II. LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS SPÉCIAUX

A. UN BUDGET RELATIVEMENT RIGIDE DONT LE PILOTAGE EST CONTRAINT

Les grands postes de la mission « Action extérieure de l'État » que constituent les contributions internationales aux opérations de maintien de la paix, les subventions pour charges de service public versées aux opérateurs et la masse salariale sont relativement rigides .

Par ailleurs, le pilotage de la mission est contraint par deux types de risque : le risque sécuritaire et le risque de change . Le premier a, à nouveau, conduit au renforcement des conditions de sécurité en France et à l'étranger. Comme l'a montré la Cour des comptes, sur les crédits hors titre 2, comme en 2017, des redéploiements ont été opérés en 2018 de l'étranger vers la France afin de répondre aux besoins de renforcement des prestations de gardiennage et de procéder à des travaux de sécurisation des sites en France. Le second constitue le principal risque identifié par le contrôle interne budgétaire du ministère. Alors que vos rapporteurs spéciaux avaient appelé le Gouvernement , lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2018, à progresser rapidement vers l'établissement d'un mécanisme effectif de couverture du risque de change, une nouvelle convention est entrée en vigueur le 12 avril 2018. Ils saluent les dispositions nouvelles introduites par cette convention qui apportent un réel progrès en matière de couverture du risque de change lié aux versements des contributions internationales de la France mais ne pourront véritablement les évaluer que lors de l'examen de la loi de règlement de 2019.

Enfin, vos rapporteurs spéciaux soulignent que le pilotage de la mission en matière de masse salariale n'est pas satisfaisant . Alors que les crédits de personnel sont répartis sur les programmes 105, 151 et 185, les responsables de programme ne pilotent pas leur activité par la masse salariale, mais uniquement par ETPT. Dans un contexte d'objectif de baisse de 5,7 % de la masse salariale du ministère de l'Europe et des affaires étrangères à l'horizon 2022 , cette absence de pilotage de la masse salariale par les responsables de programme constitue une vraie faiblesse. Vos rapporteurs spéciaux reviendront sur ce sujet lors de leurs prochains travaux de contrôle budgétaire.

B. UNE LÉGÈRE SOUS-EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION QUI MASQUE UNE SUREXÉCUTION CHRONIQUE DES DÉPENSES DE PERSONNEL

La sous-exécution des crédits de la mission, qui s'élève en 2018 à 37,5 millions d'euros, masque des disparités importantes entre l'évolution des crédits hors titre 2 (- 67 millions d'euros 13 ( * ) ) et celle des crédits de titre 2 (+ 29,4 millions d'euros).

Les dépenses de personnel ont en effet été systématiquement supérieures aux crédits votés en loi de finances initiale depuis 2007, à l'exception de l'année 2014 . Cette surconsommation de masse salariale est due en majeure partie aux effets change-prix constatés sur les indemnités de résidence à l'étranger des agents expatriés et à l'effet change sur les agents de droit local. En moyenne, depuis 2012, l'effet change-prix, qui n'est calculé qu'à l'échelle du ministère 14 ( * ) , a représenté 23 millions d'euros par an sur l'ensemble des dépenses de personnel, soit un montant supérieur à l'écart moyen annuel entre les crédits exécutés et les crédits votés en LFI (16,4 millions d'euros).

Contribution de l'effet change-prix à la sur-exécution des crédits de titre 2 du ministère de l'Europe et des affaires étrangères

(en millions d'euros)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

LFI

1 062

1 092

1 113

1 105

1 082

1 123

1 090

Exécution

1 105

1 108

1 086

1 118

1 119

1 128

1 118

Écart

43

16

- 27

13

37

5

28

Effet change-prix

30,9

26,7

- 2,3

20,8

42,8

25,9

16,4

Source : contrôleur budgétaire et comptable ministériel

La couverture de l'effet change-prix

L'indemnité de résidence à l'étranger (IRE) « est destinée à compenser forfaitairement les charges liées aux fonctions exercées, aux conditions d'exercice de ces fonctions et aux conditions locales d'existence » 15 ( * ) .

Les montants d'IRE sont ajustés chaque trimestre au titre du change-prix, pour maintenir constant le pouvoir d'achat des personnels expatriés de l'État. Les ajustements sont calculés en fonction des variations de change entre l'euro et la monnaie locale et du différentiel d'inflation entre la France et le pays de résidence.

Le calcul de l'effet change-prix permet d'ajuster l'IRE en fin de gestion, en intégrant aux prévisions budgétaires, calculées sur la base de l'année N-2, le surcoût ou l'économie qui résulte des évolutions constatées.

Vos rapporteurs spéciaux déplorent cette situation récurrente depuis plus de dix ans et appellent de leurs voeux une rénovation des modalités de prise en compte de l'effet change-prix dans les prévisions budgétaires, qui permette au Parlement de voter des enveloppes de crédits réalistes, respectées en exécution.

Ils soulignent par ailleurs que cette sur-exécution des crédits de titre 2 crée un dépassement des crédits inscrits dans la loi de programmation des finances publiques, comme ils l'avaient déjà montré lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2019 .

Ils espèrent que le projet de réforme de la couverture de l'effet change-prix , qui est en cours d'examen à la direction du budget et qui consisterait à prendre en compte l'effet prix en loi de finances initiale, permettra de remédier à ces difficultés chroniques et suivront de près sa mise en oeuvre.


* 13 Y compris les fonds de concours et les attributions de produits.

* 14 Mission «Aide publique au développement » comprise.

* 15 Article 5 du décret du 28 mars 1967.

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