IV. DE NOUVEAUX DÉFIS FINANCIERS POUR LES TROIS GRANDS OPÉRATEURS DU PROGRAMME 203 CONFRONTÉS À LA CRISE ÉCONOMIQUE ET SANITAIRE PROVOQUÉE PAR LA COVID-19

Les trois grands opérateurs rattachés au programme 203 ont tous, à des degrés divers, été sévèrement touchés par les conséquences de la pandémie de Covid-19 et participeront de la relance mise en place pour dynamiser l'économie .

A. EN DÉPIT DE L'IMPACT MASSIF DE LA CRISE SANITAIRE SUR SES COMPTES, SNCF RÉSEAU DEVRAIT POUVOIR POURSUIVRE LE GRAND PLAN DE MODERNISATION DU RÉSEAU STRUCTURANT GRÂCE À UNE RECAPITALISATION DE 4,1 MILLIARDS D'EUROS

La loi n° 2018-515 pour un nouveau pacte ferroviaire , si elle portait principalement sur l'ouverture à la concurrence du marché domestique de voyageurs et sur la réforme du cadre social des personnels de la SNCF , a également prévu la réorganisation et la transformation en sociétés nationales à capitaux publics de SCNF Mobilités et de SNCF Réseau .

Elle prévoyait également que SNCF Réseau :

- devrait poursuivre , et même accélérer grâce aux crédits prévus par la loi d'orientation des mobilités (LOM), le grand plan de modernisation du réseau ;

- devrait réaliser des efforts de productivité supplémentaires de l'ordre de 380 millions d'euros en 2026, portant ainsi le gain de productivité à mettre en oeuvre à plus de 1,6 milliard d'euros en 2026 ;

- bénéficierait d'une reprise de dette de 25 milliards d'euros en deux temps (voir infra ).

Cette trajectoire vertueuse a malheureusement été balayée par les conséquences catastrophiques pour le système ferroviaire de la crise sanitaire , si bien que seule une intervention financière massive de l'État permettra de maintenir les grands équilibres imaginés il y a deux ans.

1. Un grand plan de modernisation du réseau qui ne pourra être maintenu qu'avec une aide exceptionnelle de l'État, compte tenu des effets de la crise économique et sanitaire provoquée par la Covid-19

L'audit du réseau ferré français réalisé en 2005 par l'école polytechnique fédérale de Lausanne, actualisé en 2012, a démontré que le réseau ferré structurant le plus circulé s'était considérablement dégradé en France ces trente dernières années en raison d'investissements d'entretien et de modernisation longtemps très insuffisants 13 ( * ) .

Cette situation pose des problèmes en termes de sécurité mais également d'efficacité, en raison de la multiplication des ralentissements de la circulation des trains sur quelque 5 300 kilomètres du réseau .

Pour y remédier, SNCF Réseau a conçu en 2013 un grand plan de modernisation du réseau qui vise à régénérer notre patrimoine ferroviaire en péril .

Les engagements pris dans le cadre du contrat de performance conclu entre l'État et SNCF Réseau le 20 avril 2017 prévoyaient des investissements de 2,5 milliards d'euros par an en 2018 et en 2019 puis de 3 milliards d'euros par an à compter de 2020 en faveur du réseau .

Comme le Gouvernement l'avait annoncé au moment de la discussion du projet de loi pour un nouveau pacte ferroviaire, la programmation des investissements dans les transports annexée à la loi d'orientation des mobilités (LOM) prévoit désormais que SNCF Réseau investira 3,6 milliards d'euros par an dans le réseau existant .

Les pertes sans précédent encaissées par le groupe SNCF en raison de la crise sanitaire provoquée par la pandémie de Covid-19 - 4,9 milliards d'euros de pertes de chiffre d'affaires et des pertes de 4,0 milliards d'euros en termes de marges opérationnelles à la fin août 2020 - ont suscité beaucoup d'inquiétudes quant à la capacité de SNCF Réseau de financer son plan de modernisation du réseau , pourtant indispensable.

Le Gouvernement a toutefois annoncé qu'il allait procéder, dans le cadre du plan de relance, à une recapitalisation exceptionnelle du groupe SNCF d'ici la fin de l'année 2020 à hauteur de 4,05 milliards d'euros .

Sur cette somme, 2,3 milliards d'euros devraient être directement dévolus au rétablissement de l'investissement annuel de régénération des voies et 1,5 milliard d'euro s correspondent aux investissements relatifs à la fin de l'utilisation du glyphosate sur les voies , la sécurisation des ponts et les investissements de sécurité nécessaires et 300 millions d'euros devraient être dédiés aux petites lignes .

Par ailleurs, SNCF Réseau recevra 192 millions d'euros en 2021 correspondant aux dividendes que l'État a renoncé à percevoir de la part du groupe SNCF . Cette dotation sera intégralement consacrée à la régénération du réseau ferroviaire .

Les rapporteurs spéciaux seront très attentifs à ce que SNCF Réseau reçoive bien tous les financements dont l'entreprise a besoin pour poursuivre l'indispensable modernisation du réseau structurant . Il s'agit là en effet d'une des principales priorités décidées par le Parlement dans le cadre de la LOM.

2. Les crédits d'intervention du programme 203 à destination de SNCF Réseau augmenteront de 80 millions d'euros en 2021

Les liens financiers entre SNCF Réseau et le programme 203 « Infrastructures et services de transport » sont très importants puisque l'action 41 « Ferroviaire » , qui représente 62,5 % des crédits dudit programme , porte pour 2021 2 467,3 millions d'euros en AE et 2 466,0 millions d'euros en CP de crédits d'intervention en faveur de SNCF Réseau , soit 80,9 millions d'euros en AE (+ 3,4 %) et 78,2 millions d'euros en CP (+ 3,3 %) de plus qu'en 2020.

Ces crédits visent à financer l e coût de l'utilisation du réseau ferré national par les trains régionaux de voyageurs (TER) , les trains d'équilibre du territoire (trains Intercités) et les trains de fret , que les péages que perçoit par ailleurs SNCF Réseau ne parviennent pas à couvrir .

En vertu de ce mécanisme, SNCF Réseau percevra ainsi en 2021 :

- 2 094,0 millions d'euros (AE=CP) pour le financement de l'utilisation du réseau ferré national par les TER . Ce montant correspond à la redevance d'accès facturée par SNCF Réseau pour l'utilisation par les TER du réseau ferré national hors Île-de-France ;

- 260,0 millions d'euros pour le paiement par l'État de la redevance d'accès facturée par SNCF Réseau pour l'utilisation du réseau ferré national hors Île-de-France par les trains d'équilibre du territoire (TET), dont l'État est l'autorité organisatrice (voir infra );

- 110,0 millions d'euros pour le financement de l'utilisation du réseau ferré national par les trains de fret , y compris le financement du complément de prix visant à contribuer au financement du coût marginal du fret pour SNCF Réseau .

Si ces crédits sont récurrents pour SNCF Réseau, ils seront plus que jamais nécessaires en 2021 pour que l'entreprise puisse faire face à ses engagements .


* 13 Dans un passé récent, l'État a clairement privilégié la construction de nouvelles lignes à grande vitesse (LGV), qui ont monopolisé les ressources financières, mais également les ressources humaines de SNCF Réseau et de ses sous-traitants.

Page mise à jour le

Partager cette page