IV. SUPPRIMER LE QUESTIONNAIRE MÉDICAL POUR FACILITER L'ACCÈS À L'EMPRUNT IMMOBILIER DES PERSONNES MALADES

Les personnes atteintes ou anciennement atteintes de pathologies de santé font aujourd'hui face à d'importantes difficultés - si ce n'est à une impossibilité - pour accéder à l'emprunt immobilier, du fait des surprimes ou exclusions de garanties qui sont exigées de la part des assureurs pour les couvrir. En outre, même lorsque la pathologie n'affecte pas particulièrement l'espérance de vie, comme le diabète ou le cholestérol, les patients rencontrent ces obstacles.

Cette situation est insupportable pour des personnes dont l'achat d'une résidence représente souvent la possibilité de se projeter à moyen terme et de vivre une vie normale en dépit de l'affection. En outre, elle donne l'impression aux patients en rémission ou guéris qu'ils n'en auront jamais vraiment fini avec la pathologie, malgré le long combat qu'ils lui ont livré.

Les sénateurs sont convaincus que la solidarité doit s'appliquer pleinement à ces emprunteurs.

S'il existe aujourd'hui la convention AERAS, supposée permettre de trouver une solution aux emprunteurs qui font face à ces difficultés, force est de constater que son fonctionnement est jugé insuffisant par l'ensemble des associations de patients rencontrées par le rapporteur, et qu'elle ne permet pas la souscription de crédits dans des conditions normales. En outre, le droit à l'oubli, dont le délai est aujourd'hui de dix ans, ne semble pas tenir compte des dernières avancées médicales qui permettraient de le réduire. Du reste, il ne s'applique qu'aux pathologies cancéreuses.

L'article 7 de la proposition de loi est à cet égard décevant, puisqu'il se contente d'inviter les signataires de la convention AERAS à entamer des négociations sur le raccourcissement de ce délai et sur l'intégration de nouvelles pathologies, sous peine de reprise en main par le pouvoir règlementaire.

Les sénateurs, à la suite du rapporteur, ont donc acquis la conviction qu'il était temps que la loi évolue fermement sur ce sujet et remette l'humain au coeur de cette problématique qui engendre nombre de souffrances morales.

Le manque de solidarité et d'inclusion que la situation traduit, ainsi que la rupture d'égalité regrettable qui en résulte, semblent d'autant plus injustifiées que le niveau élevé des marges réalisées en assurance emprunteur donne toute latitude aux assureurs (historiques ou alternatifs) pour cesser ces discriminations et assurer un égal accès à l'emprunt.

Souhaitant placer les assurances face à leurs responsabilités, et alors que le niveau élevé de concurrence sur ce marché permet d'anticiper que les tarifs n'évolueront pas soudainement et de façon massive à la hausse, les sénateurs ont supprimé le questionnaire médical pour les prêts immobiliers de moins de 200 000 euros et qui arrivent à leur terme avant le 65 e anniversaire de l'emprunteur .

Il s'agit d'une étape fondamentale et inédite pour mettre en place un système inclusif et solidaire, qui rejette la discrimination dont sont victimes les personnes malades. Il s'agit d'un enjeu fort de société, qui ne saurait être réduit à un traitement comptable et aveugle des situations humaines génératrices de souffrance.

Les deux conditions mises en place par les sénateurs, qui pourront être progressivement levées après examen de la façon dont le marché de l'assurance emprunteur se comporte, visent à :

• éviter le risque d'« anti-sélection », c'est-à-dire le cas d'une personne âgée « à risque » réalisant un emprunt immobilier afin que la réalisation du risque se traduise par le remboursement du prêt par l'assurance, notamment au bénéfice de ses héritiers. Compte tenu de la durée moyenne des prêts au moment de leur émission, environ 20 ans, le bénéfice de cette mesure sera prioritairement réservé aux personnes âgées de moins de 45 ans, présentant en moyenne un risque de santé plus faible que les personnes âgées ;

• éviter une augmentation des tarifs pour les seniors. Les personnes empruntant à un âge supérieur à 45 ans ne devraient en effet pas subir de hausse automatique des prix, puisque la date de fin de remboursement de leur prêt (au-delà de 65 ans) autorisera le prêteur à conserver le questionnaire médical en vue de la tarification du risque.

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