DEUXIÈME PARTIE
COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « PENSIONS »

Le compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » retrace les opérations relatives aux pensions civiles et militaires de retraite et d'invalidité des agents de l'État .

Doté de 60,2 milliards d'euros de crédits en 2021 contre 59,6 milliards d'euros en 2020, ses dépenses, en équivalents points de PIB, diminueraient très significativement sous l'effet de la reprise, anticipée, de l'activité économique.

L'année en cours (2020) verrait le poids des dépenses du compte s'alourdir de 0,3 point de PIB (de 2,4 % du PIB en 2019 à 2,7 % du PIB en 2020). En 2021, sous les conditions économiques mentionnées, le poids des dépenses du compte dans le PIB reculerait, sans pour autant retrouver le niveau de 2019. Il lui serait supérieur de 0,1 point de PIB, à 2,5 points de PIB.

Dans l'hypothèse d'une croissance nulle les dépenses du compte renforceraient très légèrement leur niveau relatif.

Ces évolutions, sans être négligeables, témoignent que l'ampleur nominale des dépenses couvertes par le compte d'affectation spéciale ne doit pas conduire à surestimer l'importance relative, d'un strict point de vue macroéconomique, des charges de pension qu'il finance. Elles témoignent aussi que la dynamique des dépenses de pensions inscrites au compte d'affectation spéciale est, globalement, maîtrisée.

Le CAS est structuré en trois programmes, représentant chacun une section du compte spécial :

- le programme 741 « Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d'invalidité » (56,7 milliards d'euros contre 56 milliards d'euros en 2020) est consacré aux régimes de retraite et d'invalidité des fonctionnaires civils et militaires de l'État, gérés par le service des retraites de l'État ( SRE ), créé en 2009. Il représente l'essentiel des enjeux financiers du CAS (94,2 % des crédits) ;

- le programme 742 « Ouvriers des établissements industriels de l'État » (1,94 milliard d'euros contre 1,93 milliard d'euros en 2020) retrace les opérations du fonds spécial des pensions des établissements industriels de l'État (FSPOEIE) et du fonds gérant les rentes d'accident du travail des ouvriers civils des établissements militaires (RATOCEM), tous deux gérés par la Caisse des dépôts et consignations. Ils représentent 3,22 % des crédits du CAS ;

- le programme 743 « Pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre et autres pensions » (1,54 milliard d'euros contre 1,62 milliard d'euros en 2020) regroupe les pensions dues au titre du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG) ainsi que les pensions financées par l'État au titre d'engagements historiques et de reconnaissance de la Nation. Programme-miroir avec les crédits correspondant ouverts dans le programme 169 de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », sa part dans les crédits du CAS « Pensions » tend à diminuer (2,5 % des crédits contre 3,2 % en 2018).

Les dépenses portées au compte, auquel ne devraient pas être imputées les dépenses prévues au titre de la retraite du combattant et les allocations de reconnaissance versées aux anciens supplétifs (soit au total, 645,6 millions d'euros de crédits), puisqu'il ne s'agit de dépenses de retraite stricto sensu mais des allocations de reconnaissance, représentent près de 18,7 % des dépenses totales de retraite (estimation à fin 2018).

La programmation des équilibres du compte pour 2020 prévoit un nouvel excédent de recettes, le solde positif du compte étant prévu à 759 millions d'euros, contre 1,4 milliard d'euros l'an dernier, si bien que le solde cumulé du compte serait de 9,8 milliards d'euros en fin d'exercice.

Le solde prévu en 2021 représente 1,3 % des dépenses prévues tandis que la solde cumulé atteint 16,3 % des charges prévues en 2021, soit presque deux mois de dépenses. Cependant, ce solde ne peut être considéré comme accroissant au solde public de l'État dans la mesure où il est tributaire de charges supportées par le budget général à travers les contributions employeurs versées par les ministères et les opérateurs.

Néanmoins, la progression des cotisations sociales retenues sur les salaires des affiliés apporte une forte contribution aux équilibres financiers des retraites versées par l'État.

I. DES CHARGES DE PENSIONS CIVILES ET MILITAIRES EN FAIBLE AUGMENTATION

A. UN RYTHME MODÉRÉ D'AUGMENTATION DES DÉPENSES DANS LA LIGNÉE DU RALENTISSEMENT OBSERVÉ DEPUIS 2008

Les dépenses de pensions des fonctionnaires civils et militaires de l'État et de ses opérateurs ont très fortement augmenté jusqu'en 2008, sous l'effet des départs à la retraite des générations issues du baby-boom mais aussi du fait de l'amélioration de la valeur de la pension moyenne.

Les réformes apportées au système de retraite ont sensiblement freiné cette progression à partir de la fin des années 2000, la décélération étant particulièrement nette depuis 2014.

1. À long terme, une augmentation des dépenses de pensions des fonctionnaires de l'État

Au total, en tenant compte des pensions de retraite des ouvriers d'État, les prestations versées sont passées de 19,1 milliards d'euros en 1990 à 54 milliards d'euros en 2014 . Elles ont été multipliées par 2,8.

Depuis 2014 , les charges de pensions ont encore augmenté de 4,6 milliards d'euros, soit de 8,5 % en sept ans, mais sur un rythme annuel nettement inférieur à la moyenne annuelle de longue période (de l'ordre de 1 %, soit une progression inférieure à l'inflation et à la croissance économique).

S'agissant des seules dépenses de pensions civiles et militaires de l'État, leur taux de croissance annuel avait été en moyenne de 3,9 % entre 1990 et 2019.

Évolution des dépenses de pensions
de la fonction publique d'État

Source : projet annuel de performances du compte d'affectation spécial pour 2021

Les effectifs de pensionnés ont augmenté de 1,6 % en moyenne annuelle tandis que la pension moyenne en stock a connu une revalorisation de 2,3 % par an. La contribution du volume des pensions à l'augmentation des dépenses a été de l'ordre d'un tiers, le renchérissement de la valeur de la pension en stock expliquant les deux tiers de l'augmentation des dépenses.

Quant aux dépenses liées aux pensions servies aux ouvriers de l'État , leur augmentation a été inférieure, avec + 2 % par an.

La pension moyenne du stock a également progressé, de 2,4 % soit un peu plus que pour les pensions civiles et militaires, mais il faut compter avec la réduction du nombre des bénéficiaires (- 0,4 % en moyenne annuelle).

Évolution des dépenses de pensions
des ouvriers de l'État

Source : projet annuel de performances du compte d'affectation spécial pour 2021

2. Une décélération confirmée par le projet de loi de finances pour 2021

Ainsi que le montrent les graphiques ci-dessus, la courbe ascendante des dépenses de pensions de la fonction publique d'État est allée s'aplatissant.

Les dépenses du compte d'affectation spéciale « Pensions » programmées dans le projet de loi de finances pour 2021 confirment cette dernière évolution.

Au total, les crédits demandés progressent de 1 % (autour de + 612 millions d'euros).

Les dépenses de pensions des fonctionnaires civils et militaires ( programme 741 ) augmenteraient de 1,2 % , avec + 0 ,5 % pour les pensions des militaires et + 1,4 % pour les pensions civiles , soit un rythme constant par rapport à l'an dernier mais un ralentissement beaucoup plus net par rapport aux évolutions de longue période décrites ci-dessus.

De fait, le rythme de croissance des dépenses de pensions des régimes concernés a été divisé par quatre.

Les dépenses du programme 742, correspondant aux pensions des ouvriers de l'État n'augmenteraient que de 0,2 % du fait de l'alourdissement des rentes d'accident du travail des ouvriers civils des établissements militaires, dont la base pour 2020 serait revue à la hausse par rapport aux prévisions initiales, du fait notamment d'un certain dynamisme des rentes dues à raison des préjudices subis du fait de l'amiante.

Quant aux dépenses du programme 743 , elles reculeraient de 4,7 %, contre 5,8 % l'an dernier, année durant laquelle la trésorerie du CAS avait été sollicitée. Elles s'inscrivent dans une tendance naturelle à la décrue, qui n'est que suspendue à peu près tous les cinq ans, au gré de revalorisations ponctuelles.

On rappelle que l'annexe B du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 fixe l'objectif de dépenses des régimes de base obligatoires de la branche vieillesse à 251,9 milliards d'euros contre 247 milliards d'euros pour 2020, en progression de 2 %, dont 144,7 milliards d'euros contre 140,6 milliards d'euros en 2020 pour les seuls régime général et fond de solidarité vieillesse (+ 3 %).

La faible progression des charges du CAS explique la majeure partie du différentiel entre l'objectif de dépenses du régime général et celui de l'ensemble des régimes de base.

3. Des dépenses inférieures à celles prévues par la loi de programmation des finances publiques 2018-2022

En 2017, les dépenses du compte avaient été légèrement supérieures à celles programmées dans le cadre de la précédente loi de programmation des finances publiques (2014-2019).

Comparaison entre les dépenses du compte et les dépenses prévues
par les lois de programmation des finances publiques 2014-2019 et 2018-2022

Source : réponse au questionnaire de la rapporteure spéciale

La nouvelle loi de programmation (2018-2022) avait été à son tour légèrement dépassée en 2018 (+ 94,1 millions d'euros).

Depuis, les crédits nécessaires à la couverture des dépenses de pension sont significativement inférieurs à ceux fixés par la loi de programmation. Cette dernière n'avait pas été construite sur l'hypothèse mise en pratique d'un gel de l'indexation des pensions qui a dégagé des économies, en particulier sur les charges de pensions des fonctionnaires civils et militaires de l'État. Pour 2021, les crédits demandés sont inférieurs de 1,6 milliard d'euros par rapport à la norme de dépense.

Du côté des recettes du compte, des moins-values doivent être constatées par rapport aux prévisions. Elles tendent à se creuser, atteignant 383,8 millions d'euros en 2020 et 635,5 millions d'euros en 2021.

Comparaison entre les recettes du compte et les dépenses prévues
par les lois de programmation des finances publiques 2014-2018 et 2018-2022

Source : réponse au questionnaire de la rapporteure spéciale

Le ministère n'en détaille pas les ressorts mais il s'agit d'une révision de la masse cotisable plutôt que du taux des cotisations employeurs et salariés. Elle peut tenir à la combinaison d'une série de facteurs parmi lesquels une moindre progression de la masse indiciaire et une déformation de la structure des emplois assujettis à cotisation.

Au total, la conjonction des moindres dépenses et des moins-values de recettes constatées aboutit à une amélioration du solde par rapport aux prévisions (environ 1 milliard d'euros de plus en 2021).

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