CHAPITRE VII
DISPOSITIONS RELATIVES À LA PRÉVENTION
DE L'UTILISATION DU SYSTÈME FINANCIER
AUX FINS DU BLANCHIMENT DE CAPITAUX
OU DU FINANCEMENT DU TERRORISME

ARTICLE 21

Habilitation du Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance
les mesures nécessaires pour transposer en droit interne
la directive (UE) 2019/1153 fixant les règles facilitant l'utilisation d'informations financières et d'une autre nature aux fins de la prévention ou de la détection de certaines infractions pénales, ou des enquêtes ou des poursuites en la matière

Le présent article prévoit d'habiliter le Gouvernement à transposer par voie d'ordonnance la directive (UE) 2019/1153 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 fixant les règles facilitant l'utilisation d'informations financières et d'une autre nature aux fins de la prévention ou de la détection de certaines infractions pénales, ou des enquêtes ou des poursuites en la matière.

Sur le fond, la commission des finances se félicite des améliorations apportées par la directive. Dès lors que le recours à une ordonnance pour sa transposition ne soulève pas de difficulté, la commission a adopté cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : LA DIRECTIVE DU 20 JUIN 2019 FACILITE L'UTILISATION ET LE PARTAGE D'INFORMATIONS FINANCIÈRES POUR LUTTER CONTRE CERTAINES INFRACTIONS GRAVES

La directive (UE) 2015/849 81 ( * ) modifiée par la directive 2018/843 82 ( * ) , dite « cinquième directive anti-blanchiment », fait obligation aux États membres de « mettre en place des registres centralisés des comptes bancaires ou des systèmes de recherche de données permettant d'identifier en temps utile les personnes qui détiennent des comptes bancaires et des comptes de paiement » 83 ( * ) .

Ces informations doivent être directement accessibles aux cellules de renseignement financier (CRF) - Tracfin en France - ainsi qu'aux autorités nationales chargées de la prévention du blanchiment de capitaux, de ses infractions sous-jacentes associées et du financement du terrorisme.

Toutefois, il est apparu à l'usage que le droit de l'Union européenne ne prévoit pas « tous les outils et mécanismes spécifiques dont les CRF devraient disposer pour accéder à ces informations et accomplir leurs missions » et que « comme les États membres sont entièrement responsables de la mise en place et du choix de la nature organisationnelle des CRF, le degré d'accès de ces dernières aux bases de données réglementaires est variable, ce qui se traduit par des échanges d'informations insuffisants entre les services répressifs ou judiciaires et les CRF » 84 ( * ) .

Dans ce contexte, la directive (UE) 2019/1153 du 20 juin 2019 est venue compléter le cadre juridique européen en la matière afin de faciliter l'utilisation et l'échange de ces informations financières , en établissant :

- des règles « accordant un accès direct aux informations conservées dans les registres centralisés des comptes bancaires aux autorités désignées des États membres chargées de la prévention ou de la détection d'infractions pénales, ou des enquêtes ou des poursuites en la matière » ;

- des règles « destinées à renforcer la capacité des CRF à partager les informations financières et les analyses financières avec les autorités compétentes désignées dans leur État membre pour toutes les infractions pénales graves » ;

- un cadre juridique « permettant aux CRF de demander des données pertinentes conservées par les autorités compétentes désignées dans leur État membre, afin d'être en mesure de prévenir, de détecter et de combattre efficacement le blanchiment de capitaux, les infractions sous-jacentes associées et le financement du terrorisme » ;

- « le type d'informations pouvant être échangées entre les CRF, entre les CRF et les autorités compétentes désignées et entre les autorités compétentes désignées des différents États membres, ainsi que leur portée » ;

- des garanties et des conditions spécifiques et supplémentaires « pour assurer la protection des données à caractère personnel en ce qui concerne les mécanismes de traitement des données sensibles et les registres des demandes d'informations » 85 ( * ) .

La commission des affaires européennes du Sénat n'était pas intervenue sur la proposition de directive dans le cadre de la procédure prévue à l'article 88-4 de la Constitution et avait considéré qu'elle respectait pleinement le principe de subsidiarité 86 ( * ) .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UNE HABILITATION À TRANSPOSER PAR ORDONNANCE LA DIRECTIVE DU 20 JUIN 2019

Le présent article prévoit d'habiliter le Gouvernement à prendre par voie d'ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour :

- transposer la directive du 20 juin 2019 précitée ;

- mettre en cohérence avec les mesures issues de cette transposition les dispositions du code monétaire et financier et, le cas échéant, celles d'autres codes et lois, relatives à l'échange d'informations financières ;

- rendre applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna, avec les adaptations nécessaires, les articles du code monétaire et financier et, le cas échéant, les articles d'autres codes et lois pour celles qui relèvent de la compétence de l'État et procéder, le cas échéant, aux adaptations de ces articles en ce qui concerne les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon.

La durée de l'habilitation s'étend sur douze mois à compter de la publication de la présente loi, étant donné que la France doit avoir transposé la directive avant le 1 er août 2021.

Un projet de loi de ratification devra être déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l'ordonnance.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE DIRECTIVE BIENVENUE DONT LA TRANSPOSITION PAR ORDONNANCE NE SOULÈVE PAS DE DIFFICULTÉ

La commission des finances se félicite des améliorations apportées par la directive du 20 juin 2019 précitée , qui sont de nature à garantir une coopération plus étroite entre les autorités répressives et Tracfin au niveau national, ainsi qu'entre les États membres.

Comme le relève l'étude d'impact 87 ( * ) , si le droit national est déjà en partie conforme à cette nouvelle directive, des modifications législatives sont requises pour :

- permettre à Europol et aux services répressifs français d'adresser des demandes d'informations financières à Tracfin ;

- permettre à Tracfin de demander aux services répressifs français des informations nécessaires pour prévenir et combattre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et les infractions sous-jacentes associées.

Dès lors que la marge de manoeuvre laissée aux États membres est limitée et que les adaptations à opérer en droit national pour transposer la directive sont essentiellement d'ordre technique, tout en nécessitant un travail interministériel approfondi, le recours à l'habilitation apparaît justifié.

Décision de la commission : la commission a adopté cet article sans modification.


* 81 Directive (UE) 2015/849 du Parlement Européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, modifiant le règlement (UE) n° 648/2012 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil et la directive 2006/70/CE de la Commission.

* 82 Directive (UE) 2018/843 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive (UE) 2015/849 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme ainsi que les directives 2009/138/CE et 2013/36/UE.

* 83 Exposé des motifs de la directive (UE) 2019/1153 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 fixant les règles facilitant l'utilisation d'informations financières et d'une autre nature aux fins de la prévention ou de la détection de certaines infractions pénales, ou des enquêtes ou des poursuites en la matière, et abrogeant la décision 2000/642/JAI du Conseil.

* 84 Exposé des motifs de la directive (UE) 2019/1153 précitée.

* 85 Étude d'impact annexée au présent projet de loi, pp. 174-175.

* 86 Commission des affaires européennes, procédure écrite du 19 octobre 2018.

* 87 Étude d'impact annexée au présent projet de loi, pp. 177.

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