le règlement de produits alimentaires.

« L'enjeu est prioritaire pour la direction des services judiciaires qui est confrontée chaque année à une rotation importante dans le corps des greffiers compensée par des sorties d'école de greffiers représentant près d'un tiers des promotions.

« En mars 2016, un groupe de travail sur les juridictions fragilisées a été mis en place à la demande du Garde des sceaux, ministre de la justice, et poursuivra ses travaux au dernier trimestre.

« L'un des objectifs poursuivi est notamment d'identifier les critères de détection des juridictions en voie de fragilisation, tant sur le plan des ressources humaines (manque d'attractivité, effectifs ayant une importante rotation, absentéisme supérieur à la moyenne...) que sur le plan de l'activité, afin d'anticiper les difficultés et identifier les dispositifs d'accompagnement à mobiliser pour permettre l'amélioration de leur situation. »

Source : ministère de la justice

Malgré les créations de postes, il y a moins de magistrats en juridictions en 2016 qu'en 2012.

Évolution des effectifs théoriques et réels de magistrats affectés en juridictions depuis 2008

N.B. : les effectifs théoriques correspondent aux circulaires de localisation des emplois [Sont comptabilisés dans la circulaire de localisation des emplois (C.L.E.), les postes de magistrats localisés dans les tribunaux et les cours d'appel.]

Source : commission des finances du Sénat à partir des réponses du ministère de la justice

Tableau général des recrutements dans le corps judiciaire

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Total

3 Concours d'accès à l'ENM (admis)

250

210

160

105

105

105

176

206

214

205

280

n.d**

2016

+ n.d**

2 Concours complémentaires

(admis)

30

néant

néant

néant

néant

néant

28

55

50

44

79

n.d**

286

+ nd**

Intégration directe

(art. 22-23 et 41-9) ***

27

12

14

18

40

33

49

49

45

35

58

33 (au 30/06/2016)

+ n.d**

413

+ n.d**

Nominations sur titre en qualité d'auditeurs de justice (art. 18-1)

40

44

fév

42

déc*

49

36

23

35

38

48

71

65

86*

n.d**

577

+ n.d**

Détachement judiciaire (art. 41)

3

2

5

5

6

7

4

11

4

13

11

13 (au 30/06/2016)

+ n.d**

84

+ n.d**

Magistrats exerçant à titre temporaire (art. 41-10)

2

2

0

1

1

0

4

12

5

8

11

4 (au 30/06/2016)

+ n.d**

50

+ n.d**

Conseillers et avocats généraux à la Cour de cassation en service extraordinaire

(art. 40-1)

4

0

0

0

2

0

1

0

4

2

2

1

+ n.d**

16

+ n.d**

Hors hiérarchie

(art. 40)

***

****

****

2

0

0

0

0

0

0

0

1

0

+ n.d**

3

+ n.d**

TOTAL

356

270

272 *

165 *

177

180

300

381

393

372

528

51

+ n.d**

3445

+ n.d**

Source : réponse au questionnaire budgétaire

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