PREMIÈRE PARTIE : LES PREMIÈRES NORMES MNIMALES INTERNATIONALES DE FORMATION DES PERSONNELS DES NAVIRES DE PÊCHE

I. LA CONVENTION STCW-F, LE PENDANT DE LA CONVENTION STCW POUR LES NAVIRES DE COMMERCE

La convention STCW-F de 1995 se présente comme le pendant, pour la navigation de pêche, de la convention sur les normes de formation des gens de mer, de délivrance des brevets et de veille dite « convention STCW » de 1978.

Les formations prévues par les conventions STCW et STCW-F ne sont pas toutefois identiques du fait qu'elles fixent des standards pour deux types de navigation différents. Un certain nombre de connaissances propres à l'exploitation d'un navire de pêche en activité de pêche sont en effet à connaître par les seuls marins concernés.

Sa mise en place a été décidée par l'Organisation maritime internationale (OMI), en liaison avec le Bureau international du travail (BIT), à l'occasion de la révision de l'annexe de la convention STCW. Une conférence internationale s'est ainsi tenue à Londres entre le 26 juin et le 17 juillet 1995. Réunissant 74 Etats, elle a permis l'adoption de la convention STCW-F, le 7 juillet 1995.

Cet instrument est entré en vigueur le 29 septembre 2012, douze mois après la ratification du quinzième Etat (la République du Palaos) comme le prévoient ses stipulations. À ce jour, seulement 21 pays l'ont ratifié dont 6 Etats membres depuis l'autorisation du Conseil de l'Union européenne de 2015 : Danemark, Espagne, Lettonie, Lituanie, Pologne et Portugal.

Neuf résolutions ont été adoptées en même temps que la convention STCW-F. Elles portent respectivement sur :

- la formation des opérateurs des radiocommunications à l'utilisation du système mondial de détresse et de sécurité en mer (SMDSM) ;

- la formation sur simulateur de radar ;

- les directives et recommandations applicables au personnel des navires de pêche ;

- la formation des matelots de pont à bord des navires de pêche d'une longueur égale ou supérieure à 24 mètres ;

- la formation du personnel des navires de pêche aux techniques individuelles de survie ;

- la formation du personnel des gros navires de pêche et la délivrance des brevets ;

- les prescriptions applicables aux officiers chargés du quart-machine et les dispositions relatives à la tenue du quart ;

- la promotion de la participation des femmes dans le secteur de la pêche ;

- et les relations humaines.

Comme la convention STCW de 1978, cette convention STCW-F, qui établit des normes internationales minimales de formation et de qualification des marins à la pêche ainsi que des règles strictes en matière de délivrance des brevets pour les différentes fonctions occupées sur un navire de pêche, a pour objectif l'amélioration de la sauvegarde de la vie humaine et la protection du milieu marin - les événements de mer ayant un impact considérable sur celui-ci.

La convention STCW-F répond à des besoins réels car le secteur de la pêche est fortement accidentogène . On dénombre environ 24 000 morts par an au niveau mondial. En France, le rapport de 2016 du Bureau d'enquêtes sur les événements de mer (BEAmer) constate que « la pêche reste le secteur d'activité sujet au plus grand nombre d'événements de mer, dans un contexte où l'élément humain demeure le principal facteur de causalité » et que « les navires de pêche sont concernés dans ces événements (de mer) dans près de 70 % des cas, soient seuls, soient avec des navires de commerce ou de plaisance (collisions) ». 243 accidents à la pêche ont été déclarés au BEAmer pour l'année 2016. Sur les 12 enquêtes techniques ouvertes après accident en 2016, 9 concernent le secteur de la pêche (dont un décès suite à une chute à la mer).

À l'instar du secteur des marins au commerce, le secteur des marins à la pêche connaît une internationalisation grandissante et des marins de nationalité différente peuvent être amenés à travailler au sein d'un même équipage sur un navire de pêche. Dans ces conditions, la sécurité maritime commande que ces marins partagent un langage commun et qu'ils soient formés selon des normes internationales communes, que leurs titres soient délivrés dans des conditions identiques et que l'organisation de la veille à bord des navires réponde elle aussi à des exigences minimales communes.

La convention STCW-F spécifie les exigences minimales obligatoires à la formation, aux qualifications et à la délivrance des brevets de capitaine, d'officier et d'officier mécanicien et certificats d'opérateurs des radiocommunications :

- Brevet de capitaine de navires de pêche d'une longueur égale ou supérieure à 24 m exploités dans des eaux illimitées (plus de 100 milles des côtes) ;

- Brevet d'officier chargé du quart à la passerelle à bord de navires de pêche d'une longueur égale ou supérieure à 24 m exploités dans des eaux illimitées (plus de 100 milles des côtes) ;

- Brevet de capitaine de navires de pêche d'une longueur égale ou supérieure à 24 m exploités dans des eaux limitées (moins de 100 milles des côtes) ;

- Brevet d'officier chargé du quart à la passerelle à bord de navires de pêche d'une longueur égale ou supérieure à 24 m exploités dans des eaux limitées (moins de 100 milles des côtes) ;

- Brevet de chef mécanicien et de second mécanicien de navires de pêche dont l'appareil de propulsion principal a une puissance propulsive égale ou supérieure à 750kW ;

- et Certificats du personnel chargé des radiocommunications ou effectuant des tâches relatives aux radiocommunications à bord des navires de pêche.

La convention STCW-F prévoit aussi une formation de base en matière de sécurité destinée à l'ensemble du personnel des navires de pêche et pose également les principes fondamentaux à observer lors du quart à la passerelle à bord des navires de pêche.

Ces brevets d'une durée de validité de cinq ans ne sont délivrés que si les conditions requises et détaillées par la convention en matière de service, d'âge, d'aptitude physique, de formation, de qualifications et d'examens sont remplies.

La convention STCW-F prévoit classiquement une période transitoire pour sa mise en oeuvre. Les titres de formation professionnelle maritime délivrés avant l'entrée en vigueur du décret de 2015 resteront valides jusqu'au 1 er septembre 2020 et les marins à la pêche auront jusqu'à cette même date pour se voir délivrer des titres conformes à la convention STCW-F. Ils devront également dans ce délai se conformer à l'obligation de formation à la sécurité.

La convention STCW-F concerne à des degrés divers la totalité des marins travaillant dans le domaine de la pêche, soit 18 340 marins.

9 920 marins devront demander la transformation de leur titre de formation professionnelle , ce qui représente un coût global de 52 377,66 euros à la charge de l'Etat, le prix moyen d'impression et d'envoi d'un titre étant de 5,28 €. Les services du ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE) 3 ( * ) ont indiqué à votre rapporteur qu'une réflexion était en cours pour étudier la possibilité de dématérialiser ces documents pour l'instant détenus à bord. En effet, la convention STCW-F, à la différence de la convention STCW, ne prévoit pas que les originaux des titres doivent être détenus à bord des navires de pêche. Seul un dispositif de contrôle doit être organisé pour permettre à tout agent du contrôle par l'État du port de vérifier l'authenticité des titres détenus par les marins.

8 117  marins devront être formés à la sécurité , ce qui représente un coût de 6,19 millions d'euros. Trois types de formations peuvent être pris en compte :

- la formation permettant la délivrance du certificat de formation de base à la sécurité (CFBS) dont le coût moyen est d'environ 1 250 € par marin;

- la formation à la sécurité pour les personnels embarqués sur des navires armés à la petite pêche ou à la pêche côtière à bord des navires de moins de 12 mètres dont le coût moyen est d'environ 500 € par marin ;

- la formation à la sécurité dispensée entre 2009 et 2013 en application de la convention de mécénat entre Total SA, l'Institut maritime de prévention (IMP) et le Fonds d'assurance formation pêche et cultures marines (FAFPCM).

L'ensemble de ces coûts seront échelonnés jusqu'en 2020.

La convention STCW-F présente plusieurs intérêts. À moyen et long terme, elle va permettre une amélioration globale des conditions de formation et de qualification au niveau mondial. Sa mise en oeuvre participe à la lutte contre le dumping social. La dynamique qui sera engendrée va permettre de faire progresser non seulement la formation des marins mais aussi, à terme, la sécurité des navires de pêche au niveau international, ce qui favorisera un alignement très progressif également des conditions de concurrence entre pavillons, le secteur de la pêche étant de plus en plus internationalisé.

En outre, le rapprochement des formations exigées pour la navigation de pêche et la navigation de commerce facilitera la mobilité des navigants entre ces deux secteurs, ce qui améliorera la situation du marché de l'emploi maritime en le décloisonnant.


* 3 Réponses du Gouvernement aux questions de la commission.

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