II. L'ANTICIPATION DE LA MISE EN oeUVRE DE LA CONVENTION STCW-F PAR LA FRANCE

Afin d'anticiper la mise en oeuvre de la convention STCW-F et d'éviter notamment que les navires de pêches battant pavillon français ne soient bloqués dans les ports étrangers pour non-conformité avec la convention, la France s'est lancée dans une réforme globale de la formation professionnelle tous secteurs confondus qui a abouti au décret n° 2015-723 du 24 juin 2015 relatif à la délivrance des titres de formation professionnelle maritime et aux conditions d'exercice des fonctions à bord des navires armés de commerce, à la plaisance, à la pêche et aux cultures marines. Le décret et les arrêtés qui le complètent sont d'application obligatoire depuis le 1 er septembre 2016.

Les professionnels ont été associés étroitement à l'élaboration de ce dispositif juridique qui a introduit les dispositions de cette convention en droit français. Ainsi l'architecture de la convention STCW-F et ses implications ont fait l'objet de nombreuses présentations dans le cadre du comité spécialisé de la formation professionnelle maritime (CSFPM). Un groupe de travail a également été mis en place par la direction des affaires maritimes associant l'ensemble des représentants de la profession : comité national des pêches maritimes et des élevages marins, organisations syndicales, organisations patronales et de nombreuses réunions techniques ont également eu lieu.

Le décret précité transpose la convention STCW-F, sauf pour la mise en oeuvre des dispositions relatives à la reconnaissance des brevets qui imposent qu'une partie appose un visa sur le brevet émanant d'une autre partie en reconnaissance de sa conformité avec la convention. Ces dispositions relèvent en effet de la compétence exclusive de l'Union européenne. En l'absence de directive spécifique sur la formation minimale des gens de mer à la pêche, il a fallu tenir compte des dispositions de la directive 2005/36/CE du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles. Or, cette directive principalement conçue pour des professions libérales contient des mécanismes difficilement applicables à la pêche (liberté d'établissement, libre prestation de service...), ce qui a conduit à deux mécanismes de reconnaissance différents au commerce et à la plaisance, d'une part, et à la pêche et aux cultures marines, d'autre part. Comme l'Union européenne ne peut devenir partie à la convention STCW-F, elle a invité, par décision (UE) 2015/799 du 18 mai 2015 du Conseil, les Etats membres à adhérer à cette convention et à déposer leur instrument d'adhésion auprès du secrétariat général de l'OMI si possible avant le 23 mai 2017. Dans ce contexte, la ratification de la convention par tous les États membres de l'Union européenne (UE) qui deviendront parties à la convention STCW-F devrait favoriser l'adoption d'une directive spécifique.

Selon les informations transmises par les services du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE) 4 ( * ) , la réforme de la formation professionnelle maritime, mise en place par le décret de 2015 et en vigueur depuis le 1 er septembre 2016, impose de nouvelles exigences réglementaires dans le secteur de la pêche.

Un cursus « machine » commun à la pêche, au commerce et à la plaisance a ainsi été mis en place afin d'anticiper les évolutions des métiers en favorisant les passerelles entre secteurs et deux nouveaux certificats ont été créés : le certificat de matelot pont et le certificat de matelot machine.

D'une manière générale, les niveaux de formation pour les différentes fonctions exercées à bord, imposés par le décret de 2015, vont souvent au-delà de ce qui est prévu par la convention STCW-F. Ainsi le niveau le plus élevé de qualification de la convention ne correspond pas au niveau le plus élevé du décret (capitaine de pêche), mais à celui qui lui est juste inférieur (patron de pêche).

Pour faire progresser la sécurité maritime, le nouveau cadre réglementaire a prévu une revalidation des titres tous les cinq ans et un renforcement des conditions d'octroi des dérogations . Pour exercer les fonctions de capitaine, de second capitaine, de patron, de lieutenant et de chef mécanicien, les marins-pêcheurs devront prouver le maintien de leur compétence par le biais de la revalidation de leurs titres, tous les cinq ans. La durée des dérogations est désormais limitée à six mois dans une capacité définie et uniquement si la personne détient le brevet requis pour occuper les fonctions immédiatement inférieures.

Des dispositions ont été mises en place pour « transformer » les anciens titres en nouveaux titres à la pêche avec suivi obligatoire de formation médicale et d'une formation à la sécurité. En ce qui concerne la formation médicale , une formation aux premiers secours est exigée depuis le 8 juillet 2017 pour tous les marins tandis que pour les capitaines ou les personnes responsables des soins à bord, une formation médicale plus poussée, comportant des unités de valeur formant à l'assistance médicale à distance, à l'hygiène et à la prévention des risques à bord sera exigée à compter du 8 juillet 2018.

Un outil de communication entre les marins et l'administration chargée de la mer, dénommé « Portail du marin », a été généralisé le 5 décembre 2016. Accessible sur internet, sur tablette ou sur smartphone, cette application permet au marin de suivre le calendrier des visites médicales périodiques obligatoires, de connaître l'échéance de validité de ses titres professionnels, de visualiser ses attestations de formation, ses titres et son certificat médical d'aptitude à la navigation et de formuler en ligne des demandes de délivrance ou revalidation de titres.Le marin peut programmer des alertes à sa convenance, lui rappelant ces diverses échéances.

À ce jour, environ 20 % des marins sont connectés au Portail du marin. Depuis le début de l'année 2018, des campagnes de relance, par SMS et par mails, ont été effectuées auprès des marins.

En parallèle, des opérations de communication à destination des marins sont menées conjointement avec les organisations professionnelles et les services des affaires maritimes.

Le choix fait par la France a été celui d'une mise en oeuvre progressive de la réforme, rendue nécessaire par les besoins nombreux en formation que les organismes et établissements actuels ne sont pas en mesure d'absorber immédiatement.


* 4 Réponses du Gouvernement aux questions de la commission et audition du 6 mars 2018.

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