EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 13 novembre 2018, sous la présidence de M. Vincent Éblé, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de Mme Sylvie Vermeillet, rapporteure spéciale, sur la mission « Régimes sociaux et de retraite » et le compte d'affectation spéciale « Pensions ».

M. Vincent Éblé , président . - Permettez-moi de souhaiter la bienvenue à notre collègue René-Paul Savary, membre de la commission des affaires sociales, qui suit de près ces questions et nous livrera son point de vue sur, notamment, le compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions ».

Mme Sylvie Vermeillet , rapporteure spéciale de la mission « Régimes sociaux et de retraite » . - Je salue moi aussi la présence de notre collègue René-Paul Savary, avec qui je partage un certain nombre de préoccupations.

Je vous présenterai brièvement - et peut-être pour la dernière fois... - la mission « Régimes sociaux et de retraite » et le compte d'affectation spéciale « Pensions ».

M. Jean-Claude Requier . - Pourquoi ? Il n'y aura plus de retraites ?...

Mme Sylvie Vermeillet , rapporteure spéciale . - Sait-on jamais...

La mission « Régimes sociaux et de retraite » subventionne les déséquilibres financiers des régimes spéciaux, principalement ceux de la SNCF et de la RATP, qui absorbent les deux tiers des dotations, ainsi que ceux des marins et des mines pour l'autre tiers. Il est toutefois à noter le rattachement du régime complémentaire des exploitants agricoles, avec une dotation budgétaire de 55 millions d'euros, qui devrait être maintenue à ce niveau malgré la disparition de taxes à hauteur de 190 millions d'euros, les taxes sur les huiles et les farines, qui finançaient plus de 20 % des dépenses.

Les crédits de la mission baissent un peu, pour s'établir à 6,2 milliards d'euros, mais les incertitudes sont telles qu'il est inutile de commenter une évolution soumise à d'importants aléas. Ceux-ci sont renforcés par l'incertitude liée à la réforme du système des retraites. Par ailleurs, à la suite d'un contentieux, les conditions dans lesquelles une dette de l'État de l'ordre de 100 millions d'euros envers le régime de la SNCF sera honorée ne sont pas précisées. L'essentiel est que les subventions d'équilibre demeurent à un niveau élevé.

Cette stabilisation est quelque peu décevante au vu des réformes passées des régimes, mais, pour l'essentiel, ces dernières entreront en application dans les années à venir. La politique de revalorisation des pensions adoptée par le Gouvernement est de nature à augmenter les dépenses à hauteur de 27 millions d'euros, mais la sous-revalorisation mise en oeuvre en 2018 et en 2019 dégage des économies de près de 100 millions d'euros.

Les régimes spéciaux connaissent une progression spontanée assez significative de leurs dépenses du fait de la revalorisation des bases liquidatives, à l'inverse de ce qui se produit pour l'État.

Les subventions couvrent principalement les déséquilibres démographiques. Le rapport démographique de 1,3 dans le régime général n'est que de 0,65 à la SNCF et de 0,85 à la RATP. C'est l'origine de la majeure partie de la subvention de 3,3 milliards d'euros versée à la SNCF et de celle de 736 millions versée à la RATP. Il en va de même pour les marins, avec une subvention de 815 millions d'euros, et les mines, avec une subvention de 1,1 milliard d'euros.

Cependant, les déséquilibres démographiques ne sont pas indépendants des règles spéciales s'appliquant à ces régimes. Ces dernières ont été partiellement corrigées par les réformes, mais celles-ci n'exerceront leurs effets que dans le temps. Pour le moment, les âges de départ, qui ont augmenté, restent bas (cinquante-sept ans et cinq mois à la SNCF et cinquante-cinq ans et cinq mois à la RATP). Ils sont plus bas encore pour les agents de conduite (cinquante-deux ans), cette situation pouvant être discutée selon l'opinion que l'on se fait de la pénibilité des métiers. Ainsi, les périodes de retraite sont assez inhabituelles (plus de quarante ans avec les réversions à la RATP) : elles sont supérieures à la durée d'activité. La montée en puissance des réformes concernant les conditions d'âge se traduira par des économies substantielles.

Les régimes spéciaux, du fait de cette perspective, mais aussi de l'extinction de certains régimes, comme le régime minier, devraient parvenir à un meilleur équilibre et, par là même, beaucoup moins solliciter la subvention publique. Les engagements de l'État actualisés se situent en cumulé entre 120 et 160 milliards d'euros pour la période allant de 2017 à 2050. Cela correspond à une réduction des besoins de financement projetés. Dans le compte général de l'État, les soldes financiers des régimes se rétablissent et se stabilisent à terme autour de 1,4 milliard d'euros, contre 6,2 aujourd'hui.

Toutefois, cette perspective, qui est évidemment soumise aux aléas de la vie économique, a été remise en cause par l'adoption du « pacte ferroviaire ». Celui-ci instaure un nouveau régime fermé, les nouveaux salariés de la SNCF étant appelés à être recrutés hors statut. Les pertes de recettes du régime des anciens salariés s'accentueront en cours de période, les baisses de dépenses intervenant plus tardivement. L'opération se solde par un alourdissement des engagements de couverture de l'État de 1,7 milliard d'euros par an à l'horizon de 2050.

Le CAS « Pensions », avec des crédits de paiement à hauteur de 59 milliards d'euros, connaît, de son côté, des évolutions très modérées. Les dépenses progressent de 1 %, soit à peu près au même niveau que les recettes toutefois un peu moins dynamiques. Concernant les dépenses, la sous-revalorisation des pensions permet d'économiser plus de 600 millions d'euros bruts, la revalorisation de 0,3 % au 1 er janvier augmentant les dépenses de 147 millions d'euros. Le bilan est positif pour l'État, avec une économie en 2019 de près de 500 millions d'euros. L'écart est sensible pour la pension moyenne avec 250 euros de moins. Les pensions nouvellement liquidées le sont sur une base qui décroche depuis quelques années de l'inflation. C'est l'effet de la faible revalorisation indiciaire. Seuls échappent à celle-ci les personnels bénéficiant du glissement vieillesse-technicité (GVT), ce qui avantage certains hauts fonctionnaires. Les recettes progressent moins que la masse salariale de l'État en raison de la structure de rémunération qui réserve une place importante aux primes généralement non cotisées, mais aussi du fait de la déformation de l'emploi public. Depuis quelques années, la part des contractuels non affiliés a augmenté de plus de quatre points ; elle était supérieure à 16 % en 2016.

Malgré des recettes évoluant très peu, le solde financier devrait demeurer à peu près inchangé, en excédent de 1,6 milliard d'euros. Le solde cumulé atteindrait 8,4 milliards à la fin de l'année 2019. Ces dernières années, la progression des cotisations salariales a permis de couvrir les dépenses supplémentaires, si bien que le supplément de contribution employeur de l'État a contribué à améliorer le solde du CAS.

Les soldes financiers des régimes couverts par le CAS devraient demeurer plus ou moins positifs dans tous les scénarios à l'horizon de 2070, au contraire du solde du régime général qui exigera que la croissance soit supérieure à 1,5 %.

Les perspectives du CAS reposent sur une forte réduction de la valeur relative de la pension servie par rapport au revenu moyen d'activité. La valeur réelle de la pension servie progresserait de 50 % entre 2017 et 2070, même si le niveau de vie des retraités relatif chutait de 25 % par rapport à l'ensemble de la population.

Face à ces perspectives, les conditions de liquidation des pensions dans le régime général et dans la fonction publique sont très différentes. Aujourd'hui, le taux de remplacement est nettement plus élevé dans le régime général en raison de l'exclusion des primes des fonctionnaires de la base de liquidation.

Le pilotage implicite de l'équilibre financier des régimes de retraite passe par une dégradation de l'assiette de liquidation des pensions. Dans le régime général, le calcul sur les vingt-cinq meilleures années de salaires qui ne sont revalorisées que de l'inflation concourt à ce décrochage. Dans la fonction publique, le calcul sur les six derniers mois permet une revalorisation qui tient compte des progressions de carrière. Aussi, le taux de remplacement de la fonction publique ne perdra que de cinq à sept points contre quinze points dans le régime général.

Malgré les différences entre les régimes de liquidation, les avantages relatifs du régime des fonctionnaires ne doivent pas être exagérés. J'observe cependant que plus la rémunération est élevée, moins elle est cotisée. Dans un régime à cotisations définies et à points, comme celui qui est actuellement envisagé, ceci pose question.

Dans le cadre de la réforme, il faut donc évoquer ici le projet d'intégrer les primes des fonctionnaires. Cela impliquera, outre un certain nombre de modifications dans la répartition des droits entre catégories, une réduction du pouvoir d'achat courant, compensée par la constitution de droits nouveaux, mais dont la conversion en revenus sera fortement différée. Combiné avec l'application du prélèvement à la source, l'effet « feuille de paye » s'annonce assez délicat.

Je vous propose d'adopter les crédits de la mission et du compte d'affectation spéciale.

M. René-Paul Savary . - Je m'exprimerai ici à titre personnel, la commission des affaires sociales n'ayant pas encore examiné cette mission. Nous ferons les mêmes remarques que l'an dernier.

Je note les différentes approches entre le CAS « Pensions » et la mission « Régimes spéciaux et de retraite », avec, d'un côté, des recettes et des dépenses exposées avec une vision réaliste de la situation et, de l'autre, une subvention d'équilibre, à hauteur des deux tiers du financement des pensions des régimes spéciaux, qui ne reflète pas la réalité des problèmes.

Les problèmes sont différents d'un régime à l'autre ; j'ai pu le constater au travers des auditions que j'ai organisées en tant que futur rapporteur du projet de loi sur les retraites. Il faudra pourtant en tenir compte lors de la réforme. Comment ces spécificités seront-elles transcrites ? Comment parvenir à une équité ? Des mesures ont certes déjà été prises concernant l'âge de départ à la retraite : on arrive à une uniformisation.

Aujourd'hui, il y a une part forfaitisée, si je puis dire, au travers d'une subvention d'équilibre, et une cotisation patronale de l'État. À l'avenir, comment clarifiera-t-on la situation d'employeur de l'État pour parvenir à un régime universel ?

Quant aux coûts de gestion des régimes spéciaux, ils sont importants. La réforme concernera 96 % des salariés ; il n'y aura donc plus de place pour les régimes de retraite complémentaires obligatoires. Il conviendra d'améliorer les coûts de gestion (plus de 320 millions d'euros annuellement pour l'ensemble des régimes de retraite de base et complémentaires).

Je partage les observations formulées par votre rapporteur spécial dans leur intégralité.

M. Thierry Carcenac . - Ce rapport nous permet de toucher du doigt la difficulté d'harmoniser les régimes spéciaux, le régime général et les pensions des fonctionnaires. De façon générale, se pose, à nos yeux, le problème de la majoration de 0,3 % des retraites en termes de pouvoir d'achat. Néanmoins, je ne vois pas comment nous pourrions ne pas voter les crédits de cette mission et du CAS « Pensions ».

Concernant les coûts de gestion, j'ai lu que le programme 197 « Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins » est géré à Périgny en Charente-Maritime. La situation des personnels a-t-elle été évoquée, alors même que l'on nous parle de déconcentration ?

Par ailleurs, on a tendance à nous dire que les pensions des fonctionnaires de l'État sont importantes en raison du calcul sur les six derniers mois. Mais se pose la problématique des primes. De nombreux départs à la retraite de personnels de catégorie C sont prévus, alors que les personnels de catégorie A et A+ partent généralement après l'âge légal et bénéficient de la surcote. Que sait-on sur ce sujet ? La suppression des 50 000 fonctionnaires au cours de la législature a-t-elle été prise en compte dans l'équilibre global des pensions ? Vous l'avez noté, l'État envisage de recourir plus encore aux contractuels.

M. Jean-Claude Requier . - Un grand chambardement va se produire à la suite du rapport de M. Delevoye, ancien sénateur : on peut être sénateur et réformer !

Je relève le poids des régimes spéciaux, avec une contribution de plus de 6 milliards d'euros, ce qui est considérable. Si l'on peut comprendre cette forme d'héritage culturel, les divers régimes vont devoir s'uniformiser pour ce qui concerne tant l'âge du départ à la retraite que le calcul des retraites. Nous abordons ici ce sujet difficile de manière sereine. L'ensemble des membres du groupe du RDSE sans doute votera ces crédits.

Mme Christine Lavarde . - Je profite de la présence du rapporteur du futur projet de loi sur les retraites pour poser une question relative aux petites retraites de 600 ou 700 euros. Des personnes licenciées à quelques mois ou trimestres de leur départ à la retraite souhaitent bénéficier du dispositif du cumul emploi retraite. Or elles cotisent pour la retraite, sans voir la leur abonder pour autant. Ces personnes se démènent pour vivre des revenus de leur travail et non pas des minima sociaux ou de différentes aides. Ne conviendrait-il pas de faire évoluer cette situation ?

Mme Sylvie Vermeillet , rapporteure spéciale . - Je tiens à souligner que la future réforme est très anxiogène pour les militaires. Il est aujourd'hui difficile de dire aux futurs recrutés ce qu'il adviendra de leur retraite. Or c'est un élément très important dans une carrière militaire.

Thierry Carcenac, la revalorisation de 0,3 % des retraites seulement entraîne un boni de 500 millions d'euros pour l'État. On ne sait pas ce que deviendront les personnels des sites qui gèrent toutes les caisses de retraite, ainsi que les bâtiments. À l'heure actuelle, on est encore bien loin de tout cela. A priori , une seule structure pourrait assurer le pilotage.

On observe effectivement des surcotes dans les personnels de catégorie A, ce qui participe à une certaine iniquité mais résulte aussi de la faiblesse des taux de remplacement. Cette question fait partie des aléas comportementaux dans l'évolution du CAS dont j'ai parlé.

Le départ prévu de 50 000 fonctionnaires induit 50 000 cotisants en moins. Cela correspond toutefois à moins de 2,5 % de la masse salariale publique. Je l'ai dit, on a de plus en plus recours aux contractuels.

Jean-Claude Requier, les régimes spéciaux sont là pour compenser un déséquilibre démographique. Comme l'a souligné René-Paul Savary, dans le cadre de la réforme des retraites, nous ne savons pas comment seront traduits certains avantages réels, comme l'âge de départ à la retraite à la SNCF ou à la RATP. La contribution de 6,2 milliards d'euros n'est pas uniquement due au déséquilibre démographique. Revoir le départ à la retraite à cinquante-deux ans du personnel roulant de la SNCF risque de faire quelques vagues.

Christine Lavarde, le régime à points réglerait le problème du cumul que vous avez évoqué : dès lors que l'on travaille, on cotise et on acquiert donc des points.

Mme Christine Lavarde . - Aujourd'hui, ces personnes sont obligées de cotiser et ne perçoivent rien de plus.

Mme Sylvie Vermeillet , rapporteure spéciale . - La situation n'est pas satisfaisante aujourd'hui, mais la réforme devra résoudre ce problème.

Mme Christine Lavarde . - Il y aurait donc un calcul continu de la pension de retraite.

Mme Sylvie Vermeillet , rapporteure spéciale . - Oui.

M. René-Paul Savary . - Même si une simplification est opérée au travers des points - chaque rémunération donnera des points -, il faudra voir comment s'exercera la solidarité. Se pose notamment le problème des petites retraites, qui sont aujourd'hui compensées par le biais du minimum contributif (MICO), une prestation complémentaire permettant d'avoir une retraite minimale. Demain, la part de solidarité doit rester identique sur le plan macroéconomique (20 % de l'ensemble des prestations), mais on ne sait pas comment elle se déclinera.

J'ajoute que la commission des affaires sociales proposera de décaler de six mois, dès 2020, l'âge du départ à la retraite pour arriver à soixante-trois ans, levier incontournable pour équilibrer le régime des retraites en assurant des pensions décentes. Concernant le pouvoir d'achat des retraités - nous n'avons pas été insensibles à cette préoccupation -, nous proposerons un amendement visant à indexer, dès 2019, les pensions sur l'inflation selon un mécanisme identique à celui qui était en vigueur avant 2015, de façon à limiter la diminution du pouvoir d'achat.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'âge du départ à la retraite nettement plus précoce des cheminots tient à des raisons historiques. À l'époque, beaucoup mouraient malheureusement de maladies professionnelles et ne bénéficiaient pas de leur retraite. Au regard des évolutions techniques, ces avantages sont aujourd'hui beaucoup moins justifiés. Un conducteur de bus a même une plus grande responsabilité individuelle qu'un conducteur de train automatisé. Ces avantages sont encore moins justifiés pour les personnels administratifs : du fait de la bonification pour enfants, certaines employées de cinquante-trois ou cinquante-quatre ans partent à la retraite. Même si l'âge a été relevé, on sait que l'âge effectif ne correspond pas à l'âge légal. Il s'agit d'arriver progressivement à faire converger l'âge du départ à la retraite avec la réalité actuelle. D'ailleurs, connaissez-vous l'âge effectif de départ à la retraite des non-roulants à la RATP ?

Mme Sylvie Vermeillet , rapporteure spéciale . - L'âge moyen est de cinquante-sept ans et cinq mois. À la page 48 du rapport, vous trouverez un tableau établissant la répartition des retraités selon leur âge.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Je note que 53 % des personnels de la RATP de moins de cinquante-six ans partent à la retraite !

Mme Sylvie Vermeillet , rapporteure spéciale . - J'ajoute que les réformes successives ayant fait passer l'âge de départ à la retraite pour les roulants de cinquante à cinquante-deux ans et cinquante-cinq à cinquante-sept ans pour les non-roulants se sont chaque fois accompagnées d'avantages salariaux relativement coûteux.

Par ailleurs, avec les mécanismes de décote et de surcote, mécaniquement, l'âge légal de départ à la retraite est plutôt de soixante-quatre ans pour avoir une retraite décente ; les projections à long terme intègrent d'ailleurs la perspective d'un report de l'âge effectif de départ à la retraite bien au-delà de 62 ans.

À l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d'affectation spéciale « Pensions ».

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Réunie à nouveau le jeudi 22 novembre 2018, sous la présidence de M. Vincent Éblé, président, la commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d'affectation spéciale « Pensions ».

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