II. LE PROGRAMME « LIVRE ET INDUSTRIES CULTURELLES » : UNE AUGMENTATION DES CRÉDITS VERSÉS AUX OPÉRATEURS

Le projet de loi de finances prévoit une augmentation des crédits de paiement du programme « Livre et industries culturelles » de près de 7,5 millions d'euros, soit une progression de 2,37 % par rapport à la loi de finances pour 2021.

Hors mesure de périmètre - avec notamment, le transfert des crédits dédiés à la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet, aux termes de sa fusion avec le Conseil supérieur de l'audiovisuel, au programme 308 « Protection des droits et libertés » rattaché à la mission « Direction de l'action du Gouvernement - la majoration apparaît plus importante : les crédits de paiement devraient ainsi augmenter de 12,2 millions d'euros (+ 3,7 %). L'essentiel de cette majoration est orientée d'un côté vers les travaux de la Bibliothèque nationale de France (BnF) et de la Banque publique d'information (Bpi) et de l'autre, vers le Centre national de la musique.

L'augmentation des montants prévus en autorisation d'engagement - 11,7 millions d'euros, soit une progression de 3,49 % par rapport à la loi de finances pour 2021 - est principalement fléchée vers la Bibliothèque publique d'information (Bpi). Hors mesure de périmètre, la majoration s'élève à 16,5 millions d'euros (+ 4,7 millions d'euros).

Évolution des crédits du programme 334 « Livre et industries culturelles »
de 2021 à 2022 à périmètre courant

(en euros)

LFI 2021

PLF 2022

Variation 2022/2021 (%)

AE

CP

AE

CP

AE

CP

01 - Livre et lecture

305 680 211

286 881 813

319 755 379

296 730 725

+ 4,60

+ 3,43

02 - Industries culturelles

30 048 415

30 048 415

27 702 586

27 702 586

- 7,81

-7,81

334 - Livre et industries culturelles

335 728 626

316 930 228

347 457 965

324 433 411

+ 3,49

+ 2,37

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données budgétaires

Le programme est composé de deux actions. L'action 01 « Livre et lecture » représente 92 % des crédits du programme.

A. UNE ACTION EN FAVEUR DU LIVRE ET DE LA LECTURE CONCENTRÉE SUR LES DEUX GRANDES BIBLIOTHÈQUES PARISIENNES ET LE SOUTIEN À L'ÉDITION

1. Un financement principalement tourné vers les opérateurs

L'action 01 « Livre et lecture » du programme 334 devrait être dotée en 2022 de 319,7 millions d'euros en AE et 296,7 millions d'euros en CP. Essentiellement tournée vers le financement des dépenses de fonctionnement de trois opérateurs : la Bibliothèque nationale de France (BnF), la Bibliothèque publique d'information (Bpi) implantée au Centre national d'art et de culture Georges Pompidou et le Centre national du livre, elle ne reflète qu'imparfaitement l'action de l'État en faveur du livre et de la lecture, éclatée entre plusieurs programmes.

Les trois établissements concentrent, en effet, 90 % des crédits prévus en 2022.

Subventions pour charges de service public versées dans le cadre
de l'action 01 du programme 334 (prévision 2022)

(en euros)

Dépenses de fonctionnement

Dépenses d'investissement

Total

AE

CP

AE

CP

AE

CP

BnF

192 347 909

192 347 909

27 684 783

31 684 783

219 643 712

223 643 712

BpI

6 895 659

6 895 659

35 905 812

8 881 158

42 793 371

15 768 717

CNL

27 325 166

27 325 166

75 000

75 000

27 391 346

27 391 346

Total

226 568 734

226 568 734

63 665 595

40 640 941

290 234 329

267 209 775

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données budgétaires

Les dépenses d'investissement prévues se concentrent essentiellement sur les frais liés aux travaux de rénovation de la BnF (Quadrilatère Richelieu, travaux de conservation et ouverture d'un centre de conservation) et de la Bpi.

Celle-ci devrait voir en effet sa dotation en fonds propres majorée de 35,53 millions d'euros en AE et 5,33 millions d'euros en CP. Une partie de ces crédits (3,2 millions d'euros en AE et 2,34 millions d'euros en CP) est appelée à financer la fin du projet de rénovation des espaces de lecture. Le solde (32,33 millions d'euros en AE et 2,99 millions d'euros en CP) vise à anticiper un relogement temporaire dans le contexte de la fermeture annoncée du Centre national d'art et de culture Georges Pompidou pour travaux à compter de 2023.

2. Les travaux sans fin et coûteux de la Bibliothèque nationale de France

Les dépenses d'investissement de la Bibliothèque nationale de France représentent 78 % des dépenses d'investissement des trois opérateurs de l'action 01 réunis. Ce ratio illustre le poids des travaux dans la gestion de cet opérateur et une impression d'éternel recommencement.

Le coût total des travaux de la BnF s'agissant du quadrilatère Richelieu a de nouveau été actualisé pour atteindre 247,6 millions d'euros, soit un dépassement de plus de 30 % par rapport au montant initial arrêté en 2011. Le collectif budgétaire de fin de gestion 2021 prévoit d'ailleurs une ouverture de crédits de 11 millions d'euros afin de financer les surcoûts. Ceux-ci relèvent pour l'essentiel de la crise sanitaire, qui a conduit à un retard de 6 mois dans la livraison des travaux.

La participation du ministère de la culture s'élève à 205 millions d'euros :

- 164,75 millions d'euros sont financés sur le programme 334 ;

- 40,2 millions d'euros sont versés via le programme 175 « Patrimoines ».

Le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche contribue également à ce chantier à hauteur de 42,7 millions d'euros.

A ces coûts liés aux travaux, s'ajoute une augmentation des dépenses de personnels en vue de la réouverture du site.

Le site Richelieu ne saurait pour autant résumer la dépense d'investissement de la Bnf, confrontée à l'obsolescence des équipements du site François Mitterrand , qui devrait contribuer à faire croître les dépenses d'investissement dans les années à venir. Plusieurs chantiers ont déjà débuté, certains devant prendre fin en 2026, pour un montant total de 54,1 millions d'euros. Il en va ainsi :

- du remplacement du système de sécurité incendie, estimé à 31 millions d'euros, les travaux devant s'étaler de 2020 à 2026 ;

- de la rénovation des équipements de la gestion technique centralisée et du système de gestion technique électrique, pour un montant de 5,4 millions d'euros étalé entre 2019 et 2025 ;

- du remplacement des 62 ascenseurs du socle, soit 1 million d'euros par an entre 2020 et 2026 ;

- du remplacement du système de contrôle d'accès et de la vidéo-protection, pour un coût estimé à 5,8 millions d'euros étalé de 2019 à 2022 ;

- du renouvellement décennal du transport automatique des collections et des documents, soit 5,9 millions d'euros étalés entre 2016 et 2027.

De nouveaux travaux sont également prévus à partir de 2022. Le coût global est évalué à 18 millions d'euros. Ils visent :

- l'amélioration de la performance énergétique des centrales de traitement d'air. Le coût de 1,3 million d'euros sera étalé entre 2022 et 2027 ;

- le remplacement des groupes froids de la production centralisée, soit 4 millions d'euros entre 2022 et 2025 ;

- les travaux de réfection des tours aéro-réfrigérantes du site, soit 3 millions d'euros en 2022 ;

- la rénovation des installations électriques de puissance pour un coût de 9,7 millions d'euros à financer à partir de 2023.

Le présent projet loi de finances prévoit, par ailleurs, le premier versement destiné au financement du futur pôle regroupant le conservatoire national de la presse et le centre de conservation des collections. Le coût total du dispositif est estimé à 100 millions d'euros, l'État s'est engagé à en participer à hauteur de 30 millions d'euros : cette somme a été ouverte en AE en loi de finances pour 2021. Le premier versement s'élèverait en 2022 à 4 millions d'euros en CP. Le reste du financement est porté à parts égales par la Bibliothèque nationale de France et les collectivités territoriales.

3. Une maquette budgétaire à revoir

Hors soutien aux opérateurs, le projet de loi de finances pour 2022 prévoit de financer à hauteur de 19,2 millions d'euros (AE = CP) deux sous-actions :

- la sous-action 03 dédiée au développement de la lecture et des collections, abondée à hauteur de 7,9 millions d'euros (AE = CP) ;

- la sous-action 04 destinée à soutenir éditeurs, libraires et professionnels du livre, dotée de 11,3 millions d'euros (AE = CP).

Le maintien de crédits dédiés au développement de la lecture au sein du programme 334 peut interroger, puisque les actions relatives au livre et à la lecture sont, depuis la loi de finances pour 2018, rattachés au programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », rattachée à la mission « Culture ». Celles-ci sont, en effet, considérées comme participant de l'éducation artistique. Les crédits dédiés aux contrats territoires lecture (CTL), au soutien aux manifestations littéraires et aux associations, le développement des programmes « Premières pages » ou « Des livres à soi » dédiés à la promotion de la lecture chez les plus jeunes ou l'appui à la Cité internationale de la bande dessinée et de l'image animée ou de l'Institut de la mémoire de l'édition contemporaine ne relèvent donc pas du programme 334.

La mise en oeuvre du Plan Bibliothèques 2018-2020 et ses suites est par ailleurs partagée entre le programme 119 « concours particuliers aux collectivités territoriales et à leurs groupements », via la dotation générale de décentralisation (concours particulier des bibliothèques - DGD Bibliothèques) pour le volet « ouvrir plus », soit l'extension des horaires d'accueil (8 millions d'euros) et le programme 361 pour le volet « offrir plus », portant sur l'élargissement des missions (1,5 million d'euros prévu en mesure nouvelle dans le projet de loi de finances pour 2022).

Dans ces conditions, le rapporteur spécial souhaite une poursuite de la rationalisation de la maquette budgétaire et un transfert des crédits restants dédiés à la lecture vers le programme 361. Le programme 334 verrait ainsi ses missions recentrées sur l'industrie du livre plus que sur la lecture en tant que telle. La sous-action 04 participe ainsi au financement de la Centrale de l'édition, du Syndicat de la librairie française ou du Bureau international de l'édition française (9,1 millions d'euros au total) et au développement, dans les territoires, des librairies et des maisons d'édition (2,2 millions d'euros).

4. La réponse à la crise sanitaire est portée par la mission Plan de relance

Le programme 363 - Compétitivité - de la mission Plan de relance prévoyait 53 millions d'euros sur la période 2021-2022 pour soutenir la filière livre.

Ces crédits sont appelés à financer la rénovation des bibliothèques publiques (30 millions d'euros) et leurs programmes d'acquisition (10 millions d'euros), Ils doivent également favoriser les investissements des librairies (6 millions d'euros versés dès 2021) et soutenir l'extension des opérations commerciales ponctuelles « Jeunes en librairie » (7 millions d'euros).

La loi de finances pour 2021 prévoyait un premier versement de 29,5 millions d'euros. Le solde de 23,5 millions d'euros est prévu dans le présent projet de loi de finances.

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