C. L'INCERTITUDE LIÉE AUX DYSFONCTIONNEMENTS DU LOGICIEL LOUVOIS

Le projet Louvois (logiciel unique à vocation interarmées de la solde) résulte d'une décision du ministre du 26 octobre 1996 confiant au commissariat de l'armée de terre le pilotage de l'élaboration d'un logiciel de calcul de la solde commun aux trois armées et à la gendarmerie, avec extension ultérieure à la délégation générale pour l'armement. Il visait à remplacer le système antérieur, dans lequel la collecte des informations avait lieu via des formulaires papier, tandis que le décompte des soldes était effectué séparément, grâce à des applications informatiques de paye.

À la suite d'un audit de modernisation réalisé par l'inspection générale des finances et le commissariat général aux armées, une nouvelle phase d'études a été lancée en 2006 devant aboutir au déploiement de Louvois en 2009.

D'importantes difficultés ont cependant été constatées conduisant à reporter ce délai d'un an. La couverture des personnels a été progressive : services de santé des armés en avril 2011, armée de terre en octobre 2011 et marine en mars 2012. Le « raccordement » de l'armée de l'air, initialement prévu pour le printemps 2013 a finalement été abandonné compte tenu des importants dysfonctionnements constatés.

En effet, depuis sa mise en place, Louvois présente des anomalies affectant les montants des soldes versées et les imputations budgétaires de la masse salariale des personnels pris en charge.

En particulier, l'utilisation de Louvois a donné lieu au versement d'indus.

Si différentes mesures ont été prises pour essayer de corriger ces anomalies (création de la cellule « solde assistance », mise en place de procédures de contournement, création du groupe utilisateurs, et mise en place d'une gouvernance de la chaîne soldes, versements d'avances de trésorerie dans le cadre du plan d'urgence ministériel, etc.), le 3 décembre 2013, le ministre de la défense a pris la décision de remplacer Louvois dans le cadre du programme Source Solde.

Le lancement de la procédure de passation de contrat a eu lieu le 1 er février 2014, le contrat a été notifié à la société Sopra Steria le 22 avril 2015.

Le coût total de la mise en oeuvre du projet Source Solde est estimé à 122,2 millions d'euros, dont 22,5 millions d'euros en AE et 34,7 millions d'euros en CP au titre de 2017. Ce coût est inchangé par rapport à l'évaluation de départ.

En revanche, la durée de réalisation a été portée de 60 mois à 68 mois . La dernière bascule devrait ainsi intervenir en décembre 2019 (armée de l'air et service de santé des armées).

État d'avancement du projet Source Solde

Le développement de Source Solde de déroule en trois incréments. Le premier englobe toutes les fonctions nécessaires au calcul de la solde et les interfaces avec les systèmes d'information de ressources humaines qui envoient les informations de gestion administrative. Le deuxième traite des fonctions dites post clôture de la solde, c'est-à-dire toutes les fonctions qui garantissent l'auditabilité du système (contrôles, restitutions...) ainsi que les interfaces avec les systèmes d'information auxquels Source Solde envoie des informations. Le troisième incrément couvre principalement les fonctions d'archivage et d'entrepôt de données.

La réalisation du premier incrément est terminée et est actuellement en phase de test. La réalisation du deuxième incrément est terminée et les tests vont débuter début septembre. La réalisation du troisième incrément est en cours.

En parallèle, une mesure de la qualité des informations des SIRH concourant au calcul de la solde est effectuée avec l'assistance d'un prestataire informatique. Les corrections éventuelles sont faites par les gestionnaires RH des armées.

L'année 2016 est presque intégralement consacrée aux tests, consistant d'abord en la qualification du système, c'est-à-dire la vérification de sa conformité aux exigences de l'administration. Dès que le résultat des tests de qualification sera satisfaisant débuteront les phases de solde à blanc et de solde en double de la marine pour comparer en conditions réelles les résultats de l'ancien et du nouveau système.

La mise en service va se dérouler de façon incrémentale. Sauf si la qualification devait prendre du retard, il est prévu de commencer par la Marine au deuxième semestre 2017, suivie de l'armée de terre un an plus tard puis du service de santé des armées et de l'armée de l'air au deuxième semestre 2019.

Le marché principal est conclu pour une période de dix ans et comprend une tranche ferme, couvrant la réalisation du système et sa mise en service, et des tranches conditionnelles couvrant la maintenance du système et les évolutions nécessaires pour rester en phase avec les évolutions de la réglementation. Le montant maximum du marché est de 128 millions d'euros, dont 54 millions d'euros ont déjà été engagés à fin août 2016.

Le montant du marché comprend la réalisation de Source Solde, à savoir l'achat des licences d'exploitation des progiciels, le travail de développement et de paramétrage, ainsi que tous les tests et la conduite du changement (dont la formation des utilisateurs). Il comprend aussi la mise en service et la maintenance corrective et évolutive du système jusqu'en 2025. En 2015, le montant des indus liés aux dysfonctionnements du logiciel Louvois se sont élevées à 40 millions d'euros. Bien que prévisible, cette dépense n'avait fait l'objet d'aucune inscription de crédits dans le cadre de la loi de finances pour 2015.

Source : réponse au questionnaire budgétaire

En 2015, les indus versés par le ministère de la défense du fait des dysfonctionnements du logiciel Louvois se sont élevés à 41 millions d'euros. Une diminution de leur montant peut cependant être constatée, de l'ordre de - 36 millions d'euros entre 2014 et 2015.

Si le ministère de la défense a indiqué à votre rapporteur spécial que les difficultés liées au logiciel Louvois étaient globalement maîtrisées, il estime cependant que « seul le remplacement de Louvois par Source solde permettra d'obérer le risque de dysfonctionnement de la solde » laissant entendre qu'un dérapage pourrait à nouveau être constaté en 2017.

Or le coût des dysfonctionnements de Louvois est financé par le mécanisme de l'auto-assurance et vient en déduction des ressources du ministère de la défense.

L'inscription de crédits à ce titre dès le présent projet de loi de finances aurait pu être envisagée dans la mesure où la mise en oeuvre du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » et la création de l'indemnité d'absence cumulée se traduiront par d'importantes modifications dans Louvois et donc par un risque plus élevé de dysfonctionnements.

Par ailleurs, votre rapporteur spécial estime inacceptable, dans un contexte de très forte mobilisation des militaires, que les indemnités dues soient versées avec plusieurs mois de retard, compte tenu des délais nécessaires à leur intégration dans Louvois.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page